M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice Gosselin, vous avez évoqué un certain nombre de filières, dont celle de l’élevage, chère au département que vous représentez.
Il est nécessaire de rompre avec une forme d’« élevage bashing » permanent, que nous avons laissé se développer. Nous avons besoin d’élevages en France. Le modèle d’élevage que nous avons construit dans notre pays devrait être observé, car il est à bien des égards vertueux.
Pour aller dans le sens de votre propos, j’entends des personnes parler d’agro-industrie, d’élevage industriel ou de fermes-usines : qu’ils aillent voir ce qui se passe au-delà de nos frontières proches – il n’est pas nécessaire d’aller jusqu’en Chine – pour étudier de près la réalité des élevages ! Nous devrions plutôt nous féliciter d’avoir le modèle d’élevage qui est le nôtre. C’est un facteur d’attractivité, y compris pour les métiers du secteur.
Il convient de s’attacher au sujet particulier du lait, vous avez raison, mais aussi à la question de la rémunération, à celles des conditions de travail et du portage des capitaux, qui sont assez lourds pour un jeune. De façon plus générale, le système d’élevage a été pensé différemment selon les régions : il est différent pour les Normands, les Bretons et pour les éleveurs du Massif central, chers à M. Duplomb.
Ce n’est pas le même modèle, parce que les constantes paléoclimatiques sont différentes. Par conséquent, ce ne sera pas le même élevage. Nous devons essayer d’y travailler.
Vous vous êtes demandé ce qu’il était souhaitable de faire. À mon sens, la question de la souveraineté est un fil directeur. C’est dans cette direction que nous allons nous engager et je viendrai bien volontiers vous en parler à l’occasion du plan de souveraineté pour la filière fruits et légumes. Il s’agit de travailler sur la question des produits phytosanitaires, sur leur réduction et les solutions de substitution, qui supposent des investissements pour faire face aux défis de demain, mais aussi sur la question de la main-d’œuvre afin de regagner de la compétitivité.
Il s’agit de retrouver des filières d’excellence et de répondre aux besoins des consommateurs. De cette façon, nous réussirons. Nous devons procéder, secteur par secteur – j’allais dire, presque filière par filière.
M. le président. La parole est à M. Christian Klinger. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christian Klinger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en lisant ce rapport, je me suis souvenu des leçons que j’apprenais plus jeune. La France était alors le « grenier à blé » de l’Europe, un pays de cocagne, deuxième exportateur mondial. Aujourd’hui, nous sommes au cinquième rang ! Dans les années 1980, nous comptions 1,2 million d’exploitations agricoles, contre un peu moins de 440 000 aujourd’hui.
Oui, en 2023, la France est l’un des seuls grands pays agricoles dont les parts de marché reculent, tandis que ses importations alimentaires explosent. Le potentiel productif agricole s’érode d’année en année : baisse du nombre d’exploitations, chute de la surface agricole utile en cultures et plafonnement des rendements. La productivité de l’agroalimentaire, faute d’investissements suffisants, est également en berne.
Nos collègues ont donc passé plusieurs mois à dresser un tableau exhaustif de la filière agricole, mais, point plus intéressant, ils se sont penchés sur les causes et ont donc interrogé l’esprit des réformes successives qui ont conduit notre agriculture à aller aussi mal.
Depuis plusieurs décennies, nous nous sommes habitués à entendre une petite musique jouée par ceux qui vitupèrent notre modèle agricole, pourtant l’un des plus vertueux.
C’est dans ce contexte politico-médiatique qu’en 2017 notre Président a plaidé pour « la montée en qualité, la montée du bio ». Les produits français n’étant plus compétitifs, ils devaient monter en gamme afin d’atteindre des marchés de niche plus rémunérateurs, tandis qu’« en même temps » le marché allait être ouvert aux produits étrangers cœur de gamme. Cette politique agricole à deux faces sera une impasse.
Tels Perrette et son pot au lait, ces décideurs ont rêvé : adieu lait, pommes, tomates, poulet !
Oui, comme Perrette, ces gouvernements successifs ont fini par trébucher sur la réalité : ce modèle était déconnecté des attentes des Français et les contraintes qui pèsent sur lui sont autant de boulets qui l’ont entravé.
C’est ce que démontre ce rapport, très pédagogique, au travers notamment d’exemples tirés de la consommation quotidienne de nos concitoyens.
Prenons l’exemple de la pomme. Voilà dix ans, nous en exportions 700 000 tonnes, et en importions 100 000 tonnes. À ce jour, nous n’en exportons plus que 350 000 tonnes, et en importons 200 000 tonnes… Derrière ces chiffres, ce sont nos pomiculteurs qui se sont adaptés à des contraintes toujours plus coûteuses pour produire la pomme parfaite.
Or, pour la produire, on augmente son coût et les vilaines pommes manquent pour les produits de transformation, comme le jus ou la compote. Les conséquences sont sans appel : produire une pomme française coûte 1,18 euro contre 53 centimes pour une pomme polonaise.
La consommation régulière de la pomme pourrait donc rapidement être réservée aux consommateurs français les plus aisés, laissant les pommes étrangères, bourrées de substances interdites en France, aux consommateurs les moins aisés et aux producteurs de produits transformés à base de pommes.
Cette politique du « tout montée de gamme » a fait apparaître deux risques majeurs : une déconnexion totale de notre agriculture avec les attentes de nos concitoyens, lesquels connaissent une inflation alimentaire sans précédent, et une crise de souveraineté alimentaire. La guerre russo-ukrainienne nous a rappelé l’importance géostratégique de l’arme agricole. Certes, le ministère de l’agriculture a été renommé en conséquence, mais corriger réellement le tir est maintenant une nécessité.
La stratégie Farm to Fork, qui nous entraîne vers la décroissance, est à rebours de nos besoins et, actuellement, se heurte à la situation géopolitique. À l’heure où nous découvrons le prix de la dépendance énergétique, comment pouvons-nous ne pas doter la France d’une agriculture souveraine et compétitive ? Nous ne pouvons plus nous acheter une bonne conscience environnementale sur le dos de nos agriculteurs : ce serait irresponsable vis-à-vis de nos enfants.
Ce rapport nous donne les clés pour redresser la barre de notre filière agricole. Il serait dommage de passer à côté et de ne pas mettre en œuvre ses préconisations. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué plusieurs sujets.
Tout d’abord, pardonnez-moi, mais, dans son discours, le Président de la République n’a pas dit qu’il fallait « tout monter en gamme », mais que la montée en gamme était aussi un objectif et une perspective.
M. Laurent Duplomb. Ce n’est pas vrai !
M. Marc Fesneau, ministre. Essayons de ne pas caricaturer son propos. D’ailleurs, depuis trente ans, la tendance collective était plutôt d’aller vers une montée en gamme.
Ensuite, vous avez soulevé un point peu abordé ce soir, en dépit de son importance à mon sens : la compétitivité de nos filières agroalimentaires.
En effet, en raison d’un défaut de rémunération, nous avons un défaut de modernisation. Le ministère de l’économie et des finances, mon collègue Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’industrie, et moi-même travaillons sur le sujet important de l’investissement dans les industries agroalimentaires. Nous devons résorber ce retard en termes de compétitivité.
Par ailleurs, vous avez raison, la crise en Ukraine vient de montrer combien l’alimentation est une arme. Par conséquent, nous ne devons pas faire preuve de naïveté en la matière. La souveraineté alimentaire est une question de souveraineté « tout court ».
Pouvoir nourrir sa population est peut-être la première des souverainetés, comme l’indiquait le sénateur Mérillou.
Ce sujet doit être posé de cette façon, y compris dans le débat public. Ainsi, nous pourrons avancer.
Enfin, je ne suis pas sûr que la question de la souveraineté ne soit pas sans lien avec le défi environnemental.
Le défi climatique, celui des grandes transitions, est aussi un défi de souveraineté. En effet, la particularité du modèle agricole est qu’il est dépendant du climat. Si nous ne sommes pas capables d’adapter notre modèle agricole au dérèglement climatique et de lutter contre ce dérèglement, alors le modèle agricole et la souveraineté alimentaire seront mis en cause.
Il me semble que nous devons tenter de combiner ces deux impératifs, sinon des modèles se retrouveront, de ce fait, dans une impasse.
Conclusion du débat
M. le président. En conclusion du débat, la parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le président, mesdames et messieurs les sénateurs, madame la présidente de la commission, tout d’abord, je voudrais vous faire part de ma joie de pouvoir débattre, une nouvelle fois, du sujet de la souveraineté alimentaire, et de sa reconquête.
Je voudrais également saluer la qualité du travail réalisé par le Sénat, à l’occasion de ce rapport en particulier, mais aussi plus généralement sur les sujets agricoles.
Mes propos ne relèvent pas de la flagornerie. En effet, je pense que vous avez souvent su poser les termes du débat, avec tout le recul nécessaire, sur des sujets bien plus complexes que la caricature qui en est faite dans un certain nombre de tribunes.
Je salue donc le travail accompli par le sénateur Duplomb, par le sénateur Louault et par le sénateur Mérillou. Ce rapport sur la compétitivité de la ferme France et le débat que nous avons eu ce soir sont, me semble-t-il, utiles pour penser l’avenir de notre agriculture dans une période à la fois de défis – ce qui a été souligné par plusieurs d’entre vous – et marquée par le conflit en Ukraine.
Cette guerre démontre, s’il en était encore besoin – vous en étiez en tout cas, comme moi, convaincus –, combien produire pour nourrir est essentiel.
Ce rapport dresse des constats éclairants sur les politiques menées depuis la fin des années 1990, notamment lorsque ses auteurs évoquent le choix de la stratégie de montée en gamme. Il montre que la perte de compétitivité, à laquelle ce rapport conclut, n’est pas un sujet nouveau. J’évoquerai naturellement dans mon propos les orientations politiques que nous privilégions depuis 2017.
Ensuite, nous pouvons partager certains constats dressés par le Sénat et un certain nombre de solutions. Oui, nous avons perdu des parts de marché à l’international, pour certaines productions, et la tâche est immense pour assurer notre souveraineté alimentaire.
Pour autant, je ne crois pas qu’il faille opposer production de masse – je l’ai déjà dit – et montée en gamme, comme le fait ce rapport, en considérant que la priorité doit aller à l’une à la place de l’autre. Ces deux stratégies doivent être menées de front pour répondre à la demande et aux différents besoins des consommateurs.
Notre mission ne peut pas non plus être de tout produire sur notre sol. Ce n’est d’ailleurs pas le sens de la souveraineté alimentaire, qui repose également sur un équilibre entre les productions – reconnaissons-le – des différentes régions du monde.
Ce ne serait pas réaliste, sachant que l’alimentation est aujourd’hui une affaire de complémentarité, de compensation, d’échanges saisonniers, encore davantage sous le régime des dérèglements climatiques.
L’enjeu réside dans la combinaison des objectifs de production de masse et de montée en gamme de certaines filières spécifiques ; c’est impératif pour maintenir la diversité de nos systèmes agricoles, dont la force est une source de richesses.
L’enjeu, c’est également de combiner l’objectif de souveraineté avec celui d’une production capable de répondre aux besoins des consommateurs.
Il est aussi nécessaire de mener, pour le secteur agricole en particulier, des transitions, que nombre de nos concitoyens appellent de leurs vœux en général. Si nous ne sommes pas en mesure d’adapter l’agriculture aux défis du dérèglement climatique, de la perte de biodiversité et du stockage du carbone dans le sol, alors nous ne pourrons pas garantir notre souveraineté alimentaire.
Il est donc impératif d’accélérer la transition, car un haut niveau d’exigence sera indispensable pour conquérir de nouveaux marchés et répondre à de nouvelles attentes ; sur ce point, demeure la question de la distorsion de concurrence avec les autres États européens qui pourrait résulter de telles mesures.
Je conclurai en rappelant les actions que nous avons menées depuis 2017. En matière de revenus, nous avons mis en place les lois Égalim 1 et 2 – vous avez largement participé à leur élaboration et vous aurez l’occasion d’examiner un nouveau texte prochainement. Elles tracent la voie vers l’inversion de la logique de la construction du prix. Nous ne sommes pas au bout du chemin, mais nous avons soulevé pour la première fois depuis très longtemps la question de la construction du prix – elle doit commencer avec les coûts de production.
Nous avons également accompagné les transitions, à l’occasion du Varenne agricole ; il faut maintenant le concrétiser sur le terrain, notamment en développant l’accès à l’eau.
Je pense également aux adaptations au changement climatique que nous essayons de mettre en place via le plan France 2030.
Par ailleurs, nous cherchons à défendre notre agriculture en tant qu’Européens. Lors de la présidence française de l’Union européenne, nous avons inclus – c’est une première – les notions de réciprocité et de clauses miroirs dans les accords internationaux, alors même qu’elles n’étaient pas demandées dans le débat public. Y recourt-on suffisamment à ce jour ? La réponse est non, mais nous devons œuvrer en ce sens, avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, et avec les autres États membres, afin qu’elles puissent s’appliquer. Nous devons nous mettre d’accord avec nos partenaires commerciaux pour qu’un certain nombre de clauses miroirs puissent être défendues et respectées.
Enfin, toute cette réflexion alimentera les débats sur le projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles que je présenterai prochainement. Nous en sommes actuellement à la phase de concertation, au cours de laquelle nous avons abordé l’ensemble des sujets relatifs à la rémunération, aux transitions, aux adaptations, au portage du foncier et des capitaux, à la formation et à l’innovation, etc. Ces sujets participent d’un écosystème, si je puis dire.
On a beaucoup dit que l’agriculture se porte mal – c’est vrai, un certain nombre de secteurs sont en difficulté –, mais quel formidable métier ! Il est porteur de sens et il a l’avenir devant lui, car il touche à notre capacité de produire, de nourrir, de stocker du carbone et de défendre un certain nombre de valeurs qui sont celles de notre territoire.
Voilà ce que nous essaierons de défendre au travers de ce projet de loi à venir. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, RDSE, INDEP et UC. – Mme la présidente de la commission applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, au nom de la commission qui a demandé ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb, au nom de la commission des affaires économiques. Monsieur le ministre, ce n’est pas parce qu’on réécrit l’Histoire que cela devient la vérité…
La réalité, c’est que, en 2017, à la tête de la ferme France, il y avait un Président de la République, dont le propos n’est pas tout à fait le même que celui qu’il tient aujourd’hui, comme c’est d’ailleurs le cas sur plein d’autres sujets…
À cette époque-là, je le rappelle, le Président de la République avait tenu, dans son discours de Rungis, un propos très clair. Malheureusement, nombre d’agriculteurs ou de représentants professionnels n’en ont pas compris le sens. Lorsqu’il parlait de montée en gamme, ce cher Président de la République, il partait du principe que nous ne sommes plus compétitifs, qu’il faut donc accepter que des produits viennent de l’extérieur et recentrer notre agriculture sur la qualité.
Monsieur le ministre, dans notre rapport, mes collègues et moi critiquons non pas la montée en gamme ni les produits de qualité, mais la valse à deux temps, à savoir, d’un côté, dire qu’il faut monter en gamme pour conserver une partie de notre agriculture, tout en acceptant politiquement de laisser tomber des pans entiers de notre production ; de l’autre côté, se gargariser de messages tout faits sur l’agroécologie. C’est ça la réalité du discours de 2017 du Président de la République !
Et je ne parle pas du discours de la Sorbonne du même Président de la République, en 2018, qui était quasiment capable de sacrifier la politique agricole sur l’autel du marché européen – c’est la première fois dans l’histoire de la Ve République qu’un Président de la République parle d’abandonner la politique agricole de son pays. C’est ça la réalité ! Relisez les discours de Rungis et de la Sorbonne, si vous ne l’avez pas déjà fait, vous verrez que tout ce que je viens d’énoncer s’y trouve !
Monsieur le ministre, la réalité, c’est que la France décline ! Cela s’explique à 70 % par la baisse de productivité.
Quatre grandes causes entraînent cette baisse de productivité. La première, ce sont des charges plus élevées, des coûts de main-d’œuvre 1,5 fois plus élevés qu’en Espagne, 1,7 fois plus qu’en Allemagne ou encore 12 fois plus qu’en Pologne ; une concurrence avec le Maroc, où l’heure de main-d’œuvre coûte 70 centimes.
Autre cause : la surtransposition de normes – mes collègues l’ont rappelé sans cesse –, qui vient sans arrêt amplifier la réglementation qui s’applique aux agriculteurs européens, et que la France alourdit encore plus.
La réalité de cette baisse de productivité, c’est aussi la guerre des prix – vous avez essayé de l’endiguer, certes, au moyen des différentes lois que vous avez mises en place, monsieur le ministre –, qui a pour seule conséquence d’empêcher, au bout du bout, les industries agroalimentaires de retirer suffisamment de bénéfices pour pouvoir réinvestir et rester compétitives.
La troisième cause, c’est l’insuffisante protection de l’État. Monsieur le ministre, combien d’exemples – je pense en particulier à la production de la tomate – montrent que nous avons laissé des productions, qui proviennent d’autres pays, remplacer les nôtres ? La tomate marocaine, qui au départ devait être ronde, a évolué vers la tomate en grappe, puis vers la tomate cerise. Résultat : au bout du bout, les seuls Français qui produisent des tomates sont quasiment condamnés à ne produire que des tomates anciennes !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Exactement !
M. Laurent Duplomb. Est-ce là la politique agricole que nous voulons pour demain ?
Le quatrième élément, c’est un climat médiatico-politique catastrophique, comme l’ont dit mes collègues. Lorsque l’on se rend en Italie, pour reprendre l’exemple de Serge Mérillou, on a l’impression de rencontrer 58 millions d’ambassadeurs de l’agriculture italienne ; en France, notre agriculture fait face, sur 67 millions d’habitants, à 30 millions de procureurs ! C’est ça la réalité !
Et de ces quatre phénomènes résultent trois conséquences.
La première, c’est que nous perdons notre souveraineté – tous les exemples nous le révèlent. C’est pour ça que le Président de la République a changé de ton et de termes. Entre 2017 et aujourd’hui, le discours sur la mondialisation heureuse, le multiculturalisme et tout ce qui était vendu comme étant le paradis sur terre, devient, sous l’effet de la covid-19 et de la guerre en Ukraine, un discours sur la souveraineté ; comme par hasard, on redécouvre tous ses avantages ! Un pays qui est capable de produire est un pays qui est en mesure de nourrir sa population.
La deuxième conséquence, c’est que le discours sur la montée en gamme divise les Français en deux : d’un côté, vous avez une partie relativement faible de la population qui a les moyens de se « payer » l’agriculture qu’elle souhaite ; de l’autre, vous avez la plupart des Français, qui sont condamnés à n’acheter que des produits importés, lesquels ne correspondent pas – pour un tiers – à nos normes, monsieur le ministre.
En clair, nous sommes dans une situation qui amplifie ces phénomènes ; au bout du bout, la seule réalité, c’est que, chez nous, nous interdisons et nous mettons dans le corner des productions qui passent par la porte de l’importation, et que nous finissons par manger !
Et s’agissant les accords de libre-échange, les clauses miroirs ne vont pas les changer.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Monsieur le président, laissez-le terminer !
M. Laurent Duplomb. Monsieur le président, si vous me permettez quelques secondes de plus…
Mes chers collègues, savez-vous qu’actuellement la Commission européenne est en train d’instaurer deux types d’accords de libre-échange ? D’un côté, les accords de libre-échange globaux, qui seront soumis au vote des États membres ; de l’autre, des accords de libre-échange intérimaires, où seront traités tous les sujets commerciaux, et qui pourront ne pas être votés. Cela permettra de continuer comme avant !
M. le président. Mon cher collègue, vous avez dépassé très largement votre temps de parole.
Il faut tenir dans les délais, c’est le règlement.
M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, j’espère que vous comprendrez enfin qu’il faut faire quelque chose de bien pour notre agriculture.
Il ne suffit pas de le dire ; encore faut-il le faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, INDEP et CRCE.)
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur les conclusions du rapport d’information Compétitivité : une urgence pour redresser la ferme France.
10
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 8 février 2023 :
À quinze heures :
Questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures trente :
Débat d’actualité sur le thème « Quelle réponse européenne aux récentes mesures protectionnistes américaines ? » ;
Proposition de résolution en application de l’article 34-1 de la Constitution, relative à la reconnaissance du génocide des Assyro-Chaldéens de 1915-1918, présentée par Mme Valérie Boyer, M. Bruno Retailleau et plusieurs de leurs collègues (texte n° 227, 2022-2023).
Le soir :
Proposition de résolution européenne, en application de l’article 73 quinquies du règlement, sur l’avenir de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), présentée par MM. Jean-François Rapin et François-Noël Buffet (texte de la commission n° 298, 2022-2023).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 8 février 2023, à zéro heure cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER