M. Rachid Temal. Tout à fait !
M. Jean-Raymond Hugonet. Madame la ministre, je m’adresse à vous en tant que représentante du « en même temps ». Vous devriez tenir compte du fait que, contre votre position, des voix concordantes viennent de s’exprimer de part et d’autre de l’hémicycle.
Un certain nombre d’éléments de ces amendements nous conduisent à cette conclusion évidente : ce texte n’est pas encore à la hauteur des attentes, mais il suffirait de peu pour qu’il le soit. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.
Mme Esther Benbassa. Mes chers collègues, ces débats sont riches à plus d’un titre. Cela étant, nous n’avons pas encore parlé du contexte colonial dont les harkis sont les protagonistes. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)
L’Algérie a été colonisée en 1830 : il s’agissait d’une colonie – je n’y peux rien – et, d’une certaine manière, les harkis en sont les victimes.
On ne peut pas se contenter de parler de réparation et de mémoire. N’oublions pas que, contrairement aux rapatriés, les harkis, qu’ils soient français ou pas, étaient musulmans. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Valérie Boyer. Et alors ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Quel est le rapport ?
Mme Esther Benbassa. Il convient de le souligner.
Les rapatriés n’ont pas été placés dans des camps. Ils n’ont pas suivi les mêmes itinéraires que les harkis. Malgré les immenses difficultés auxquelles ils ont été confrontés, ils ont pu s’insérer plus facilement dans la société.
Ne noyons pas le poisson : « Étaient-ils français ? » ; « Y avait-il aussi des Marocains et des Tunisiens ? » Arrêtons avec ces questions et regardons la réalité en face !
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Bien entendu, je peux comprendre l’intention des nombreux collègues signataires de ces amendements, de même que les réactions tout à fait respectables et légitimes suscitées par ces dispositions.
Pour ma part, j’insiste sur la notion de réparation. En tant que rapporteur spécial de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » – je parle sous l’autorité du président de la commission des finances et de son rapporteur général –, je tiens à mentionner le programme 169, intitulé « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».
Quels que soient les combats considérés, pour tous les représentants du monde combattant, toutes les associations patriotiques et de mémoire, tous les porte-drapeaux, pour qui nous avons aussi beaucoup de respect et de reconnaissance, ce terme de réparation est tout à fait essentiel.
Je salue également le grand travail accompli par la commission des affaires sociales, en particulier par sa rapporteure et par sa présidente. J’ai moi-même cosigné certains amendements et, j’y insiste, la notion de réparation est fondamentale.
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Au sujet de l’appartenance des harkis à la nation française, qu’il me soit permis d’évoquer la devise de la Légion étrangère : on est aussi français « par le sang versé ».
Nous savons que 60 000 à 150 000 harkis ont été massacrés après les accords d’Évian, censés garantir la paix. Sincèrement, il ne me semble pas décent de débattre aujourd’hui de la nationalité des harkis. Bien sûr qu’ils sont français : et, même s’ils ne l’étaient pas techniquement, je considère qu’il est de notre devoir de leur reconnaître cette qualité !
M. Olivier Paccaud. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Madame la présidente, mes chers collègues, la passion que ce débat suscite est bien compréhensible, mais je me dois de vous appeler à un peu plus de calme.
Tout d’abord, je n’admets pas que l’on dénigre le travail de la rapporteure en lui reprochant de piétiner l’honneur des harkis : ce n’est pas acceptable ! (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et RDSE. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.) Quand on veut défendre l’honneur des harkis – ils le méritent –, on s’efforce de tenir des propos modérés à l’égard de ses collègues. C’est la moindre des choses.
Ensuite, sur le fond, nous n’avons jamais dit que les harkis n’étaient pas citoyens français. Simplement – Mme la rapporteure l’a bien précisé –, nous rappelons que certains de ces combattants étaient originaires d’autres pays.
Mme la rapporteure a parlé avec humanité, et tout le monde a salué le travail qu’elle a mené, en particulier lors de ses auditions. C’est pourquoi les propos que j’ai entendus me paraissent inadmissibles. Ils discréditent complètement les positions de ceux qui les prononcent ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDPI. – Mme Raymonde Poncet Monge applaudit également.)
Mme Agnès Canayer. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, nous devons effectivement aller dans le sens de l’apaisement.
Ce conflit d’Algérie…
M. Guy Benarroche. La guerre d’Algérie !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. La guerre, oui, est difficile, et les mémoires sont toujours à vif soixante ans après.
C’est pourquoi nous devons travailler dans un esprit d’apaisement et rassembler au maximum les mémoires, non pas pour en faire une mémoire unique, mais pour respecter chacune d’elles, pour faire en sorte qu’elles s’inscrivent dans le champ mémoriel de cet événement historique si important pour notre pays.
Pour autant, certains propos m’écorchent les oreilles. Je le répète : j’ai toujours dit que les harkis étaient Français, qu’ils étaient citoyens français depuis toujours. C’est écrit dans le rapport Ceaux…
M. Olivier Paccaud. Mais ce n’est pas écrit dans le texte !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. Si vous n’en avez pas encore pris connaissance, je vous en recommande la lecture : il est très complet et très bien documenté, notamment pour ce qui concerne les conditions d’accueil des harkis.
Ce que je crains, avec ces amendements, c’est ce que nous ne créions – cela arrive souvent avec les lois, hélas ! – de nouvelles zones d’exclusion…
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Ah bon ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. … à l’encontre de certains, ceux qui ont combattu dans l’armée française sans être français.
Comprenez-le bien : c’est ce sujet-là qui me tient à cœur. Des Tunisiens et des Marocains ont combattu aux côtés de l’armée française.
M. Rachid Temal. Combien étaient-ils ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. Ils n’étaient peut-être pas très nombreux, mais ils le sont suffisamment pour obtenir eux aussi réparation.
Il ne faut pas que la loi en vienne à exclure : voilà ce qui m’importe. Il est préférable de simplifier les choses, de donner de la lisibilité au texte, de sorte que les droits de chacun soient respectés.
Je ne voudrais pas que, dans quelque temps, l’on en soit réduit à déposer un nouveau projet de loi pour avoir exclu certains supplétifs de nos armées, ces Marocains et ces Tunisiens qui ont combattu pour la France.
Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Et alors ?
M. Olivier Paccaud. Ils ne demandent pas la nationalité !
M. Rachid Temal. Sous-amendez !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. C’est à ce niveau que je souhaiterais porter le débat.
Voilà pourquoi je ne suis pas favorable à ces amendements. Notre intention n’est pas du tout de blesser les harkis et leurs familles. Nous faisons tout, au contraire, pour regarder leur situation et leur histoire avec la plus grande humanité et la plus grande écoute possible.
Je puis vous assurer que j’ai contacté et rencontré les représentants des associations. Je m’y emploie depuis cinq ans. Je les connais très bien et, si je ne les connais pas toutes, j’en connais beaucoup. Leurs témoignages sont profondément touchants et troublants.
Cette histoire, que les Français connaissent encore mal, doit être abordée avec beaucoup de dignité au cours de nos débats, mais aussi avec pragmatisme, afin que ce texte de loi soit utile. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Après avoir suivi les travaux de la commission, je n’avais pas l’intention d’intervenir en séance.
Mes chers collègues, nous avons tous les mêmes préoccupations, même si le sujet est certainement plus sensible pour certains que pour d’autres.
Personnellement, je suis rapatrié d’Algérie et ma famille a été directement frappée par la guerre. Ainsi, quand on me parle des événements de la rue d’Isly, je me souviens de ma cousine germaine, qui, lors des mitraillages, avait reçu un cadre sur la tête.
Nous sommes repartis de rien. Comme d’autres, j’ai été élevé dans la culture des événements d’Algérie, qui restent traumatisants : pour ma part, je n’aime pas en parler. Nous avons aussi grandi dans le souvenir des harkis, de ces hommes qui se sont battus à nos côtés. Ils font partie de la France : notre commission ne l’a jamais mis en doute.
Il nous faut retrouver du calme et de la sérénité face à ces événements, qui sont toujours aussi marquants pour le peuple français, et plus encore pour ceux qui y ont participé, de part et d’autre de la Méditerranée.
Personnellement, je fais confiance au travail de la commission. En admettant un certain nombre de faits, nous accomplissons une avancée. Par ailleurs, au-delà des nuances de ces amendements, nous nous retrouvons tous sur un point : la reconnaissance que nous voulons accorder aux harkis.
Je vous invite à suivre l’avis de Mme la rapporteure. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour explication de vote.
M. Laurent Burgoa. Après Mme Deroche et M. Savary, je tiens à apporter mon soutien à Mme le rapporteur.
Marie-Pierre Richer a réalisé un important travail d’auditions. Elle a été à l’écoute de toutes et tous. Certains propos me paraissent particulièrement blessants, d’autant plus dans cet hémicycle, censé être celui des sages…
Je suis membre de la commission des affaires sociales et élu d’un département où vivent de nombreuses familles de harkis. Je rejoins M. Savary : jamais personne n’a prétendu que les harkis n’étaient pas français. Nous avons toujours dit l’inverse !
Sur un sujet si sensible, efforçons-nous de faire preuve de responsabilité : pour ma part, je suivrai l’avis de Mme le rapporteur. (Bravo ! et applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC. – M. Martin Lévrier applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, pour explication de vote.
M. Bernard Buis. Aujourd’hui, notre rôle n’est pas de diviser les harkis. Nous devons soutenir l’excellent travail de Mme la rapporteure et nous suivrons l’avis de la commission.
Jamais nous n’avons dit, nous non plus, que les harkis n’étaient pas français. Pour nous, ils sont bel et bien français ; nous avons toujours été à leurs côtés et nous continuerons de l’être. (Applaudissements sur des travées du groupe UC.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, avant de procéder aux votes, je précise que, si l’amendement n° 39, l’amendement n° 2 rectifié, l’amendement n° 14 ou l’amendement n° 31 rectifié était adopté, les autres amendements n’auraient plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 39.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures dix, est reprise à dix-neuf heures quinze.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
Article 1er bis
Est instituée une journée nationale d’hommage aux harkis, aux moghaznis et aux personnels des diverses formations supplétives et assimilés en reconnaissance des sacrifices qu’ils ont consentis du fait de leur engagement au service de la France lors de la guerre d’Algérie. Cette journée rend également hommage aux personnes qui leur ont apporté secours et assistance à l’occasion de leur rapatriement et de leur accueil sur le territoire français.
Cette journée est fixée au 25 septembre.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Buis, sur l’article.
M. Bernard Buis. Le samedi 25 septembre 2021, les harkis ont été doublement honorés dans mon département de la Drôme, le matin par une cérémonie au carré militaire de Valence, l’après-midi lors de l’inauguration d’une plaque commémorative au hameau de forestage de Beaurières, commune voisine de la mienne.
Honorer les combattants, c’est bien ; mais il convient aujourd’hui d’aller plus loin, ce que ce projet de loi va enfin permettre.
Ce texte est nécessaire pour les harkis ainsi que pour leurs descendants, qui seront accompagnés par l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) et la commission nationale. Il faut le rappeler : les enfants et petits-enfants de harkis sont également au cœur de cette histoire.
Mes chers collègues, je tiens à vous citer les mots de Rekia Danet, arrivée enfant à Beaurières, qui décrit ainsi son hébergement : « On est arrivés fin 1962 : c’était l’hiver ; nous étions logés dans des tentes meublées avec de gros poêles à bois, des lits en fer et des tables de l’armée.
« Quelques jours plus tard, il s’est mis à neiger ; la neige nous arrivait aux genoux et ce n’était pas évident, car il fallait prendre le chemin de l’école, distante de trois kilomètres. Ma petite sœur, en voyant la neige, a dit à ma mère que c’était comme du sable mais que c’était froid. »
Ce froid glaçant a pu, pour certains, être couplé à de l’indifférence, mais – je puis vous le dire d’expérience – pas partout.
La chaleur humaine était présente dans la Drôme. À Beaurières et dans les communes environnantes, la solidarité s’est exercée sous la houlette d’André Reynaud, maire du village, qui n’hésitait pas à faire le tour des maisons et des commerces pour que chacun aide à porter vêtements et nourriture.
Je me félicite que, lors de l’examen du texte par l’Assemblée nationale, l’article 1er bis ait étendu la journée nationale d’hommage aux harkis à toutes les personnes qui leur ont porté secours et assistance. Ces dernières font honneur à la République, là où malheureusement l’État a failli.
À Beaurières, les enfants étaient scolarisés ensemble au sein de l’école de la République, dans deux classes supplémentaires créées ex nihilo grâce à l’installation de préfabriqués dans la cour. Élisabeth et Pascal Reynaud, les enfants du maire, nous rappellent régulièrement qu’ils étaient tous assis sur les mêmes bancs et qu’ils jouaient ensemble sans distinction.
La chaleur humaine est grande, mais elle ne peut remédier à tout. Ce projet de loi portant reconnaissance de la Nation représente, notamment grâce à la réparation qu’elle instaure, un apport indéniable. (M. François Patriat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Boyer, sur l’article.
Mme Valérie Boyer. Madame la rapporteure, il s’agit effectivement d’un sujet difficile, qui ravive les plaies de beaucoup d’entre nous dans cet hémicycle pour toutes les raisons déjà exposées.
Si nous déposons des amendements, ce n’est pas pour aller à l’encontre de votre excellent travail, mais pour faire avancer le débat et faire valoir nos positions. Certains d’entre nous défendent ces sujets depuis longtemps, pour ne pas dire depuis toujours : nous sommes nés avec, ce n’est pas un choix ! C’est ainsi que les choses se sont passées.
Nous n’allons pas à l’encontre de votre travail ; bien au contraire, nous nous efforçons de le compléter. Tel est le sens de ma prise de parole sur cet article.
Je souhaiterais que ce texte permette à la République française de reconnaître la barbarie et l’ampleur des massacres commis après le 19 mars, notamment ceux de la rue d’Isly ou ceux d’Oran, le 5 juillet, et de parler des disparus à la population française.
Voilà ce qui s’est passé : des militaires, des civils engagés à nos côtés, des harkis, des femmes et des enfants ont été massacrés.
À ce propos, Jean-Jacques Jordi a déclaré : « De 1957 jusqu’aux accords d’Évian, il y a eu à peu près 330 disparus civils. On pouvait s’attendre à ce qu’après les accords d’Évian ce chiffre baisse. Or, entre les accords d’Évian et la date de l’indépendance, le 5 juillet 1962, c’est-à-dire en quelques semaines, il y en a eu plus de 600, donc deux fois plus en quatre mois qu’en six ans de guerre. »
Je tiens à vous parler d’un autre événement extrêmement important : la fusillade de la rue d’Isly, cette fusillade unilatérale qui a duré douze minutes. La France n’a pas respecté le cessez-le-feu : le bilan officiel fut de 49 morts et 200 blessés ; toutes les victimes furent des civils, on ne déplora pas un mort chez les militaires.
Les civils n’ont pas pu enterrer leurs morts dignement ; les obsèques religieuses ont été interdites ; les corps furent convoyés directement au cimetière par camions militaires au jour et à l’heure choisis par les autorités.
Il s’agit d’un événement d’une gravité exceptionnelle, de la répression d’État la plus violente que la France ait jamais orchestrée, de la manifestation de rue la plus meurtrière depuis la Commune.
Permettez-moi de parler d’un dernier événement…
Mme la présidente. Merci, ma chère collègue !
Mme Valérie Boyer. … qui mériterait la reconnaissance de notre nation : les massacres d’Oran du 5 juillet 1962. En quelques heures…
Mme la présidente. Ma chère collègue, votre temps de parole est épuisé.
La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Je dirai quelques mots de cet article 1er bis, consacré à la journée nationale d’hommage aux harkis.
Bien entendu, je salue le travail de la commission des affaires sociales, qui s’appuie sur les auditions des différentes associations patriotiques et de mémoire.
Il est fait directement référence au décret du 31 mars 2003, qui a institué cette journée nationale d’hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives.
L’hommage serait également rendu aux personnes ayant apporté secours et assistance à l’occasion de leur rapatriement et de leur accueil sur le territoire français. La date retenue est celle du 25 septembre, date à laquelle des cérémonies sont déjà organisées dans nos départements respectifs, en métropole et outre-mer, sous l’autorité des représentants de l’État et avec la participation des élus, des porte-drapeaux et des représentants des associations patriotiques et de mémoire.
Ce décret du 31 mars 2003, il faut le rappeler, a été pris sur l’initiative du président Jacques Chirac, et cette date a une portée hautement symbolique, comme, d’ailleurs, toutes les cérémonies dites « nationales et locales », pour lesquelles nous avons aussi beaucoup de respect.
N’oublions pas, enfin, que deux autres dates existent, le 5 décembre et le 19 mars, cette dernière étant la journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.
Je soutiendrai donc, bien entendu, cet article 1er bis.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot, sur l’article.
M. Philippe Folliot. Les grands peuples se reconnaissent à leur capacité à analyser lucidement leur histoire dans ce qu’elle a de plus beau, mais aussi, parfois, de plus tragique.
C’est ce qui nous rassemble ici ce soir, mes chers collègues : la nécessité d’inscrire un certain nombre d’éléments dans la loi, pour réparer une injustice, flagrante, envers ceux qui ont fait le choix de défendre la France dans une période particulièrement difficile et troublée, alors que notre pays connaissait une forme de guerre civile.
Il me paraît essentiel – bien entendu, je voterai cet article 1er bis – d’instaurer une journée spécifique d’hommage à nos compatriotes harkis, vis-à-vis d’eux, de leurs descendants et de toutes celles et tous ceux qui se sont engagés pour les soutenir dans cette période extrêmement dure.
Bien entendu, d’autres journées nationales, que ce soit le 5 décembre ou le 19 mars, nous ramènent directement à ces événements d’Algérie. Elles méritent aussi respect et attention.
Toutefois, il importe que nous puissions, dans une forme de calme et de sérénité, dire ce que nous pensons au regard de ce qui s’est passé. À cet égard, je salue le travail de notre rapporteure et de toutes celles et tous ceux qui ont fait en sorte que nous puissions débattre de ce sujet et soutenir cette mémoire des harkis.
Mme la présidente. L’amendement n° 50, présenté par M. Bourgi, Mmes Poumirol et Lubin, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Le Houerou, Meunier et Rossignol, MM. Temal, Stanzione, Michau, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1, première phrase
Après le mot :
consentis
insérer les mots :
et des sévices qu’ils ont subis
La parole est à M. Hussein Bourgi.
M. Hussein Bourgi. Cet amendement tend à compléter l’article 1er bis, auquel, naturellement, nous souscrivons tous.
Dans cet article, il est fait mention des sacrifices que les harkis ont consentis. Personne n’en disconvient, mais il est juste de rappeler que des familles de harkis ont été victimes de représailles, d’exécutions sommaires et de sévices. Ces personnes n’étaient pas engagées dans l’armée française ; elles ont été prises pour cible simplement parce qu’elles étaient liées à un harki qui, lui, était un soldat engagé dans l’armée française.
Chaque année, lorsque je participe aux cérémonies commémoratives, je rencontre des harkis, présents sur le sol français, qui me racontent comment leur père et leur mère ont été exécutés chez eux, dans leur maison – des personnes âgées, assassinées au seul motif que leur fils s’était engagé dans l’armée française.
Le fils avait voulu consentir des sacrifices, mais ses parents n’avaient absolument rien demandé… C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose de les inclure symboliquement dans la mémoire collective nationale, dans l’hommage rendu par la Nation aux harkis et à leur famille, leurs femmes, leurs enfants, mais aussi leurs parents.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Pierre Richer, rapporteure. Cet amendement vise à élargir l’objet de la journée nationale d’hommage aux harkis, aux moghaznis et aux autres personnels des diverses formations supplétives et assimilés en intégrant la reconnaissance, non seulement des sacrifices qu’ils ont consentis du fait de leur engagement au service de la France, mais également des sévices qu’ils ont subis pour cette même raison.
Il s’agit là d’une proposition pertinente. Il est indéniable que des milliers d’anciens supplétifs ont subi des persécutions et des massacres en raison de leur soutien à la cause de la France.
C’est pourquoi, sans conteste, j’émets un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, les sévices que vous évoquez sont bien réels – c’est, dans toute sa gravité, la triste et douloureuse réalité historique –, et personne ne veut bien sûr les minimiser.
La journée nationale d’hommage vise à honorer l’engagement des harkis au service de la France et à rassembler le peuple français autour de cette mémoire. La mention des sévices que ces derniers ont pu subir ou des souffrances qu’ils ont connues dans leur chair est, en réalité, couverte par l’évocation des sacrifices consentis au service de notre pays ; une guerre est en effet toujours douloureuse.
Néanmoins, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er bis, modifié.
(L’article 1er bis est adopté.)
Après l’article 1er bis
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 12 rectifié est présenté par Mme V. Boyer, M. Regnard, Mme Muller-Bronn, MM. Meurant, Daubresse et Longuet, Mme Dumont et MM. Sido et Le Rudulier.
L’amendement n° 34 rectifié ter est présenté par MM. Tabarot, Mandelli, Hingray, Favreau et Chaize, Mme Herzog, MM. Rietmann, Somon, Grosperrin, Paccaud et J.M. Boyer, Mme Demas et M. J.B. Blanc.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 2012-1361 du 6 décembre 2012 relative à la reconnaissance du 19 mars comme journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc est abrogée.
La parole est à Mme Valérie Boyer, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié.