Mme Mélanie Vogel. Arrêtez !
M. Gérald Darmanin, ministre. Madame, vous pouvez crier, mais c’est la vérité ! Les deux partis populistes se sont levés ensemble contre les partis de gouvernement, et cela, c’est honteux ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)
reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et séisme dans les deux-sèvres
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Madame la Première ministre, mesdames, messieurs les sénateurs, mes chers collègues, tout d’abord, je souhaite rassurer le président Kanner, en lui indiquant que les valeurs et les convictions de notre groupe sont intactes. C’est la raison pour laquelle nous avons retiré notre proposition de loi constitutionnelle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Marques d’ironie sur les travées du groupe SER.)
Mme Marie-Arlette Carlotti. Évidemment !
M. Philippe Mouiller. J’en reviens à ma question, qui a trait non pas à l’immigration, mais à la parole de l’État.
Le 16 juin dernier, un séisme d’une magnitude de 5,8 sur l’échelle de Richter a frappé le sud de mon département, les Deux-Sèvres, ainsi que le nord de la Charente-Maritime et le sud de la Vendée.
Trois jours plus tard, le Gouvernement, représenté par le ministre Christophe Béchu, était sur les lieux, afin de remercier les services de sécurité, de rassurer les élus locaux et, surtout, d’annoncer aux habitants la mise en place d’une procédure accélérée pour déclencher l’arrêté de catastrophe naturelle.
Six mois plus tard, malgré trois réunions de la commission interministérielle de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, seules 22 des 400 communes concernées ont bénéficié d’une telle reconnaissance.
Pis, 8 communes proches de l’épicentre, dont parfois 25 % des maisons ont été touchées, sont sans nouvelles de l’État.
La commission interministérielle statue à partir d’un rapport établi par le bureau central sismologique français. Or ce bureau central ne s’est toujours pas rendu dans certaines communes.
Concrètement, en ce début d’hiver, quelle réponse pouvons-nous apporter aux élus locaux confrontés à des habitants aux maisons endommagées, dont les assureurs refusent la prise en charge ?
D’une façon plus générale, cette question, certes très locale, renvoie à l’ensemble des situations de catastrophes naturelles que connaît la France. Il en va ainsi des nombreux territoires touchés par les inondations et des zones concernées par le retrait-gonflement des argiles.
Que répondre, dès lors, aux élus locaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Philippe Mouiller, vous l’avez rappelé, je me suis rendu sur place, au nom du Gouvernement, pour représenter à la fois la Première ministre et le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
J’ai vu les maisons fissurées et j’ai rencontré les maires des communes directement touchées et éprouvées. J’ai ainsi pu leur indiquer que le Gouvernement mettrait tout en œuvre pour procéder à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.
En la matière, d’après les règles en vigueur, deux critères doivent être réunis lorsqu’il s’agit d’un tremblement de terre.
Le premier est relatif à la magnitude du séisme, qui doit être supérieure à 5 sur l’échelle de Richter. Cela a été le cas, puisque la magnitude du présent séisme était comprise entre 5,1 et 5,4.
Toutefois, dans certaines communes éloignées de l’épicentre, la magnitude du séisme était inférieure à 5. C’est pourquoi le bureau central sismologique français, dont vous avez rappelé l’existence, doit se rendre dans ces communes et étudier les dossiers au cas par cas.
À l’heure où nous parlons, vos chiffres sont exacts : seule une trentaine de communes bénéficient de cette reconnaissance.
Au travers de votre question, et à la lumière des inondations survenues dans le Pas-de-Calais ou dans la Vésubie, notre système de catastrophes naturelles semble arriver en fin de cycle. Je m’en suis entretenu avec M. le ministre de l’intérieur, qui est chargé de prononcer l’état de catastrophe naturelle. Nous avons, ensemble, dressé un certain nombre de constats, et nous allons vous proposer des modifications en conséquence.
Ainsi, c’est au maire de demander la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, alors que la mairie elle-même peut être frappée.
J’ajoute que les événements visés doivent faire l’objet de clarifications : pourquoi des vents supérieurs à 200 kilomètres par heure conduisent-ils à un classement en catastrophe naturelle outre-mer et non en Bretagne ?
Dans les prochaines semaines, le plan national d’adaptation au changement climatique nous permettra de tirer toutes les leçons des difficultés passées et de réexaminer la situation de votre territoire. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI et INDEP.)
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour la réplique.
M. Philippe Mouiller. Monsieur le ministre, votre réponse est très technique. Je vous invite à revenir dans les Deux-Sèvres et à rencontrer de nouveau les personnes que vous y avez vues : vous leur expliquerez comment obtenir une prise en charge quand on vit dans une maison fissurée, ne tenant plus que par des étais.
Les dispositifs en vigueur ne répondent pas aux attentes de nos concitoyens ; à ce titre, je déplore un réel décalage entre le discours tenu le jour J et la réponse si technique que l’on nous apporte aujourd’hui… (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Nicole Bonnefoy applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Mikaele Kulimoetoke, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Mikaele Kulimoetoke. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Monsieur le ministre, alors qu’elle figure toujours sur la liste des pays les moins avancés de l’OCDE, la collectivité française de Wallis-et-Futuna ne bénéficie pas de l’aide publique au développement.
Notre éloignement entraîne une cherté excessive de la vie et l’accumulation des monopoles provoque tensions et crises sociales. En témoigne le récent blocage de la banque de Wallis-et-Futuna (BWF) – la seule de nos îles.
J’ai entendu le Gouvernement rappeler la responsabilité de la collectivité en matière sociale, en préconisant la mise en œuvre d’une fiscalité directe pour financer les mesures qui s’imposent ; mais il faut garder à l’esprit les réalités de notre territoire.
Sur une population de 12 000 habitants, seules 2 300 personnes sont salariées, fonctionnaires d’État compris ; le reste de la population survit péniblement. L’allocation chômage n’existe pas, et le seuil de pauvreté s’élève à 522 euros mensuels. Le contrat social n’aide que les personnes âgées, handicapées ou percevant un revenu inférieur au Smic, lequel s’établit à 784 euros.
Aussi, depuis le début de cette année, je propose de créer le revenu de solidarité active (RSA) à Wallis-et-Futuna. J’ai présenté, à cette fin, un amendement au projet de loi de finances : il a été adopté à l’unanimité, et j’en remercie chaleureusement mes collègues.
Nous ne sommes pas non plus éligibles au pacte des solidarités. Pour lutter contre la pauvreté, j’en appelle donc à la solidarité nationale : je sollicite 5 millions d’euros supplémentaires en faveur de notre contrat social, pour financer le RSA.
Monsieur le ministre, comment le Gouvernement compte-t-il répondre à cette demande, qui me semble parfaitement légitime ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, nous connaissons votre engagement pour ces magnifiques territoires de la République que sont les îles Wallis et Futuna ; je sais avec quelle vigueur vous y combattez la pauvreté.
Dans le même esprit que vous, votre collègue député Mikaele Seo a déposé un amendement visant à doter le contrat social de 900 000 euros supplémentaires. Grâce à l’intervention de mon collègue Thomas Cazenave, chargé du budget, nous serons en mesure de retenir dans la prochaine loi de finances l’abondement que vous proposez.
Vous souhaitez améliorer l’accompagnement des personnes handicapées, âgées ou pauvres, que ce soit en étendant le RSA à Wallis-et-Futuna ou en élargissant le contrat social. Nous sommes tout à fait prêts à aller dans ce sens avec vous.
Au préalable, nous avons besoin d’une délibération de l’assemblée territoriale de Wallis-et-Futuna. En effet, l’État n’étant pas compétent en la matière, la collectivité doit apporter 25 % des crédits.
À la demande de Mme la Première ministre, nous allons travailler ce dossier, et ce le plus rapidement possible, parallèlement aux autres demandes d’abondements budgétaires que nous allons accompagner – je pense entre autres à l’enveloppe de 1,4 million d’euros dédiée aux investissements.
Au début de l’année prochaine, je me rendrai de nouveau dans le Pacifique, notamment dans votre territoire, avec M. le ministre délégué chargé des outre-mer. Nous pourrons alors négocier ce nouveau contrat social avec vous, votre homologue député et les membres de l’assemblée de Wallis-et-Futuna. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
situation du groupe casino (i)
M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. Jean-François Longeot applaudit également.)
M. Pierre Jean Rochette. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie.
Monsieur le ministre, les Verts de Saint-Étienne ont fait la fierté de toute la France dans les années 1970 ; et, si cette couleur a été choisie, c’est parce que c’était celle des magasins de la société Casino, créée par Geoffroy Guichard en 1898.
Aujourd’hui, le « peuple vert » s’inquiète de l’avenir du groupe Casino. L’entreprise est historiquement ligérienne et son siège social a toujours été situé à Saint-Étienne. Sa marque, qui remonte à 1901, fut en outre, dans notre pays, la première marque de distributeur ; elle appartient au patrimoine français.
Depuis quelques semaines, la situation financière du groupe est devenue particulièrement préoccupante pour tous les employés. En attendant l’arrivée de nouveaux actionnaires en janvier prochain, la vente des hypermarchés et supermarchés est en discussion.
Dans mon département, le malaise est palpable. Les personnels des magasins qui seraient cédés, ainsi que les salariés de la logistique, craignent d’être les perdants de cette restructuration. De plus, l’opération risque d’entraîner des suppressions de postes au siège social stéphanois, qui emploie 1 800 salariés.
Ces craintes sont largement partagées. L’ensemble du groupe ne risque-t-il pas d’être fragilisé par la cession d’une grande part de ses magasins et entrepôts ? Le siège social pourra-t-il bien être maintenu à Saint-Étienne ? Est-il indispensable d’envisager un découpage d’une telle ampleur ?
Sur les 22 000 salariés que l’enseigne Casino dénombre en France, 6 000 emplois directs pourraient être menacés.
Monsieur le ministre, j’attire votre attention sur le risque majeur que représente l’effondrement de ce groupe historique et emblématique. Une telle chute serait un coup dur, non seulement pour notre département, mais aussi pour notre pays.
Tous les Ligériens voient d’un œil bienveillant l’arrivée du groupe Kretinsky, qui œuvre à la reprise de Casino. Mais que peut faire le Gouvernement pour l’assister au mieux et sauver cette entreprise ? Avez-vous abordé, avec le repreneur, l’avenir du siège social de Saint-Étienne ? Et comment comptez-vous l’accompagner, afin que le maximum d’emplois soit préservé ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Emmanuel Capus. Excellent !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie. (Exclamations.)
M. Claude Raynal. Il est au Sénat… Bienvenue ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Mesdames, messieurs les sénateurs, M. Rochette m’a posé une question sérieuse, à laquelle je me dois de répondre.
Monsieur le sénateur, les salariés de Casino n’ont pas à payer pour les erreurs stratégiques commises depuis plusieurs années par la direction de l’entreprise.
De toute évidence, le groupe s’est mal positionné. Il a pratiqué des prix plus élevés que tous ses concurrents et, de ce fait, il a été percuté de plein fouet par la crise inflationniste. Il accuse donc de fortes pertes.
À cet égard, je ne citerai qu’un seul chiffre : au cours du dernier trimestre, le groupe Casino a subi un demi-milliard d’euros de pertes supplémentaires. Sa situation est devenue absolument intenable.
Je suis au côté des salariés. J’ai reçu, ce matin même, les représentants de l’intersyndicale pour faire le point avec eux. Je continuerai de les recevoir, car je suis là pour défendre les intérêts des salariés, tout en garantissant le respect de l’ordre public économique.
Tout d’abord, il y a quelques mois, nous avons évité de justesse une cessation de paiements du groupe Casino. Or, avant de trouver un repreneur, il fallait assurer la jonction : nous l’avons fait, en assumant ses charges sociales et fiscales à hauteur de 300 millions d’euros. Cette somme, placée dans une fiducie, doit être remboursée par le repreneur.
Ensuite, nous avons aidé le groupe à trouver un repreneur – je rappelle qu’un seul candidat a pu mettre sur la table le milliard d’euros nécessaire.
Maintenant, il faut garantir l’avenir du groupe, ce qui suppose d’apporter, avec le reste de la grande distribution française, une solution pour l’ensemble de ses salariés.
Bref, je suis en contact avec l’intersyndicale. Je le suis évidemment aussi avec le repreneur, Daniel Kretinsky, ainsi qu’avec l’ensemble des distributeurs qui souhaitent reprendre une partie des activités du groupe Casino. Ce faisant, le Gouvernement entend assurer la survie de l’activité et celle des magasins.
Je demeure attentif à trois points essentiels.
Le premier, c’est évidemment l’emploi : pour les hypermarchés comme pour les supermarchés, qui sont aujourd’hui des centres de pertes pour le groupe, les offres de reprise doivent préserver un maximum d’emplois.
Le deuxième, c’est l’avenir des treize centres logistiques du groupe. Sauf exception, les repreneurs disposeront déjà de leurs propres centres. Je veillerai donc tout particulièrement aux emplois concernés.
Le troisième et dernier, c’est bien sûr le siège de Saint-Étienne. Il s’agit là de notre principale préoccupation. Ce siège regroupe 1 800 emplois,…
M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre. … dont 1 200 sont consacrés aux hypermarchés et aux supermarchés.
Monsieur le sénateur, nous veillerons au maintien du siège de Saint-Étienne. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
situation du groupe casino (ii)
M. le président. La parole est à M. Hervé Reynaud, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Hervé Reynaud. Ma question s’adresse également à M. le ministre de l’économie et elle porte elle aussi sur la situation du groupe Casino, qui préoccupe au plus haut point les élus et les habitants de notre territoire, par-delà les clivages politiques.
M. Emmanuel Capus. Eh oui !
M. Hervé Reynaud. Il y va en effet de notre souveraineté économique.
L’histoire de Casino et celle de Saint-Étienne sont intimement liées. Voilà 125 ans que le siège du groupe est installé dans cette ville, dont Geoffroy Guichard demeure une figure emblématique.
Or nous assistons à un crash économique en direct. Une stratégie inadaptée a siphonné les comptes de l’entreprise, qui présente désormais une dette abyssale : cette dernière approcherait 12 milliards d’euros !
D’ailleurs, comment un PDG a-t-il pu jongler avec les finances de son groupe tout en étant son actionnaire principal ?
M. Guy Benarroche. C’est un libéral ! (Sourires sur les travées des groupes GEST et SER.)
M. Hervé Reynaud. Le démantèlement a commencé il y a maintenant plusieurs mois, avec la cession de marques à l’étranger, puis en France, dans une logique de vente à la découpe : hier, Go sport, dont on connaît le sort ; ensuite, Leader Price ; demain, peut-être, Monoprix, Franprix, Vival, Naturalia ou encore Cdiscount. Au total, 300 hypermarchés et supermarchés sont actuellement sur la sellette.
L’intersyndicale est très inquiète, à juste titre. Elle craint que, dans la foulée, les entrepôts logistiques ne soient abandonnés.
Les syndicats ont lancé l’alerte. Ils en appellent au Président de la République lui-même : qu’en est-il de son soutien, monsieur le ministre ? Nous sommes proches d’une casse sociale sans précédent. En tout, 50 000 emplois sont menacés en France, dont 4 000 dans le seul département de la Loire.
Monsieur le ministre, depuis les propos que vous avez tenus en juillet dernier, la situation, de toute évidence, a évolué défavorablement. Le plan initial n’est pas respecté. Vous le rappeliez à l’instant, vous avez reçu l’intersyndicale ce matin : pouvez-vous apporter la garantie du maintien du siège et des emplois à Saint-Étienne ?
Les habitants de notre territoire ne veulent pas subir le traumatisme d’un nouveau Manufrance. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC et CRCE-K.)
Mme Cécile Cukierman. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Monsieur le sénateur, je le répète, je n’ai qu’une seule priorité : la préservation de l’emploi, au siège de Saint-Étienne comme dans les hypermarchés et les supermarchés.
Vous avez parfaitement décrit la situation. Depuis des années, la direction de Casino a multiplié les erreurs de positionnement stratégique. Elle a opté pour des prix élevés, tandis que ses concurrents pratiquaient des prix bas. Dès lors, quand les produits alimentaires ont été frappés par l’inflation, cette stratégie économique a mené le groupe droit dans le mur.
Le chiffre de pertes que vous avez cité est le bon, et, je le confirme, 50 000 emplois se trouvent menacés.
Nous avons garanti la reprise ; nous avons pris à notre charge les dettes sociales et fiscales ; nous accompagnons maintenant la reprise par d’autres groupes de distribution.
Je suis convaincu que les offres de reprise permettront de relancer l’activité, non seulement des hypermarchés et supermarchés, mais aussi des centres de profit que sont les magasins de centre-ville, comme les Monoprix, les Franprix ou les Spar.
J’y insiste, l’avenir du siège est, pour nous, un sujet de préoccupation majeur.
À cet égard, nous devons faire face à un certain nombre de réalités économiques – je ne les ai jamais cachées. Sur les 1 800 personnes qui travaillent au siège de Casino, 1 200 sont affectées aux hypermarchés et supermarchés, dont 200 ont déjà été cédés au groupe Intermarché ; d’autres le seront dans les mois qui viennent, pour garantir la pérennité de l’activité et de l’emploi.
L’engagement que j’ai pris et qu’a pris le repreneur, Daniel Kretinsky, c’est le maintien du siège à Saint-Étienne. Je veillerai à ce que cet engagement soit tenu. (M. Claude Malhuret applaudit.)
laïcité (i)
M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Alexandre Ouizille. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Le 6 décembre dernier, à l’Élysée, il a été porté atteinte au principe de séparation des Églises et de l’État. Un ministre du culte, à savoir le grand rabbin de France, a allumé la première bougie de Hanoukka dans la salle des fêtes du palais présentiel, en présence du chef de l’État.
M. Loïc Hervé. C’était très beau !
M. Alexandre Ouizille. L’organisation d’une telle cérémonie est radicalement contraire à la Constitution,…
M. Loïc Hervé. Pas du tout !
M. Alexandre Ouizille. … ainsi qu’aux principes qui fondent notre République, qui nous lient et dont le Président de la République est le garant.
Dans mon département de l’Oise, il y a quelques jours, nous avons rendu hommage à Ferdinand Buisson. Nous avons rappelé à cette occasion la règle autour de laquelle nous nous retrouvons : la religion libre dans l’État libre.
Ma question est simple : comment le Président de la République a-t-il pu commettre un tel impair ? Comment a-t-il pu s’écarter à ce point du principe de laïcité ?
Comment peut-on vous faire confiance quand, depuis Mayotte, Mme la Première ministre affirme qu’il s’agit d’une simple manifestation de soutien à la lutte contre l’antisémitisme ?
M. Loïc Hervé. Vous mélangez tout !
M. Alexandre Ouizille. Monsieur le ministre, on ne combat pas l’antisémitisme avec des offices religieux.
Pouvez-vous nous confirmer qu’il n’y aura pas de messe de Noël à Matignon cette année ? (Protestations sur des travées des groupes Les Républicains et UC.) Qu’au printemps prochain, il n’y aura pas de rupture du jeûne au ministère de l’intérieur ? Pouvez-vous nous garantir que les palais de la République n’abriteront pas d’autres offices cultuels ? (Protestations sur les mêmes travées.)
Pouvez-vous nous rassurer, tout simplement, en certifiant qu’il s’agissait d’un accident et non d’un précédent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE-K et GEST. – Mme Jacqueline Eustache-Brinio applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, à l’heure où nos concitoyens font face à de très grandes difficultés, vous vous concentrez sur un fait dont, contrairement à vous, je suis fier : le Président de la République a reçu, de la part des rabbins du monde entier, un prix récompensant la lutte contre l’antisémitisme, au nom de l’engagement de la France. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, INDEP et UC. – Mme Christine Herzog applaudit également.)
Je crains que nous n’ayons pas le même sens des priorités ! (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Franck Montaugé. Ce n’est pas le sujet !
Mme Audrey Linkenheld. Pas du tout !
M. Gérald Darmanin, ministre. C’est d’autant plus étonnant au moment où nos compatriotes juifs – vous le savez très bien – subissent un regain d’hostilité. Au total, 1 800 actes antisémites ont été recensés depuis le 1er janvier dernier.
Mme Laurence Rossignol. Ce n’est pas la question !
M. Hussein Bourgi. Aidez plutôt les enseignants à faire respecter la laïcité !
M. Gérald Darmanin, ministre. … ainsi que d’autres cérémonies religieuses dans je ne sais quels édifices publics.
Si vous manquez à ce point de hauteur de vue (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.), c’est sans doute parce que vous ne prenez pas la mesure de la situation.
M. Hussein Bourgi. Il ne fallait pas faire cela à l’Élysée ! C’était une faute !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je vous rappelle que la République a le devoir de protéger nos compatriotes juifs.
Vous citez Ferdinand Buisson,…
M. Franck Montaugé. Et la laïcité !
M. Gérald Darmanin, ministre. … mais chacun a sa gauche. Pour ma part, je citerai Jean Jaurès, qui déclarait à propos de la séparation des Églises et de l’État : « La loi […] laisse la liberté à tous les cultes […]. La liberté de conscience sera garantie, complète, absolue ; la loi de séparation, telle qu’elle est, est libérale, juste et sage. »
Il est dommage que le parti socialiste s’éloigne encore de Jaurès ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe INDEP. – Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour la réplique.
M. Alexandre Ouizille. Monsieur le ministre, nous ne nous éloignons de personne !
Cette actualité n’est pas la vôtre, et nous comprenons bien pourquoi ; mais vous ne sauriez en déduire que ce n’est pas celle des Français.
La laïcité est un principe fondateur de la République. En oubliant de la respecter, en refusant d’admettre cette faute, vous dégringolez encore quelques marches ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Jacqueline Eustache-Brinio applaudit également.)
laïcité (ii)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Ma question s’adresse également à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Monsieur le ministre, jeudi dernier, à l’invitation du Président de la République, une cérémonie marquant le début de la fête juive de Hanoukka s’est déroulée dans la salle des fêtes de l’Élysée.
À cette occasion, le chef de l’État a convié le grand rabbin de France au palais présidentiel. De fait, il a participé à cette grande fête religieuse. La prudence élémentaire aurait pourtant dû l’en dissuader. Comment le Président de la République, protecteur de la laïcité, a-t-il pu prendre part à une telle célébration ? (Applaudissements sur des travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) Le rôle éminent que lui confère la Constitution s’y opposait, à l’instar du lieu emblématique où s’est déroulée cette cérémonie à caractère religieux.
Reconnaissez-vous que le Président de la République a commis une erreur, étant donné la fonction qu’il exerce ? Et comment, à l’avenir, comptez-vous combattre de telles atteintes à la laïcité ? (Vifs applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, SER, CRCE-K et GEST.)