Mme la présidente. La discussion générale est close.
La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion de la proposition de loi initiale.
proposition de loi tendant à sécuriser l’intégration des jeunes majeurs étrangers pris en charge par l’aide sociale à l’enfance
Article 1er
Le chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, est complété par une section 7 ainsi rédigée :
« Section 7
« Étranger confié au service de l’aide sociale à l’enfance
« Art. L. 421-36. – Dans l’année qui suit son dix-huitième anniversaire, l’étranger qui a été confié au service de l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans, et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention “salarié” ou “travailleur temporaire” d’une durée d’un an, sans que lui soit opposable, ni la situation de l’emploi, ni la condition prévue à l’article L. 412-1.
« Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite et de l’avis de la structure d’accueil sur son insertion dans la société française. »
Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
d’un an
par les mots :
égale à celle restant à courir du cycle de formation dans lequel est inscrit l’étranger et dont la durée ne peut être inférieure à un an
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Cet amendement, que je qualifierai d’amendement de bons sens, vise à garantir un titre de séjour qui couvre la totalité de la durée de la formation des jeunes en question, parce qu’il nous semble contre-productif de fixer un titre de séjour annuel pour des jeunes en formation, laquelle, par définition, peut excéder le délai d’un an.
On doit avoir un objectif fort en matière de formation de ces jeunes, et ce afin de les préparer au mieux à leur avenir professionnel, mais aussi personnel. On peut comprendre qu’ils aient des réticences à s’engager dans des parcours de formation, notamment dans une formation longue, s’ils ne sont pas sûrs de pouvoir la terminer.
C’était d’ailleurs l’un des objectifs de la carte de séjour pluriannuelle pour les étudiants étrangers lorsque celle-ci a été instaurée.
Dans nos départements, nous connaissons, les uns et les autres, les situations de jeunes qui sont en formation, en apprentissage, qui suivent des études pour obtenir un diplôme et qui se voient cependant délivrer des OQTF, ce qui est absolument incompréhensible, comme de nombreux collègues l’ont souligné.
On ne peut à la fois défendre l’idée d’une obligation de formation des jeunes que la France accueille et, en même temps, les empêcher, puisque c’est de cela qu’il s’agit, de terminer leur formation. C’est d’autant plus problématique que ce titre de séjour restreint à une durée annuelle peut rendre les employeurs formateurs plus réticents à accueillir des jeunes, précisément parce que la possibilité que ces derniers terminent leur formation en serait hypothéquée.
Par cet amendement, nous proposons donc tout simplement de permettre que le titre de séjour couvre la totalité de la durée de la formation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Je veux juste rappeler à notre collègue que la commission des lois s’est prononcée contre le principe même d’une voie d’accès au séjour de droit pour les jeunes majeurs pris en charge par l’aide sociale à l’enfance. Par cohérence, je suis bien évidemment défavorable à l’assouplissement de ce dispositif.
De même, la durée de droit commun des cartes de séjour salarié ou travailleur temporaire est d’un an. Étendre cette durée pour les seuls MNA pris en charge par l’ASE après l’âge de 16 ans créerait une rupture d’égalité avec les autres demandeurs de titre.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par Mme Benbassa, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le caractère réel et sérieux se détermine par l’assiduité à la formation, l’engagement du jeune majeur étranger au sein de la formation dont la participation à la vie de l’entreprise, l’apprentissage de la langue française et l’accompagnement effectif de la structure d’accueil dans toutes les démarches administratives. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. L’article 1er de la proposition de loi modifie le Ceseda afin de permettre l’octroi de plein droit d’une carte de séjour temporaire salarié ou travailleur temporaire aux jeunes confiés à l’ASE ayant atteint leur majorité et suivant depuis au moins six mois une formation destinée à leur apporter une qualification professionnelle.
Il serait préférable d’inclure à cet article un alinéa visant à clarifier le caractère « réel et sérieux » mentionné au premier alinéa de l’article 1er. Cela évitera un flou dans leur caractérisation.
Je propose alors que soient indiquées les bases sur lesquelles l’administration pourra s’appuyer. Il me semble essentiel que tout jeune majeur confié à l’ASE ait le droit à cette carte et que celle-ci soit attribuée au regard des motivations suivantes.
Seront pris en compte l’assiduité à la formation, l’engagement du jeune majeur au sein de la formation comme sa participation à la vie de l’entreprise. Bien entendu, l’apprentissage de la langue française est un élément nécessaire à une bonne intégration dans la société.
Je souhaite insister sur l’accompagnement effectif de la structure d’accueil dans les démarches administratives : ces jeunes doivent être renseignés correctement. Parfois, par manque de temps ou de personnel, des informations ne leur sont pas transmises. C’est alors un véritable parcours du combattant pour obtenir ne serait-ce qu’une aide dans la préparation de leur dossier. Il ne faudrait pas que cela leur porte préjudice dans l’octroi de leur carte.
Cet amendement a donc pour objet d’ajouter ces garanties dans la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Ce sera un avis défavorable, pour les raisons que j’ai indiquées tout à l’heure, la commission s’étant prononcée contre ce principe d’attribution de droit d’une carte de séjour à ces jeunes.
De toute façon, ces critères quant au caractère « réel et sérieux » de la formation prescrite sont des éléments qui sont déjà pris en compte dans le cadre de la délivrance des titres.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Madame la sénatrice, au-delà des arguments de principe, au-delà des raisons qui viennent d’être invoquées, il ne nous paraît pas nécessaire d’encadrer de manière aussi détaillée le pouvoir d’appréciation de l’autorité administrative.
En effet, l’annexe 10 du Ceseda, qui peut être modifié par un arrêté, prévoit la liste des pièces justificatives à produire à l’appui d’une demande de titre de séjour, notamment les pièces qui permettent d’apprécier les conditions relatives au « caractère réel et sérieux du suivi de la formation » – relevé de notes, attestations d’assiduité, etc. – et à l’intégration.
le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er n’est pas adopté.)
Article 2
Le chapitre II du titre II du livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 précitée, est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Étranger confié au service de l’aide sociale à l’enfance
« Art. L. 422-15. – Dans l’année qui suit son dix-huitième anniversaire, l’étranger qui a été confié au service de l’aide sociale à l’enfance entre l’âge de seize ans et l’âge de dix-huit ans, et qui justifie suivre depuis au moins six mois un enseignement en France ou qu’il y fait des études, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention “étudiant” d’une durée d’un an, sans que lui soit opposable la condition prévue à l’article L. 412-1.
« Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation et de l’avis de la structure d’accueil sur son insertion dans la société française. »
Mme la présidente. L’amendement n° 4, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
d’un an
par les mots :
égale à celle restant à courir du cycle d’études dans lequel est inscrit l’étranger
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Il est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par Mme Benbassa, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le caractère réel et sérieux se détermine par l’assiduité à la formation, l’engagement du jeune majeur étranger au sein de la formation dont la participation à la vie scolaire, l’apprentissage de la langue française et l’accompagnement effectif de la structure d’accueil dans toutes les démarches de l’étudiant. »
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Il serait préférable d’inclure à l’article 2 un alinéa visant à clarifier le caractère « réel et sérieux » mentionné à son premier alinéa. Cela éviterait, comme je l’ai dit précédemment, de maintenir le flou autour des critères d’appréciation.
Les exigences prévues sont les mêmes que pour l’article précédent.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Comme pour les dispositions similaires qui visent l’article 1er, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.
(L’article 2 n’est pas adopté.)
Article 3
Au 1° de l’article L. 421-35 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 précitée, après le mot : « articles », est insérée la référence : « L. 421-36, ».
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 n’est pas adopté.)
Article 4
L’article L. 435-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 précitée, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les mêmes conditions, l’étranger qui justifie suivre un enseignement en France ou qu’il y fait des études peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention “étudiant” si cette formation n’est pas destinée à lui apporter une qualification professionnelle. »
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 4.
(L’article 4 n’est pas adopté.)
Article 5
Au second alinéa de l’article L. 423-22 et à la première phrase de l’article L. 435-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 précitée, les mots : « , de la nature des liens de l’étranger avec sa famille restée dans son pays d’origine » sont supprimés.
Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l’article 5.
Je rappelle que, si cet article n’était pas adopté, il n’y aurait plus lieu de voter sur l’ensemble de la proposition de loi, dans la mesure où les cinq articles qui la composent auraient été rejetés. Il n’y aurait donc pas d’explications de vote sur l’ensemble.
La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour explication de vote sur l’article.
M. Jacques Grosperrin. Tout à l’heure, en nous présentant sa proposition de loi, Jérôme Durain nous a relaté ce qui s’est passé à Besançon.
Pour ma part, j’habite Besançon, et cette histoire, c’est celle de M. Ravacley, qui est un homme formidable, un boulanger pétri de qualités, si vous permettez l’expression, un honnête homme, quelqu’un qui a du cœur, beaucoup d’humanité, et qui emploie un jeune apprenti formidable, le petit Traoré, qui doit partir pour Dijon y exercer ce métier, toujours par amour pour celui-ci.
À Besançon, d’autres boulangers, confrontés à la même problématique, ont vu la situation réglée par le préfet. Je pense au cas du jeune Guinéen Lamine Diaby.
Il n’y a pas, d’un côté, les bons, qui auraient du cœur, et, à l’opposé, les autres, qui n’en auraient pas au motif qu’ils ne voteront pas cette proposition de loi.
Cela a été dit tout à l’heure, nombre d’enfants et de jeunes ont suivi des parcours prometteurs, et ces jeunes en font partie. Et comme l’ont rappelé tout à l’heure Mme la ministre et Mme la rapporteure, 90 % des dossiers les concernant ont connu une issue favorable en 2021.
Pourquoi une loi, alors que le préfet a la possibilité de discriminer ces parcours ? Il nous faut améliorer les procédures, et les outils juridiques existent. J’ai été sensible aux propos qu’a tenus tout à l’heure Thani Mohamed Soilihi quand il évoquait des « bouleversements ». Je ne sais s’il y aura un appel d’air ; en revanche, je sais qu’il faut mener une vraie réflexion sur l’apprentissage en France et sur les raisons pour lesquelles certains jeunes ne veulent pas s’y engager.
Je ne suis pas certain que ce texte apportera des solutions, lesquelles sont ailleurs. Elles sont diplomatiques – je pense à la Guinée ou à d’autres pays –, ou réglementaires. Madame la ministre, peut-être faudrait-il diffuser une circulaire à l’attention des préfets pour préciser de nouveau leur fonction, leur rôle et leur rappeler le discernement dont ils doivent faire preuve pour ne pas laisser ces jeunes de côté.
Je félicite Jérôme Durain d’avoir provoqué ce débat, mais nous n’avons pas besoin d’une loi : chaque cas doit être étudié précisément.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote sur l’article.
M. Bernard Bonne. Certes, il était intéressant d’aborder cet après-midi la question des mineurs non accompagnés, laquelle l’a déjà été lors de l’examen de la loi 3DS, ou différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification.
Cependant, la plupart de ces problématiques seront traitées dans le projet de loi relatif à la protection des enfants, que le Sénat devrait examiner d’ici à la fin de l’année.
Par conséquent, je confirme que, personnellement, je voterai contre ce texte, non pas que je sois opposé au principe d’une discussion, mais simplement parce que j’estime que l’on ne peut débattre trois fois du même sujet à l’occasion de trois textes différents.
Mme la présidente. La parole est à M. Jérôme Durain, pour explication de vote sur l’article.
M. Jérôme Durain. Lors des débats en commission, l’un de nos collègues nous a dit : « C’est bien, vous êtes généreux », tandis que, tout à l’heure, il a été question d’émotion.
En fait, nous nous fichons un peu de la générosité et de l’émotion : ce que nous voulons, c’est de l’efficacité, comme l’a dit tout à l’heure avec beaucoup de talent notre collègue Jean-Yves Leconte, au service des principes de la République.
Il est question d’humanité, de la dignité de ces jeunes, d’un accès sécurisé à notre territoire. Il ne s’agit pas de « verrouiller » un statut juridique, mais de veiller à offrir à ces jeunes un accueil de qualité, des jeunes qui, comme le disait là encore Jean-Yves Leconte, sont souvent poussés hors de chez eux par leur propre famille.
Cela m’amène à contester très fermement, comme nous le faisons au travers de ce texte, le critère relatif à la nature des liens avec la famille restée dans le pays d’origine, critère complètement faussé dans la mesure où c’est souvent elle qui pousse ces enfants à cet exil.
Je veux aussi revenir sur la portée juridique de la notion de « plein droit ». Je le répète : il n’est nullement question d’automaticité. L’argument selon lequel nous créerions ainsi un appel d’air est invalidé par ces critères objectifs que nous avons rappelés, lesquels permettent d’attester que des jeunes sont bien inscrits dans un parcours d’intégration, ce qui est souvent le cas.
Comme elles ont été décrites, de manière un peu lisse, l’impression prévaut que l’essentiel des situations serait traité favorablement. Si tel était le cas, alors nous ne verrions pas toutes ces mobilisations en France. Ainsi, une pétition mise en ligne a recueilli près de 50 000 signatures.
Il faut donc mener ce travail, et d’autres textes seront nécessaires. Cette proposition de loi est une occasion manquée de manifester cette humanité que nous devons à ces jeunes dont notre économie a besoin et que leurs patrons soutiennent, mais nous continuerons à porter ce combat juste, qui est à l’honneur de la République.
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote sur l’article.
Mme Esther Benbassa. Je remercie dans un premier temps le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain d’être à l’initiative de cette proposition de loi. Ce texte vient compléter le projet de loi relatif à la protection des enfants, adopté en première lecture par l’Assemblée nationale en juillet dernier.
Un amendement du Gouvernement a réintroduit la question du sort des jeunes majeurs étrangers, grands oubliés du texte initial. Ainsi, je me réjouis que le Sénat s’empare de ce sujet. Comment ne pas être sensible au sort de ces jeunes, arrivés mineurs, qui ont fait de la France leur pays d’adoption ? Devenus majeurs, ils sont alors menacés d’expulsion et réduits à vivre dans l’indigence, la peur et la clandestinité.
L’objectif de ce texte est de faciliter l’obtention d’une carte de séjour temporaire aux jeunes majeurs étrangers suivant une formation professionnelle ou académique. On ne peut pas les empêcher de poursuivre leur intégration ; on doit plutôt les y encourager. Il faut que ces jeunes, qui suivent assidûment une formation, ne rencontrent pas d’obstacles administratifs. Je suis certaine qu’ils rendront à la France ce qu’elle a investi dans leur formation.
Ce texte est une réponse à ces jeunes, à leurs éducateurs, à leurs enseignants et à leurs employeurs. Leur message a été entendu. Personnellement, je voterai pour.
Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour explication de vote sur l’article.
Mme Élisabeth Doineau. Le groupe Union Centriste, cela a été dit par ma collègue Nathalie Goulet, n’est pas favorable à ce texte. Néanmoins, à titre personnel, je salue l’initiative de Jérôme Durain.
Cette proposition de loi soulève deux contradictions et souligne des obligations.
La première des contradictions, c’est que, d’un côté, la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance incite les départements à éviter les sorties sèches des jeunes, notamment des mineurs non accompagnés – c’est ce que l’on s’évertue à faire pour certains d’entre eux –, cependant que, d’un autre côté, le ministère de l’intérieur met fin au parcours de ces jeunes quand ils atteignent l’âge de 18 ans.
La seconde contradiction, c’est que des chefs d’entreprise, très heureux d’accueillir ces jeunes, qui nous interpellent – j’ai deux exemples récents à l’esprit –, voudraient leur permettre de poursuivre leur engagement professionnel à leurs côtés.
S’agissant des obligations, je voudrais vous inciter, madame la ministre, à intervenir auprès des préfets, afin que soient mis en place ces protocoles ; si certains le font, d’autres ne le font pas. Ce serait le moyen de rapprocher les centres académiques pour la scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage (Casnav) et les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (Direccte), qui ne travaillent pas suffisamment ensemble pour préparer en amont l’avenir de ces jeunes.
Les uns et les autres, nous avons tous en tête de très bons exemples d’intégration de ces jeunes, mais nous ne sommes pas capables de les mettre en avant. La communication mériterait d’être améliorée dans ce domaine.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’article.
M. Guillaume Gontard. Au nom du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, je souhaite tout d’abord remercier l’auteur de ce texte particulièrement important.
Tous, dans nos territoires, nous avons rencontré ces situations, qui concernent des bouchers, des boulangers et bien d’autres professions. Ces jeunes de 16 à 18 ans, inévitablement, ont tissé des rapports humains avec ces artisans, lesquels leur ont transmis leur savoir-faire et les ont accompagnés tout au long de leur cycle de formation. Et quand ils atteignent l’âge de 18 ans, il faudrait leur dire « stop » et tout arrêter ? C’est totalement impossible.
Par conséquent, ce texte est particulièrement important à cet égard. Tout le monde s’accorde sur ce constat, mais certains en tirent la conclusion qu’il suffirait de demander au préfet d’être un peu plus arrangeant.
Or ce serait l’arbitraire le plus total ! Je l’ai moi-même constaté : en fonction des possibilités d’intervenir des préfets, cela marche ou non.
M. Jérôme Durain. Exactement !
M. Guillaume Gontard. Ce n’est pas cela la République ! La République, ce n’est pas l’arbitraire ; c’est tout le contraire. C’est pourquoi ce texte est nécessaire.
Autre réalité, des artisans, des chambres de commerce et d’industrie nous demandent de régler ce problème et expriment leurs besoins de main-d’œuvre et de formations. Et, franchement, l’argument de l’appel d’air, c’est vraiment le dernier des arguments ; on le sait bien, cela ne tient pas.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera bien sûr ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie Mercier, pour explication de vote sur l’article.
Mme Marie Mercier. Évidemment, nous comprenons l’état d’esprit qui a guidé le travail de Jérôme Durain.
Dans nos communes, nous accompagnons tous des jeunes placés dans de telles situations. Dans ma ville de Chalon-sur-Saône, je suis plus spécifiquement des Maliens ; pour deux d’entre eux, nous avons trouvé des emplois de boucher.
Je tiens d’ailleurs à remercier les patrons qui prennent en charge ces jeunes. Je souligne également le courage dont ces derniers font souvent preuve, en suivant leur formation avec assiduité.
Madame la ministre, il faut effectivement que nous travaillions avec les préfets : chaque situation étant particulière, les cas concrets doivent être examinés au cas par cas.
Cela étant, il faut aussi souligner les failles de l’aide sociale à l’enfance (ASE). Les problèmes auxquels nous sommes confrontés se résoudront sans doute autrement que par un texte de cette nature ; quoi qu’il en soit, nous resterons tous très vigilants ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Jacqueline Eustache-Brinio, rapporteure. Très bien !
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix l’article 5.
J’ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Les Républicains, et, l’autre, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 9 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 107 |
Contre | 237 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Les articles de la proposition de loi ayant été successivement rejetés par le Sénat, je constate qu’un vote sur l’ensemble n’est pas nécessaire, puisqu’il n’y a plus de texte.
En conséquence, la proposition de loi n’est pas adoptée.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures trente-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)