Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Nous voterons contre les deux amendements présentés par Catherine Procaccia, tout simplement parce qu’en fixant de tels critères – je pense en particulier au fait d’imposer une distance minimale par rapport à de nombreux établissements –, notre collègue rend l’installation d’une HSA quasi impossible, notamment dans le tissu urbain dense.
J’entends les arguments de certains riverains qui s’inquiètent de l’ouverture de ce type de salles. J’ai moi aussi été sollicitée par un collectif d’habitants du XXe arrondissement de Paris pour présenter un amendement identique à celui de Mme Procaccia. En réalité, cet amendement habile est une fin de non-recevoir et une opposition déguisée à l’existence même de ces structures.
La situation dramatique des jardins d’Éole, avec ses consommateurs de crack et, désormais, la construction d’un mur de la honte à Pantin, doit nous rappeler qu’il faut multiplier les structures d’accompagnement de soins plutôt que les obstacles à leur implantation. Des drames humains se jouent à quelques kilomètres de cet hémicycle sans que les pouvoirs publics interviennent, ce qui est assez inquiétant.
Par ailleurs, le caractère systématique de l’amendement de la commission, dont nous pouvons partager l’esprit, restreint les possibilités d’implantation des HSA. C’est pourquoi nous ne le voterons pas non plus.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, j’en profite pour vous demander de faire le point sur l’implantation d’une nouvelle HSA à Lille. Celle-ci devait ouvrir il y a quelques jours, mais son lancement a été retardé pour une raison inconnue. J’ai cru comprendre que cette implantation se heurterait à l’opposition du ministre de l’intérieur. Pourrions-nous avoir davantage d’explications à ce sujet ?
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Les deux seules salles de consommation à moindre risque ouvertes à ce jour l’ont été dans des enceintes hospitalières. La SCMR de Paris ne devait pas l’être à l’origine, mais elle a finalement été installée dans l’enceinte de l’hôpital Lariboisière.
Il ne faut pas pour autant élever ce constat au rang de principe général. Pour une large part, les Caarud et les Csapa – il y en a de nombreux à Paris – sont implantés hors de toute enceinte hospitalière. Or on n’entend pas parler de ces structures et elles ne font jamais l’objet de plaintes de la part des riverains.
Il y a quelques années, l’un de ces centres, à Beaurepaire, dans le Xe arrondissement de Paris avait suscité des tensions, mais depuis, aucun autre conflit n’a éclaté avec des riverains.
Il faut se garder de tout dogmatisme. Je partage à cet égard les propos de Laurence Cohen : les conditions que vous fixez, madame Procaccia, empêchent grosso modo toute ouverture de salle en milieu urbain. Dans une ville dense, on trouve en effet des écoles et des structures d’accueil de jeunes enfants tous les 200 mètres. Il s’agit de fait d’amendements interdisant la mise en place des HSA.
Un autre sujet d’inquiétude sur lequel je souhaite vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, concerne le budget alloué à la prolongation de l’expérimentation des haltes « soins addictions ».
Ce dernier s’établit à environ 2 millions d’euros par an, ce qui correspond précisément au coût des deux salles existantes. Cela signifie que le nombre de nouveaux centres se comptera sur les doigts d’une main, et que le dispositif ne permettra pas de résoudre les problèmes actuels de façon satisfaisante.
J’ajoute – je l’ai d’ailleurs dit le jour de l’inauguration de la SCMR de Paris – que, si d’autres salles ne sont pas ouvertes rapidement à Paris, cela posera inévitablement des problèmes de voisinage, car les usagers de drogues se concentreront autour de la seule salle disponible. C’est un peu comme lorsqu’il n’y a qu’un seul boulanger ou un seul médecin généraliste dans un quartier, tout le monde fait la queue au même endroit… S’il n’y a qu’une seule salle pour les usagers de drogues dans toute l’Île-de-France, ces derniers se rassembleront inévitablement à proximité de cette salle.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Le changement de dénomination des salles de consommation à moindre risque, devenues des haltes « soins addictions » va dans le sens d’une prise en charge des soins dans leur ensemble, tout comme l’amendement n° 1030 de la commission.
Lors de leur audition, les acteurs de la SCMR de Strasbourg, qui se situe dans l’enceinte de l’hôpital civil, nous ont expliqué que cette proximité hospitalière favorisait l’enclenchement d’un traitement des addictions, quand les personnes le souhaitent, ou la mise en œuvre plus rapide des soins, y compris de nature psychiatrique, quand l’état de santé des consommateurs l’exige.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. J’aurais bien volontiers retiré mes amendements, comme me l’a demandé Mme la rapporteure, si les propos que je viens d’entendre – je ne pense pas particulièrement aux vôtres, madame la rapporteure, mais à ceux du secrétaire d’État, entre autres – ne m’avaient pas autant choquée, non seulement en tant qu’ancien adjoint au maire chargé de l’enseignement d’une ville qui comptait 8 000 élèves et étudiants, mais aussi en tant que grand-mère.
Monsieur le secrétaire d’État, vous venez de nous dire explicitement qu’il est plus important de mettre à disposition des salles pour les drogués que de se préoccuper de nos enfants ! (M. le secrétaire d’État proteste.)
M. Xavier Iacovelli. C’est une caricature ! Ce n’est pas ce qu’il a dit !
Mme Catherine Procaccia. M. Jomier vient de dire qu’en milieu urbain il y avait des écoles tous les 200 mètres, et que mon amendement interdisait de facto l’ouverture de ces salles. Mais il y a d’autres villes que Paris dans lesquelles on pourrait en installer !
M. Bernard Jomier. Il n’y a pas qu’à Paris que l’on trouve des écoles tous les 200 mètres !
Mme Catherine Procaccia. On est en train de nous expliquer qu’il faut mettre en place ces structures coûte que coûte – la drogue est pourtant, me semble-t-il, une substance illicite et interdite –, peu importe s’il y a une école ou une structure d’accueil de jeunes enfants à proximité. Ces propos me choquent profondément !
Dernier point, il me semble que l’amendement de la commission n’est pas du tout incompatible avec les amendements nos 262 rectifié bis et 261 rectifié. C’est pourquoi je les maintiens.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Franchement, madame la sénatrice, je ne peux pas vous laisser prétendre que la rapporteure, les sénateurs qui viennent d’intervenir et moi-même avons tenu les propos que vous nous attribuez.
Dites-nous clairement que vous êtes opposée à ce type de dispositif. (Marques d’approbation sur les travées des groupes SER et CRCE.) Après tout, c’est ce qui transparaît dans vos propos ! Je vous prie de ne pas faire dire au secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles qu’il privilégie les drogués aux enfants ! Je n’ai pas jamais dit cela.
M. Bernard Jomier. Personne n’a dit une telle chose !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Personne ne l’a dit. En revanche, il vous revient de nous dire clairement si vous êtes opposée par principe à la prise en charge des soins de ces personnes.
Depuis le début, j’explique que le dispositif prévoit une concertation entre les élus locaux – dont vous étiez – et les associations de riverains, qui rassemblent peut-être des grands-mères – dont vous êtes aujourd’hui –, pour trouver le meilleur compromis possible entre l’impératif de santé publique, puisque les usagers de drogues doivent être soignés, et la tranquillité publique, indispensable au bien-être des enfants et du reste des riverains.
Il faut laisser la main aux acteurs locaux et leur confier le soin de trouver le bon équilibre, car nous croyons en eux. En tout cas, n’opposons pas usagers de drogues et enfants ! Il est faux de dire que nous privilégions les uns par rapport aux autres.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 262 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 43, modifié.
(L’article 43 est adopté.)
Après l’article 43
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 675 rectifié est présenté par MM. Iacovelli, Lévrier, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 1032 rectifié est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 221-1-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au I, les mots : « liées aux substances psychoactives » sont supprimés ;
2° À la première phrase du III, après le mot : « année, », sont insérés les mots : « le montant de la dotation de la branche maladie finançant le fonds et détermine ».
La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l’amendement n° 675 rectifié.
M. Xavier Iacovelli. Les addictions sont des pathologies cérébrales définies comme une dépendance à une substance ou à une activité dont les conséquences sont graves.
À cet égard, le fonds de lutte contre les addictions permet de financer et d’amplifier des actions innovantes de prévention, d’accompagnement et de recherche sur les addictions liées à des substances psychoactives.
Cependant, notre société évolue et les addictions d’hier ne sont pas forcément celles d’aujourd’hui. L’Inserm le souligne, la pratique des jeux de hasard, les paris sportifs, les jeux vidéo sont autant de pratiques qui peuvent avoir des répercussions médicales, psychologiques et psychiatriques sur le long terme.
L’addiction aux jeux vidéo a ainsi été formellement reconnue comme maladie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en 2018, au même titre que l’addiction à la cocaïne ou aux jeux d’argent. Elle a ainsi été intégrée à la classification internationale des maladies.
Je ne citerai que quelques chiffres pour que chacun puisse se rendre compte de l’importance de cette problématique. Un joueur sur dix dépense plus de 1 000 euros par an dans les jeux de hasard ; le volume des mises engagées dans les paris sportifs sur internet a été multiplié par 4,6 depuis 2014 ; les jeunes entre 13 et 19 ans ont passé en moyenne 15 heures et 11 minutes par semaine sur internet en 2017.
Une telle progression de ces pratiques, compte tenu de leurs effets sur le public des plus jeunes, nécessite que le législateur s’y intéresse. C’est pourquoi nous proposons que le périmètre du fonds de lutte contre les addictions soit élargi à toutes les formes d’addiction, et non plus seulement à celles qui sont liées aux substances psychoactives, et ce afin de renforcer la prévention et de prévoir l’accompagnement le plus large possible pour nos concitoyens.
Mme la présidente. L’amendement n° 1032 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 43
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 221-1-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au I, les mots : « liées aux substances psychoactives » sont supprimés ;
2° À la première phrase du III, après le mot : « année, », sont insérés les mots : « le montant de la dotation de la branche maladie finançant le fonds et détermine ».
La parole est à M. le secrétaire d’État, pour présenter l’amendement n° 1032 rectifié.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Il s’agit d’un amendement identique à celui qui vient d’être défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Ces deux amendements visent à élargir le champ d’application du fonds de lutte contre les addictions liées aux substances psychoactives aux autres usages à risque d’addiction, dont les jeux de hasard, les paris sportifs ou encore les écrans.
Le dispositif prévoit un transfert financier, dont le montant sera fixé par arrêté, de l’assurance maladie vers le fonds. Ce transfert sera alimenté par la hausse des droits sur le tabac instituée au bénéfice de la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM), afin de compenser la suppression en 2019 de la taxe sur les fournisseurs de tabac, initialement affectée au fonds.
Ces amendements vont dans le bon sens. La commission y est donc favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement est en toute logique favorable à l’amendement n° 675 rectifié du sénateur Iacovelli, identique au sien.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. L’amendement du Gouvernement tend à élargir le périmètre des missions du fonds de lutte contre les addictions en permettant qu’il finance des actions innovantes de prévention, notamment le soutien aux priorités du programme national de lutte contre le tabac et du plan national de mobilisation contre les addictions.
Si nous souscrivons à cet objectif de santé publique, à savoir la promotion de la prévention des addictions, nous tenons à rappeler que le fonds de lutte contre les addictions n’est doté que d’une centaine de millions d’euros par an, soit 350 millions d’euros en trois ans. À titre de comparaison, les taxes sur le tabac ont permis de dégager près de 15 milliards d’euros de recettes en 2020.
Par ailleurs, la commission des comptes de la sécurité sociale a chiffré l’augmentation des recettes de l’assurance maladie en 2021 à 1,2 milliard d’euros de plus que ce qui avait été prévu en 2020, soit une hausse de 14 %. En parallèle, le budget pour 2022 de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) est resté identique à celui de 2021, à hauteur de 16,6 millions d’euros. Je rappelle en outre que le budget de la Mildeca a été divisé par deux depuis 2009.
Pour l’ensemble de ces raisons, et parce que nous constatons que les crédits alloués à la prévention des addictions n’ont pas suffisamment augmenté pour nous permettre d’atteindre les objectifs que vise le Gouvernement, nous nous abstiendrons sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Alors que le ministre chargé des comptes publics, Olivier Dussopt, s’est engagé à ne plus toucher à la fiscalité sur le tabac, je note que la hausse des crédits du fonds de lutte contre les addictions repose sur une augmentation des droits sur le tabac. Je vous invite donc, monsieur le secrétaire d’État, à vous rapprocher du ministère des finances… (Sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 675 rectifié et 1032 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 43.
Article 44
I. – Le titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le 21° de l’article L. 160-14 est ainsi modifié :
a) Le mot : « mineure » est remplacé par les mots : « âgée de moins de 26 ans » ;
b) (nouveau) Sont ajoutés les mots : « , ainsi que pour les assurés âgés de moins de 26 ans pour les frais liés aux consultations de prévention en matière de santé sexuelle » ;
2° À la première phrase des articles L. 162-4-5 et L. 162-8-1, le mot : « mineure » est remplacé par les mots : « âgée de moins de 26 ans ».
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2022.
III (nouveau). – Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les moyens à mettre en œuvre pour développer, promouvoir et prendre en charge la contraception masculine.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Nous sommes très favorables à l’article 44, car il prévoit d’étendre la gratuité de la contraception à toutes les assurées de moins de 26 ans. Il s’agit d’une avancée extrêmement importante qui s’inscrit dans la continuité de ce que nous avions voté en 2019.
Cependant, nous soutiendrons les amendements de nos collègues Corinne Imbert, Mélanie Vogel et Laurence Rossignol. En effet, chacun d’entre eux a pour objet de renforcer l’article, que ce soit sur la gratuité de toutes les méthodes de contraception féminine, sur le remboursement des préservatifs féminins au même titre que les préservatifs masculins, ou bien encore sur la nécessité d’avancer concrètement quant à la gratuité de la contraception masculine, afin que cette question ne reste pas une charge mentale et financière supportée uniquement par les jeunes filles et les femmes.
Pour notre part, nous aurions souhaité rehausser le seuil d’âge au-delà de 25 ans, car cette limite n’a guère de sens, mais l’article 40 de la Constitution nous en a empêchés. Je pense pourtant, monsieur le secrétaire d’État, qu’il faudrait évoluer sur ce point.
L’article 44, surtout si certains des amendements déposés par nos collègues sont adoptés, enverra un signe extrêmement positif, celui d’une très belle mesure de prévention, d’une avancée en matière de santé publique et d’un nouveau pas en avant vers l’égalité entre les femmes et les hommes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, sur l’article.
Mme Michelle Meunier. Je l’ai dit en début de semaine lors de la discussion générale, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte de bonnes mesures. Cet article 44 en est la preuve, puisqu’il étend la gratuité de la contraception aux assurées jusqu’à l’âge de 25 ans.
Notre groupe tentera néanmoins d’en améliorer le dispositif et d’en étendre l’application par un certain nombre d’amendements que nous vous présenterons dans quelques instants.
C’est un fait, en 2021, on constate encore des inégalités dans l’accès à la contraception pour les femmes et les jeunes filles en particulier. Je me réjouis donc à mon tour que l’on puisse faciliter cet accès grâce à la gratuité et garantir encore un peu plus aux femmes le droit de disposer librement de leur corps.
Cependant, le diable se niche dans les détails, et après y avoir été sensibilisée par des médecins gynécologues, je formulerai quelques réserves qu’il conviendra de lever, monsieur le secrétaire d’État.
Ainsi, il semble que la gratuité ne s’applique qu’aux pilules déjà prises en charge par la sécurité sociale, ce qui en exclut certaines dites de troisième, voire de quatrième génération, alors qu’elles sont davantage prescrites aux jeunes femmes et qu’elles semblent provoquer moins d’effets secondaires. Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous apporter quelques précisions à ce sujet, afin de nous garantir que la gratuité de l’accès à la contraception, que vous nous annoncez ce soir, sera demain une réalité dans la vie quotidienne de toutes les femmes ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, sur l’article.
Mme Colette Mélot. Je suis favorable à l’extension de la gratuité de la contraception aux jeunes femmes de moins de 26 ans, afin de prévenir les risques de grossesse non désirée, mais je considère qu’il faudrait également étendre la mesure aux jeunes hommes de moins de 26 ans.
Il s’agit d’une mesure de santé publique visant à limiter les risques de grossesse non désirée, ainsi que les risques de transmission des infections sexuellement transmissibles, en recrudescence chez les jeunes.
La contraception n’est pas une responsabilité exclusivement féminine. Elle doit être partagée entre les femmes et les hommes.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 205, présenté par Mme Imbert, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 7, qui prévoit un rapport sur la contraception masculine.
La commission des affaires sociales considère que le développement de la contraception masculine n’appelle pas un énième rapport, mais passe par une mesure forte de gratuité.
Mme la présidente. L’amendement n° 647, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique, Gontard et Labbé, Mmes de Marco et Taillé-Polian et MM. Salmon et Parigi, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce rapport traite également de la formation des personnels médicaux à la contraception masculine, de la levée des obstacles à une mise sur le marché des méthodes de contraception masculine hormonale et de la conduite d’une enquête scientifique de référence sur la contraception masculine thermique.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Encore aujourd’hui, les femmes supportent le plus souvent seules la charge contraceptive, charge y compris mentale.
Quand le Premier ministre a annoncé la contraception gratuite pour les femmes de moins de 25 ans, elles ont été nombreuses à se demander : quand les hommes prendront-ils leur part ?
De plus en plus d’hommes sont prêts. Les derniers chiffres de l’assurance maladie le montrent, le nombre de vasectomies a été multiplié par sept. De plus en plus d’hommes innovent et testent la contraception par les slips chauffants ou par les anneaux. (Rires étouffés sur des travées du groupe Les Républicains.)
C’est drôle que cela amuse, alors qu’il s’agit de méthodes de contraception. Cela montre que ce n’est culturellement pas très mûr…
Ces hommes sont en avance sur la politique gouvernementale, qui ne marque rien de décisif en la matière.
Sans véritable soutien des pouvoirs publics, les hommes bricolent (Exclamations amusées.), ils improvisent. Ce retard n’est plus possible. Nous avons collectivement trop tardé.
Par cet amendement, nous demandons que le Gouvernement nous expose clairement pourquoi nous n’avançons pas suffisamment sur cette question et quel plan d’action il entend mettre en place pour rompre l’immobilisme des pouvoirs publics : immobilisme sur la recherche, sur la sensibilisation de la population, notamment des jeunes, sur la formation des professionnels de santé.
Il est temps que la charge mentale de la contraception soit partagée, afin de lutter de manière concrète, notamment contre les rapports de domination au sein du couple. Au-delà des choix intimes qu’il revient à chacun de discuter au sein de son couple, c’est le rôle du politique de donner à tous, hommes et femmes, la possibilité de choisir en conscience.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Par cohérence, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 647.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Si l’objet de l’amendement n° 647 semble aller un peu trop dans le détail, le Gouvernement est attaché à ce rapport. Sur la question de la contraception masculine, il y a utilité et nécessité à poursuivre plus avant la réflexion et les travaux. Je ne reviens pas sur les remarques que vous avez formulées, notamment sur le fait que cette question doit davantage être partagée par les femmes et les hommes, madame la sénatrice.
Nous pensons qu’un travail de réflexion doit être mené sur ce sujet pour aller au-delà de la seule question du remboursement de la contraception masculine. D’autres champs restent probablement à explorer, notamment les méthodes de contraception masculine qui peuvent être envisagées – des recherches sont en cours dans d’autres pays, ce qui n’est pas le cas en France.
Nous pensons utile que ce rapport puisse être réalisé.
Nous pensons utile que la Haute Autorité de santé puisse être associée à ces travaux pour contribuer à un état des lieux des connaissances et établir des recommandations sur l’ensemble des méthodes de contraception masculine, afin que celles-ci puissent être promues, sous réserve qu’elles soient validées scientifiquement.
Il y a là une opportunité pour avancer collectivement sur ce sujet, au-delà, je le répète, de la seule question du remboursement de la contraception masculine. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement tient à ce rapport, qui pourra servir d’aiguillon.
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 647 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 646, présenté par Mmes M. Vogel et Poncet Monge, MM. Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, MM. Labbé, Parigi et Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La modification de la mention du sexe à l’état civil ne fait pas obstacle à l’application du présent article.
La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.
Mme Raymonde Poncet Monge. Encore aujourd’hui, les personnes trans sont exposées à des discriminations en raison de la rédaction « genrée » de la loi. L’amendement que défend Mélanie Vogel a un objet simple, faire en sorte que l’article 44 ne crée pas de discriminations supplémentaires pour les personnes trans, discriminations qui pourraient d’ailleurs être déclarées anticonstitutionnelles.
La jurisprudence du Conseil constitutionnel exige en effet que toutes les personnes placées dans des situations identiques soient soumises au même régime juridique et soient traitées de la même façon – sans privilège et sans discrimination. Tel est le principe constitutionnel que cet amendement tend à réaffirmer en garantissant l’accès des hommes trans de moins de 26 ans au remboursement de la contraception.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Corinne Imbert, rapporteure. Sur cet amendement, la commission souhaite avoir un éclairage du Gouvernement.
En effet, certains hommes transgenres peuvent se trouver dans une situation biologique similaire aux femmes au regard des besoins en contraception.
Monsieur le secrétaire d’État, j’aimerais avoir votre avis sur les conditions d’accès à la contraception des hommes transgenres et sur le risque qu’il y aurait à ce qu’ils se retrouvent en situation d’inégalité juridique par rapport aux assurés femmes dans l’accès à la contraception gratuite.