Mme Hélène Conway-Mouret. Cet amendement vise à étendre la faculté de voir délivrer un visa de long séjour aux conjoints de Français dont le mariage a été célébré à l’étranger à condition que ledit mariage ait été préalablement transcrit sur les registres de l’état civil français.
Il s’agit de corriger une différence de traitement manifestement injustifiée.
En effet, le cadre juridique actuel réserve le droit de solliciter un visa de long séjour aux étrangers dont le mariage avec un Français a été célébré en France et exclut ceux dont le mariage avec un Français a été célébré à l’étranger.
Dans le cadre de la lutte contre les mariages de complaisance, qui constitue une préoccupation constante des pouvoirs publics, les conditions d’accès et de séjour en France ont été considérablement durcies par le législateur. Les unions entre un ressortissant français et un ressortissant étranger qui ont lieu à l’étranger font désormais l’objet de contrôles tout aussi stricts et rigoureux que ceux qui s’appliquent aux unions ayant lieu en France.
Pour me rendre régulièrement dans ma circonscription et passer beaucoup de temps dans les locaux consulaires, je puis témoigner de la minutie avec laquelle les demandes de mariage sont traitées par nos agents consulaires qui, formés à cet effet, analysent les dossiers et convoquent et auditionnent les prétendants au mariage.
Il vous suffit d’examiner les statistiques de la lutte contre la fraude pour vous rassurer, mes chers collègues.
Cet amendement se veut également un signal pour les agents qui font leur travail honnêtement. La mesure de cohérence que nous vous proposons, mes chers collègues, n’est ni plus ni moins qu’un gage de confiance à l’égard de leur travail, qu’ils effectuent avec le même sérieux qui caractérise en France celui des agents de l’état civil.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Avis défavorable, pour une raison assez technique : la rédaction du dispositif de cet amendement me paraît manquer son objet.
Vous souhaitiez, ma chère collègue, étendre les conditions de délivrance du visa de long séjour ; or vous avez rédigé votre amendement de telle façon qu’il vise une dispense de visa. Nous ne souhaitons pas, quant à nous, qu’une dispense de visa s’applique aux cas que vous avez en vue. Il nous semble en tout état de cause opportun de maintenir une différence de traitement entre le cas d’un étranger qui s’est marié à l’étranger et celui d’un étranger qui se marie en France.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 77 rectifié ter, présenté par M. Paccaud, Mmes Valente Le Hir et V. Boyer, M. Menonville, Mme Josende, MM. Bazin, Karoutchi, H. Leroy et Chasseing, Mme L. Darcos, MM. Wattebled, Tabarot et Sautarel, Mmes Berthet, Estrosi Sassone, Drexler et Belrhiti, MM. D. Laurent, Belin, Cadec et Folliot, Mme Lassarade et MM. Levi, Longeot, Panunzi, Pointereau, Saury et Sol, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est créé un diplôme de l’intégration pour distinguer les citoyens ayant acquis la nationalité française dans les cas prévus par les paragraphes 2 et 5 de la section 1 du chapitre III du titre Ier bis du livre Ier du code civil, dont le parcours de vie, l’insertion professionnelle ou les engagements associatifs et civiques témoignent d’une intégration exemplaire dans la société française.
Peuvent également être distingués les étrangers pouvant prétendre à l’acquisition de la nationalité française sur le fondement de ces mêmes dispositions.
Un décret fixe les règles d’attribution, de promotion et le statut de ce diplôme.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigé :
Chapitre…
Distinguer les parcours d’intégration réussis
La parole est à M. Olivier Paccaud.
M. Olivier Paccaud. Par cet amendement, je souhaitais initialement proposer la création d’une médaille de l’intégration, mais les conseils avisés et la sagesse du président de la commission des finances, Claude Raynal, m’ont conduit, afin d’éviter les cruelles fourches caudines de l’article 40 de la Constitution, à métamorphoser cette médaille en un plus simple diplôme.
Pourquoi donc créer un diplôme de l’intégration, que le Gouvernement pourra éventuellement transformer en médaille ?
Certains y verront peut-être une mesure anecdotique, cosmétique, voire inutile ; ce serait faire fi, à mon humble avis, des vertus de l’exemplarité, du symbole, de la méritocratie.
Améliorer l’intégration, c’est aussi distinguer ses réussites. En mettant à l’honneur ou en valeur des modèles d’intégration, on envoie un message fort quant à la conception de l’immigration que l’on souhaite faire prévaloir : on ne la considère pas, de façon caricaturale, comme un réservoir de main-d’œuvre bon marché ; on sait s’en féliciter, au contraire, lorsqu’elle incarne une plus-value sociale.
Sans nier les problèmes, il faut savoir mettre en lumière celles et ceux qui se comportent bien. Nous en connaissons tous beaucoup autour de nous, des immigrés ou des Français fraîchement naturalisés qui se dévouent admirablement au sein d’associations ou qui, professionnellement, sont irréprochables.
Ces personnes qui donnent le meilleur d’elles-mêmes, qui apportent à la République, sachons les ériger en modèles et les récompenser !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Elle est assez partagée sur ce point. Il est vrai que nous avons souvent tendance à parler de l’immigration d’une manière assez négative… (Marques d’ironie sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Mme Colombe Brossel. Non, jamais ! (Sourires sur les mêmes travées.)
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est vrai que cela ne peut constituer une vision complète de l’immigration en France, et que ce serait là une occasion de le rappeler. Mais une partie de la commission s’interrogeait sur le fait qu’on puisse remettre un diplôme à quelqu’un qui, finalement, se comporte normalement : l’intégration est le principe du comportement de l’étranger en France. C’est pourquoi, afin de ne pas sombrer dans la schizophrénie, la commission a émis un avis de sagesse sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alexandre Ouizille, pour explication de vote.
M. Alexandre Ouizille. Mon cher collègue Paccaud, vous êtes tout de même gonflé ! Vous proposez des médailles aux étrangers alors que, depuis maintenant trois jours, vous ne faites que leur retrancher des droits !
De fait, ce texte s’attaque à tous les compartiments de la vie des étrangers, qu’ils soient en situation irrégulière – je pense à l’AME – ou en situation régulière, puisque vous compliquez l’accès de la famille sur le territoire national, rendez plus difficile le recours aux aides au logement, cependant que Mme Boyer nous explique qu’il faut contrôler, jusque dans les mariages, la manière dont les familles se constituent. (Mme Jacqueline Eustache-Brinio proteste.)
Et là, pour faire passer cette potion amère, vous proposez de distribuer des médailles. Eh bien non, monsieur Paccaud, ils ne veulent pas des médailles, ils veulent des droits, et c’est tout à fait différent ! (Mme Valérie Boyer proteste.)
Votre amendement vise des Français par acquisition. Mais vous le savez, dans notre République, les médailles sont pour tout le monde, que vous soyez Français par acquisition ou de naissance. Il serait incroyable de créer ainsi une médaille, en quelque sorte, de second rang, à côté de la Légion d’honneur, de l’ordre national du Mérite et toutes les médailles qui existent, notre République n’en manquant pas tant nous aimons ce genre de breloque.
Monsieur Paccaud, je pense vraiment que cet amendement a quelque chose d’indécent au regard de la nature des débats que nous avons eus durant toutes ces dernières heures. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. Je soutiens l’amendement de mon collègue Olivier Paccaud, que j’ai cosigné. Son adoption permettrait de reconnaître l’intégration au cas par cas.
Yannick Jadot m’a interpellé tout à l’heure alors que j’étais en audition, et non dans l’hémicycle. Comme vous tous, comme beaucoup, nous sommes sensibles à certaines situations individuelles, et nous souhaitons tous accompagner ceux qui se montrent exemplaires et souhaitent s’intégrer dans notre pays. C’est l’illustration même de ce que nous défendons dans ce texte : l’examen des situations cas par cas. Cet engagement est très humain, et nous avons tous envie d’accompagner et de valoriser ceux qui se montrent exemplaires dans notre pays, quelles que soient leurs origines.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je suis également cosignataire de cet amendement. J’entends bien les propos de notre collègue Ouizille, mais la vérité, c’est que l’acquisition de la nationalité française est un événement difficile, lourd d’engagement. Tous ceux qui ont participé dans des mairies aux cérémonies d’entrée dans la nationalité savent l’émotion qui y règne, et la force de ces moments. Reconnaître les mérites a un poids symbolique. La méritocratie, c’est aussi l’exemple et l’exemplarité.
Dans notre société, si nous ne voulons pas que tout soit permis, que tout soit possible, nous souhaitons que les personnes qui, ayant acquis la nationalité, sont méritantes, font preuve d’un esprit de sacrifice, s’impliquent, reçoivent, sinon une médaille, car l’article 40 s’y oppose, au moins un diplôme reconnaissant une intégration réussie.
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Je ne suis pas convaincu que je convaincrai mes collègues… Je ne sais pas si je suis gonflé, mais je ne sais pas non plus si vous êtes cohérents ! Depuis trois jours, vous nous accusez d’être particulièrement cruels envers les immigrés. Et cette mesure, qui est peut-être un petit peu moins méchante, pour reprendre votre raisonnement, vous êtes contre !
Certes, il y a eu un doute au sein de la commission. Faut-il dire merci à quelqu’un qui se comporte bien ? Mais le but de ce diplôme, c’est de dire bravo à ceux qui se comportent très bien !
M. Roger Karoutchi. Voilà !
M. Olivier Paccaud. Sur un point, M. Ouizille a raison : il existe différents types de médaille et tout le monde peut y prétendre. Les palmes académiques, les arts et lettres, le mérite agricole correspondent à des parcours très précis. Le diplôme que nous proposons correspondrait, lui aussi, à un parcours très précis. (Mme Cécile Cukierman se récrie.) Il concernerait les Français fraîchement naturalisés, mais aussi, monsieur Ouizille, les immigrés non naturalisés : il fallait lire le texte de mon amendement !
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur Paccaud, j’ai lu avec attention votre amendement : il y est question d’un « diplôme de l’intégration pour distinguer les citoyens ayant acquis la nationalité française »… (M. Olivier Paccaud s’exclame.) Vous pourriez donc retirer votre amendement. Il est vrai que, dans son objet, vous concédez – à juste titre – qu’il « existe sans doute autant de façons différentes de s’intégrer qu’il y a de Français naturalisés », et que « certains critères peuvent aider à objectiver une intégration réussie ». Je le dis très tranquillement : l’intégration, ce n’est pas automatiquement la naturalisation.
Notre collègue a parlé d’indécence, ce qui n’est pas si blessant, car vous parlez de diplômes, de médailles, quand vous êtes incapables de donner la médaille du travail aux sans-papiers qui travaillent… La leur donnerez-vous cette médaille ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et SER.)
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. À la suite des propos de M. Savoldelli, je voudrais demander une petite précision aux auteurs de l’amendement. J’ai bien compris qu’on pourrait donner ce diplôme à des personnes ayant fraîchement acquis la nationalité française ; je comprends également de vos explications qu’on pourra le délivrer aussi à des personnes qui n’ont pas la nationalité française, donc à des migrants qui gardent leur nationalité. Nous avons tous quelques exemples en tête d’étrangers en situation irrégulière en France, qui pourraient satisfaire aux critères d’obtention de ce diplôme. Pourra-t-on le donner à des étrangers en situation irrégulière qui rempliraient les critères que vous proposez ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8.
Mme Valérie Boyer. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt.)
M. le président. La séance est reprise.
TITRE II
AMÉLIORER LE DISPOSITIF D’ÉLOIGNEMENT DES ÉTRANGERS REPRÉSENTANT UNE MENACE GRAVE POUR L’ORDRE PUBLIC
Chapitre Ier
Rendre possible l’éloignement d’étrangers constituant une menace grave pour l’ordre public
Avant l’article 9
M. le président. L’amendement n° 539 rectifié bis, présenté par M. Ravier, est ainsi libellé :
Avant l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 2° de l’article L. 251-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les mots : « , actuelle et suffisamment grave » sont supprimés.
La parole est à M. Stéphane Ravier.
M. Stéphane Ravier. Aux termes de l’article L. 251-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’autorité administrative compétente peut obliger les étrangers à quitter le territoire français dès lors que « leur comportement personnel constitue, du point de vue de l’ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l’encontre d’un intérêt fondamental de la société ».
Pour rendre cette capacité d’expulser plus facilement applicable, mon amendement tend à supprimer les termes « actuelle » et « suffisamment grave ». En effet, une menace réelle pour l’ordre public et la sécurité des Français, qu’elle soit passée ou future, n’est pas tolérable. Si nous ne pouvons pas éviter le risque zéro, appliquons tout au moins la tolérance zéro.
De même, il est inutilement restrictif pour l’autorité administrative de devoir justifier de la particulière gravité de cette menace, car le principe d’une menace, tant qu’elle n’est pas réalisée, est qu’elle est tapie et imprévisible. La sécurité des Français avant tout ! Cet amendement me paraît particulièrement important.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 539 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 9
I. – Le chapitre Ier du titre III du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° L’article L. 631-2 est ainsi modifié :
a) L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° du présent article lorsqu’il a déjà fait l’objet d’une condamnation définitive pour des crimes ou des délits punis de cinq ans ou plus d’emprisonnement. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 4° du présent article lorsque les faits à l’origine de la décision d’expulsion ont été commis à l’encontre de son conjoint ou de ses enfants ou de tout enfant sur lequel il exerce l’autorité parentale. » ;
2° L’article L. 631-3 est ainsi modifié :
a) (nouveau) Au huitième alinéa, les mots : « 3° et 4° » sont remplacés par les mots : « 1° à 5° » ;
b) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Par dérogation au présent article, peut faire l’objet d’une décision d’expulsion en application de l’article L. 631-1, l’étranger mentionné aux 1° à 5° du présent article lorsqu’il a déjà fait l’objet d’une condamnation définitive pour des crimes ou délits punis de dix ans ou plus d’emprisonnement ou de cinq ans en réitération de crimes ou délits punis de la même peine. »
II. – Au chapitre II du titre V du livre II du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le deuxième alinéa de l’article L. 252-2 est ainsi rédigé :
« Par dérogation au sixième alinéa de l’article L. 631-2, la circonstance qu’il a déjà fait l’objet d’une condamnation définitive pour des crimes ou des délits punis de cinq ans ou plus d’emprisonnement n’a pas pour effet de le priver du bénéfice des dispositions du présent article. »
III. – Le code pénal est ainsi modifié :
1° A (nouveau) L’article 131-30 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« La peine d’interdiction du territoire français peut être prononcée, à titre définitif ou pour une durée de dix ans au plus, à l’encontre de tout étranger coupable d’un crime, d’un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure ou égale à cinq ans ou d’un délit pour lequel la peine d’interdiction du territoire français est prévue par la loi. » ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « , pour la durée fixée par la décision de condamnation, » sont supprimés ;
c) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La peine d’interdiction du territoire français cesse ses effets à l’expiration de la durée fixée par la décision de condamnation. Cette durée court à compter de la date à laquelle le condamné a quitté le territoire français, constatée selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
1° L’article 131-30-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’exigence de motivation spéciale, prévue au premier alinéa du présent article, au regard de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger n’est pas applicable aux peines d’interdiction du territoire français prononcées à l’encontre d’un étranger coupable d’un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement ou d’un délit commis à l’encontre du conjoint ou des enfants de l’étranger ou de tout enfant sur lequel il exerce l’autorité parentale. » ;
2° L’article 131-30-2 est ainsi modifié :
aa) (nouveau) Au septième alinéa, les mots : « au 3° et au 4° » sont remplacés par les mots : « aux 1° à 5° » ;
a) Le dernier alinéa est complété par les mots : « , ni aux délits de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes prévus aux septième et huitième alinéas de l’article 24 de la loi du 29 juillet de 1881 sur la liberté de la presse, ni aux crimes, ni aux délits punis d’au moins dix ans d’emprisonnement, ni aux délits commis en état de récidive et punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La décision est spécialement motivée au regard de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle et familiale de l’étranger dans ces cas. » ;
2° bis (nouveau) Les articles 213-2, 215-2, 221-11, 221-16, 223-21, 224-11, 311-15, 312-14, 321-11, 324-8, 414-6, 422-4, 431-27, 433-23-1, 434-46, 442-12, 443-7 et 462-4 sont abrogés ;
3° À l’article 222-48, les mots : « 222-1 à 222-12, 222-14, 222-14-1, 222-14-4, 222-15, 222-15-1, 222-23 à 222-31 et 222-34 à 222-40 » sont remplacés par les mots : « 222-11 et 222-14-4 » ;
4° (Supprimé)
5° (nouveau) À l’article 225-21, les mots : « sections 1 bis, 2, 2 ter et 2 quater du présent chapitre » sont remplacés par les mots : « articles 225-12-5 et 225-12-8 » ;
6° (nouveau) À l’article 322-16, les mots : « l’une des infractions définies aux articles 322-6 à 322-10 » sont remplacés par les mots : « de l’infraction définie à l’article 322-6-1 » ;
7° (nouveau) À l’article 431-19, les mots : « à la présente section » sont remplacés par les mots : « aux articles 431-14 et 431-15 » ;
8° (nouveau) Au dernier alinéa de l’article 435-14, les mots : « l’une des infractions prévues au présent chapitre » sont remplacés par les mots : « l’infraction prévue à l’article 435-12 » ;
9° (nouveau) À l’article 441-11, les mots : « au présent chapitre » sont remplacés par les mots : « aux articles 441-1, 441-3, 441-6 et 441-7 » ;
10° (nouveau) À l’article 444-8, les mots : « au présent chapitre » sont remplacés par les mots : « aux articles 444-4 et 444-5 ».
IV (nouveau). – À la première phrase du sixième alinéa du I de l’article 86 de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, les mots : « visés au dernier » sont remplacés par les mots : « mentionnés à l’avant-dernier ».
M. le président. Mes chers collègues, j’appelle chacun et chacune d’entre vous à être concis dans ses propos, afin que nous achevions l’examen de ce texte dans les délais.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cela vaut pour le ministre aussi !
M. le président. L’amendement n° 315 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Monsieur le président, je vous remercie de cette invite au moment même où je prends la parole, moi qui suis toujours très concis. (Sourires.)
Cet article 9 nous paraît être l’un des articles les plus dangereux et les plus difficiles à accepter de ce projet de loi. Ses dispositions marquent le retour en force de la double peine pour l’ensemble des étrangers qui auraient commis une infraction. Il prévoit en effet de fragiliser la catégorie des étrangers bénéficiant de la protection dite « quasi absolue ». Cette protection concerne notamment des personnes résidant en France avant l’âge de 13 ans, ou y résidant de manière régulière depuis plus de vingt ans, ou encore les étrangers malades.
M. Guy Benarroche. Il s’agirait d’abolir les protections en raison non plus de la peine prononcée, mais de la peine encourue. C’est un assouplissement excessivement large, englobant même des délits de faible gravité.
En effet, loin de viser les quelques centaines d’étrangers condamnés pour un crime – il y en a eu 451 en 2021 –, ces dispositions concernent les étrangers condamnés pour des délits, soit 99 % de ceux qui le sont.
Ce dispositif serait-il conforme aux obligations internationales de la France ? La substitution de la peine encourue – un délit passible d’une peine de cinq ans d’emprisonnement – à la peine prononcée est disproportionnée au regard des conséquences qu’une décision d’expulsion aura sur les droits fondamentaux des personnes qui en font l’objet et des membres de leurs familles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérald Darmanin, ministre. L’article 9 concerne les mesures administratives d’expulsion à l’encontre d’étrangers en situation irrégulière ou régulière. Un tel arrêté peut être pris par le préfet, mais il l’est le plus souvent par le ministre de l’intérieur. On en compte moins d’un millier par an, et nous souhaitons précisément qu’il y en ait davantage – j’ai compris que vous vous y opposiez – en levant les protections qui empêchent le ministre de l’intérieur de prendre ces arrêtés. Ceux-ci, d’ailleurs, s’ils permettent une expulsion plus rapide, offrent aussi des garanties plus fortes à la personne que l’on veut expulser, notamment parce qu’ils sont soumis à l’avis de la commission d’expulsion, dans laquelle siègent des magistrats.
Le Conseil d’État a indiqué dans son avis que rien, tant dans notre bloc de constitutionnalité que dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), n’empêche de revenir sur les protections qui avaient été décidées par le législateur – sur proposition, d’ailleurs, du ministre Sarkozy en 2003. Nous sommes le seul pays, dans toute l’Union européenne, à avoir mis en place ces protections, qui relèvent entièrement du domaine législatif.
Certes, l’une de ces dispositions concerne les mineurs qui commettent des actes graves pendant qu’ils sont mineurs ; mais nul ici ne propose de revenir dessus, et d’ailleurs la convention internationale des droits de l’enfant (CIDE), que nous avons ratifiée, nous en empêcherait. Mais nous pouvons modifier toutes les autres. Il y a plusieurs types de rédaction possibles, nous le verrons.
Cela ne signifie pas qu’il n’y aura pas de juge pour regarder ce que nous faisons, monsieur Benarroche : nous prenons l’arrêté ministériel d’expulsion, et c’est ensuite au juge d’examiner si la vie privée et familiale l’emporte sur le trouble grave à l’ordre public, ou si ce dernier l’emporte sur la vie privée et familiale, selon les mêmes règles que pour l’intérêt fondamental de la Nation en matière de terrorisme.
Actuellement, les protections votées par le législateur il y a vingt-cinq ans sont telles qu’il n’est parfois pas même possible pour le ministre de l’intérieur de prendre un arrêté ministériel d’expulsion.
Nos propositions sont conformes à la Constitution, en tout cas. Il y a simplement un équilibre à trouver entre le ministre de l’intérieur, qui doit pouvoir faire son travail, et le juge, qui fera le sien.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur votre amendement, monsieur Benarroche.