Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 44 est présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 64 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 44.
Mme Éliane Assassi. En proposant la suppression de cet article, nous affirmons notre opposition à la transformation de la réserve civile de la police nationale en une réserve opérationnelle, ainsi qu’à la possibilité de confier des prérogatives étendues aux réservistes.
Le dispositif proposé soulève plusieurs difficultés.
Tout d’abord, la possibilité de porter une arme est offerte à tous les réservistes, qu’il s’agisse de policiers retraités ou de réservistes volontaires issus de la société civile.
Ensuite, le statut d’officier de police judiciaire (OPJ) sera accordé aux réservistes quand ils effectueront des missions de police judiciaire.
Par ailleurs, la limite d’âge pour servir dans la réserve est reculée de 65 à 67 ans : pourquoi ?
Enfin, les temps de formation ne me semblent pas adaptés aux nouvelles missions confiées aux réservistes non issus de la police. Le Gouvernement affiche pour objectif de resserrer le lien entre la police et la population ; mais ce dispositif est aussi, à l’évidence, un moyen un peu léger de faire face à la pénurie d’agents et en particulier d’OPJ.
À nos yeux, il convient de renforcer les moyens humains et matériels de la police nationale pour accroître ses capacités opérationnelles et non de créer une telle réserve, qui apparaît préoccupante.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 64.
M. Guy Benarroche. J’approuve pleinement les propos de Mme Assassi.
Comme je le disais lors de la discussion générale, la police souffre d’un manque chronique de moyens humains et matériels. Pour autant, selon nous, le repli vers une réserve opérationnelle n’est pas la bonne réponse à ces problèmes.
À l’évidence, le fait d’étendre le port d’armes à des civils, fussent-ils d’anciens policiers, ne saurait être une solution satisfaisante. Souhaitons-nous instituer une forme de police alternative investie de missions de police judiciaire ? Que dire des problèmes de gouvernance qui en résulteraient ? Qui serait chargé de diriger cette police et de la contrôler ?
Une partie de nos concitoyens n’ont plus confiance en la police nationale : on ne saurait répondre à cette situation en conférant des pouvoirs de police et en accordant un port d’armes à des civils ou à des réservistes non soumis à une déontologie professionnelle et à une hiérarchie policière attentive.
La priorité, c’est de renforcer les recrutements tout en améliorant les conditions de travail des agents, non de développer la réserve civile de la police nationale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. L’article 6, qui reprend un article de la loi Sécurité globale adopté sur l’initiative de notre collègue Henri Leroy, va permettre la montée en charge de la réserve opérationnelle de la police nationale.
M. Marc-Philippe Daubresse. Exactement !
M. Loïc Hervé, rapporteur. Il s’agit ni plus ni moins que d’aligner les prérogatives et les missions de cette réserve sur celles de la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Tout à fait !
M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet article ouvre également la possibilité, pour d’anciens OPJ, de conserver cette qualité pendant cinq ans lorsqu’ils servent dans la réserve de l’une des deux forces. Cette évolution me paraît tout à fait pertinente, puisqu’elle permet d’utiliser au mieux les capacités des uns et des autres, lesquelles sont le fruit d’une formation spécifique.
Une actualisation des connaissances est prévue, afin de s’assurer que les intéressés sont bien au fait des évolutions de la procédure pénale.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. Comme M. le rapporteur l’a très bien exprimé, cet article ne présente au fond aucune nouveauté majeure. Il étend tout simplement à la police nationale un dispositif qui existe déjà et qui a suscité l’intérêt, voire l’approbation de beaucoup, à savoir la réserve opérationnelle de la gendarmerie. C’est une simple montée en puissance.
Madame Assassi, il est bel et bien nécessaire de renforcer les moyens des forces de l’ordre : le Gouvernement en est pleinement conscient et l’institution de cette réserve opérationnelle n’entend pas se substituer à cet effort. Pour mémoire, je rappellerai que, sous ce quinquennat, plus de 10 000 fonctionnaires de police et de gendarmerie auront été recrutés et déployés sur le terrain. Ces effectifs ne suffiront sans doute pas, mais il y avait longtemps qu’un tel effort n’avait pas été accompli ; ainsi, vous constatez que la montée en puissance de la réserve opérationnelle n’est en aucun cas un mécanisme de substitution.
Enfin – M. le rapporteur l’a également souligné –, ces personnels seront évidemment formés et l’on pourra s’assurer qu’ils travaillent, sur le terrain, de façon complémentaire avec les forces de police et de gendarmerie.
Pour l’ensemble de ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 44 et 64.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 74, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Les élus de notre groupe se sont toujours fermement opposés à la course à l’armement. Ni l’usage des armes ni leur port ne doivent être généralisés au motif fallacieux qu’ils renforceraient la protection. De fait, ce n’est pas le cas. À l’inverse – les études le prouvent –, l’extension du port d’armes, même non ostensible, entraîne une augmentation des violences de près de 15 %. De surcroît, un plus grand nombre d’attaques armées ont été déjouées sans l’aide de ripostes armées qu’avec.
L’armement d’une telle réserve, où serviront d’anciens policiers ou de réservistes volontaires issus de la société civile, suscite également de légitimes inquiétudes quant au suivi et à la formation de ces volontaires, malgré les assurances que M. le ministre vient de nous donner.
Selon nous, la banalisation du port d’armes pour les policiers hors service, que permet un autre texte adopté par le Sénat, comme pour les policiers réservistes trahit un virage sécuritaire dangereux.
Les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ont déjà eu l’occasion de se prononcer contre l’extension du port d’armes. Avec cet amendement, ils confirment leur position.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Mon cher collègue, vous souhaitez supprimer la possibilité de port d’armes en mission pour les réservistes de la police nationale.
Je précise que nous ne débattons pas d’un quelconque port d’armes hors service : consacrer cette possibilité, c’est tout simplement aligner les prérogatives des réservistes de la police nationale sur celles des réservistes de la gendarmerie.
L’objectif de cette réforme est de permettre aux réservistes qui ne sont ni des retraités des corps actifs de la police ni d’anciens policiers adjoints de réaliser des missions de nature opérationnelle en tenue d’uniforme et armés, exception faite des missions de maintien et de rétablissement de l’ordre public.
Cette possibilité est conditionnée à de fortes exigences, qu’il s’agisse de la formation, de l’entraînement, ou des aptitudes physiques de ces réservistes.
Aussi, la commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. Premièrement, comme M. le rapporteur vient de le rappeler, ces réservistes seront formés.
Deuxièmement, un policier réserviste formé ne pourra être autorisé à porter son arme que si les missions qu’il est appelé à exercer l’exposent à un risque d’agression.
Enfin, cette mesure est déjà applicable dans la réserve opérationnelle de la gendarmerie nationale : aucun motif ne justifie que l’on différencie entre elles les deux réserves.
Voilà pourquoi j’émets, à mon tour, un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l’article.
Mme Éliane Assassi. Mes chers collègues, au nom de mon groupe, je tiens à revenir sur un sujet qui nous tient particulièrement à cœur : la lutte contre les contrôles d’identité abusifs, à laquelle nous avons d’ailleurs consacré une proposition de loi en 2015.
Cette réforme, que nous persistons à défendre, est soutenue par différents acteurs de la vie publique et politique, comme la Défenseure des droits ou le Conseil national des barreaux. Il s’agit de rétablir une véritable sécurité juridique et de garantir l’utilisation efficace des contrôles d’identité effectués par les forces de l’ordre en modifiant l’article 78-2 du code de procédure pénale, qui définit les circonstances autorisant les contrôles d’identité et les motifs légaux les justifiant.
Dans sa rédaction actuelle, l’imprécision de cet article ouvre la voie à un certain nombre de dérives et limite l’efficacité de toute autre mesure ; dès lors, elle encourage les violations graves et répétées de plusieurs droits fondamentaux, comme la liberté de circulation, la protection contre l’arbitraire, la protection de la vie privée, ou encore la non-discrimination.
En effet, le cadre légal en vigueur permet aux forces de l’ordre de procéder à des contrôles sans lien nécessaire avec la prévention ou la répression d’actes de délinquance, de délits ou de crimes, sans avoir à justifier du motif du contrôle.
L’article 78-2 du code de procédure pénale doit être réécrit. Il faut imposer la remise de récépissés afin de mettre un terme aux discriminations que les dispositions actuelles favorisent dans la pratique.
À cet instant du débat, il me paraît très important de rappeler cette exigence. Nous ne lâcherons pas !
Mme Laurence Cohen. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote sur l’article.
M. Guy Benarroche. Mes chers collègues, nous souhaitions également proposer par voie d’amendement les dispositions que Mme Assassi vient de présenter, pour les raisons qu’elle vient précisément d’exposer.
Nous l’avons déjà rappelé : ce projet de loi est le septième texte sécuritaire défendu par ce gouvernement. Il sera certainement voté, comme les précédents. Mais, pour aucun d’entre eux, on ne nous a permis d’ouvrir la discussion sur le sujet essentiel des récépissés de contrôle d’identité.
Monsieur le ministre, exprimer un désaccord, c’est une chose ; empêcher tout dialogue, c’en est une autre.
Vous le savez, comme nous tous : pour garantir la confiance entre la police et la population, il est indispensable d’instaurer cette mesure, que nous avions déjà défendue lors de l’examen de la loi Sécurité globale.
C’est une évidence : ceux qui agressent les représentants des forces de l’ordre méritent la plus grande sévérité. Mais pourquoi refusez-vous d’envisager les discriminations dont une partie de la population pourrait être victime de la part des forces de sécurité, ne serait-ce que pour les mesurer ? C’est absolument inaudible.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6.
(L’article 6 est adopté.)
TITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES À LA CAPTATION D’IMAGES
Article additionnel avant l’article 7
Mme la présidente. L’amendement n° 14, présenté par M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Jacquin et Antiste, Mme Conconne et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Est instauré un moratoire sur le déploiement des systèmes de reconnaissance faciale à des fins répressives destinés à l’identification, à moins qu’ils ne soient utilisés qu’aux fins de l’identification des victimes de la criminalité, jusqu’à ce que les normes techniques puissent être considérées comme pleinement respectueuses des droits fondamentaux, que les résultats obtenus ne soient ni biaisés, ni discriminatoires, que le cadre juridique offre des garanties strictes contre les utilisations abusives ainsi qu’un contrôle et une surveillance démocratiques rigoureux, et que la nécessité et la proportionnalité du déploiement de ces technologies soient prouvées de manière empirique.
Ce moratoire s’applique pour une durée de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi sous réserve que les critères mentionnés au premier alinéa sont remplis.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Mes chers collègues, les dispositions de cet amendement sont très importantes à nos yeux. Elles traduisent la position que nous avons déjà défendue lors de l’examen de la loi Sécurité globale.
Nous proposions alors d’instaurer un moratoire sur l’usage de la reconnaissance faciale pour identifier les individus jusqu’à ce que des garanties suffisantes soient établies, tant pour la sécurité que pour les libertés.
À ce jour, cette technologie n’est pas aboutie. Elle présente de nombreux travers et tout le monde le sait. Le risque le plus grave est le renforcement, à terme, d’une sécurité et d’une justice prédictives. Une telle évolution serait totalement contraire au principe de notre droit pénal en vertu duquel les forces de sécurité publique et l’autorité judiciaire réagissent à une infraction : elles se mettent en mouvement après qu’elle a été commise et non avant, évidemment. En effet, elles ne peuvent agir par présomption.
Or les techniques de reconnaissance faciale, couplées à l’intelligence artificielle, remettent profondément en cause ce principe : leur application présuppose que tous les citoyens sont dangereux et doivent être constamment surveillés.
En outre, les données faciales sont des données biométriques sensibles, uniques et irrévocables. En ce sens, elles exigent une protection accrue.
Pour l’ensemble de ces raisons, le déploiement de la reconnaissance faciale dans les domaines répressif et judiciaire requiert, selon nous, une décision politique éclairée : il y va de notre conception des systèmes mis en œuvre et des objectifs que nous leur assignons.
En adoptant ces dispositions, nous nous inscrirons dans la droite ligne du Parlement européen, qui, par une résolution récente, s’est opposé à l’instauration d’une police prédictive fondée sur l’utilisation de l’intelligence artificielle…
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Pierre Sueur. Le Parlement européen a même insisté pour que, dans le monde entier, l’on fasse preuve d’une grande vigilance à cet égard.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. M. Sueur nous propose de faire figurer dans la loi un moratoire sur le déploiement des systèmes de reconnaissance faciale à des fins répressives.
Au nom de la commission des lois et en mon nom personnel, je souligne qu’il faut faire preuve d’une très grande vigilance face à de tels dispositifs, mais cette précaution n’en est pas moins superflue en droit.
La reconnaissance faciale est un traitement automatisé de données : elle est donc soumise à la réglementation européenne et nationale relative aux données personnelles.
Or, en vertu de l’article 9, alinéa 1, du RGPD, qui est d’application directe dans notre droit et dont l’usage a encore été facilité par un texte de loi voté par le Sénat, le traitement des données biométriques aux fins d’identifier une personne physique est interdit. Tel est l’état du droit européen en la matière, lequel – j’y insiste – est d’application directe en droit français.
Par exception, le traitement de ces données peut être autorisé lorsque l’intéressé accorde son consentement ou lorsque d’importants motifs d’intérêt public l’imposent. Dans ce dernier cas, une loi autorisant la reconnaissance faciale serait nécessaire, mais un tel texte n’existe pas aujourd’hui.
En d’autres termes, si des dispositifs de reconnaissance faciale devaient être mis en œuvre, ils ne pourraient être que la conséquence d’un débat parlementaire.
Pour l’ensemble de ces raisons, il ne me semble pas utile d’inscrire un moratoire dans la loi ; notre commission a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Fesneau, ministre délégué. Sur cette question, je ne sais si je saurai dire mieux que M. le rapporteur !
Monsieur Sueur, ce qui n’est pas explicitement autorisé par la loi est interdit dans ce domaine : aussi un moratoire de cette nature ne nous paraît-il pas utile.
Comme vous, nous jugeons nécessaire d’avancer avec prudence sur ces sujets compte tenu de leur grande sensibilité, que M. le rapporteur et vous-même avez rappelée. Il faut saisir cette question à bras-le-corps et l’aborder collectivement, par des réflexions transpartisanes, en associant les acteurs concernés et même l’ensemble de la société civile.
Or un moratoire, au demeurant juridiquement inutile, enverrait un signal extrêmement négatif : non seulement il interdirait cette réflexion, mais il priverait l’État de toute capacité à engager des travaux permettant d’en encadrer l’usage et, le cas échéant, de l’expérimenter. En ce sens, il pourrait entraver la lutte contre les principales menaces pesant sur la sécurité publique, au premier rang desquelles le terrorisme.
Aussi, j’émets à mon tour un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 14.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 7
I. – Après le titre V du livre II du code de la sécurité intérieure, il est inséré un titre V bis ainsi rédigé :
« TITRE V BIS
« VIDÉOSURVEILLANCE DANS LES LIEUX DE PRIVATION DE LIBERTÉ
« Art. L. 256-1. – L’autorité administrative peut mettre en œuvre des systèmes de vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue et de retenue douanière pour prévenir les risques d’évasion de la personne placée en garde à vue ou en retenue douanière et les menaces sur cette personne ou sur autrui.
« Une affiche apposée à l’entrée de la cellule équipée d’un système de vidéosurveillance informe de l’existence dudit système ainsi que des modalités d’accès et de rectification des données recueillies.
« Art. L. 256-2. – Le placement sous vidéosurveillance de la personne placée en garde à vue ou en retenue douanière est décidé par le chef du service responsable de la sécurité des lieux concernés ou son représentant, lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser que cette personne pourrait tenter de s’évader ou représenter une menace pour elle-même ou pour autrui.
« Le placement sous vidéosurveillance est décidé pour une durée strictement nécessaire au regard du comportement de la personne concernée, qui ne peut excéder vingt-quatre heures. Il est mis fin à la mesure dès que les motifs qui l’ont justifiée ne sont plus réunis.
« L’autorité judiciaire compétente sous le contrôle de laquelle s’exerce la garde à vue ou la retenue douanière est informée sans délai de la mesure. Elle peut y mettre fin à tout moment.
« Au-delà d’une durée de vingt-quatre heures, le placement de la personne sous vidéosurveillance ne peut être prolongé, sur demande du chef de service établissant que les motifs justifiant la mesure sont toujours réunis, qu’avec l’autorisation de l’autorité judiciaire compétente, pour des périodes de même durée, jusqu’à la levée de la garde à vue ou de la retenue douanière.
« La décision de placement sous vidéosurveillance est notifiée à la personne concernée, qui est informée qu’elle peut à tout moment demander à l’autorité judiciaire compétente qu’il soit mis fin à la mesure de placement sous vidéosurveillance.
« Lorsque la personne concernée est mineure, ses représentants légaux et l’avocat qui l’assiste, en application de l’article L. 413-9 du code de la justice pénale des mineurs, sont informés sans délai de la décision de placement sous vidéosurveillance ainsi que, le cas échéant, de son renouvellement. Le médecin désigné en application de l’article L. 413-8 du même code indique si le placement sous vidéosurveillance du mineur est compatible avec son état de santé.
« Lorsque la personne concernée bénéficie d’une mesure de protection juridique, son avocat ainsi que, le cas échéant, la personne désignée en application de l’article 446 du code civil, sont informés sans délai de la décision de placement sous vidéosurveillance ainsi que, le cas échéant, de son renouvellement. Un médecin inscrit sur la liste mentionnée à l’article 431 du même code indique si le placement sous vidéosurveillance de la personne sous protection juridique est compatible avec son état de santé.
« La personne concernée, son avocat ainsi que ses représentants légaux lorsqu’elle est mineure et son avocat et, le cas échéant, son curateur ou son tuteur lorsqu’elle est sous protection juridique sont informés du droit prévu à l’article L. 256-4 du présent code de demander la conservation des enregistrements ainsi que de la durée de cette conservation. Ils sont également informés des droits dont ils bénéficient en application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’exception du droit d’opposition prévu à l’article 110 de la même loi, qui ne s’applique pas aux systèmes de vidéosurveillance mentionnés à l’article L. 256-1 du présent code.
« Art. L. 256-3. – Le système de vidéosurveillance permet un contrôle en temps réel de la personne placée en garde à vue ou en retenue douanière. Un pare-vue fixé dans la cellule de garde à vue ou de retenue douanière garantit l’intimité de la personne tout en permettant la restitution d’images opacifiées. L’emplacement des caméras est visible.
« Sont enregistrées dans ces traitements l’ensemble des séquences vidéo provenant des systèmes de vidéosurveillance des cellules concernées.
« Aucun dispositif biométrique ou de captation du son n’est couplé avec ces traitements de vidéosurveillance. Aucun rapprochement, interconnexion ou mise en relation automatisé avec d’autres traitements de données à caractère personnel ne peut être réalisé.
« Art. L. 256-4. – Les images issues du système de vidéosurveillance peuvent être consultées en temps réel par le chef de service ou son représentant individuellement désigné et spécialement habilité par lui, pour les seules finalités mentionnées à l’article L. 256-1.
« À l’issue de la garde à vue ou de la retenue douanière, hors le cas où ils sont utilisés dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire, les enregistrements sont conservés sous la responsabilité du chef du service ayant prononcé le placement de la personne sous vidéosurveillance pendant une durée de sept jours, sans que nul ne puisse y avoir accès, sauf pour les besoins d’un signalement dans ce délai à l’autorité judiciaire, dans les conditions prévues à l’article 40 du code de procédure pénale. Cette durée est portée à un mois à compter du lendemain de la levée de la garde à vue ou de la retenue douanière lorsque la personne ayant fait l’objet de la mesure demande, dans un délai de sept jours à compter de la fin de la garde à vue ou de la retenue douanière, la conservation des enregistrements la concernant. À l’issue de ces délais, les enregistrements sont détruits.
« L’autorité responsable tient un registre des systèmes de vidéosurveillance mis en œuvre, qui précise l’identité des personnes qui ont fait l’objet d’un placement sous vidéosurveillance, la durée des enregistrements réalisés ainsi que les personnes ayant visionné les images, y compris en temps réel.
« Art. L. 256-5. – Les modalités d’application du présent titre et d’utilisation des données collectées sont précisées par un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. Ce décret détermine les mesures techniques mises en œuvre pour garantir la sécurité des enregistrements et assurer la traçabilité des accès aux images. »
II. – (Supprimé)
Mme la présidente. L’amendement n° 46, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. L’article 7, dont nous proposons ici la suppression, encadre le recours à la vidéosurveillance des cellules de garde à vue des services de la police et de la gendarmerie nationales.
Le Gouvernement avait déjà fait voter cette mesure dans la loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés, mais l’article 41, où elle figurait, a été entièrement censuré par le Conseil constitutionnel.
Je le dis et je le répète : nous sommes vertement opposés à la mise en œuvre de la vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue. Il s’agit d’une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée, comme l’a d’ailleurs souligné le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 mai dernier.
En outre, nous dénonçons l’argumentaire que le Gouvernement déploie pour justifier une telle mesure, argumentaire que nous trouvons – pardonnez-moi l’expression, monsieur le ministre – particulièrement hypocrite.
À en croire l’exposé des motifs du projet de loi, « l’observation régulière des cellules de garde à vue permet de diminuer notablement les risques de suicide, d’automutilation, d’agression ou d’évasion ». Or ces situations de détresse humaine ne résultent en rien de l’absence de vidéosurveillance, mais plutôt de conditions insalubres de détention, que la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a récemment dénoncées.
Cette situation matérielle est préjudiciable à la fois aux gardés à vue et aux fonctionnaires de police, à qui l’on inflige des conditions de travail indignes.
De son côté, la Défenseure des droits préconise que le présent texte apporte des précisions quant à l’existence de « raisons sérieuses » justifiant le recours à la vidéosurveillance. Sur ce point, l’étude d’impact n’est absolument pas étayée.
En outre, comme le souligne la CNIL, « de tels dispositifs, qui permettent une surveillance permanente, portent par nature une atteinte grave au droit au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel d’individus déjà soumis à des mesures restrictives de libertés. Une telle atteinte ne peut dès lors être admise que si elle apparaît strictement nécessaire au but poursuivi ».
Enfin, il est à craindre que le développement de ce type de dispositifs ne conduise à en banaliser l’usage, par sa substitution aux moyens humains de surveillance.
Madame la présidente, deux minutes, c’est vraiment très court pour s’exprimer sur des sujets si importants ; mais, puisque la majorité a modifié le règlement en ce sens, nous nous y plions… En tout cas, nous essayons !