M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Madame la sénatrice, je vais abonder dans votre sens, et prendre l’excellent cas des PPNG comme l’exemple à la fois d’une forme d’erreur, mais aussi d’une correction apportée.
Vous ne siégiez pas dans les majorités précédentes, madame la sénatrice, mais l’ensemble des majorités – je nous y inclus –, au début de ce quinquennat, a commis l’erreur de considérer que la numérisation était inéluctable, qu’elle se ferait, que tout le monde s’y convertirait, et que tout se passerait bien.
Comme l’a rappelé la sénatrice Lavarde, alors que nous avions initialement promis 100 % de numérisation, nous avons ralenti. Nous avons en effet considéré, au vu des problèmes rencontrés par l’ANTS en matière de délivrance de permis de conduire, qu’il fallait s’occuper de la qualité avant de s’occuper de la quantité. La numérisation va dans le sens de l’Histoire, mais elle doit être accompagnée pour tous ceux qui ne se sentent pas capables d’utiliser des outils numériques.
Il faut donc réinjecter de l’humain. D’où la mise en place des conseillers numériques France services et d’une approche, au sein de l’ANTS, partant de la qualité de service et de la capacité à répondre à la demande des usagers pour aboutir à une réduction des délais d’attente et à une augmentation de la satisfaction des usagers. Avons-nous fait le tour de la question de la qualité de l’expérience des usagers dans leur relation au service public ? Non. Mais je peux vous assurer que l’approche de la numérisation des services publics s’est transformée, et part désormais de la qualité avant de se préoccuper de quantité.
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.
M. Vincent Capo-Canellas. Nous parlions tout à l’heure de notre addiction collective à la dépense publique.
Je voudrais profiter de ce débat, qui permet de nous échapper un peu des contraintes du court terme, pour que nous nous interrogions sur une double incapacité collective : incapacité, d’une part, à créer de l’adhésion autour de la nécessité de maîtriser nos dépenses et notre dette ; incapacité, d’autre part, à faire partager le besoin de compétitivité de nos entreprises. Cela se manifeste d’ailleurs par le déficit de notre balance extérieure ; cette donnée est rarement évoquée.
Les deux notions jumelles de déficit budgétaire et de déficit de la balance des échanges apparaissent souvent trop lointaines dans le débat public ; on évite de parler du solde budgétaire. Pourtant, elles symbolisent les deux faces de l’endettement « à la française ». Le déficit budgétaire entraîne le déficit extérieur, qui est financé par des capitaux extérieurs, entraînant ainsi la perte de contrôle de notre tissu productif.
Pourquoi ne pas exprimer plus clairement le déficit ? Quand on sait que les recettes du budget de l’État sont de 236 milliards d’euros en 2022 et que les dépenses sont de 391 milliards d’euros – cela représente donc un déficit de 155 milliards d’euros –, on comprend que près de 40 % des dépenses sont financées par le déficit et la dette et que cela ne peut pas durer.
Dans la communication financière, on a pris l’habitude de s’exprimer en pourcentage du PIB. Sans doute s’agit-il d’éviter d’inquiéter les marchés. Mais nous finissons par nous anesthésier nous-mêmes et par créer une forme d’indifférence au déficit. Nous gagnerions à décrire la réalité pour susciter une prise de conscience qui nous permettrait de réformer plus facilement.
Idem sur le commerce extérieur : son caractère structurellement déficitaire montre que nous sommes dépendants, et les entreprises étrangères rachètent du patrimoine national.
Monsieur le secrétaire d’État, va-t-on enfin envisager de communiquer les vrais chiffres et de les mettre dans le débat public, afin de favoriser des réformes structurelles ayant pour effet de réduire les dépenses ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur Capo-Canellas, en un sens, vous avez raison : les volumes exprimés en milliards d’euros sont peut-être plus parlants que les pourcentages. Cela étant, quand on a les chiffres du PIB français, le calcul est assez simple pour connaître le déficit et le solde budgétaires.
Le déficit public s’élève à 8,2 %, soit 200 milliards d’euros, en 2021 – il est même possible qu’il soit inférieur si la croissance est meilleure que prévu –, et il sera de 5 %, soit 130 milliards d’euros, en 2022.
Si vous voulez le fond de ma pensée, je doute que les volumes en millions ou en milliards parlent encore à qui que ce soit, en particulier après la crise.
Par conséquent, la rigueur budgétaire et la réduction de la dette relèvent moins d’une question sémantique ou rhétorique – le problème n’est pas de savoir s’il faut s’exprimer en pourcentages, en milliards, en déficit structurel ou faire des comparaisons internationales – que du bon sens et d’un souci de bonne gestion. Et cela doit s’accompagner d’un exercice de pédagogie.
Bien entendu, et je me permets là une adresse à la Haute Assemblée, quand on parle de réduction des déficits publics, il faut préciser quelles dépenses on souhaite diminuer. Car si j’entends beaucoup d’apostrophes sur la nécessité de baisser les dépenses, je n’ai pas forcément saisi quels secteurs la Haute Assemblée s’accordait à cibler en priorité dans un objectif de réduction drastique du déficit public français.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire.
M. Bernard Fialaire. Monsieur le secrétaire d’État, l’avantage de passer en dernier est que beaucoup de questions que l’on aurait aimé poser l’ont déjà été !
Nous n’avons pas pu discuter du projet de loi de finances, ce qui est regrettable, d’autant que nombre de sujets pourraient encore être abordés. Je déplore une nouvelle fois la manœuvre un peu coupable qui ne grandit ni notre assemblée ni l’image que nos concitoyens peuvent avoir de notre fonction.
Ainsi que cela a été souligné, la dette est un enjeu majeur, même si la situation est un peu paradoxale, avec une augmentation en volume et une baisse de la charge du fait des taux d’intérêt.
La question qui nous inquiète est bien de savoir à qui nous empruntons et de qui nous dépendons.
J’ai entendu que vous comptiez sur la relance économique pour le remboursement. Il faut le savoir, les collectivités peuvent participer à la reprise par leurs investissements ; les infrastructures qu’elles créent permettent ensuite le développement économique.
La réforme de l’État est effectivement importante. Mais il faut une véritable révolution culturelle. Les élus locaux, ceux que nous représentons, doivent être aidés par les services de l’État, au lieu d’être constamment bloqués. Quand on présente un dossier, on doit pouvoir percevoir une aide, et non pas faire systématiquement l’objet de refus ou de manœuvres ayant pour effet, sous des prétextes divers, de retarder les investissements et les projets que l’on veut mettre à disposition de nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Cédric O, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Monsieur le sénateur, je vous rejoins : dans la dynamique d’investissement public, de réforme et de projection vers un fonctionnement institutionnel et administratif plus moderne, la question de la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales, de leur capacité à mettre en œuvre des politiques publiques, est centrale. Au risque de me répéter, le déploiement de la fibre me semble être un exemple de coopération entre les deux.
Ma conviction est que nous devons nous concentrer moins sur le débat idéologique entre décentralisation ou non que sur l’objectif d’efficacité et de déploiement des politiques publiques.
À cet égard, le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, qui est en cours d’examen, permet des avancées. Je pense par exemple à la gestion des routes, alors qu’on observe une recentralisation du RSA, en accord avec certaines collectivités. C’est bien la preuve qu’il n’y a pas une démarche à sens unique qui emporterait l’adhésion de tout le monde. Il faut faire des adaptations entre décentralisation, déconcentration et différenciation. D’ailleurs, l’efficacité de l’État central dans sa capacité à nouer localement des partenariats avec les collectivités territoriales est également un enjeu important.
Nous avons évidemment besoin de déconcentrer et de décentraliser – il faut faire les deux –, de laisser plus de latitude au terrain et de contrôler un peu moins par la norme et un peu plus par la délégation.
M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur le thème : « Situation des comptes publics et réforme de l’État. »
11
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 7 décembre 2021 :
À quatorze heures trente et le soir :
Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi portant mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires ;
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, interdisant les pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne (texte de la commission n° 239, 2021-2022).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinq.)
nomination de membres d’une mission d’information et d’une commission d’enquête
Aucune opposition ne s’étant manifestée dans le délai d’une heure prévu par l’article 8 du règlement, la liste des candidatures préalablement publiée est ratifiée.
Mission d’information sur le thème « La judiciarisation de la vie publique : une chance pour l’état de droit ? Une mise en question de la démocratie représentative ? Quelles conséquences sur la manière de produire des normes et leur hiérarchie ? »
MM. Philippe Bas, Bruno Belin, Étienne Blanc, Jean Baptiste Blanc, Philippe Bonnecarrère, Mme Alexandra Borchio Fontimp, M. François Noël Buffet, Mmes Agnès Canayer, Cécile Cukierman, M. Alain Duffourg, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Jean-Luc Fichet, Mme Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Stéphane Le Rudulier, Jean-Yves Leconte, Pascal Martin, Franck Menonville, Claude Raynal, Alain Richard, Jean-Yves Roux, Mmes Elsa Schalck, Dominique Vérien et Mélanie Vogel
Commission d’enquête sur la situation de l’hôpital et le système de santé en France
Mmes Marie-Christine Chauvin Laurence Cohen, Catherine Conconne, Catherine Deroche, Jocelyne Guidez, Véronique Guillotin, M. Bernard Jomier, Mmes Sonia de La Provôté, Florence Lassarade, M. Pierre Médevielle, Mme Marie Mercier, M. Alain Milon, Mmes Annick Petrus, Raymonde Poncet Monge, M. Jean Sol, Mme Nadia Sollogoub, MM. Laurent Somon, Dominique Théophile et Jean-Marc Todeschini.
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER