M. Jean-Claude Requier. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Éric Gold, vous avez commencé votre propos en saluant le programme extrêmement ambitieux – 160 millions d’euros – de régénération de la ligne Paris-Clermont-Ferrand, ligne que j’ai beaucoup utilisée et donc je connais les quelques difficultés pour avoir de temps en temps cru que je voyageais dans un train de nuit alors que j’étais dans un train de jour ! (Sourires.)
Vous m’interrogez plus spécialement sur la section Thiers-Boën-sur-Lignon, qui constitue la partie centrale de la ligne Clermont-Ferrand-Saint-Étienne, et qui est classée en petite ligne ferroviaire jusqu’à Saint-Just-sur-Loire, à l’approche de l’agglomération de Saint-Étienne. Cette section, qui est la plus montagneuse, fait l’objet d’une suspension des circulations depuis 2016 ; un service de substitution par autocar a donc été mis en place.
L’accord pour la relance du ferroviaire en Auvergne qu’ont signé le 5 octobre 2020 le président du conseil régional et le Premier ministre pour la période 2020-2022 n’a en effet prévu aucun investissement sur la section Thiers-Boën-sur-Lignon. Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a annoncé au mois de février 2021 le lancement d’une étude pour expertiser les besoins et envisager une réhabilitation à un coût moins élevé que celui estimé jusqu’à présent.
C’est en effet à la région, autorité organisatrice de transports en la matière, de définir les modalités de services envisageables sur ce tronçon, qui incluent le recours à des choix technologiques innovants, alternatifs au ferroviaire lourd. Si un projet viable venait à émerger, soyez assuré, monsieur le sénateur, que l’État serait prêt à accompagner les acteurs territoriaux dans cette démarche.
Par ailleurs, les résultats de cette étude permettront d’alimenter les discussions relatives à l’élaboration du protocole d’accord État-Région sur l’avenir des petites lignes ferroviaires, qui est en cours de négociation entre l’État et la région Auvergne-Rhône-Alpes. Là encore, monsieur le sénateur, soyez assuré que, si la décision est prise et que la région suit la volonté exprimée par les habitants, l’État sera au rendez-vous.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Gold, pour la réplique.
M. Éric Gold. Monsieur le secrétaire d’État, sur les petites lignes, quelle que soit l’autorité organisatrice de la mobilité, il faut une impulsion forte de l’État. Aujourd’hui, il n’y a pas de visibilité sur ce projet et sur cette ligne.
Mme la présidente. La parole est à Mme Angèle Préville. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Angèle Préville. Le dérèglement climatique est un voyage sans retour. Le volet transport contribue très largement aux émissions de gaz à effet de serre. Le ferroviaire constitue un levier important de progrès ; il fait indéniablement partie de la solution. C’est pourquoi nous devons permettre à tous nos concitoyens d’accéder à ce mode de transport vertueux, tant pour circuler au quotidien que pour partir en vacances.
Je tiens à vous alerter sur les inquiétudes des Lotois concernant la ligne POLT, Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. En effet, il semblerait que les arrêts dans le Lot ne soient pas sanctuarisés et que certains trains s’arrêteront à Brive-la-Gaillarde, privant mon département de dessertes.
Or cette ligne est essentielle pour le Lot, surtout dans le nord, situé à une heure et demie de Cahors, où les habitants ne sont pas concernés par la future ligne TGV Toulouse-Bordeaux. Nous ne comprendrions pas d’être abandonnés, parce que ruraux.
Gagner la bataille du climat, c’est être volontariste beaucoup plus qu’aujourd’hui en matière ferroviaire ! C’est reconquérir des usagers lassés, qui se sont détournés par manque d’opportunités, d’arrêts, de tarifs adaptés et de commodités diverses. Le changement de nos habitudes est si important à réaliser qu’il nous faut une stratégie non seulement robuste, mais très fortement incitative.
L’ouverture à la concurrence ouvre de nouvelles perspectives : une société coopérative à but non lucratif dans mon département, Railcoop, s’inscrit d’emblée dans une complémentarité avec la SNCF, sur des lignes que l’on peut qualifier de délaissées. Quel soutien, lorsqu’elle rencontre des freins, alors qu’elle propose des offres plus qu’intéressantes ?
Pour le fret et les trains de nuit, le défi est immense. Un choc de l’offre s’impose. Le volontarisme de façade n’a plus sa place : rouvrir une ligne fermée il y a peu, ce n’est ni une victoire ni une solution suffisante. Quelle sera la stratégie du Gouvernement pour donner toute sa place au ferroviaire pour tous, usagers et nouveaux acteurs ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Madame la sénatrice, vous évoquez deux sujets.
Vous mentionnez l’axe structurant Paris-Orléans-Limoges-Toulouse. Les travaux de régénération représentent une enveloppe de 1,6 milliard d’euros, financée par SNCF Réseau, pour des opérations commencées en 2015 et prévues jusqu’en 2025 qui concernent les voies, les ouvrages d’art, les caténaires. Certes, cela provoque des désagréments, mais garantira à l’horizon 2025 des performances importantes pour cette ligne. Des travaux de modernisation sont réalisés en complément ; qui plus est, à l’horizon 2026, le matériel roulant sera remplacé par du matériel plus rapide et plus confortable – l’État investit pour cela 800 millions d’euros, dont 450 millions d’euros pour Paris-Orléans-Limoges-Toulouse.
Madame la sénatrice, soyez sûre d’une chose, c’est que le schéma directeur des dessertes a été validé voilà deux ans ; il n’y a donc pas d’inquiétude à avoir sur un quelconque revirement en la matière. C’est bien le schéma qui a été négocié et établi qui sera mis en œuvre en 2026.
Le projet Railcoop est véritablement une initiative inédite en France. Il réunit sous la forme d’une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) 11 000 sociétaires, ce qui est la preuve d’une prise en compte collective et citoyenne de ce sujet, notamment 180 entreprises morales, privées comme publiques. Au mois de décembre 2021, à la suite de saisines de plusieurs régions, l’Autorité de régulation des transports (ART) a donné son autorisation à Railcoop pour l’exploitation d’autres lignes.
Le Gouvernement est intervenu auprès de la SNCF afin de faciliter l’arrivée de la concurrence sur le réseau ferré national. À titre personnel, j’ai organisé des réunions avec la Caisse des dépôts et consignations pour parvenir à un consensus sur une opération qui n’avait rien d’évident, à savoir l’acquisition de matériels. Un dialogue constructif a pu s’engager entrera Railcoop et SNCF Réseau sur la mise à disposition de sillons compétitifs.
Railcoop finalise actuellement son plan de financement pour disposer des trains nécessaires à l’exploitation des lignes annoncées. C’est une excellente nouvelle pour les voyageurs, que mon secrétariat d’État a véritablement soutenue, madame la sénatrice.
Mme la présidente. La parole est à Mme Angèle Préville, pour la réplique.
Mme Angèle Préville. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, mais on attend toujours que l’État soit au rendez-vous, notamment en termes d’investissements. Les belles annonces ne peuvent rester des vœux pieux.
Mme la présidente. La parole est à M. Alain Cadec.
M. Alain Cadec. Monsieur le secrétaire d’État, les lignes de desserte fine du territoire, souvent appelées « petites lignes », représentent environ un tiers du réseau ferroviaire français. Elles accueillent 17 % du trafic des trains régionaux et constituent souvent des moyens de déplacement pour les habitants des territoires ruraux et les villes moyennes.
En 2018, le rapport Spinetta préconisait la fermeture de 200 petites lignes ferroviaires fortement déficitaires, et ce après des décennies de sous-investissements, l’État ayant privilégié – c’était normal – la rénovation des lignes à grande vitesse et délaissé la maintenance des trains express régionaux et des réseaux, ce qui allait moins de soi.
L’État a depuis promis de remettre en marche les petites lignes souvent fermées ou remplacées par des bus. Toutes ces lignes étaient jusqu’à présent exploitées par la SNCF, mais sous la responsabilité des régions, comme cela a déjà été rappelé. Le Gouvernement souhaite ainsi investir plus de 7 milliards d’euros sur dix ans pour sauvegarder certaines lignes, mais il laisse aux régions le choix de prendre en charge la rénovation des lignes traversant des territoires moins denses. Combien cela coûtera-t-il aux régions, donc aux contribuables, alors que vous avez déjà effacé 35 milliards d’euros de dettes contractées par SNCF Réseau ?
Si certaines régions ne veulent pas réexploiter certaines petites lignes parce qu’elles préfèrent privilégier le bus, d’autres sont attachées au maintien, voire à la récupération, d’un patrimoine de voies ferroviaires. Évidemment, toutes les régions n’ont pas les mêmes moyens pour développer ces plans, mais la plupart ont une stratégie de reconquête ferroviaire.
Ne peut-on trouver une solution en exploitant le réseau ferroviaire avec des enjeux de transition écologique, d’aménagement du territoire et de soutenabilité économique ? Je pense particulièrement à Taxirail, une société bretonne installée dans les Côtes-d’Armor qui vient de finaliser la version fret d’un train autonome pour passagers qu’elle a conçu dès 2017 et qui sera mis en service en 2025. Ce type de train sans chauffeur peut très certainement sauver certaines petites lignes ferroviaires déficitaires, grâce à un coût de fonctionnement considérablement réduit. Évidemment, il restera le problème de la réhabilitation des voies souvent très détériorées.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur Cadec, je sens dans votre question comme un paradoxe : vous êtes très favorable à la réouverture de ces lignes, mais, en même temps, vous vous interrogez sur le coût de cette nouvelle politique, ce qui est légitime et que je comprends tout à fait.
La rénovation du réseau dans laquelle l’État investit – 3 milliards d’euros par an – n’est pas un investissement à perte à mes yeux. Une fois celui-ci rénové, il sera possible de faire circuler plus de trains avec une fiabilité accrue. Aussi, le ferroviaire retrouvera une nouvelle attractivité et constituera plus qu’aujourd’hui une véritable alternative à l’usage de la voiture sur de nombreux axes.
À l’époque où l’on ne pouvait réserver de couchette que la veille pour le lendemain, seuls quelques rares initiés, parmi lesquels je comptais, connaissaient la ruse et réservaient la veille. Si les trains étaient quasiment vides, c’est parce que seuls les usagers habitués étaient au fait de cette méthode de réservation !
Je suis convaincu que, sur de nombreux axes, le train peut constituer une véritable solution de rechange à la voiture. À l’heure où nous cherchons des solutions qui permettent de diminuer la part des transports dans les émissions de CO2, la valorisation du réseau existant est un atout tout à fait considérable, d’autant qu’il faut prendre en compte les innovations que vous citiez, monsieur le sénateur, mais aussi celles que j’ai évoquées, au sujet de la ligne Clermont-Ferrand-Saint-Étienne, en réponse à votre collègue Gold.
C’est dans cet esprit que le Gouvernement a fait réaliser une étude sur le redéploiement des réseaux de trains Intercités de jour et de nuit. Celle-ci, qui doit être complétée par des approfondissements relatifs au mode de financement des trains nécessaires à l’équilibre économique potentiel des dessertes envisagées, met l’accent sur l’effet « réseau » qui est nécessaire pour attirer une nouvelle clientèle sur ces lignes.
Comme la sénatrice Préville et moi-même le soulignions tout à l’heure, le fait que la coopérative Railcoop envisage de développer un certain nombre de dessertes sur ces lignes montre bien que, avec un nouveau modèle économique d’exploitation, il est possible de relancer certaines lignes qui avaient été complètement abandonnées.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Monsieur le secrétaire d’État, mon collègue Stéphane Demilly étant souffrant – je lui souhaite d’ailleurs un prompt rétablissement –, il m’a prié de vous poser la question suivante.
Parler de politique ferroviaire aujourd’hui nous amène à dresser un bilan, et celui-ci est clair : selon leur territoire, nos concitoyens ne sont pas égaux face à la mobilité ferroviaire.
L’année 2021 a été particulièrement difficile pour les voyageurs TER des Hauts-de-France. Notre région est en dernière place du classement de régularité, tandis que les plaintes pour retards, annulations et dysfonctionnements ne cessent de se multiplier.
La SNCF a déployé un plan d’urgence à la fin du mois d’octobre, mais les aléas ont continué de perturber le trafic, et les bonnes résolutions ne suffiront pas.
J’ai alerté le président de la SNCF à ce sujet le 15 décembre dernier lors de son audition devant la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Il est urgent de réagir, car cette situation affecte près de 200 000 voyageurs par jour.
Assurer un maillage équilibré, c’est abord assurer la régularité des lignes existantes et répondre aux besoins de mobilité de nos concitoyens au quotidien. Si nous pouvons comprendre les difficultés liées à la crise sanitaire ou les problèmes ponctuels associés aux intempéries, nous ne pouvons pas accepter que ces problèmes soient systématiques, au point de faire des Hauts-de-France le mauvais élève récurrent des classes de régularité.
Monsieur le secrétaire d’État, nous souhaitons une politique ferroviaire susceptible de remédier aux fractures et de répondre au sentiment d’injustice éprouvé par nombre de nos concitoyens, qui peinent dans leurs transports quotidiens. Quelles mesures seront-elles prises pour répondre à ces difficultés dans nos territoires ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur Longeot, permettez-moi de m’associer aux vœux de rétablissement que vous adressez au sénateur Stéphane Demilly, qui fut d’ailleurs mon collègue à l’Assemblée nationale.
Je tiens tout d’abord à assurer M. Demilly que le Gouvernement est très soucieux de la qualité des services ferroviaires TER dans la région des Hauts-de-France. Ces derniers comptent 1 250 trains et assurent un trafic de 200 000 voyageurs par jour. C’est tout à fait considérable, et j’ai naturellement une pensée pour les usagers qui connaissent des difficultés pour se rendre à leur travail le matin et pour rentrer chez eux le soir.
Je souligne toutefois que, en l’état, en application du principe de libre administration des collectivités territoriales, l’État n’intervient ni dans l’organisation des services TER, qui relève uniquement de la compétence du conseil régional, ni dans le suivi de leur exploitation par SNCF Voyageurs.
Depuis le mois de septembre dernier, les TER de l’Oise, et plus généralement des Hauts-de-France, ont connu des difficultés de production qui ont suscité une forte dégradation de la régularité, ainsi que des suppressions de trains.
Les causes en sont pour une part externes à l’entreprise – celles-ci ont d’ailleurs augmenté de 30 % depuis septembre dernier –, telles que des bagages oubliés, des accidents de personnes, des heurts avec des animaux… D’autres sont dues à des difficultés liées à l’indisponibilité de rames endommagées ou au manque de personnel, du fait des retards pris dans les formations en raison de la crise sanitaire et des difficultés de recrutement.
Grâce au plan d’action qu’elle a présenté en octobre dernier à la région, la SNCF affiche des résultats en nette amélioration, notamment en termes de suppressions de trains. Cette dynamique doit se poursuivre grâce à un complément d’agents roulants, une homogénéisation du parc et une réindustrialisation de la maintenance.
La SNCF va également proposer un plan qualité, et elle s’engagera, au travers d’un programme précis portant sur neuf lignes, à baisser le taux de trains supprimés à 3 %, au lieu des 8,5 % observés aujourd’hui.
Par ailleurs, l’entreprise a d’ores et déjà donné son accord de principe pour le remboursement des abonnements aux usagers. Elle s’est également engagée à améliorer la communication avec ces derniers, notamment à mieux les informer en cas de retard ou de suppression de train.
En tout état de cause, il est essentiel à mes yeux qu’un dialogue constructif se poursuive entre la SNCF et la région Hauts-de-France, pour résoudre ces difficultés.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Hervé Gillé. Monsieur le secrétaire d’État, avant le mois d’avril 2022, le Gouvernement sera amené à prendre une ordonnance créant la société publique de financement pour lancer les appels d’offres du GPSO, ou Grand projet du Sud-Ouest.
La relance de la LGV Bordeaux-Toulouse par le Premier ministre, il y a quelques mois, s’inscrit dans un calendrier présidentiel qui n’échappera à personne… Quelque 4 milliards d’euros sont donc promis, sous réserve de l’engagement de l’ensemble des collectivités concernées. Ces dernières ont délibéré et se sont prononcées en faveur de l’inclusion des lignes Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax dans le projet. Une majorité d’entre elles, dont les deux régions, ont acté leur participation, mais 340 millions d’euros brut manquent encore à l’appel.
D’autres incertitudes demeurent, notamment sur le financement européen, attendu à hauteur de 20 %.
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement est-il en mesure de prendre l’ordonnance citée avant le mois d’avril ? Celle-ci est-elle d’ores et déjà transmise au Conseil d’État ? Où en sont les négociations avec l’Europe pour obtenir les 20 % de financement qui sont attendus et qui imposeront la liaison vers l’Espagne ? Quel est le calendrier ? Qu’envisagez-vous pour le franchissement de la frontière espagnole et le passage au Pays basque ?
Compte tenu de ces interrogations financières et techniques, pensez-vous que le Conseil d’État donnera in fine un avis favorable sur ce projet et sur la maquette financière ? Confirmez-vous le lancement des travaux en 2024 ? Pouvez-vous nous indiquer une date pour la signature de l’ordonnance ?
Comment, enfin, concilier le maintien et le développement des petites lignes et des lignes d’équilibre du territoire avec de tels investissements, soit plus de 14 milliards d’euros ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, je ne dispose pas à cette heure de l’ensemble des éléments de réponse à votre question.
Vous avez exprimé une inquiétude relative au financement de ce projet, indiquant qu’il manquait 340 millions d’euros. Sur ce point, je puis vous rassurer : la région Nouvelle-Aquitaine s’est engagée à compléter le financement pour la part que les collectivités territoriales n’apporteront pas finalement. Cet engagement est pris.
Vous m’interrogez par ailleurs sur la saisine du Conseil d’État relative à l’ordonnance. Permettez-moi de ne pas faire de commentaire sur l’avis que le Conseil d’État rendra : il lui appartient, et à lui seul, d’analyser les aspects juridiques et financiers de ce projet.
Au-delà de ces éléments, comme je l’indiquais tout à l’heure, j’estime qu’il y a un subtil équilibre à trouver entre les lignes à grande vitesse et les lignes d’aménagement du territoire, qui relèvent d’une desserte régionale plus fine.
C’est tout l’enjeu de ces contrats que nous signons avec les différentes régions : faire en sorte de ne pas être « dépossédés » des moyens nous permettant de financer ces projets relevant de l’intérêt régional et local. Jusqu’à présent, nous y sommes parvenus ; le GPSO en est l’exemple.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour la réplique.
M. Hervé Gillé. Monsieur le secrétaire d’État, vous m’apprenez que le conseil régional s’est engagé à financer les 340 millions d’euros brut qui manquent ! Je vérifierai cette information, qui est désormais publique, car elle ne correspond pas à ce que j’avais cru comprendre.
En tout état de cause, vous n’avez pas répondu à l’ensemble de mes interrogations. Ce débat est souvent un monologue, et je le regrette.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État. Monsieur Gillé, personne au Gouvernement n’est omniscient ! Personne n’est en mesure de vous répondre dans l’instant sur les moindres détails d’un projet ferroviaire.
Si vous souhaitez obtenir des réponses précises à vos interrogations techniques et, au demeurant, très pertinentes, je vous invite à nous les transmettre.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé.
M. Hervé Gillé. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai avisé le ministère du thème de ma question. Il ne faut pas être grand clerc pour imaginer l’ensemble des questions qui se posent autour de la mise en œuvre des axes Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax. Honnêtement, votre réponse est insuffisante et sans commune mesure avec la nature des débats que suscitent ces sujets.
Par ailleurs, confirmez-vous que ces deux axes, Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax, sont bien inclus dans le projet ? Jusqu’à maintenant, le Premier ministre s’est exprimé surtout sur l’axe Bordeaux-Toulouse.
Or les 4 milliards d’euros que j’évoquais financeront le Bordeaux-Toulouse. Il faudra donc que l’État apporte aussi un complément financier pour le Bordeaux-Dax. Pouvez-vous me confirmer que cet engagement financier sera pris ? Les parties prenantes attendent vivement cette réponse.
Mme la présidente. La parole est à M. Rémy Pointereau.
M. Rémy Pointereau. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les notions de politique ferroviaire et de maillage équilibré du territoire devraient se retrouver dans un même champ lexical. Pour bon nombre de territoires ruraux, c’est malheureusement loin d’être le cas.
Je suis élu d’un département qui attend impatiemment un tel maillage équilibré, lequel lui permettrait de sortir d’un enclavement qui plombe notre démographie, ainsi que notre tissu social et économique.
Plus concrètement, je souhaite vous interroger sur l’avenir des lignes du quotidien, que l’on appelle aussi lignes de desserte fine, pour lesquelles l’État n’a pas tenu son rôle d’aménageur du territoire.
J’en donnerai quelques exemples.
Le premier est la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT). Cette ligne historique est la colonne vertébrale des territoires du sud de la région Centre. Alors que, dans les années 1960, le Capitole y roulait à plus de 160 kilomètres par heure, sa vitesse moyenne n’est plus que de 120 kilomètres par heure, voire moins.
Nombre d’annonces ont été faites concernant cette ligne, mais les travaux n’avancent pas. Où en sommes-nous ?
Le second exemple est la ligne Bourges-Montluçon, qui est entrée en déshérence, et je pèse mes mots, alors qu’elle est par excellence la ligne de rabattement des voyageurs des territoires ruraux qui vont du nord de l’Allier vers Bourges et vers Paris.
La situation est une spirale infernale : le mauvais état oblige à moins de vitesse, ce qui entraîne beaucoup de retards, donc moins de voyageurs, donc moins de dessertes. Conséquence, la SNCF ne voit pas l’intérêt d’augmenter le nombre de dessertes et d’investir plus rapidement dans la modernisation de cette ligne, ce qui nécessite la mise en place de bus pour aller de Montluçon à Saint-Amand-Montrond, puis à Vierzon, par voie d’autoroute. Bravo pour la décarbonation ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
L’État envisage-t-il d’agir enfin sur cette ligne fine, qui est la clé du maillage équilibré de nos territoires ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Joël Giraud, secrétaire d’État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez en second lieu sur la ligne Bourges-Montluçon, que je connais bien et dont je mesure l’importance.
La régénération de cette ligne, qui sera prise en charge à 100 % par SNCF Réseau à partir de 2024, est tout à fait symbolique du plan de revitalisation des petites lignes ferroviaires engagé par le Gouvernement en février 2020, après la signature d’un protocole d’accord entre l’État et la région Centre-Val de Loire définissant la stratégie d’investissements pour les dix ans à venir.
À la fin de 2022, l’État aura débloqué 66 millions d’euros d’autorisations d’engagement en faveur des petites lignes en Centre-Val de Loire pour la période 2020-2022, soit 100 % de ses engagements pris dans le cadre de l’avenant au contrat de plan État-région du 8 juillet 2020.
L’État a notamment financé des investissements de régénération de la ligne Bourges-Montluçon à hauteur de 91,5 %, comme il s’y était engagé, soit plus de 26 millions d’euros, pour des travaux à réaliser en 2023, le complément de 8,5 % étant apporté par SNCF Réseau.
La poursuite de ce programme de régénération par SNCF Réseau à compter de 2024 permettra de maintenir à niveau les infrastructures de la ligne et, partant, la qualité des dessertes ferroviaires que vous appelez de vos vœux, ce que je comprends parfaitement tant les difficultés d’enclavement de cette région, que je connais bien, sont sérieuses.
J’en viens à l’axe structurant POLT. Les travaux de régénération de cette ligne, dont le montant s’élève à 1,6 milliard d’euros, sont financés par SNCF Réseau. Les opérations, qui ont commencé en 2015 et qui se poursuivront jusqu’en 2025, concernent les ouvrages d’art, ainsi que les caténaires. Elles permettront de garantir la performance des infrastructures à horizon de 2025.
Des travaux de modernisation sont réalisés en complément pour un montant de 385 millions d’euros, dont les deux tiers sont déjà financés par l’État, les régions desservies étant sollicitées pour le dernier tiers.
Enfin, le matériel roulant sera remplacé par un matériel neuf, plus rapide et plus confortable à l’horizon de 2026.