Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement est extrêmement attentif à ce que les personnes transgenres ne subissent aucune discrimination dans leur accès aux soins.
Madame la rapporteure, le changement de mention du sexe à l’état civil ne fait pas obstacle à ce que les personnes transgenres puissent bénéficier de leurs droits, notamment en matière d’exonération de participation pour les frais liés à la contraception.
Il ne paraît pas nécessaire d’inscrire cette doctrine dans la loi, car les caisses d’assurance maladie l’appliquent déjà. Cet amendement est satisfait, mais le Gouvernement sollicite la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, dans la mesure où il est satisfait.
Mme la présidente. Madame Raymonde Poncet Monge, l’amendement n° 646 est-il maintenu ?
Mme Raymonde Poncet Monge. N’étant pas la première signataire de cet amendement, je préfère le maintenir, madame la présidente. Reste que je me réjouis qu’il soit satisfait.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 528 rectifié, présenté par Mme Rossignol, M. Bourgi, Mmes Jasmin, Poumirol et Van Heghe, M. P. Joly, Mme Meunier, M. Leconte, Mme Blatrix Contat, M. Redon-Sarrazy, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Tissot, Cardon et Temal, Mmes Conconne, Féret et Carlotti, M. Cozic, Mme M. Filleul, MM. Antiste et Durain et Mme Le Houerou, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité d’étendre la prise en charge de toutes les contraceptions féminines pour les femmes.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Je prends la parole au nom de Mme Rossignol, qui n’a pas le don d’ubiquité… (Sourires.)
Nous avons examiné, voilà quelques jours, dans cet hémicycle, une proposition de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle, une juste cause qui a globalement fait l’unanimité sur l’ensemble des travées, bien que nous ne soyons pas toujours d’accord sur les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir ni sur le niveau d’ambition politique requis. Pour notre part, nous considérons que le texte n’allait pas assez loin.
Même si son objet se réduit à une demande de rapport, cet amendement vise concrètement l’égalité économique entre les femmes et les hommes.
La charge contraceptive, qu’elle soit mentale ou financière, pèse davantage sur les femmes. Il est vrai que celles-ci sont les premières concernées par la grossesse, donc les premières à devoir garantir leur droit à disposer librement de leur corps. Cependant, le coût de la contraception ne doit-il reposer que sur elles, nonobstant les méthodes contraceptives prises en charge par la sécurité sociale ?
Cette injustice financière supplémentaire qui pèse sur les épaules des femmes n’est pas une fatalité. Cet amendement vise donc à demander au Gouvernement l’opportunité d’étudier la gratuité de toutes les contraceptions.
Mme la présidente. L’amendement n° 526 rectifié, présenté par Mme Rossignol, M. Bourgi, Mmes Jasmin, Poumirol et Van Heghe, M. P. Joly, Mme Meunier, M. Leconte, Mme Blatrix Contat, M. Redon-Sarrazy, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Tissot, Cardon et Temal, Mmes Conconne, Féret et Carlotti, M. Cozic, Mme M. Filleul, MM. Antiste et Durain et Mme Le Houerou, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité d’étendre la prise en charge de toutes les contraceptions féminines pour les femmes de moins de 26 ans.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement, déposé également par Laurence Rossignol, vise les femmes de moins de 26 ans.
Pour de nombreuses femmes, le choix d’une méthode de contraception adéquate relève du parcours de la combattante, entre implant, dispositif intra-utérin, anneau, patch… Les effets que l’on qualifie de secondaires ne le sont pas pour les femmes concernées.
Au terme de ce parcours, le fait que la méthode contraceptive adaptée soit finalement payante – elle est d’ailleurs parfois très onéreuse – représente une injustice et une inégalité. Pour les femmes qui en ont les moyens, la contraception est une liberté ; pour les autres, c’est trop souvent la résignation qui l’emporte. Seule la contraception remboursée n’a pas de prix ; les effets secondaires, eux, pèsent au quotidien.
Il s’agit donc de garantir un choix éclairé, accompagné bien sûr d’un avis médical, et libéré de toute pression financière.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’amendement n° 528 rectifié a pour objet de demander au Gouvernement un rapport sur l’extension de la gratuité de la contraception à toutes les femmes sans condition d’âge. Conformément à sa position constante sur de telles demandes, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 526 rectifié a pour objet de demander au Gouvernement un rapport sur l’extension de la gratuité pour toutes les contraceptions pour les femmes de moins de 26 ans. La direction générale de la santé a confirmé que seront concernés par la mesure de gratuité tous les produits contraceptifs pris en charge par l’assurance maladie, qu’il s’agisse des pilules de première et deuxième générations, des dispositifs intra-utérins, des implants, des diaphragmes ou des contraceptifs d’urgence.
La demande de rapport ne semble donc pas justifiée. C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Même avis, pour les mêmes raisons.
Au risque d’être un peu redondant, je rappelle que nous avons tous le souci de garantir l’accès aux différentes méthodes de contraception. C’est d’ailleurs tout le sens de cet article.
Je confirme que sont concernées les méthodes remboursables par l’assurance maladie. Elles sont diverses – elles viennent d’être énumérées, mais je les rappelle à mon tour : pilules, diaphragmes, implants, dispositifs intra-utérins –, ce qui permet de garantir un libre choix.
Comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, la décision de prise en charge de produits de santé est tranchée au regard des dossiers déposés par les entreprises, à la suite d’une évaluation de la Haute Autorité de santé. Si certaines méthodes de contraception ne sont pas prises en charge, ce qui les empêchera bénéficier de l’extension, c’est parce que le service rendu supplémentaire n’a pas été prouvé. C’est le cas, par exemple, à ce stade, des pilules de troisième génération.
Mme Michelle Meunier. Elles coûtent plus cher !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. La preuve d’un service rendu supplémentaire n’a pas été apportée. Or ce critère régit l’appréciation et l’évaluation de l’ensemble des médicaments et dispositifs médicaux.
Mme la présidente. Madame Le Houerou, les amendements nos 528 rectifié et 526 rectifié sont-ils maintenus ?
Mme Annie Le Houerou. Non, je les retire, madame la présidente.
Mme la présidente. Les amendements nos 528 rectifié et 526 rectifié sont retirés.
L’amendement n° 527 rectifié, présenté par Mme Rossignol, M. Bourgi, Mmes Jasmin, Poumirol et Van Heghe, M. P. Joly, Mme Meunier, M. Leconte, Mme Blatrix Contat, M. Redon-Sarrazy, Mmes Conway-Mouret et Monier, MM. Tissot, Cardon et Temal, Mmes Conconne, Féret et Carlotti, M. Cozic, Mme M. Filleul, M. Antiste et Mme Le Houerou, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…. – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité d’étendre le remboursement des préservatifs masculins et leur prescription par les médecins et sages-femmes aux préservatifs féminins.
La parole est à Mme Annie Le Houerou.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement, dont Laurence Rossignol est encore la première signataire, a pour objet de demander au Gouvernement de présenter devant le Parlement un rapport sur l’opportunité d’étendre le remboursement des préservatifs masculins et leur prescription par les médecins et sages-femmes aux préservatifs féminins.
Il est inspiré d’une recommandation du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, dans son avis du 16 avril 2021 intitulé Préservatif féminin : vers un remboursement intégral pour une plus grande utilisation. Il vise à proposer au Gouvernement de présenter devant le Parlement un rapport sur l’opportunité de rembourser les préservatifs féminins à hauteur de 60 %, comme les préservatifs masculins.
Au contraire du préservatif masculin, largement promu et distribué, dont certains modèles sont remboursés sur ordonnance, le préservatif féminin, qui est méconnu, se vend à des tarifs entre trois à quinze fois plus élevés. S’il est vendu sans ordonnance dans certaines pharmacies, il demeure onéreux et difficile à trouver. Prévoir une possibilité de se faire prescrire ces préservatifs par les médecins et sages-femmes serait bénéfique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Comme la commission, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Il est pertinent de soulever ce point et d’étudier plus avant l’opportunité d’une prise en charge des préservatifs internes, dits féminins. Vous l’avez mentionné, madame la sénatrice, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes en a recommandé le remboursement. D’ailleurs, des travaux exploratoires et des réflexions sont menés sur ces questions dans le cadre des actions de la deuxième feuille de route de déclinaison de la stratégie nationale de santé sexuelle, qui est en cours de finalisation. Cette demande de rapport n’est donc pas pertinente.
Mme la présidente. Madame Le Houerou, l’amendement n° 527 rectifié est-il maintenu ?
Mme Annie Le Houerou. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 527 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 44, modifié.
(L’article 44 est adopté.)
Après l’article 44
Mme la présidente. L’amendement n° 753 rectifié, présenté par MM. Iacovelli et Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 44
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur l’information de la population à la contraception ainsi que sa prise en charge par les lois de financement de la sécurité sociale.
La parole est à M. Xavier Iacovelli.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
Santé publique France publie d’ores et déjà régulièrement des baromètres santé qui fournissent des informations sur les pratiques contraceptives et les connaissances des Françaises et des Français sur le sujet.
Cet amendement semble donc satisfait sur le principe.
Mme la présidente. Monsieur Iacovelli, l’amendement n° 753 rectifié est-il maintenu ?
M. Xavier Iacovelli. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 753 rectifié est retiré.
Article 44 bis (nouveau)
I. – L’article L. 2122-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la dernière phrase du troisième alinéa, les mots : « au dernier » sont remplacés par les mots : « à l’avant-dernier » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un entretien postnatal précoce obligatoire est réalisé par un médecin ou une sage-femme entre les quatrième et huitième semaines qui suivent l’accouchement. Cet entretien a pour objet, dans une approche globale de prévention en postpartum, de repérer les premiers signes de la dépression du postpartum ou les facteurs de risques qui y exposent et d’évaluer les éventuels besoins de la femme ou du conjoint en termes d’accompagnement. Un deuxième entretien peut être proposé, entre les dixième et quatorzième semaines qui suivent l’accouchement, par le professionnel de santé qui a réalisé le premier entretien aux femmes primipares ou pour lesquelles ont été constatés des signes de la dépression du postpartum ou l’existence de facteurs de risques qui y exposent. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er juillet 2022.
Mme la présidente. L’amendement n° 206, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’article 44 bis instaure un entretien postnatal précoce obligatoire suivi, si besoin est, d’un second entretien pour les femmes primipares ou pour celles dont la situation le nécessite, afin de prévenir la dépression du post-partum.
Si l’on peut soutenir sur le fond les dispositions proposées, un tel article est déjà satisfait par le droit en vigueur, qui prévoit des examens postnataux obligatoires et relève, aux termes mêmes de la loi, du domaine réglementaire.
En outre, les dispositions proposées ont trait à l’organisation des soins et n’ont donc pas d’incidence sur l’équilibre financier des régimes de sécurité sociale. Elles ne relèvent pas, à ce titre, du domaine d’une loi de financement de la sécurité sociale.
Pour toutes ces raisons, cet amendement vise à supprimer l’article.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet un avis extrêmement défavorable sur cet amendement.
L’entretien postnatal précoce obligatoire – ce n’est pas un examen, j’y reviendrai – fait partie intégrante de la politique publique que nous sommes en train d’élaborer autour des 1 000 premiers jours. C’est l’un de ses points d’ancrage majeurs.
Le parcours 1 000 jours s’articule autour de trois moments.
Il s’articule d’abord autour de l’entretien prénatal précoce, ou EPP, obligatoire au quatrième mois de grossesse. Il est effectif depuis deux ans et monte en puissance : le Gouvernement s’est fixé l’objectif de 70 % d’entretiens prénataux précoces en 2022, car c’est l’entrée dans le parcours.
Il s’articule ensuite autour de la maternité, par le biais d’un certain nombre de staffs médicaux et psychosociaux, avec un travail de coordination entre la ville et l’hôpital, notamment pour que le suivi des femmes avant, pendant et après l’accouchement soit le plus fluide possible et que l’on évite les ruptures, dont les femmes nous disent qu’elles existent.
Il s’articule enfin autour de l’entretien postnatal précoce obligatoire pour lutter contre le fléau et le tabou qu’est la dépression post-partum.
Celle-ci touche 15 % à 20 % des femmes dans notre pays et cette estimation est sans doute sous-évaluée. Le phénomène s’étend probablement aussi à quelques hommes. C’est un véritable problème non seulement en matière de santé publique, mais aussi pour ce qui est de l’égalité entre les femmes et les hommes, puisque cela renvoie au partage des tâches et de la charge mentale. (Mme Annick Jacquemet acquiesce.)
Par conséquent, il est temps que nous nous attaquions à la dépression post-partum. C’est aussi le sens, même si ce n’est pas le seul, du doublement du congé paternité que le Gouvernement a instauré, le faisant passer de quatorze à vingt-huit jours.
Cet entretien ne s’inscrit pas dans la même logique que le Prado, le programme d’accompagnement du retour à domicile, où la diminution du nombre de jours passés à la maternité est compensée par une visite à domicile.
Il y a évidemment la santé de l’enfant, mais il y a aussi le bien-être, c’est-à-dire la santé globale de la mère. L’entretien postnatal précoce obligatoire intervient plus tard, entre la quatrième et la douzième semaine, puisque, selon la science, c’est à cette période qu’a lieu le pic de dépression post-partum.
Selon vous, madame la rapporteure, cela n’aurait aucune incidence sur l’équilibre financier des régimes de sécurité sociale. Au contraire, cela a un impact sur les finances de la sécurité sociale ! C’est un entretien, ce n’est pas un examen. À ce titre, il n’a pas le même contenu et ne vise pas les mêmes objectifs.
Selon vous, cela existe déjà dans le droit en vigueur. Or l’article L. 2122-1 du code de la santé publique prévoit le principe d’examens postnataux obligatoires et non d’entretiens postnataux obligatoires ; ce n’est pas la même chose et cela a bien évidemment un impact sur les finances publiques.
Il faut que nous investissions sur cette période de la vie, car il s’agit d’un investissement social. Demain, le parcours 1 000 jours prévoira davantage que ces trois moments. La Finlande programme douze entretiens entre la naissance et les 2 ans de l’enfant.
Mesdames, messieurs les sénateurs, pour les 100 000 femmes au bas mot qui, chaque année, souffrent de dépression post-partum, je vous prie de maintenir cet entretien postnatal précoce obligatoire, et donc de rejeter cet amendement de suppression.
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. Nous ne sommes pas défavorables par principe à ce dispositif, mais nous saisissons mal la différence entre un entretien et un examen.
Monsieur le secrétaire d’État, tous les médecins présents dans cette enceinte vous diront que, quand ils examinent, ils procèdent forcément à un entretien. L’interrogatoire du patient, c’est le b.a-ba de l’examen médical, que ce soit à l’hôpital ou en libéral. Je comprends mal la distinction que vous établissez.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Les dépressions post-partum toucheraient entre 15 % et 30 % des mères. Ces dépressions sont encore souvent un tabou et trop peu de femmes se sentent suffisamment accompagnées dans les premières semaines et les premiers mois qui suivent l’accouchement.
L’article 44 bis, qui précise justement l’obligation de réaliser un entretien postnatal, est donc essentiel. Il l’est pour l’accompagnement des nouveaux parents, père et mère. Il l’est pour rassurer les femmes et leur permettre d’être soutenues par des professionnels de santé dès qu’elles en ressentent le besoin. Il l’est pour qu’elles puissent être dirigées vers des professionnels ciblés qui pourront apporter des réponses aux questions qu’un nouveau parent peut se poser.
Avoir un enfant est précieux. C’est une mission unique, mais c’est aussi – on ne le dira jamais assez – un chamboulement, évidemment pour les deux parents, mais encore plus pour les femmes. Il m’est impossible d’imaginer avec précision la réalité du post-partum, mais j’assure les femmes concernées de mon engagement total pour qu’elles trouvent une oreille attentive lorsqu’elles en ressentent le besoin et pour que les deux parents soient soutenus après la naissance.
Il me paraît dommageable que cet article puisse être supprimé, car, même si l’article L. 2122-1 du code de la santé publique prévoit un examen postnatal, il n’en précise ni les modalités ni la temporalité, comme c’est le cas pour l’entretien prénatal. Par conséquent, pour que cet examen ait lieu de manière effective, il semble utile de prévoir les précisions visées par l’article.
C’est pourquoi nous voterons contre cet amendement de suppression et j’invite le Sénat à en faire de même.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Aux propos de M. le secrétaire d’État, que je partage pleinement, j’ajoute l’argument de l’intérêt de l’enfant.
Plus on soutient la mère, plus on soutient l’enfant, pour parler comme le juge Édouard Durand, bien connu et apprécié dans cette enceinte.
Pour toutes ces raisons, pour tous les avantages que vous avez soulignés en faveur des femmes et des mères, monsieur le secrétaire d’État, mais aussi pour l’enfant et son intérêt à grandir et à se développer, nous voterons contre cet amendement de suppression.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite avoir une précision.
Tel qu’il est rédigé, l’article prévoit que l’« entretien postnatal précoce obligatoire est réalisé par un médecin ou une sage-femme ». S’agit-il du médecin traitant ou du gynécologue ? Cela risque de poser des difficultés de disponibilité pour les femmes concernées.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. N’importe quel médecin pourra réaliser cet entretien, même si, idéalement, mieux vaut que ce soit d’abord le médecin traitant qui connaît sa patiente, ensuite la sage-femme qui a suivi la femme avant et pendant l’accouchement.
En anticipant légèrement – mais ce seront probablement d’autres que moi et peut-être d’autres que vous qui auront à réfléchir à ces questions –, je pense qu’à l’avenir, d’autres professionnels, qui ne seront pas nécessairement issus du monde de la santé, réaliseront des entretiens postnataux, qui pourront venir en complément et pas forcément en substitution de celui dont nous parlons aujourd’hui.
De quoi s’agit-il, au fond, sinon de déceler précocement des fragilités ? Celles-ci peuvent être de nature somatique, psychologique, sociale ou psychiatrique.
Dans le parcours 1 000 jours idéal, c’est-à-dire renforcé, que nous bâtirons au fil des années, le fait qu’un technicien de l’intervention sociale et familiale (TISF) puisse un jour être amené à réaliser un entretien postnatal ne me choque pas, parce que la fragilité est aussi de cet ordre. Vous verrez d’ailleurs que nous l’envisagerons un jour dans cette assemblée.
En attendant, idéalement, ce sont les professionnels de santé qui ont suivi et accompagné la femme et les parents qui pourront réaliser cet entretien postnatal obligatoire. Il est bon que le conjoint soit aussi associé, puisque l’on parle de bien-être global, mais ce ne doit être ni une restriction ni une obligation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour explication de vote.
Mme Annick Jacquemet. À titre personnel, je voterai contre cet amendement de suppression. Au sein du groupe Union Centriste, les avis sont partagés.
Il est à mon sens nécessaire d’accompagner les jeunes parents dans cette période difficile du post-partum. Je suggère que puissent être consultées également des infirmières puéricultrices, car elles proposent aussi un accompagnement à la parentalité et peuvent aider les jeunes parents.
Un tel dispositif est d’autant plus important que, dans notre société, les cellules familiales sont beaucoup moins soudées qu’elles ne l’étaient dans la génération précédente, lorsque les mères ou les grands-mères assistaient souvent les jeunes couples dans leur nouveau métier de parent.
Mme la présidente. Les amendements nos 669 rectifié et 668 rectifié ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l’article 44 bis.
(L’article 44 bis est adopté.)
Après l’article 44 bis
Mme la présidente. L’amendement n° 723 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et M. Vogel, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mme de Marco, MM. Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’article 44 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, un rapport sur l’extension du dispositif « engagement maternité » à l’ensemble du territoire, son financement par une dotation populationelle et sur le renouvellement des indicateurs de périnatalité nécessaires.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Selon la Drees, en quarante ans, le nombre de maternités est passé de 1 369 en 1975 à 498 en 2016. Le nombre de maternités a ainsi été divisé presque par trois, alors que, selon l’Insee, le taux de natalité augmentait dans le pays.
La fermeture des maternités porte à conséquence, car, toujours selon la Drees, près de 200 000 femmes en âge de procréer résident à plus de quarante-cinq minutes de la maternité la plus proche. Renforcer le maillage territorial et permettre à toutes les femmes d’être à proximité d’une maternité est donc un enjeu fondamental.
À cet égard, le dispositif « engagement maternité » avait justement pour objectif d’organiser des schémas territoriaux de prise en charge pour les parturientes qui résident à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité. Il donnait également accès aux remboursements de prestations de transport ou à une prestation d’hébergement en hôtels hospitaliers, dont on connaît le faible développement. Il permettait aussi de définir dans chaque territoire les schémas d’accès aux soins de prévention, les prises en charge pré et post-partum, la permanence des soins périnataux et les mécanismes de prise en charge des urgences. En somme, il traçait des parcours lisibles pour les femmes.
Pourquoi ce dispositif si essentiel reste-t-il encore limité à certains territoires ?
Ce n’est pas entendable. C’est la raison pour laquelle l’amendement que nous présentons vise à demander une étude sur la faisabilité de l’extension de l’« engagement maternité » à l’ensemble du territoire et à prévoir son financement par une dotation populationnelle afin de répondre aux besoins des populations.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. L’« engagement maternité », annoncé par la ministre Agnès Buzyn en 2019, s’était traduit par quelques dispositions dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020. Nous avions ainsi voté en faveur d’une mesure facilitant l’accès aux soins pour les femmes enceintes les plus éloignées des maternités, grâce à une prestation d’hébergement temporaire non médicalisé ou à une prise en charge des frais de transport. Ces dispositions étaient toutefois insuffisantes pour pallier la désertification obstétricale engendrée par la fermeture des maternités : entre 1996 et 2016, le nombre de maternités a diminué de 39 % en France.
Je souscris à votre intention d’améliorer l’accès aux maternités sur le territoire. Cependant, conformément à la doctrine de la commission des affaires sociales, nous suggérons le retrait de cette demande de rapport. À défaut, l’avis sera défavorable.