M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Je répète, madame la ministre, que vous ne nous avez pas convaincus. En effet, l’argumentation que vous venez de développer n’est pas pertinente.
D’une part, pour les raisons que notre collègue Pierre Laurent a évoquées tout à l’heure et que nous avons nous-mêmes abordées en commission, le risque constitutionnel est réel.
Dans la décision QPC du 29 mars 2018, le Conseil constitutionnel estime que les Micas, compte tenu de leur rigueur, ne sauraient, « sans méconnaître les exigences constitutionnelles précitées, excéder, de manière continue ou non, une durée totale cumulée de douze mois ». D’après le commentaire que le Conseil fait de cette décision, quelle que soit la gravité de la menace qui la justifie, une telle mesure de police administrative ne peut se prolonger aussi longtemps que dure cette menace.
Autrement dit, si nous sommes parfaitement conscients de l’existence de menaces particulièrement graves, nous affirmons, pour notre part, que le risque constitutionnel est patent.
Nous disons par ailleurs, conformément à la position constante de la commission, que les mesures de suivi judiciaire présentent plusieurs avantages : elles sont prononcées par un juge, offrent des possibilités de surveillance plus longues et potentiellement plus contraignantes et des garanties plus importantes pour les individus concernés. Cet équilibre est important, en ce qu’il permet d’associer aux mesures de surveillance des mesures sociales visant à favoriser la réinsertion de la personne.
Madame la ministre, vous opposez surveillance administrative et mesure judiciaire, mais rien n’empêche qu’une Micas accompagne, la première année, une mesure de sûreté qui serait prononcée conformément à la proposition de loi du président de la commission François-Noël Buffet.
Les développements auxquels vous venez de procéder ne constituent donc pas une argumentation pertinente. Aussi, nous le réaffirmons clairement : la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 45, présenté par MM. Leconte et Vaugrenard, Mme S. Robert, M. Kanner, Mme de La Gontrie, MM. Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Sueur, Mmes Carlotti, Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Roger, Temal, Todeschini, M. Vallet, Vallini et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 21
Insérer huit alinéas ainsi rédigés :
…° Il est ajouté un article L. 228-… ainsi rédigé :
« Art. L. 228-…. – Le juge des libertés et de la détention de Paris peut être saisi, à tout moment, aux fins de statuer, à bref délai, sur la mainlevée immédiate d’une mesure de sûreté prévue aux articles 706-53-13 à 706-53-19 du code de procédure pénale et à l’article 131-36-1 du code pénal, lorsque celle-ci est incompatible avec le prononcé d’une des obligations prévues aux articles L. 228-2 à L. 228-7 du présent code à l’égard de toute personne mentionnée à l’article L. 228-1.
« La saisine peut être formée par :
« 1° La personne faisant l’objet d’une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance et d’une mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion ;
« 2° Les titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur si la personne est mineure ;
« 3° Son conjoint, son concubin, la personne avec laquelle elle est liée par un pacte civil de solidarité ;
« 4° Le procureur de la République.
« Le juge des libertés et de la détention peut également se saisir d’office, à tout moment. »
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Comme vient de l’indiquer notre rapporteur, une même personne peut être soumise à la fois à des mesures administratives et à des mesures judiciaires. La conjugaison de ces deux obligations pose parfois des problèmes de cohérence. Il peut ainsi être complexe de paraître à tel et tel endroit.
Nous proposons une solution qui permettrait de recourir au juge des libertés et de la détention, le JLD, pour traiter au cas par cas les situations issues d’obligations qui pourraient sembler incompatibles entre elles, afin que le JLD puisse décider la mainlevée de certaines parties des obligations s’imposant à une personne qui aurait du mal à remplir l’ensemble d’entre elles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Notre collègue Jean-Yves Leconte pose une vraie question : celle du conflit qui peut exister entre les obligations relevant respectivement des Micas et des mesures de sûreté. Il prévoit une possibilité de saisine spécifique du juge des libertés et de la détention, aux fins d’ordonner la mainlevée de la mesure judiciaire.
Cher collègue, connaissant la cohérence dont vous faites toujours preuve et que je respecte beaucoup, je suis très surpris par votre proposition.
En effet, il est tout de même étrange qu’une mesure administrative prenne la priorité sur une mesure judiciaire, alors que, comme je l’ai indiqué, les mesures judiciaires que nous proposons à l’article 5 présentent plusieurs avantages : elles sont prononcées par un juge, elles offrent des possibilités de surveillance plus longue et des garanties plus importantes pour les individus concernés et permettent d’associer aux mesures de surveillance des mesures sociales visant à favoriser la réinsertion.
En conséquence, si vous soulevez une vraie question, je ne pense pas que la solution que vous proposez soit la bonne.
L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je prends note de votre remarque, monsieur le rapporteur, mais j’invite malgré tout le Sénat à voter cet amendement. Le JLD pourrait examiner l’ensemble des contraintes qui s’appliqueraient à la personne et prononcer une décision qui concernerait soit la mesure judiciaire, soit la mesure administrative.
Votre remarque est fondée, mais il faut trouver un moyen de résoudre cette difficulté. On ne peut laisser sans réponse ce problème, qui est réel et qui a été maintes fois évoqué lors de nos auditions.
Je propose donc d’adopter l’amendement tel qu’il est. Certes, il n’est pas parfait, mais nous pourrons profiter de la navette pour améliorer son dispositif.
M. le président. L’amendement n° 102, présenté par M. Daubresse et Mme Canayer, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 22
1° Remplacer les mots :
huitième et neuvième
par les mots :
septième et huitième
2° Remplacer le mot :
septième
par le mot :
sixième
3° Remplacer les mots :
quatrième et cinquième
par les mots :
troisième et quatrième
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
(Non modifié)
Après le premier alinéa du I de l’article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’occupant des lieux ou son représentant mentionné au troisième alinéa de l’article L. 229-2 fait obstacle à l’accès aux données contenues dans tout système informatique ou équipement terminal présent sur les lieux de la visite, mention en est faite au procès-verbal prévu au même article L. 229-2. Il peut alors être procédé à la saisie de ces supports, dans les conditions prévues au présent I. » – (Adopté.)
Article 4 bis
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 54, présenté par MM. Leconte et Vaugrenard, Mme S. Robert, M. Kanner, Mme de La Gontrie, MM. Durain, Todeschini, Roger et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Marie et Sueur, Mmes Carlotti, Conway-Mouret et G. Jourda, MM. Temal, M. Vallet, Vallini et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article L. 229-2 du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase du septième alinéa, les mots : « ou les témoins » sont supprimés ;
2° Le huitième alinéa est complété par trois phrases ainsi rédigées : « Cette copie préserve l’anonymat des témoins mentionnés au troisième alinéa du présent article. L’identité et l’adresse des témoins sont inscrites dans un autre procès-verbal signé par les intéressés et versé dans un dossier distinct du dossier de la procédure. Il en est fait mention dans l’original du procès-verbal ainsi que dans la copie de ce document. »
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. L’article 4 bis a été inséré par l’Assemblée nationale dans le projet de loi, afin de répondre à une réelle difficulté, soulevée par les juges des libertés et de la détention : lorsqu’une perquisition domiciliaire est menée en l’absence de l’occupant des lieux ou de son représentant, il peut être difficile de trouver deux témoins acceptant que leur nom figure au procès-verbal, ou PV. Les témoins peuvent alors souhaiter être anonymisés, par crainte légitime de représailles.
Notre commission a supprimé l’article 4 bis, considérant que celui-ci, tel qu’il avait été voté, posait de réelles difficultés, dans la mesure où il contrevenait au respect des droits de la défense.
Nous ne pouvons cependant pas faire comme s’il n’existait pas de problème s’agissant de la protection des témoins pouvant être amenés à observer une visite domiciliaire.
C’est la raison pour laquelle nous proposons cette rédaction, qui nous semble répondre à la fois à la préoccupation exprimée à l’Assemblée nationale et à celle qui a conduit notre rapporteur à proposer la suppression de l’article 4 bis lors de l’examen en commission.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Je suis parfaitement conscient que M. Leconte soulève une fois de plus un véritable problème, mais je pense que la solution qu’il préconise ne nous permet pas d’en sortir et serait peut-être pire que le mal.
La présence de témoins au cours d’une visite domiciliaire constitue une garantie essentielle du respect des droits de la défense et, d’ailleurs, du droit à un recours juridictionnel effectif.
Si l’on anonymisait les témoins dans le procès-verbal, l’occupant des lieux ne disposerait plus d’aucun moyen de vérifier que ces témoins existent effectivement et que la visite domiciliaire a été effectuée dans le respect des prescriptions légales.
M. Leconte propose que la copie du procès-verbal de la visite transmise à l’occupant des lieux ne mentionne pas l’identité des témoins et que celle-ci soit malgré tout consignée dans un PV distinct, dont le procès-verbal de la visite domiciliaire mentionnerait l’existence, sans qu’il soit possible à l’occupant des lieux d’y accéder.
Le problème serait le même : comment l’occupant pourrait-il s’assurer de l’existence et de la régularité de ce second procès-verbal, puisqu’il n’est pas prévu qu’il puisse y accéder ? Cette solution ne serait pas tenable juridiquement.
Je le répète, laisser le texte tel quel ferait peser un vrai risque constitutionnel sur le dispositif des visites domiciliaires, ce qui priverait le Gouvernement d’un outil qui me semble important.
Par conséquent, et même si je suis conscient que nous n’apportons pas une solution totalement satisfaisante, je souhaiterais que M. Leconte retirât son amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Nous sommes tout à fait d’accord avec l’argumentaire exposé par M. le rapporteur.
Tout d’abord, la présence de deux témoins lors de la visite domiciliaire en l’absence de la personne concernée est l’une des conditions de la régularité de la mesure. En effet, la copie du procès-verbal des visites domiciliaires et de saisie est transmise à l’occupant des lieux, pour que celui-ci puisse utilement, si d’aventure il le souhaite, exercer un recours.
Ensuite, en l’absence de précisions sur l’identité des témoins qui auraient assisté à la visite domiciliaire, la personne n’est pas placée dans les conditions qui lui permettent d’apprécier la régularité de la mesure et, le cas échéant, de faire valoir ses droits.
Pour ces raisons, l’anonymisation totale des témoins, sans aucune possibilité de voir leur identité révélée en cas de contestation, ne nous paraît pas possible.
Le Gouvernement est donc également défavorable à cet amendement.
M. Jean-Yves Leconte. Je retire l’amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 54 est retiré.
En conséquence, l’article 4 bis demeure supprimé.
Article additionnel après l’article 4 bis
M. le président. L’amendement n° 35, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 4 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conséquences sur les personnes détenues mises en cause dans des affaires de terrorisme islamiste ou celles écrouées pour des faits de droit commun et repérées par l’administration et par les services de renseignement comme étant susceptibles de radicalisation, de :
- l’isolement et des quartiers spécifiques ;
- la réduction des aménagements de peine depuis la législation antiterroriste de 2016 ;
- l’accès aux activités de réinsertion.
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Au travers de cet amendement, que nous avons souhaité insérer avant l’article 5 relatif aux mesures de sécurité, nous souhaitons engager la discussion sur les autres méthodes possibles en matière de lutte antiterroriste et de gestion des condamnés pour terrorisme.
Pour ce faire, nous souhaitons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport concernant les personnes détenues mises en cause dans des affaires de terrorisme islamique ou celles qui ont été écrouées pour des faits de droit commun et repérées par l’administration et les services de renseignement comme étant susceptibles de radicalisation.
Ce rapport porterait sur les conséquences sur ces personnes de l’isolement et des quartiers spécifiques, de la réduction des aménagements de peine depuis la législation antiterroriste de 2016 et de l’accès aux activités de réinsertion.
Comme l’explique l’Observatoire international des prisons, les aménagements de peine, pourtant gages de réinsertion, sont, en matière de terrorisme, quasi inexistants.
Alors qu’ils étaient déjà rarement prononcés, la législation antiterroriste de 2016 est venue durcir les conditions d’octroi de certains de ces aménagements et en supprimer purement et simplement d’autres. In fine, c’est toute la philosophie de l’aménagement de peine, donc de la préparation à la sortie, qui est remise en cause.
En outre, à partir de 2016, six quartiers d’évaluation de la radicalisation ont été mis en place sur tout le territoire. À la suite des évaluations menées, les personnes ancrées dans un processus de radicalisation violente et présentant une forte imprégnation idéologique et prosélyte sont affectées en quartier de prise en charge de la radicalisation, étanche du reste de la détention. Une telle situation concerne 15 % des détenus des quartiers d’évaluation de la radicalisation.
Face à tout ce dispositif, dont les rouages semblent pourtant bien huilés, on nous propose aujourd’hui de déterminer un nouveau niveau de dangerosité et les mesures de sûreté appropriées, lorsque ces personnes ne seront plus écrouées. Nous nous interrogeons donc sur la pertinence de ces quartiers.
Enfin, même si nous en débattrons en septembre prochain lors de l’examen du projet de loi pour la confiance dans l’institution judiciaire, la question se pose : l’accès aux activités de réinsertion est-il effectif ? Tel n’est pas de l’avis de la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté.
Aussi, plutôt que de faire de la surenchère sécuritaire pénale, il s’agirait peut-être de faire le point sur la méthode engagée pour lutter efficacement contre la récidive, en prenant le temps de réfléchir à la réinsertion de ces individus, plutôt qu’à leur exclusion.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Marc-Philippe Daubresse, rapporteur. Cet amendement vise la remise d’un rapport au Parlement. Nous y sommes par nature défavorables. D’autres outils existent pour étudier les questions que se pose à juste titre notre collègue.
Je m’en tiens donc à la jurisprudence constante de notre commission et j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 35.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 5
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° (nouveau) L’article 230-19 est complété par un 19° ainsi rédigé :
« 19° Les obligations ou interdictions prévues au 5° de l’article 132-44 du code pénal et aux 8°, 9°, 12° à 14° et 19° de l’article 132-45 du même code prononcées dans le cadre d’une mesure de sûreté applicable aux auteurs d’infractions terroristes prévue à l’article 706-25-16 du présent code. » ;
2° Le titre XV du livre IV est ainsi modifié :
a) (nouveau) À l’intitulé, les mots : « et du jugement des » sont remplacés par les mots : « , du jugement et des mesures de sûreté en matière d’ » ;
b) (nouveau) Au quatrième alinéa de l’article 706-16, la référence : « à l’article 706-25-7 » est remplacée par les références : « aux articles 706-25-7 et 706-25-19 » ;
c) (nouveau) L’article 706-17 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les mesures de sûreté prévues à la section 5 du présent titre sont ordonnées sur réquisitions du procureur de la République antiterroriste par la juridiction régionale de la rétention de sûreté de Paris ou, en ce qui concerne les mineurs, par le tribunal pour enfants de Paris. » ;
d) (nouveau) Au premier alinéa de l’article 706-22-1, après la référence : « 706-17 », sont insérés les mots : « et les personnes astreintes aux obligations prévues à l’article 706-25-16 » ;
e) Est ajoutée une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Mesure de sûreté applicable aux auteurs d’infractions terroristes
« Art. 706-25-16. – I. – Lorsqu’une personne a été condamnée à une peine privative de liberté d’une durée supérieure ou égale à cinq ans pour une ou plusieurs des infractions mentionnées aux articles 421-1 à 421-6 du code pénal, à l’exclusion de celles définies aux articles 421-2-5 et 421-2-5-1 du même code, ou d’une durée supérieure ou égale à trois ans lorsque l’infraction a été commise en état de récidive légale, et qu’il est établi, à l’issue d’un réexamen de sa situation intervenant à la fin de l’exécution de sa peine, qu’elle présente une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive et par une adhésion persistante à une idéologie ou à des thèses incitant à la commission d’actes de terrorisme, la juridiction régionale de la rétention de sûreté peut, sur réquisitions du procureur de la République et dans les conditions prévues à la présente section, ordonner à son encontre une mesure de sûreté comportant une ou plusieurs des obligations mentionnées à l’article 132-44 du code pénal et aux 1°, 12°, 13°, 14° et 20° de l’article 132-45 du même code.
« II. – Lorsque les obligations mentionnées au I susceptibles d’être imposées à la personne faisant l’objet d’une mesure de sûreté en application du même I apparaissent insuffisantes pour prévenir sa récidive, la juridiction régionale de la rétention de sûreté peut également, par une décision spécialement motivée au regard de sa situation, de sa personnalité et de son extrême dangerosité, la soumettre à une ou plusieurs des obligations prévues aux 2°, 8°, 9° et 19° de l’article 132-45 du code pénal.
« III. – La mesure de sûreté prévue au I ne peut pas être ordonnée à l’encontre des personnes libérées avant la publication de la loi n° … du … relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement.
« IV. – La mesure prévue au I ne peut être ordonnée que :
« 1° Si les obligations imposées dans le cadre de l’inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des infractions mentionnées au premier alinéa du même I ;
« 2° Et si cette mesure apparaît strictement nécessaire pour prévenir la récidive.
« La mesure de sûreté prévue audit I n’est pas applicable si la personne a été condamnée à une peine d’emprisonnement assortie d’un sursis simple en application de l’article 132-29 du code pénal, à une peine d’emprisonnement assortie d’un sursis probatoire en application de l’article 132-40 du même code, sauf si le sursis probatoire a été révoqué en totalité en application de l’article 132-47 dudit code, à un suivi socio-judiciaire en application de l’article 421-8 du même code ou si elle fait l’objet d’une mesure de surveillance judiciaire prévue à l’article 723-29 du présent code, d’une mesure de surveillance de sûreté prévue à l’article 706-53-19 ou d’une rétention de sûreté prévue à l’article 706-53-13.
« Art. 706-25-17. – La situation des personnes détenues susceptibles de faire l’objet de la mesure de sûreté prévue à l’article 706-25-16 est examinée, sur réquisitions du procureur de la République, au moins trois mois avant la date prévue pour leur libération par la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue à l’article 763-10, afin d’évaluer leur dangerosité et leur probabilité de récidive.
« À cette fin, la commission demande le placement de la personne concernée, pour une durée d’au moins six semaines, dans un service spécialisé chargé de l’observation des personnes détenues aux fins d’une évaluation pluridisciplinaire de dangerosité.
« À l’issue de cette période, la commission adresse à la juridiction régionale de la rétention de sûreté et à la personne concernée un avis motivé sur la pertinence de prononcer la mesure mentionnée à l’article 706-25-16 au vu des critères définis au I du même article 706-25-16.
« Art. 706-25-18. – La mesure de sûreté prévue à l’article 706-25-16 est prononcée, avant la date prévue pour la libération du condamné, par un jugement rendu après un débat contradictoire au cours duquel le condamné est assisté par un avocat choisi ou commis d’office. La décision doit être spécialement motivée au regard des conclusions de l’évaluation et de l’avis mentionnés à l’article 706-25-17, ainsi que des conditions mentionnées au V de l’article 706-25-16.
« La juridiction régionale de la rétention de sûreté ne peut prononcer la mesure prévue au même article 706-25-16 qu’après avoir vérifié que la personne a effectivement été mise en mesure de bénéficier, pendant l’exécution de sa peine, d’une prise en charge adaptée à sa personnalité et à sa situation, de nature à favoriser sa réinsertion.
« Le jugement précise les obligations auxquelles le condamné est tenu ainsi que la durée de celles-ci.
« La décision est exécutoire immédiatement à l’issue de la libération.
« La juridiction régionale de la rétention de sûreté peut, sur réquisitions du procureur de la République ou à la demande de la personne concernée, selon les modalités prévues à l’article 706-53-17 et, le cas échéant, après avis du procureur de la République, modifier les mesures de sûreté ou ordonner leur mainlevée. Cette compétence s’exerce sans préjudice de la possibilité, pour le juge de l’application des peines, d’adapter à tout moment les obligations de la mesure de sûreté.
« Art. 706-25-19. – La mesure de sûreté prévue à l’article 706-25-16 est prononcée pour une durée maximale d’un an.
« À l’issue de cette période, elle peut être renouvelée pour la même durée par la juridiction régionale de la rétention de sûreté, sur réquisitions du procureur de la République et après avis de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, dès lors que des éléments actuels et circonstanciés permettent d’établir que les conditions prévues au I du même article 706-25-16 continuent d’être réunies.
« La durée totale de la mesure ne peut excéder trois ans ou, lorsque le condamné est mineur, deux ans. Cette limite est portée à cinq ans ou, lorsque le condamné est mineur, à trois ans, lorsque la personne a été condamnée à une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à dix ans.
« Art. 706-25-20. – Les décisions de la juridiction régionale de la rétention de sûreté prévues à la présente section sont prises après avis du juge de l’application des peines compétent en application du premier alinéa de l’article 706-22-1. Elles peuvent faire l’objet des recours prévus aux deux derniers alinéas de l’article 706-53-15.
« Art. 706-25-21. – La mesure prévue à l’article 706-25-16 et les obligations y afférentes sont suspendues par toute détention intervenue au cours de leur exécution.
« Si la détention excède une durée de six mois, la reprise de la mesure et d’une ou de plusieurs des obligations prévues au même article 706-25-16 doit être confirmée par la juridiction régionale de la rétention de sûreté au plus tard dans un délai de trois mois après la cessation de la détention, à défaut de quoi il est mis fin d’office à la mesure.
« Art. 706-25-22. – Le fait pour la personne soumise à une mesure de sûreté en application de l’article 706-25-16 de ne pas respecter les obligations auxquelles elle est astreinte est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.
« Art. 706-25-23. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions et les modalités d’application de la présente section. »