M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Madame la ministre, vous venez de rappeler que l’eau, plus encore que l’assainissement, est un sujet qui revient chaque fois que nous débattons dans cet hémicycle de questions ayant trait aux territoires et aux collectivités.
Ce n’est pas un hasard. Rares sont en effet les textes qui nous rassemblent autour de ces questions. Chaque disposition qui permet une forme de gestion plus assouplie, qui redonne aux communes et aux syndicats la capacité de gérer l’eau, est votée à l’unanimité ou à la quasi-unanimité des sénateurs.
M. André Reichardt. Absolument !
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. C’est tout sauf le fruit du hasard !
Il suffit d’observer chacun de nos départements. L’eau n’est pas qu’une question de culture, madame la ministre : c’est la seule compétence qui réponde non pas à une logique intercommunale, mais à une logique de bassin versant.
M. Gérard Longuet. Exactement !
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Ce faisant, elle nous invite à réfléchir et à reconnaître qu’elle exige peut-être une gouvernance et une gestion singulières.
Je fais miens vos propos, monsieur Joyandet : nous rencontrons ce problème dans la quasi-totalité des départements de France. Vous avez avec raison évoqué la question des syndicats, mais vous affirmez aussi que certaines communautés de communes ou intercommunalités ne veulent pas d’un retour en arrière. Laissons donc aux communes la liberté de choisir !
M. Gérard Longuet. Exactement !
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Des communes ont choisi d’exercer cette compétence, certaines n’ont même pas attendu que la loi NOTRe soit votée pour opérer ce transfert, des collectivités ont décidé de transférer leur compétence aux syndicats – et tout cela fonctionne très bien.
La logique supra-communautaire peut aussi l’emporter. Certains départements ont ainsi mis en place des syndicats départementaux. C’est le cas de l’Alsace-Moselle, avec le Syndicat des eaux et de l’assainissement (SDEA), de plusieurs départements du sud-ouest et de bon nombre d’autres territoires.
M. André Reichardt. Excellent !
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. De grâce, madame la ministre, écoutez la voix du Sénat qui s’exprime de façon quasi uniforme sur des problématiques de terrain qui, pardon de le dire, n’ont jamais été traitées de façon satisfaisante et qui ont pour conséquence que nos usagers sont directement frappés et qu’année après année le prix de l’eau s’envole.
Je l’ai déjà évoqué : d’un côté, on contraint à transférer la compétence aux intercommunalités, de l’autre, les communes reçoivent de moins en moins d’aides des agences de l’eau. Il y a là tout de même une incohérence et un dysfonctionnement. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Sans surprise, madame la ministre, vous souhaitez, une fois de plus, revenir sur la question de la compétence de l’eau et de l’assainissement qui, si elle ne fait pas l’unanimité, nous rassemble ici très largement.
« À quoi bon faire un texte de loi, puisque le débat sur cette question va revenir ? », vous demande-t-on. Oui, et il faut en tirer les conséquences. Cette question pose problème et n’est toujours pas tranchée.
On peut décider de façon autoritaire et arbitraire de résoudre cette difficulté en imposant le transfert ascendant de compétences pour les communautés de communes. Pour le moment, le seul assouplissement apporté est un report de calendrier.
C’est plus qu’un irritant. C’est une véritable problématique à laquelle se heurtent aujourd’hui les communes comme leurs groupements, quelle que soit la forme que prennent ceux-ci. Cette compétence s’exerce en effet de façon très différente selon les territoires, en fonction évidemment de leur géographie, mais également de leur histoire.
Lorsque l’on fait la tournée de nos communes, on se rend en effet compte, en discutant avec les uns et les autres, sans toujours pouvoir l’expliquer, que les histoires sont différentes. Parfois, c’est un village entier qui s’est mobilisé de façon citoyenne pour permettre l’adduction d’eau dans la plupart des maisons ; cela peut faire sourire, mais cela existe encore ! Sur l’un des points culminants du département de la Loire, sur les hauteurs du Pilat, chaque été, les habitants vont entretenir le réseau, tout le monde a de l’eau et cela se passe très bien.
En revanche, si l’on poursuit ce processus, ce sera la même eau au bout du réseau, mais ce ne sera pas la même facture pour les habitants.
Nous voterons donc contre cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Dans notre hémicycle comme ailleurs, depuis des années, ce sujet sensible anime les débats. Il me semble toutefois qu’il faut l’appréhender de façon objective.
Nos concitoyens doivent pouvoir disposer d’une eau de qualité à un coût maîtrisé ; or toutes les études montrent aujourd’hui que nos réseaux d’eau et d’assainissement ont subi une véritable dégradation, alors que le niveau d’exigence des usagers ne cesse de croître. En outre, les normes environnementales imposent, elles aussi, une amélioration de la qualité de l’eau.
Les investissements réalisés aujourd’hui sont incontestablement insuffisants au regard de ces besoins ; il nous faut donc déterminer le meilleur échelon d’intervention pour atteindre ces objectifs, que tout le monde partage. Nous pensons majoritairement que cet échelon est celui qui permet le plus de mutualisations, c’est-à-dire celui de l’intercommunalité.
À y regarder de près, on constate que, depuis le processus d’intercommunalisation de la gestion de l’eau et de l’assainissement, de plus en plus de régies sont créées et que de plus en plus de basculements du secteur privé au secteur public se produisent.
Lorsque j’étais président d’une communauté d’agglomération, avant même que cela ne soit obligatoire, j’ai pris cette compétence dont l’exercice était auparavant assuré par une société privée. Nous avons ainsi pu faire baisser le prix de l’eau de plus de 40 %, en l’alignant sur les pratiques des régies existantes sur le territoire.
Lorsque la gestion est maintenue à l’échelle de la commune ou d’un syndicat communal, ce sont le plus souvent les grandes entreprises privées qui assurent le service au nom de ces collectivités ; les régies sont minoritaires. En conservant cette gestion différenciée, on continuera à permettre à ces grandes entreprises de bien vivre…
M. Jean-Raymond Hugonet. Heureusement !
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Sans surprise, j’irai dans le même sens que mes collègues.
J’ai du mal à comprendre l’acharnement du Gouvernement sur cette question de l’eau et l’assainissement. Ce sujet est devenu un véritable marqueur de sa vision centralisatrice des territoires, alors même que nous débattons d’une loi de décentralisation.
Madame la ministre, vous vous comportez avec les intercommunalités et les élus locaux, comme vous vous comporteriez avec vos administrations : vous nous donnez des consignes, des ordres, vous nous dites ce que nous devons faire et comment nous devons le faire, alors même que nous avons été élus pour cela. Ce sont les élus sur le territoire qui jouissent de la légitimité.
Vous voulez absolument nous imposer ce qui serait bien pour nous, parce que vous pensez savoir mieux que nous ce dont nous avons besoin ; vous voulez faire le bien de ceux qui ne sont pas capables de décider par eux-mêmes de ce qui est bon pour leur territoire, sans faire confiance à l’intelligence des territoires et à leurs situations propres.
Cela a pourtant été rappelé : l’eau potable et l’assainissement emportent des enjeux très différents d’un territoire à l’autre, selon qu’il s’agit de territoires ruraux, de territoires urbains ou de territoires de montagne. Dans ces derniers territoires, madame la ministre, qui ont souffert cet hiver de la fermeture des remontées mécaniques, les questions relatives à l’eau peuvent peser des centaines de millions d’euros. Derrière ce débat, il y a bien un sujet économique.
Mme Cécile Cukierman. Exactement !
M. Cédric Vial. Vous n’allez pas régler depuis Paris les problèmes de bassins versants très difficiles en zone de montagne. Comment prétendez-vous dire à ces élus de montagne ce qui est bon pour eux ?
Cette position est un signe de mépris envers ces élus dont c’est le rôle et révèle une méconnaissance de ce qui se passe sur le terrain.
Je ne reviens pas sur les conséquences en termes de coûts induits pour le consommateur, mais évoquerai plutôt les coûts supplémentaires pour les collectivités, avec les transferts de personnels qui ne se feront pas. En effet, les collectivités locales garderont pour elles des personnels qui connaissent souvent les réseaux. Cela entraînera une perte qui profitera au privé.
Enfin, on impose à l’intercommunalité la gestion de l’eau et de l’assainissement alors qu’on laisse l’urbanisme aux communes. Comment voulez-vous que ces dernières remplissent leur mission de gestion si l’on dissocie la question de l’eau et de l’assainissement de celle de l’urbanisme ? Comment voulez-vous que cela soit gérable ?
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Cédric Vial. Madame la ministre, sur cette compétence, en vous entêtant, vous faites une erreur, celle-là même que le Gouvernement commet depuis quelques années.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Monsieur Marie, attention à ne pas se fourvoyer : il n’est pas question de la régie opposée à la gestion par des entreprises. Ce n’est absolument pas le sujet et cela ne doit pas l’être.
D’ailleurs, il existe aujourd’hui de petites intercommunalités, comme de gros syndicats, qui ont choisi la régie. C’est le cas dans mon département : le plus gros syndicat des eaux, le Syndicat des eaux du bassin de l’Ardèche (SEBA), que connaît bien Anne Ventalon, couvre quasiment un tiers du département et fonctionne en régie. Ce n’est donc pas la question. Je suis certain, d’ailleurs, que nous nous rejoindrions sur beaucoup de points à ce propos.
Madame la ministre, vous avez évoqué la question des syndicats, je dis : Chiche ! Le problème, c’est qu’une loi qui fait souvent débat ici, la loi NOTRe, a créé de grandes intercommunalités et nous place aujourd’hui dans une situation inextricable qui ne permettra même pas de maintenir certains syndicats après 2026.
En effet, vous avez conditionné le maintien des syndicats au fait que ceux-ci couvrent au moins tout ou partie de deux périmètres intercommunaux. Après 2026, on risque d’assister à deux phénomènes négatifs : l’effacement de la gestion par les communes de la compétence eau et la disparition des syndicats n’épousant pas le périmètre d’au moins deux intercommunalités.
C’est préjudiciable, parce que l’on ne respectera plus alors ce qui fait l’essence de la gestion de l’eau : la question des bassins versants.
Oui, la question du prix pose problème, nous l’avons évoqué avec le président de la commission. Il serait sans doute bon que nous nous penchions sur l’évolution du prix de l’eau, pour en faire un juge de paix, notamment dans les territoires les plus ruraux et dans les territoires de montagne, comme l’a dit Cédric Vial. Le coût des investissements nécessaires pour le raccordement et le maillage des eaux dans les zones de montagne n’est en effet pas le même que dans les zones de plaine.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Les prix moyens de l’eau et de l’assainissement vont de 4,08 euros à 4,14 euros entre 2018 et 2019. Il ne s’agit pas d’augmentations très importantes !
Par ailleurs, je rejoins le rapporteur sur ce point : je ne suis pas non plus dans l’opposition entre régie et délégation de service public. À mon sens, il ne faut pas aborder cette question.
Monsieur Vial, de nombreuses lois ont été promulguées sur le sujet sous les gouvernements précédents, quelle qu’ait été leur majorité. Vous dites « votre gouvernement », mais quand le groupe auquel vous appartenez était au pouvoir, il a voté les textes exactement de la même manière. Ne malmenez pas l’histoire et n’accusez pas les autres de tous les maux !
J’ai moi-même réduit dans la loi le périmètre concernant les syndicats, le faisant passer de trois à deux intercommunalités.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cela ne sert à rien !
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Je veux bien recevoir des invectives, mais il y a des limites, y compris dans cet hémicycle.
Je ne mésestime pas l’importance des syndicats. Dans le département de la Vienne, un syndicat départemental, Eaux de Vienne, a été mis en place : les communes se sont mises d’accord et tous les habitants paient le même prix. Les initiatives foisonnent.
Sur la question des syndicats, la loi peut encore apporter des améliorations, mais, franchement, je trouve complètement dépassé que les partisans de la commune envoient des invectives et prennent position contre l’intercommunalité.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est vrai.
M. le président. L’amendement n° 300, présenté par Mmes Cukierman, Assassi, Brulin, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au 8° du I de l’article L. 5215-20-1, les mots : « Eau, assainissement, à l’exclusion de l’hydraulique agricole, » sont supprimés ;
II. – Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le a du 5° du I de l’article 5217-2 est abrogé.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. J’imagine que cela ne va pas vous plaire, madame la ministre, mais tant pis : il s’agit ici d’aller plus loin et de permettre de revenir sur le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux EPCI, en incluant ceux qui ne sont pas des communautés de communes. Cela pose problème dans plusieurs communautés d’agglomération ou au sein des métropoles et on peut s’attendre à des bouleversements à l’avenir, alors que les obligations en matière de lots et la gestion diffèrent au sein d’une même intercommunalité. Là encore, cette mesure prétend harmoniser sans prendre en compte la réalité, l’histoire, ainsi que le service rendu à la population et son prix.
Au-delà de cette seule question, ce débat souligne combien, quels que soient l’échelle et le système, la gestion par les élus de proximité permet un contrôle citoyen du pacte de délégation de pouvoir établi au moment des élections. Cela demeure fondamental dans un siècle où la question de la maîtrise et de la gestion de l’eau est déterminante pour continuer à vivre et à développer les activités humaines sur notre planète.
Nous devons revenir sur cette disposition et allonger la liste des EPCI dans lesquels les communes pourraient récupérer la compétence eau et assainissement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Cet amendement me semble satisfait par la position collective que nous avons à l’instant défendue.
Pour être tout à fait exhaustif sur cette question, je rappelle, car j’ai oublié de le mentionner, que, dans la loi relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, nous avons voté la subdélégation de la compétence eau. Voilà qui démontre combien nous avons toujours essayé de trouver des solutions de façon positive.
N’y voyez pas malice, mais la problématique ici est la même que celle que nous opposions tout à l’heure au divorce de certaines intercommunalités : très souvent, l’État pourrait mettre un peu plus de bonne volonté dans l’accompagnement de cette subdélégation – j’ai des exemples très précis en tête.
Je veux bien admettre que le mécanisme n’a qu’un an, qu’il est relativement nouveau et que cela explique qu’il soit parfois méconnu par certains préfets, sous-préfets ou directeurs départementaux, mais nous avons fait le tour de ces questions.
Notre discussion sur ces amendements découle aussi de notre évaluation du principe de subdélégation. Celui-ci fonctionne manifestement mal, soit parce qu’il est méconnu, soit parce qu’il est volontairement ignoré par les présidents d’intercommunalité, qui ne souhaitent pas qu’une partie de la compétence soit déléguée aux communes, comme par l’État, qui cherche à harmoniser ce type de gestion à l’échelon intercommunal.
J’y insiste, nous ne défendons pas ici des postures et il ne s’agit pas pour nous de bloquer le processus : au contraire, nous cherchons à trouver des solutions. Madame la ministre, je vous invite à reconsidérer notre position, car nous ne sommes que les porte-voix de ce que nous vivons sur nos territoires.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement émet évidemment un avis défavorable sur cet amendement.
Comme le rapporteur, je ne veux rien oublier et je veux souligner le rôle de l’interconnexion, que la compétence intercommunale favorise.
J’habite dans le Loir-et-Cher et j’y ai été maire pendant vingt-cinq ans. Ma commune était alimentée par un forage sur le plateau de Beauce, là où celui-ci tombe sur la Loire. Un jour, le niveau de nitrate y a été trop important et l’eau est devenue impropre à la consommation. Ma commune, qui ne produisait donc plus d’eau, en a acheté à la commune voisine de Saint-Denis-sur-Loire, grâce à une interconnexion réalisée par l’intercommunalité, ainsi qu’à Blois.
Des problèmes se posent partout et on trouve partout des solutions ; l’interconnexion, donc l’intercommunalité, en apporte souvent. Je n’oppose pas les collectivités les unes aux autres : les intercommunalités sont des associations de communes, c’est ce que l’on appelle le bloc communal.
J’insiste sur ce point, même si je reconnais qu’il existe des situations très particulières qui nécessiteraient peut-être d’être étudiées, mais elles doivent l’être calmement et sereinement.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. J’entends les arguments qui ont été avancés.
Certes, les intercommunalités sont des associations de communes, mais certaines ont été créées de force ! On ne peut donc pas prétendre que tout va bien, que tout le monde s’est mis autour de la table pour signer et avancer ensemble comme si de rien n’était.
Même après les renouvellements municipaux, alors que certaines tensions qui pouvaient être liées à des personnalités s’apaisent, des difficultés subsistent, quelle que soit la strate de l’EPCI concerné.
Madame la ministre, heureusement qu’il y a des interconnexions en matière d’eau, mais vous savez comme moi qu’il existe des communes en interconnexion avec une gestion communale de l’eau. Là où se posent des problèmes d’eau, de versants, où plusieurs captages sont possibles, ces interconnexions se sont développées, ne serait-ce que pour satisfaire le besoin en eau.
J’entends les différents arguments, singulièrement ceux du rapporteur, et je retire donc cet amendement.
Mme Françoise Gatel, rapporteur. Très bien !
Mme Cécile Cukierman. Je ne doute pas, au regard des débats récurrents que nous avons sur ces questions, qu’il faudra mener une véritable évaluation en matière de gestion de l’eau, quelle que soit la taille des EPCI concernés.
M. le président. L’amendement n° 300 est retiré.
L’amendement n° 1666 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 1696, présenté par Mme Gatel et M. Darnaud, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 12, première phrase :
Après le mot :
service
insérer le mot :
public
La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 5 bis, modifié.
(L’article 5 bis est adopté.)
Articles additionnels après l’article 5 bis
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 340 rectifié bis est présenté par MM. Dantec, Benarroche et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.
L’amendement n° 1614 rectifié bis est présenté par MM. Richard, Mohamed Soilihi, Haye, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les zones mentionnées aux 3° et 4 sont délimitées avant le 31 décembre 2026 sur la base d’un diagnostic tenant compte des effets du changement climatique. Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application de la présente disposition. »
La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 340 rectifié bis.
M. Guy Benarroche. Cet amendement vise à permettre la délimitation des zonages des eaux pluviales avant 2026, sur la base d’un diagnostic tenant compte des effets du changement climatique.
Les eaux pluviales, du fait de leur ruissellement sur des surfaces imperméabilisées souvent souillées, constituent une source de pollution importante pour les milieux aquatiques.
Les états des lieux réalisés dans le cadre de l’élaboration des schémas directeurs de gestion des eaux pluviales mettent en évidence la contribution importante des eaux pluviales à la dégradation de l’état des masses d’eau.
Les communes et établissements publics de coopération intercommunale en charge d’un service public de gestion des eaux pluviales délimitent, en application de l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales, les zones où des mesures spécifiques doivent être prises pour la gestion des eaux pluviales, au regard d’enjeux quantitatifs et qualitatifs. Elles doivent également maintenir en bon état de fonctionnement les ouvrages et équipements rattachés à ce service.
Le changement climatique contribue à accroître les tensions qui s’exercent sur la ressource en eau. Des pénuries sont constatées et touchent désormais l’ensemble du territoire. Des phénomènes de pluies intenses et les inondations qui en découlent sont également constatés de plus en plus fréquemment.
Dans ce contexte, il paraît nécessaire que l’ensemble du territoire national soit, dans les meilleurs délais, couvert par des zonages d’eaux pluviales afin que soient définies et appliquées les mesures nécessaires pour répondre, au regard des spécificités de chaque territoire, à ces enjeux quantitatifs et qualitatifs.
Il est donc proposé de compléter l’article L. 2224-10 du code général des collectivités territoriales en y fixant l’échéance du 31 décembre 2026 pour la réalisation de ces documents.
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour présenter l’amendement n° 1614 rectifié bis.
M. Alain Richard. Le zonage doit en effet être délimité avant cette date. Il s’agira d’un travail technique important, qui devra faire l’objet de dialogues au sein des intercommunalités.
Un décret en Conseil d’État fixera les modalités de préparation de ce zonage.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. L’établissement de ces zonages est déjà suffisamment encadré. Il convient donc de ne pas augmenter excessivement les contraintes pesant sur les collectivités territoriales en la matière.
Au surplus, la définition du diagnostic tenant compte des effets du changement climatique semble assez lacunaire et crée un risque contentieux.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 340 rectifié bis et 1614 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 301 rectifié bis, présenté par Mmes Cukierman, Assassi, Brulin, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 5 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 2224-12-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les autorités publiques garantissent la gratuité de l’accès à l’eau pour son usage vital. Ces besoins incluent un seuil de non-tarification comprenant les premiers mètres cubes d’eau nécessaires pour chaque personne physique. Ce seuil, qui ne peut être inférieur à 40 litres d’eau par jour, est fixé par décret en Conseil d’État. »
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. L’objet de cet amendement reprend une proposition de loi dont nous avons débattu ici voilà quelques semaines et dont M. Darnaud était le rapporteur.
Il s’agit de donner un droit à l’eau et d’en garantir l’accès. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), pour vivre, chaque personne a besoin de dix à cinquante litres d’eau par jour. Nous proposons de donner droit à quarante litres par jour pour que chacun puisse vivre dignement, c’est-à-dire boire, manger et se laver.
Lorsque l’on confère un droit, il faut ensuite en garantir l’accès. Proposer la gratuité de quarante litres par jour et par personne va évidemment à l’encontre de tout ce qui est fait aujourd’hui ; je pense notamment à la privatisation de l’eau et j’ai ainsi à l’esprit l’affaire Veolia-Suez. De même, cela pose, entre autres, la question de la prise directe en régie.
Certes, nous avons déjà eu ce débat, mais nous continuerons de l’évoquer, parce qu’il s’agit d’un projet de société. À notre sens, il faut donner des droits et en garantir l’accès et il faut poser la question des biens communs. On voit bien, en effet, que le privé ne répond pas à l’intérêt humain vital dans un certain nombre de domaines.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Mathieu Darnaud, rapporteur. Mon cher collègue, je n’étais pas le rapporteur de ce texte ! Je suis intervenu au nom de mon groupe lors de la discussion générale et, comme je l’ai alors dit à la tribune, j’aurais pu voter cette proposition de loi.
En effet, le droit à l’eau me semble un droit fondamental. Nous sommes au-delà de la question de la gouvernance ou de la ressource, madame la ministre, laquelle se posera pourtant demain dans une grande partie de nos territoires. On sait que la carence sera importante et qu’elle aura un impact direct sur la vie de nos concitoyens comme sur les activités économiques, singulièrement touristiques, notamment dans des départements du sud de la France.
Si j’adhère à la philosophie de cette proposition de loi, il nous paraît qu’en l’état, s’agissant de la définition du seuil et des charges qu’elle ferait peser sur les collectivités, celle-ci nécessite d’être expertisée et de faire l’objet d’une étude d’impact approfondie, pour que l’on avance sur cette question.
En l’état, je regrette de devoir émettre un avis défavorable sur cet amendement.