M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Il est très important de pouvoir doter ces agents de pouvoirs de cyberenquête pour être plus efficace dans la lutte contre la fraude.
En l’occurrence, les mécanismes de fraude ici visés sont les usurpations d’identité, de coordonnées bancaires, les activités fictives, les ressources non déclarées ou les réseaux transnationaux de recrutement. Il est essentiel que les agents disposent de ces moyens supplémentaires, la caractérisation des infractions de travail illégal étant plus complexe.
Votre préoccupation est de vérifier si l’inspection du travail, chargée de missions de contrôles, ne va pas être « déshabillée » au profit de ces cyberenquêteurs. Évidemment, la réponse est non.
En premier lieu, nous renforçons dans le projet de loi de finances (PLF) le budget des services de l’inspection du travail : 2,5 millions d’euros supplémentaires sont alloués à des revalorisations indemnitaires des inspecteurs du travail, afin de renforcer l’attractivité de ce corps.
En second lieu, nous visons une augmentation de 15 % des interventions des services de l’inspection du travail en matière de lutte contre le travail illégal, et de 6,5 % en matière de fraude au détachement.
Vous le voyez, nous agissons sur les deux leviers. Nous dotons les agents de contrôle de pouvoirs de cyberenquête parce que c’est important pour démanteler les nouvelles fraudes complexes. Nous renforçons aussi les moyens de l’inspection du travail pour ses missions.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 41, modifié.
(L’article 41 est adopté.)
Après l’article 41
M. le président. L’amendement n° 289 rectifié bis, présenté par Mme N. Goulet, M. Henno, Mme Férat, MM. Delahaye, Maurey et Longeot, Mme Billon, MM. Kern et Lafon, Mme Herzog, MM. Canévet, Détraigne, Levi et Janssens, Mmes Perrot, Guidez et Puissat, MM. Laménie et Médevielle, Mme Belrhiti, M. Meurant, Mme Jacquemet, MM. Joyandet, Chasseing et Reichardt, Mme Garriaud-Maylam, MM. Decool et Frassa, Mme Vermeillet, M. Calvet, Mme Mélot, M. Duffourg, Mme de La Provôté, M. Lefèvre, Mme Dumont et MM. Le Rudulier et Klinger, est ainsi libellé :
Après l’article 41
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 114-10-1-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les droits d’une personne faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) sont immédiatement suspendus, sauf cas d’urgence médicale. »
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Cet amendement, non sans importance, vise à suspendre les droits sociaux des personnes visées par une obligation de quitter le territoire français (OQTF) – on parle beaucoup de ces dernières, en ce moment –, sauf, évidemment, en cas d’urgence médicale.
En outre, je veux rappeler que nous demandons depuis trois ans une obligation de consultation du fichier Agdref avant l’ouverture des droits à prestations.
Bien entendu, cette proposition est en cohérence avec la condition de résidence régulière en France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir la suspension immédiate des droits à prestations sociales d’une personne faisant l’objet d’une OQTF. En effet, il n’est pas acceptable qu’un étranger séjournant en France de façon irrégulière, devant quitter le territoire, continue à bénéficier de prestations.
Toutefois, le Gouvernement a annoncé que cette mesure figurera au sein du projet de loi relatif à l’immigration, qui devrait être examiné au début de 2023.
Dans cette attente, il serait souhaitable que nous poursuivions nos réflexions de façon à perfectionner le dispositif et, surtout, à le sécuriser sur le plan juridique, ce qui n’est pas suffisamment le cas dans cet amendement.
Pour cette raison, la commission demande le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable. La position du Gouvernement nous éclairera sans doute davantage.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je vois là aussi un amendement d’appel. C’est d’ores et déjà le droit : vous ne pouvez bénéficier d’une prestation sociale que si vous résidez régulièrement en France.
Je donnais précisément cet exemple tout à l’heure, en abordant la question des contrôles et de l’application des règles. Je disais qu’il peut y avoir des cas où les règles ne sont pas appliquées avec suffisamment de force et d’efficacité, citant le cas d’une personne se voyant délivrer une obligation de quitter le territoire français et dont les droits ne seraient pas suspendus immédiatement.
Cela fait partie des points sur lesquels il nous faut progresser. Cependant, il n’est pas nécessaire de voter cet amendement et d’ajouter une obligation légale, alors que cela figure déjà dans le droit.
Mon collègue Gérald Darmanin souhaite que nous soyons plus efficaces en la matière, c’est-à-dire que nous disposions davantage de leviers de contrôle et d’automatisation, pour véritablement procéder à la levée de ces droits à prestations sociales.
Pour conclure, comme le droit prévoit, d’ores et déjà, que la délivrance d’une obligation de quitter le territoire français, signifiant que la résidence en France n’est pas régulière, ne vous donne plus droit aux prestations sociales, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Henno, l’amendement n° 289 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Olivier Henno. Je maintiens l’amendement, monsieur le président. Je comprends l’argumentation, mais, très sincèrement, j’ai des doutes sur l’application réelle de ces dispositions. Cela ira mieux en le disant, et mieux encore en l’écrivant.
M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.
M. Philippe Mouiller. Bien entendu, nous suivrons notre rapporteur, dont les arguments sont clairs, lorsqu’il explique que nous devons encore procéder à des travaux, car la rédaction de cet amendement nécessite une sécurisation juridique.
En revanche, quand je vous entends, monsieur le ministre, je n’ai pas l’impression que nous vivons sur la même planète. J’assure dans mon département le suivi de l’ensemble des personnes qui reçoivent une OQTF ; à l’heure actuelle, les droits continuent de leur être versés de la même façon… Même les collectivités qui accueillent leur adresse au titre du centre communal d’action sociale (CCAS) continuent de percevoir au nom de ces personnes les différents droits possibles !
La disposition figure déjà dans la loi, dites-vous. Mais concrètement, elle n’est pas appliquée. Un certain nombre de personnes ne peuvent être expulsées de leurs logements, alors qu’elles ne paient pas leur loyer, et continuent, cependant, à percevoir les APL !
Le système ne fonctionne pas. J’entends votre discours, mais je peux vous assurer qu’il faut réellement voir sur le terrain la manière de gérer les situations. Le décalage est complet entre le discours et la réalité.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 289 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 805 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 1100 rectifié est présenté par Mme Le Houerou, MM. Jomier et Kanner, Mmes Lubin, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Jasmin, Meunier, Poumirol et Rossignol, MM. Chantrel et P. Joly, Mme G. Jourda, MM. Mérillou, Redon-Sarrazy et Stanzione, Mmes Artigalas et Briquet, MM. Cozic et Marie, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Préville, MM. Sueur et Tissot, Mme Carlotti, MM. Devinaz, Gillé, Kerrouche, Temal et J. Bigot, Mme Bonnefoy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 41
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« Art. L. 133-4-2. – En cas de nouvelle constatation pour travail dissimulé dans les cinq ans à compter de la notification d’une première constatation pour travail dissimulé ayant donné lieu à redressement auprès de la même personne morale ou physique, la majoration est portée à 90 % lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 25 % et 120 % lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 40 %. »
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 805.
Mme Laurence Cohen. La société VIP Services, une entreprise de nettoyage et de conciergerie, a été condamnée le 15 septembre dernier pour traite d’êtres humains aggravée. Vingt-six femmes de ménage ukrainiennes sans-papiers ont été reconnues victimes de surexploitation par leur ex-employeur dans des conditions indignes.
Le travail dissimulé constitue une double honte : honte sociale et humaine, en ce que ce travail entraîne des conditions de vie indignes ; honte fiscale, en ce qu’il vient voler la collectivité nationale, qui a fait le choix politique d’une mutualisation de son système de protection sociale.
De fait, le contrat de travail consacre la relation asymétrique de pouvoir entre l’employeur et l’employé, et son respect la protection minimale due à chaque travailleur. Son absence, son illégalité ou le manque de toutes obligations afférentes telles que le versement des cotisations patronales entraînent donc une sanction bien légitime. Le Conseil constitutionnel a même reconnu que la lutte contre la fraude revêtait le caractère d’une exigence constitutionnelle.
Plus encore, en 2019, dans une note confidentielle que le journal Les Échos avait pu consulter, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) soulignait que le travail dissimulé était responsable d’un manque à gagner compris entre 5,2 et 6,5 milliards d’euros, soit entre 1,7 % et 2,1 % des cotisations.
Ces constats appellent à un volontarisme accru face à une pratique utilisée de la part tant de Ryanair, grande entreprise condamnée cette année à payer près de 4,5 milliards d’euros à l’Urssaf, que de soixante-cinq entreprises du Lot, qui ont dû s’acquitter de 250 232 euros au même organisme.
La probité ne s’achète pas, mais les dettes que l’on a auprès de la collectivité, elles, ont un coût. Nous proposons donc d’augmenter les sanctions à l’égard de ces délinquants récidivistes, qui attentent moralement, humainement et financièrement à notre système social.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 1100 rectifié.
Mme Annie Le Houerou. Par cet amendement, nous entendons répondre, de manière évidente, à une grande préoccupation tant de notre part que de celle de la Cour des comptes, qui pointait le laxisme des pouvoirs publics envers la fraude aux cotisations patronales.
Nous estimons que le volontarisme affiché par le Gouvernement devrait se concentrer sur la fraude aux cotisations sociales patronales telle qu’elle a été décrite par ma collègue. La fraude patronale aux cotisations sociales coûte, chaque année, près de 8 milliards d’euros aux caisses de sécurité sociale, soit autant que les économies attendues par M. Macron pour sa réforme des retraites. Sur ce montant, à peine plus de 700 millions d’euros sont recouvrés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Ces amendements identiques portent sur la question des récidives de travail dissimulé. Leurs auteurs entendent majorer les sommes à redresser et, selon la constatation des infractions, vont jusqu’à les doubler.
Toutefois, l’arsenal de sanctions actuellement applicable nous paraît suffisamment dissuasif, d’autant que s’y ajoutent des mesures d’annulation des exonérations ou réductions de cotisations sociales dont bénéficie l’auteur de l’infraction ; l’article 6 tend à renforcer ces dernières pour les donneurs d’ordre récidivistes. Il existe également des sanctions pénales et des sanctions administratives.
L’arsenal étant là, nous avons donné un avis défavorable à la proposition faite par nos collègues.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Vous voulez lutter davantage contre le travail dissimulé. Évidemment, nous partageons cet objectif. Quand on parle de lutte contre la fraude sociale, on ne parle pas uniquement de lutte contre la fraude de celui qui touche indûment une prestation ; on parle aussi de lutte contre le travail informel, contre le travail dissimulé, de lutte contre des réseaux organisés, contre la fraude aux cotisations sociales par les entreprises… Il est important – vous avez raison – de le rappeler. (Mme Raymonde Poncet Monge et M. Daniel Breuiller approuvent.)
L’an dernier, 800 millions d’euros ont été recouvrés au titre du travail informel, ce qui représente une forte augmentation. Je tiens vraiment à saluer le travail de nos services pour augmenter les contrôles, pour être plus efficace quand ils ont lieu, et pour procéder au recouvrement en cas de fraude manifeste.
Vos amendements posent problème. En voulant majorer les sanctions existantes, vous écrasez, en tout cas vous supprimez, un autre dispositif de sanctions, à savoir la suppression des exonérations de cotisations sociales aux entreprises pour lesquelles une fraude manifeste et majeure a été détectée.
Je ne pense pas que tel était votre objectif ; qui plus est, je sais que, sur les travées situées à gauche de cet hémicycle, vous êtes assez opposés, d’une manière générale, aux exonérations de cotisations sociales… J’imagine, alors, que ce n’est pas votre intention que de leur permettre de continuer à en bénéficier quand elles fraudent en supprimant cette possibilité de sanction. Je précise que, en 2021, les sommes récupérées à ce titre par l’Urssaf s’élevaient à 21 millions d’euros.
Je rappelle, comme le rapporteur, qu’un dispositif de redressement avec des majorations complémentaires existe déjà. In fine, l’adoption de ces amendements identiques reviendrait à restreindre les possibilités de redressement dont nous disposons. Cela ne me semble pas l’objectif recherché.
Aussi, je demande le retrait des amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 805 et 1100 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié ter, présenté par Mme N. Goulet, M. Henno, Mmes Férat et Guidez, MM. Delcros, Delahaye et Longeot, Mme Billon, MM. Kern et Lafon, Mme Herzog, MM. Canévet, Détraigne, Levi et Janssens, Mmes Perrot, Mélot et Jacquemet, M. Duffourg et Mmes de La Provôté et Saint-Pé, est ainsi libellé :
Après l’article 41
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 83 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 est ainsi rétabli :
« Art. 83. – I. – Toute personne établie hors de France bénéficiaire d’une pension de vieillesse ou d’une pension de réversion, d’une assurance complémentaire de retraite ou d’une mutuelle servie par un régime d’assurance ou de mutuelle français doit fournir une fois par an aux organismes dont il dépend un justificatif d’existence établi par une ambassade, un poste consulaire, une mairie ou toute administration, service ou officier public de leur État d’établissement figurant sur une liste établie par le ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Cette preuve de vie est réputée valable, dès lors qu’elle est physiquement constatée par un agent diplomatique ou consulaire de la République française, légalement reconnu comme officier d’état civil.
« II. – La suspension du versement de la pension de retraite dans le cas où le bénéficiaire ne justifie pas de son existence ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai minimal d’un mois à compter de la date fixée par la caisse de retraite pour la réception du justificatif.
« III. – Les régimes obligatoires de retraite peuvent mutualiser la gestion des certificats d’existence, dans des conditions fixées par décret. Ces régimes sont alors considérés comme des administrations qui participent au même système d’échanges de données pour l’application de l’article L. 113-12 du code des relations entre le public et l’administration. »
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Différents rapports, dont celui de la Cour des comptes, mais aussi celui de Mmes Grandjean et Goulet, ont mis en avant les fraudes en matière de retraites versées à l’étranger. Le contrôle de l’existence des bénéficiaires est une nécessité ; un tel contrôle ne vaut pas qu’en matière de listes électorales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Mme Goulet va être satisfaite puisque cet amendement vise à rétablir les dispositions de l’article 83 de la loi de finances pour 2013, lequel prévoyait le contrôle de l’existence des bénéficiaires établis à l’étranger d’une pension de retraite servie par un régime français.
L’article 104 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 a actualisé les dispositions qui figurent désormais aux articles L. 161-24 à L. 161-24-3 du code de la sécurité sociale, tout en permettant aux retraités d’apporter la preuve de leur existence par le biais de données biométriques.
En conséquence, l’amendement est satisfait. Pour cette raison, nous demandons son retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. En droit, ces dispositions sont satisfaites, mais cet amendement vise à attirer notre attention sur les phénomènes de fraude aux prestations sociales, en l’occurrence aux retraites, pour des personnes qui seraient décédées, qui n’« existeraient plus », et dont la retraite continuerait à être perçue par des personnes de l’entourage.
Limiter le plus possible ce type de fraude pour l’ensemble des allocations et prestations sociales est, évidemment, l’une de nos préoccupations. Pour cette raison, un des articles qui suit est issu d’un amendement que j’ai défendu devant l’Assemblée nationale ; il vise à conditionner le versement d’allocations sociales à un compte bancaire français ou européen. Le fait de passer par un compte français ou européen est un très bon moyen de vérifier l’existence de la personne, puisque, en l’occurrence, les banques le font.
Dans ce cas, pourquoi ne le fait-on pas pour les retraites ? Ces dernières ne sont pas des prestations soumises à condition de résidence. Vous pouvez avoir travaillé toute votre vie en France et bénéficier, à ce titre, d’une retraite, mais la prendre dans un autre pays et la voir ainsi versée sur un compte étranger.
Par conséquent, il faut une politique plus ciblée pour contrôler de manière effective l’existence des bénéficiaires d’allocation retraite à l’étranger. Pour certains pays, les enjeux sont plus forts. Je ne vous apprends rien, car cela figurait dans les rapports que vous avez évoqués ; je pense notamment à certains pays du Maghreb.
Pour conclure, indépendamment du droit, satisfaisant déjà, en l’occurrence, les dispositions énoncées, l’enjeu me semble être celui du contrôle. Je viens de détacher, il y a quelques mois, des agents dans nos consulats des pays concernés pour qu’ils puissent procéder à des contrôles en convoquant des personnes sur lesquelles plane un doute. Cela fait partie des leviers qui nous permettent d’être plus efficaces dans nos contrôles.
Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Henno, l’amendement n° 7 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Olivier Henno. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié ter est retiré.
Article 41 bis (nouveau)
I. – Après l’article L. 114-10-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 114-10-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 114-10-2-1. – Lorsqu’elles sont délivrées sur un compte bancaire ou financier, les allocations et prestations soumises à condition de résidence en France et servies par les organismes mentionnés à l’article L. 114-10-1-1 sont exclusivement versées sur des comptes domiciliés en France ou dans l’espace unique de paiement en euros de l’Union européenne et identifiés par un numéro national ou international de compte bancaire. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2024.
M. le président. L’amendement n° 152 rectifié ter, présenté par Mme N. Goulet, M. Henno, Mme Guidez, MM. Janssens et Delahaye, Mmes de La Provôté et Jacquemet, M. Delcros, Mme Perrot, MM. Levi, Détraigne et Canévet, Mme Herzog, MM. Lafon et Kern, Mme Billon, MM. Longeot et Duffourg et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer la date :
1er janvier 2024
par la date :
1er juillet 2023
La parole est à M. Olivier Henno.
M. Olivier Henno. Il s’agit avec cet amendement d’anticiper l’application du dispositif de l’alinéa 3, et de l’avancer au 1er juillet 2023.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Cet amendement vise à anticiper d’un an la mise en œuvre de l’obligation de verser sur un compte domicilié en France ou dans la zone SEPA les prestations sociales soumises à condition de résidence en France.
Il serait évidemment préférable d’appliquer cette mesure le plus rapidement possible. Ainsi Mme Goulet propose-t-elle la date du 1er juillet 2023, en lieu et place du 1er janvier 2024.
La commission demande l’avis du Gouvernement sur cette proposition.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Cette disposition, proposée par Mme Goulet dans le cadre de l’article 14 de sa proposition de loi tendant à appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales, a beaucoup fait parler d’elle.
En première lecture de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale à l’Assemblée nationale, j’ai porté un amendement du Gouvernement visant à rendre obligatoire le versement des prestations sociales soumises à condition de résidence en France sur un compte bancaire français ou européen.
Cette proposition a été très commentée sur internet et les réseaux sociaux, l’écrasante majorité de ces commentaires soutenant bien évidemment cette mesure, tout en s’interrogeant, très souvent, sur l’opportunité d’attendre le 1er janvier 2024, soit plus d’un an, pour la mettre en œuvre.
Avec ce délai, nous voulions être sûrs que les caisses de sécurité sociale seraient prêtes pour mettre en place cette obligation. Il s’agissait aussi d’instaurer un délai de prévenance : les personnes bénéficiant de ces prestations sociales sur un compte étranger devaient avoir le temps d’ouvrir un compte français ou européen.
Toutefois, depuis l’adoption du PLFSS en première lecture à l’Assemblée nationale, nous avons échangé avec les caisses de sécurité sociale, qui nous ont dit qu’elles pourraient être prêtes plus tôt. J’estime par ailleurs que les personnes concernées ont eu vent de cette mesure.
J’émets donc un avis de sagesse sur cet amendement, qui prévoit d’avancer de six mois la mise en œuvre de cette obligation, en la fixant au 1er juillet 2023.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
M. René-Paul Savary, rapporteur. Monsieur le ministre, compte tenu de ces éléments, il paraît intéressant d’adopter cet amendement, afin de mettre en œuvre cette obligation le plus tôt possible.
La commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Comme j’avais rapporteur de la proposition de loi de Mme Goulet, je me réjouis, monsieur le ministre, que vous repreniez les dispositions de ce texte. En effet, le plus tôt sera le mieux !
Puisque vous n’étiez pas là lors de la discussion générale, je profite aussi de cette intervention pour vous poser une question sur les estimations que nous avons sollicitées auprès des caisses, en particulier la Caisse nationale d’assurance maladie. Nous les attendons impatiemment, et nous aurions aimé pouvoir en disposer pour ce PLFSS.
J’espère que vous pourrez accélérer la procédure pour que nous puissions avoir des estimations fondées sur un échantillonnage scientifique, au moins méthodique, afin d’éviter tous les fantasmes en matière de fraudes, à l’évidence surestimées.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. On ne peut qu’être d’accord avec cette disposition.
Je remarque tout de même que vous diligentez des moyens importants pour lutter contre la fraude sociale aux prestations, ce qui est très bien.
Toutefois, la fraude sociale aux cotisations – on devrait toujours préciser de quelle fraude sociale on parle – est neuf fois plus importante. Ma collègue l’a dit, les rendements, dans le cadre de cette lutte, sont plus que ridicules.
Monsieur le ministre, quand diligenterez-vous des moyens à la hauteur de la fraude sociale aux cotisations ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Ces prestations sont sans doute souvent de petites retraites, et l’on peut imaginer que les personnes qui les touchent rencontrent des difficultés en matière de documents administratifs.
J’estime que le délai de six mois prévu est excellent, à condition qu’une communication autour de cette mesure soit faite pour ne pas pénaliser les gens de bonne foi qui n’arriveraient pas à s’informer sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Gabriel Attal, ministre délégué. Je souhaite répondre aux différentes interventions.
C’est vrai, je n’ai pas pu participer à la discussion générale, car j’étais à l’Assemblée nationale pour présenter le PLFR. Toutefois, ma collègue Olivia Grégoire me représentait dans cet hémicycle.
Oui, nous avons besoin de mieux documenter ce sujet. Une multitude de rapports et d’études ont été réalisés. Je pense aux études réalisées par l’assurance maladie s’agissant des professionnels de santé, à celles réalisées par la Cnav s’agissant de l’Aspa, aux rapports de la Cour des comptes et aux rapports sénatoriaux.
Pour ma part, je souhaite mettre en place un comité indépendant d’évaluation de la fraude aux prestations sociales. Nous mettrons à sa disposition les moyens des administrations de Bercy et de la sécurité sociale. Nous voulons y associer des parlementaires et des personnalités qualifiées, afin de mesurer plus efficacement ce type de fraude. C’est un chantier que nous lancerons dans les prochains mois.
Madame la sénatrice Raymonde Poncet Monge, je n’oppose pas les fraudes ! Il n’y a pas une fraude plus répréhensible que les autres. Toute fraude est inacceptable ! Frauder, c’est voler, cela mine le pacte républicain et social, et les pouvoirs publics doivent donc lutter avec la même intensité contre les différents types de fraudes.
Mes services, à Bercy, sont particulièrement mobilisés contre la fraude fiscale. L’an dernier, nous avons enregistré un montant record de 13 milliards d’euros concernant les droits notifiés en matière de fraude fiscale, et 11 milliards d’euros seront recouvrés.
Nous renforçons également nos moyens grâce au numérique. Ainsi, aujourd’hui, plus de 50 % des contrôles fiscaux sont guidés par l’intelligence artificielle, grâce à des algorithmes, qui nous permettent de détecter des indices et de guider les agents vers les potentiels fraudeurs.
S’agissant de la fraude aux cotisations sociales dans le cadre du travail dissimulé, j’ai rappelé tout à l’heure l’ambition qui est la nôtre et les moyens dont nous disposons. Toutes les fraudes doivent être combattues avec vigueur !