Mme Sophie Primas. Quid des sages-femmes libérales ?
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour la réplique.
Mme Émilienne Poumirol. Certes, monsieur le ministre, j’entends bien les réformes que vous avez menées et les efforts très récents que vous avez consentis, mais il n’en demeure pas moins qu’il reste beaucoup de travail, notamment en ce qui concerne la réforme des études ou le statut des sages-femmes, qui constituent, je crois, le sujet le plus important, puisqu’il s’agit de leur principale revendication. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
asile et migrations
M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Belrhiti. Madame la ministre, le pacte européen sur la migration et l’asile a suscité peu d’écho médiatique, mais le sujet n’en est pas moins primordial pour les Français.
La décision de la Commission européenne de mettre en œuvre ce pacte est une bonne nouvelle, alors que la pression migratoire ne fait que s’accentuer.
Je souhaiterais vous interroger sur une proposition importante, bien qu’absente du projet présenté le 23 septembre 2020.
Le pacte prévoit aujourd’hui un filtrage à l’entrée incluant l’identification de toutes les personnes franchissant sans autorisation les frontières de l’Union européenne ou ayant été débarquées après une opération de sauvetage.
Cependant, cette approche axée uniquement sur nos frontières risque de rendre inefficace notre volonté de traiter et d’anticiper l’immigration.
Le Conseil européen du 29 juin 2018 était parvenu à s’entendre sur un point intéressant : la création de plateformes de débarquement en dehors des frontières de l’Union européenne. Il s’agit d’examiner les demandes d’asile dans des centres gérés et financés par les pays européens.
Ces hot spots présenteraient l’avantage d’anticiper les flux et de faire jouer la solidarité européenne, en répartissant les demandeurs avant qu’ils n’échappent aux radars des autorités. Ils enverraient un message clair, qui démontrerait l’unité européenne et, surtout, dissuaderait les passeurs. Cette délocalisation a été récemment votée par le Parlement danois grâce au soutien de l’ensemble de l’échiquier politique.
D’autres pays pourraient suivre cette voie, mais un programme européen aurait beaucoup plus de poids. Bien sûr, il faut convaincre les pays de départ de l’intérêt d’une telle coopération, ainsi que ceux où se situent les principaux points de passage, mais une action coordonnée des instances européennes et des États membres nous permettrait d’obtenir la force d’entraînement nécessaire.
Madame la ministre, la France va-t-elle enfin agir pour traduire la proposition du Conseil européen de juin 2018 en actes ? Va-t-elle se mobiliser pour rendre effectif un traitement de l’immigration qui nous permettra de ne plus subir ces flux et empêchera les drames humains ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice, nous avons longuement discuté hier, dans l’après-midi et en soirée, du paquet européen sur la migration et l’asile. Je remercie d’ailleurs les sénatrices et les sénateurs qui ont pris part à ce débat.
Notre position, longuement exposée hier, est très claire : dans la droite ligne de la volonté affichée par le Président de la République, nous sommes favorables à un équilibre entre humanité et fermeté.
Le droit d’asile ne doit pas être dévoyé. C’est d’ailleurs le sens des négociations européennes qui se déroulent en ce moment. Les échanges se poursuivent, et vous savez que les différents pays abordent cette question avec une volonté de cohérence et d’harmonisation des règles.
Le but est que l’ensemble des États européens, qu’il s’agisse de pays de première entrée ou de pays comme la France, puissent appliquer les mêmes règles de manière cohérente et dans un climat de confiance mutuelle. C’est l’objectif que nous viserons dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne.
Demain matin aura justement lieu une réunion de l’ensemble des ministres européens chargés des questions d’asile et des migrations pour avancer sur ce thème et poursuivre les négociations.
Au sujet du Danemark, je tiens à préciser, comme je l’ai fait hier, que la loi qui a été votée n’a pas de valeur contraignante : il s’agit seulement d’objectifs. Par ailleurs, ce n’est pas à ce stade la ligne retenue dans le cadre des discussions à l’échelon européen, et ce n’est en tout cas pas la position qui sera défendue par la France dans le cadre de la future présidence de l’Union européenne.
Néanmoins, pour vous répondre sur la question des contrôles aux frontières, puisque vous l’avez évoquée, vous savez qu’il existe en Europe une volonté de moderniser les systèmes d’information, et de renforcer les effectifs de Frontex pour doter cette agence par étapes d’un corps de 10 000 agents d’ici 2027. C’est la position ambitieuse que défend la France dans le cadre des négociations qui se déroulent en ce moment au niveau européen. (M. François Patriat applaudit.)
statut des sages-femmes
M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Stéphane Demilly. Monsieur le ministre de la santé, je souhaite revenir sur la situation des sages-femmes.
Celles-ci seront en grève demain, et ce n’est pas la première fois cette année. En effet, depuis janvier, ces professionnels sont déjà descendus plusieurs fois dans la rue pour réclamer davantage de reconnaissance, que ce soit par le biais d’une revalorisation salariale – on vient d’en parler – ou par une augmentation des effectifs dans les maternités.
À la suite des premières mobilisations, le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles et vous-même avez confié une mission à l’IGAS sur l’évolution de la profession de sage-femme.
En effet, malgré toutes les compétences requises et les tâches assumées, les sages-femmes ont aujourd’hui le sentiment de ne pas être reconnues à la juste valeur du travail effectué. Pis encore, elles ont parfois l’impression d’être « maltraitantes » faute de pouvoir accorder le temps nécessaire à chaque patiente. Cette situation s’explique aussi par une pénurie criante de gynécologues dans les hôpitaux. Elles le disent toutes, monsieur le ministre : les sages-femmes ont à cœur de s’occuper au mieux des patientes.
Vous avez déjà formulé plusieurs propositions pour la profession. Ainsi, les sages-femmes travaillant à l’hôpital recevront une prime et bénéficieront d’une revalorisation salariale mensuelle à partir de janvier 2022. C’est bien, c’est un premier pas, mais c’est loin de répondre à toutes les revendications et, surtout, à la profondeur du malaise.
Comme l’a dit ma collègue Poumirol, il me semble que d’autres recommandations de l’IGAS mériteraient plus d’attention de la part du Gouvernement. Des dirigeants d’établissement privé m’ont interpellé à ce sujet, et j’imagine aisément qu’ils ne sont pas les seuls à s’inquiéter de la situation.
Monsieur le ministre, quelles autres réponses allez-vous apporter pour traiter ces iniquités et répondre aux demandes légitimes de cette belle profession ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mmes Viviane Artigalas et Émilienne Poumirol applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur Demilly, je vous remercie de votre question.
J’ai déjà répondu tout à l’heure à propos des revalorisations salariales. Je le redis, l’effort de la Nation s’élèvera à 100 millions d’euros supplémentaires par an pour les 20 000 sages-femmes exerçant dans notre pays, que ce soit en ville ou à l’hôpital. Il s’agit de la plus forte revalorisation salariale jamais consentie. Vous pouvez estimer que ce n’est pas suffisant, mais cela représente tout de même plus de 4 000 euros par sage-femme chaque année. Très honnêtement, je pense que c’est vraiment un geste significatif.
En matière de formation, la demande des sages-femmes portait sur la création d’une sixième année d’études. Je l’ai dit, Frédérique Vidal et moi-même avons dit oui. Une mission de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche est en train de préfigurer cette réforme.
S’agissant des missions exercées par les sages-femmes, le rapport de l’IGAS suggérait de leur permettre d’établir des arrêts de travail, de réaliser des actes de dépistage, de prendre en charge les infections sexuellement transmissibles : nous l’avons autorisé, et vous l’avez du reste voté dans le cadre de l’examen de la loi dite « Rist ».
Nous avons également répondu positivement à une autre demande tendant à la reconnaissance du statut de sage-femme référente. Ce statut, que nous pouvons décliner avec la profession, existe désormais.
On nous a demandé de développer les centres périnataux de proximité et les maisons de naissance : nous y avons donné suite. Ainsi, dans le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, non seulement nous les avons généralisés, mais nous avons créé de nouveaux établissements, avec vingt centres de périnatalité et maisons de naissance supplémentaires.
Monsieur le sénateur, il arrive fréquemment que les syndicats nous interpellent sur tel ou tel sujet et que des conflits sociaux éclatent – ainsi va notre pays. Dans ces cas-là, nous n’arrivons pas toujours à fournir les réponses et nous tentons d’expliquer pourquoi nous n’y parvenons pas.
Mais, s’agissant des sages-femmes, profession que j’affectionne, que je connais bien et que j’ai à cœur, comme toute la représentation nationale, de soutenir, ce n’est pas le cas. J’ai récemment débattu en visioconférence avec les sages-femmes qui le souhaitaient : plus de 8 500 d’entre elles se sont connectées pour échanger librement avec moi pendant une heure, réunion au cours de laquelle j’ai pu faire toutes ces annonces.
Je le répète : nous avons revalorisé les salaires ; nous avons accordé une sixième année d’études ; nous avons aussi confirmé le statut médical des sages-femmes au sein de la fonction publique et modifié la gouvernance de l’hôpital pour qu’elles puissent être représentées au même titre que les médecins par les commissions médicales d’établissement – j’ai fait publier des circulaires en ce sens.
Que reste-t-il ? La seule revendication qui n’a pas connu un sort favorable porte sur le fait de leur accorder le statut de praticien hospitalier, c’est-à-dire le statut de médecin hospitalier, au même titre que les gynécologues ou les chirurgiens cardiaques par exemple. En vérité, l’IGAS ne le souhaite pas, tout simplement parce que l’on devient chirurgien après dix ans d’études…
M. le président. Il faut conclure.
M. Olivier Véran, ministre. … contre cinq ans d’études seulement aujourd’hui pour une sage-femme – même si le cursus passera bientôt à six ans.
Il n’empêche : la revalorisation que nous accordons permettra aux sages-femmes de gagner près de 4 000 euros de plus en fin de carrière.
Mme Sophie Primas. À l’hôpital !
M. Olivier Véran, ministre. Ce geste fort à leur endroit n’est peut-être pas suffisant pour tout le monde, mais on ne pourra pas dire que l’on n’a rien fait ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
intégration des élèves transgenres
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Cédric Vial. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, qui vient de publier une circulaire censée répondre à la situation des élèves transgenres dans le milieu scolaire. Il s’agit là d’un sujet grave, que je regrette de voir traiter ainsi avec tant de légèreté.
S’il est un fait que la société doit prendre en compte des situations d’élèves ou de jeunes confrontés à ce que l’on appelle désormais une dysphorie de genre, cette circulaire place désormais les directeurs d’établissement et les personnels enseignants en charge d’instituer une nouvelle identité de genre choisi par l’élève à partir de son seul ressenti intime, ce qui se traduit, entre autres, par un changement de prénom.
Est-ce bien de la responsabilité des équipes enseignantes d’être, à la fois, officiers de l’état civil, de fait, pour officialiser une identité d’usage, et gendarmes en charge de faire respecter cette nouvelle identité au sein de leur établissement ?
M. Rémi Féraud. Oui !
M. Cédric Vial. Sous peine de quelle sanction, d’ailleurs ?
La responsabilité de l’équipe éducative consiste à écouter, orienter et protéger les élèves. Mais est-ce bien le rôle des enseignants de les accompagner dans une transition identitaire individuelle et de l’opérer en première ligne, comme préconisé par M. le ministre, avec une médiation avec les familles pour favoriser cette transition ?
Par son texte, celui-ci incite également à des accompagnements de transitions précoces, souvent irréversibles, et dont les conséquences, si elles sont effectuées trop précipitamment, peuvent être négatives pour le jeune et son équilibre.
S’il est légitime de prendre en considération ces situations quand elles existent, et de leur apporter une réponse adaptée et individualisée, l’approche de ce texte est tout autre. M. le ministre demande, par exemple, le changement des règlements intérieurs sur les tenues vestimentaires pour faire des exceptions la règle. C’est un pas de plus vers une stratégie de déconstruction, qui nie l’altérité des sexes et créera plus de difficultés qu’elle n’en résoudra. Nous aurions préféré voir M. Jean-Michel Blanquer s’inspirer, plutôt que de l’activiste militante du même nom, du philosophe Jean-Jacques Rousseau lorsque celui-ci écrit : « Les vrais besoins n’ont jamais d’excès. ».
Je lui pose donc cette question : monsieur le ministre, l’école est-elle encore ce sanctuaire au sein duquel on protège les élèves des excès et des violences de la société, comme des discours militants ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’éducation prioritaire.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Je vous prie tout d’abord, monsieur le sénateur Cédric Vial, d’excuser Jean-Michel Blanquer, qui n’a pu être présent parmi nous et m’a chargée de vous répondre.
Je vous remercie de cette question. Elle me donne l’occasion de redire que la mobilisation de toutes et de tous est évidemment indispensable pour créer des environnements scolaires propices, favorables et garantissant le droit des élèves à l’intégrité, au bien-être, à la santé et à la sécurité.
Avec Jean-Michel Blanquer, nous avons effectivement fait le choix de publier un texte qui pose les enjeux du sujet, tout en donnant des éléments pour comprendre et accompagner les situations individuelles, comme vous l’avez dit, et des éléments pour bâtir une politique de prévention de la transphobie à l’échelle de l’établissement scolaire.
Cette circulaire, monsieur le sénateur Vial, n’a pas vocation à traiter l’ensemble de la question des mineurs transgenres ou en questionnement sur leur identité de genre.
Elle vise à donner des clés aux personnels pour accompagner et protéger tous les élèves et, en particulier, prendre en compte les élèves transgenres. Il s’agit d’harmoniser des pratiques, notamment demander l’usage du prénom choisi dans le cadre de la reconnaissance de l’identité de genre dès lors que les représentants légaux ont donné leur accord.
Ce texte a surtout été écrit, monsieur le sénateur Vial, pour que les élèves transgenres puissent réussir leur scolarité dans les mêmes conditions que tous les autres élèves et que la reconnaissance de leur identité de genre, comme corollaire à leur réussite, soit un impératif qui s’impose à tous. Car ces élèves ont, bien sûr, les mêmes droits que les autres ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Thierry Cozic. Ma question s’adresse au ministre de l’économie, des finances et de la relance, représenté ici par M. le ministre Olivier Dussopt.
Le chiffre – 11 300 milliards de dollars – est si vertigineux qu’il ne représente plus rien dans l’imaginaire collectif, si ce n’est, mes chers collègues, qu’il pèse cinq fois le produit intérieur brut de la France ! Nul besoin d’être haut fonctionnaire pour comprendre que l’évasion fiscale nous coûte un « pognon de dingue ».
OffshoreLeaks, ChinaLeaks, Panama Papers, et j’en passe, qu’est-ce qui a changé depuis ? Pas grand-chose ! Sauf que de révélations en révélations, les chiffres sont chaque fois plus colossaux. Chacun de ces scandales vient révéler l’incapacité du Gouvernement à surveiller efficacement ces territoires opaques du monde financier.
Alors que d’aucuns dissertent doctement sur l’idée de travailler jusqu’à 67 ans – pourquoi pas 80, tant qu’on y est –, le Gouvernement sait parfaitement déployer toute l’énergie qui sied lorsqu’il s’agit de traquer de fantomatiques acheteurs d’écrans plats. Mais dès lors que l’on touche aux 1 % des plus riches, il est aux abonnés absents !
Nous devons sortir du mythe selon lequel le système offshore est un outil neutre, simplement mal utilisé par certains. En lui-même, ce système est porteur d’inégalités, car il permet de rompre le contrat social et pousse les plus riches à faire sécession.
Certains sur ces travées étaient bien plus prolixes quand il s’est agi d’aborder le séparatisme religieux ; leurs voix se font moins sonores lorsque ce séparatisme se fait financier. Je ne doute pas, mes chers collègues, que vous sortirez prochainement de ce silence assourdissant.
Pas d’« argent magique », donc, pour les services publics, mais beaucoup d’argent caché au service des plus riches.
M. David Assouline. Les écrans plats !
M. Thierry Cozic. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner clairement les mesures que vous comptez mettre en place afin d’arrêter cette hémorragie que constitue la fuite des capitaux français dans des paradis fiscaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Comme je l’ai indiqué en réponse aux questions précédentes sur le même sujet, la direction générale des finances publiques (DGFiP) est pleinement mobilisée pour exploiter et analyser l’intégralité des données révélées par la presse dans le cadre de l’affaire Pandora Papers, et ce sur ma demande et celle de Bruno Le Maire.
Cette affaire, je tiens à le préciser, est une affaire internationale concernant 117 pays dans lesquels 600 journalistes ont mené des investigations. Les chiffres « énormissimes » qui viennent d’être rappelés ne concernent donc pas uniquement la France.
J’ai également eu l’occasion de souligner que, dans le cadre d’un autre scandale financier – les Panama Papers –, les investigations de la DGFiP ont permis de régulariser 657 dossiers, les autres dossiers ne concernant pas des contribuables français.
Que faire, me demandez-vous, monsieur le sénateur Cozic ? Nous appliquons la loi de 2018, avec la création d’une politique fiscale. Nos services, malgré le confinement et l’arrêt des contrôles sur pièces que celui-ci a entraîné en 2020, sont parvenus à encaisser près de 8 milliards d’euros de redressements et de sanctions, uniquement en France, dans le cadre de la lutte contre la fraude fiscale.
Au niveau européen, les échanges de données, portant sur 84 millions de comptes et concernant plusieurs milliers de milliards d’euros d’actifs, ont permis à l’Europe de détecter des fraudes et d’encaisser plus de 100 milliards d’euros de revenus complémentaires.
Nous avons mis en place des systèmes nouveaux, y compris d’information. Nous avons par exemple pérennisé le système de la rémunération des aviseurs, système proposé par votre collègue de l’Assemblée nationale, Christine Pires Beaune. Nous avons aussi développé des systèmes d’analyse de données – data mining, en mauvais français – et cette analyse de données, associée à l’intelligence artificielle, nous a permis de procéder à 800 millions d’euros de redressements l’année dernière.
C’est pourquoi, monsieur le sénateur Cozic, face à votre colère, je ne peux qu’exprimer un regret : vous auriez pu voter les outils et les crédits permettant à l’administration fiscale de développer cette analyse de données ; vous ne l’avez pas fait ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées du groupe SER.)
situation des étudiants en première année de médecine
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Houpert. Madame la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, à la suite de votre réforme du premier cycle des études de médecine, les étudiants en première année de médecine à Paris ont eu une vingtaine de minutes pour préparer un oral sur des thèmes aussi variés que le racisme ou les barrières de corail.
L’idée était de diversifier les profils des futurs soignants, en leur posant des questions de société… Admettons ! Mais le résultat est qu’une quarantaine d’étudiants, en tête des classements à l’écrit, n’ont pas dû avoir des avis suffisamment éclairés sur la vie sous-marine. Cet oral, qui comptait pour 70 % de leur note finale, les a déclassés, barrant ainsi leur passage en seconde année, sans possibilité de redoubler.
Cette injustice flagrante a conduit plusieurs de ces étudiants médecins à saisir la justice. Médecin, j’ai moi-même vécu la dure réalité d’une première année de médecine pendant laquelle on sacrifiait toute une vie au profit des révisions. Je partage totalement le sentiment de ces étudiants d’avoir été volés.
Madame la ministre, que comptez-vous faire aujourd’hui pour ces étudiants sacrifiés ? Je vous demande de réétudier leur dossier afin de leur permettre de devenir les médecins dont notre pays a besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation. Permettez-moi tout d’abord, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Houpert, de saluer les dizaines de milliers d’étudiants qui, cette année, entament ou poursuivent leurs études de santé. Je veux leur dire à quel point leur présence a été importante durant la pandémie que nous venons de vivre.
M. François Bonhomme. Ça va les rassurer !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Permettez-moi de saluer les 17 660 jeunes qui, cette année, entament leur deuxième année de formation médicale. Ils sont 2 663 de plus que l’année dernière.
Pour répondre précisément à votre question (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), monsieur le sénateur Houpert, personne ici ne souhaiterait que les jurys de concours soient menés par les politiques. Les épreuves que vous évoquez ont été pensées par des professeurs de médecine, en vue du recrutement de leurs futurs collègues. Il me paraît important que l’on puisse respecter le choix de ces jurys.
Mais venons-en à la vraie question qui a été traitée par la loi ayant modifié en profondeur les études de santé. Je viens d’évoquer le numerus apertus et les 2 600 jeunes supplémentaires poursuivant des études de santé ; mentionnons surtout la possibilité de démarrer ses études et de faire des stages d’externat et d’internat partout sur le territoire.
M. François Bonhomme. Ce n’est pas la question !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Comment voulez-vous lutter contre les déserts médicaux, en concentrant toute la formation médicale dans 34 grandes villes françaises ?
M. Bruno Retailleau. Ce n’est pas la question !
Mme Frédérique Vidal, ministre. Le vrai sujet, c’est donc les moyens que nous mettons en place pour arrêter la désertification médicale.
M. François Bonhomme. Avec la barrière de corail ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Aux jeunes dont vous parlez, je veux dire que tout est mis en œuvre pour qu’ils puissent à nouveau présenter ce concours en deuxième année. Nous ferons tout pour les accompagner ! (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour la réplique.
M. Alain Houpert. Vous n’avez pas répondu à ma question, madame la ministre, et je regrette votre manque d’empathie.
Notre pays peut-il se permettre de sacrifier plusieurs dizaines d’étudiants brillants, appelés à devenir de bons citoyens, sous prétexte qu’ils n’ont pas d’avis sur des sujets de société ? Je ne le pense pas.
Si j’ai besoin d’informations sur les coraux, madame la ministre, je ne vais pas chez mon médecin ; j’appelle l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, l’Ifremer. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Henri Cabanel, Mmes Anne-Catherine Loisier et Laurence Cohen applaudissent également.)
éoliennes en baie de saint-brieuc
M. le président. La parole est à M. Alain Cadec, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Cadec. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la transition écologique, dont je regrette d’ailleurs l’absence.
Lors de son déplacement en Polynésie française, à la fin du mois de juillet, le Président de la République a déclaré à propos du développement des parcs éoliens : « Là où ils créent trop de tensions, dénaturent et défigurent le paysage, il faut savoir ou les adapter ou y renoncer. » Je saisis l’occasion de cette déclaration pour attirer l’attention sur le parc éolien offshore de la baie de Saint-Brieuc.
Ce parc est d’abord un projet mal né. Sans prise en compte des particularités des fonds marins, sans étude d’impact sérieuse et sans véritable concertation avec les principaux utilisateurs – les pêcheurs – de l’espace maritime concerné, il est effectivement en passe de faire l’unanimité contre lui.
Il apparaît clairement que les travaux nécessaires à son implantation provoquent la destruction des fonds marins. Ces désordres, préjudiciables à la biodiversité, vont impacter directement les activités de la pêche côtière et, par conséquent, le gisement de coquilles Saint-Jacques de la baie.
Pardonnez-moi, mes chers collègues, mais j’en ai marre de ce masque… (M. Alain Cadec retire son masque. – Protestations sur les travées du groupe SER et au banc des ministres.)
Par ailleurs, défigurer le paysage du cap Fréhel, classé au titre des grands sites de France, en implantant 62 éoliennes de 207 mètres de haut à 15 kilomètres des côtes, serait un non-sens. Pour mémoire, la tour Montparnasse mesure 210 mètres.
Que les choses soient claires, mesdames, messieurs les ministres : les énergies renouvelables, en particulier l’éolien offshore, doivent être développées en complément de notre production nucléaire, mais pas n’importe où, pas n’importe comment et pas à n’importe quel prix !
Compte tenu des propos du Président de la République, le Gouvernement serait-il prêt à renoncer à ce projet et à réfléchir à une ambition alternative plus réaliste et plus adaptée aux caractéristiques de nos côtes ? Je pense à l’éolien flottant, qui a la particularité d’être implanté plus loin des côtes et ne nécessite pas de forages profonds.
Cerise sur le gâteau, le Conseil d’État ayant relevé des irrégularités, le parquet national financier vient de se saisir du dossier d’attribution de ce marché à Iberdrola. Sans commentaire ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)