Mme Martine Filleul. Cet amendement déposé par Mme Rossignol vise à créer une redevance pour pollutions diffuses sur les engrais azotés très émetteurs de gaz à effet de serre.
Déjà déposé en première lecture à l’Assemblée nationale, il tend à reprendre une disposition issue de la proposition de loi pour une vraie loi climat.
Mme la présidente. L’amendement n° 2177, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Afin d’atteindre l’objectif de réduction de 13 % des émissions d’ammoniac en 2030 par rapport à 2005 et l’objectif de réduction de 15 % des émissions de protoxyde d’azote en 2030 par rapport à 2015, il est envisagé de mettre en place une redevance sur les engrais azotés minéraux si les objectifs annuels de réduction de ces émissions fixés en application de l’article 63 ne sont pas atteints pendant deux années consécutives et sous réserve de l’absence de dispositions équivalentes dans le droit de l’Union européenne.
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport analysant les conditions, notamment de taux, d’assiette et d’affectation des recettes à la transition agroécologique, dans lesquelles cette redevance pourrait être instaurée afin de permettre une mise en conformité rapide à la trajectoire de réduction de ces émissions. Ce rapport étudie notamment l’opportunité de fixer des taux différenciés en fonction des facteurs d’émission d’ammoniac des différents types d’engrais. Il établit un inventaire des technologies et des outils d’aide à la décision et à l’exploitation, ainsi que la liste des financements publics destinés à la recherche, à l’acquisition de matériel, à la formation, à l’accompagnement et, plus largement, à toute démarche permettant la réduction des quantités d’engrais azotés minéraux utilisées, tant pour la promotion de leur utilisation raisonnée que pour le changement des pratiques culturales. Il étudie également l’impact écologique et économique de la création et de la mise en œuvre de certificats d’économies d’engrais azotés, en conformité avec la trajectoire de réduction des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote.
La parole est à M. le ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pascal Martin, rapporteur. Nous abordons l’épineux sujet – c’est le moins que l’on puisse dire – des engrais azotés, sur lequel la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a pris une position claire, en concertation étroite avec la commission des affaires économiques et en lien avec la commission des finances.
Les amendements nos 1321 rectifié et 2035 rectifié bis sont contraires à la position de la commission. En effet, celle-ci a préféré une logique d’accompagnement à une logique de taxation, cette dernière logique ne présentant que des inconvénients sur le plan de la compétitivité comme sur celui de l’empreinte carbone de notre agriculture.
L’article 62, dans sa rédaction initiale, et les dispositions que les amendements précités tendent à introduire dans le texte ne tiennent pas suffisamment compte de l’absence d’élasticité-prix de la demande d’engrais. À défaut d’alternative, les agriculteurs continueront à utiliser ces engrais azotés pour maintenir leurs rendements. Leur compétitivité-prix s’en trouvera donc dégradée, ce qu’ils ne pourront compenser par des hausses de prix, sauf à perdre les consommateurs français, en particulier les plus modestes.
En contrepartie, les Français se tourneront vers des produits moins chers, donc souvent issus d’importations, ce qui ne participe pas à la maîtrise de l’empreinte carbone de notre alimentation.
En outre, en l’absence d’alternative, les agriculteurs continueront à utiliser ces engrais. L’impact environnemental d’une telle mesure sera donc faible à court et à moyen terme.
Compte tenu de ces contradictions, la commission a prévu la mise en place d’un plan d’accompagnement de la réduction de l’usage des engrais azotés, le plan Éco’Azot, sur le modèle de ce qui a été fait pour les produits phytopharmaceutiques. C’est une garantie pour la compétitivité de notre agriculture et pour sa capacité à opérer la transition.
En conséquence, j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 1321 rectifié et 2035 rectifié bis. Ils ont en effet pour objet la création à court terme d’une redevance pour pollutions diffuses, mais le lien n’est pas fait avec le respect des objectifs de réduction des émissions de protoxyde d’azote et d’ammoniac, ce qui me paraît brutal.
J’en viens à l’amendement n° 2177 du Gouvernement. Monsieur le ministre, je m’interroge. Le Sénat vous propose une voie de sortie par le haut pour cet article qui, en l’état, ne contente personne : ni les associations de protection de l’environnement, ni certaines forces politiques – les dispositions que nos collègues souhaitent introduire par voie d’amendement en témoignent –, ni les professionnels de l’agriculture. Dans ces conditions, je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement ne saisit pas la main que nous lui tendons.
Je ne peux qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 1321 rectifié et 2035 rectifié bis ?
M. Julien Denormandie, ministre. Avis défavorable sur ces deux amendements, au bénéfice de l’amendement du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Monsieur le ministre, j’ai remarqué que, de temps en temps, vous choisissiez une cible dans nos rangs – Joël Labbé, qui en a l’habitude, pourrait presque porter une cible de tir sur le torse. (Sourires.)
Merci, donc, de m’honorer à mon tour de la sorte. Votre capacité à extraire un mot d’un propos pour le caricaturer est connue, comme votre amour de la politique, et je sais que vous êtes joueur ; vous me permettrez donc de corriger certaines des remarques que vous m’avez adressées.
Tout mon propos – le compte rendu intégral de séance l’attestera – tendait à dire qu’il ne faut pas opposer entre elles les différentes agricultures.
Intervenant plus volontiers, d’ordinaire, sur les sujets du titre III, « Se déplacer », je trouve que le débat relatif aux transporteurs, notamment aux camionneurs et aux exonérations de taxe sur le gazole non routier (GNR), ressemble assez à celui qui porte sur l’agriculture conventionnelle et les autres types d’agriculture, dont l’agriculture biologique.
Mon propos, donc, visait à rappeler l’importance du principe pollueur-payeur, qui devrait figurer partout dans ce projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique. Or l’application de ce principe – j’ai fait référence à notre débat d’hier sur les externalités positives et négatives de l’agriculture – doit prendre en compte toutes les pollutions. Défendant une position nuancée, je n’ai pas ciblé directement l’agriculture conventionnelle.
Je présenterai d’ailleurs ultérieurement un amendement tendant à assurer un équilibre entre les différentes agricultures. Si votre amendement n° 2177 était adopté, il faudrait notamment veiller à ce que les éventuelles redevances ne soient pas versées au budget général, mais reviennent spécifiquement à l’agriculture.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. L’amendement du Gouvernement, qui tend à supprimer le plan Éco’Azot, ne nous convainc pas nous non plus.
Monsieur le ministre, vous faites référence au plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques (Prépa). Cela fait maintenant cinq ans – je pourrais le démontrer, chiffres à l’appui – que l’inefficacité de ce plan dans la lutte pour la baisse des émissions de polluants est avérée.
Le plan d’action sur les matériels d’épandage de 2021 ne concerne que l’épandage des effluents d’élevage, et non celui des engrais de synthèse.
Le plan Éco’Azot proposé est donc plus ambitieux que l’article, relativement vide, que le Gouvernement entend rétablir.
Si ce plan est certes moins ambitieux que la création d’une redevance, celle-ci est seulement « envisagée » dans la rédaction proposée par le Gouvernement.
Idéalement, il faudrait à la fois créer une telle redevance et assortir ce plan Éco’Azot de mesures d’accompagnement plus fortes.
Nous devons aujourd’hui réduire notre consommation à la source, car le coût climatique du recours aux engrais azotés est considérable, y compris à l’étape de leur production : il faut l’équivalent en gaz d’un kilogramme de pétrole pour produire un kilogramme d’azote. Quant à l’épandage d’engrais azotés proprement dit, il est responsable d’environ 42 % des émissions de protoxyde d’azote du secteur agricole. Or la rédaction proposée par le Gouvernement ne permet pas une telle réduction.
Le plan Éco’Azot ne garantit rien, certes, mais, s’il est doté d’une gouvernance adéquate, ce dispositif permettra du moins de faire un pas en avant. Bien qu’il demeure insuffisant à nos yeux, nous estimons préférable d’en voter le maintien ; c’est ce que nous allons faire.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2035 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 2303, présenté par M. P. Martin, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
Alinéa 6, seconde phrase
Après le mot :
établit
insérer les mots :
un inventaire des technologies ainsi que
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pascal Martin, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je suis saisie de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1917 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec, Fernique, Salmon et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 8
Remplacer cet alinéa par six alinéas ainsi rédigés :
II. – Le paragraphe 4 de la sous-section 3 de la section 3 du chapitre III du titre Ier du livre II du code de l’environnement est complété par un article L. 213-10-8-… ainsi rédigé :
« Art. L. 213-10-8-…. – I. – Les personnes qui acquièrent des engrais minéraux azotés au sens du 1° de l’article L. 255-1 du code rural et de la pêche maritime sont assujetties à une redevance pour pollutions diffuses.
« II. – L’assiette de la redevance est la quantité d’azote contenue dans les produits mentionnés au I.
« III. – Le taux de la redevance est fixé à 0,09 euro par kilogramme d’azote.
« IV. – La redevance sur l’acquisition d’engrais minéraux azotés mentionnée au 1° de l’article L. 255-1 du code rural et de la pêche maritime est exigible à compter du 1er janvier 2023.
« V. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
II. – Alinéa 9
Remplacer cet alinéa par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le Gouvernement présente au Parlement, dans un délai d’un an, un rapport analysant les conditions de mise en œuvre de la redevance sur l’acquisition d’engrais minéraux azotés, de la progressivité de sa trajectoire, et de l’affectation des recettes à la transition agroécologique. Il étudie également la possibilité de son instauration dans le droit de l’Union européenne. Le rapport étudie l’impact économique, social et environnemental de la création de cette redevance. Il étudie son articulation avec la stratégie nationale sur les protéines végétales, et le programme Ambition bio 2022. Il étudie également l’impact écologique et économique de la création et de la mise en œuvre de certificats d’économies d’engrais azotés, ainsi que de la mise en place, en lien, notamment, avec les agences de l’eau, de mesures d’accompagnement et de paiements pour services environnementaux, permettant de rémunérer les pratiques agronomiques vertueuses sur le plan de la réduction de la fertilisation azotée minérale. Il étudie enfin le renforcement de l’accompagnement aux changements de pratiques systémiques des agriculteurs via la formation.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. La fertilisation azotée est à l’origine de 42 % des émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture. Et pour cause ! Le surplus d’azote non consommé par la plante retourne dans l’atmosphère, principalement sous forme de protoxyde d’azote, dont le pouvoir de réchauffement est 298 fois – pas 300 fois, certes – supérieur à celui du CO2.
Afin de respecter l’engagement de la France à parvenir à la neutralité carbone sur son territoire en 2050, les émissions de protoxyde d’azote devront être réduites de manière draconienne.
La taxation constitue un levier pour réduire l’utilisation de ces engrais azotés – la Convention citoyenne pour le climat l’avait d’ailleurs identifiée comme telle. Il importe toutefois de manier cet outil avec précaution en l’assortissant de très fortes mesures d’accompagnement.
Cet amendement vise donc à instaurer une redevance sur l’azote de synthèse. Pour limiter l’impact de cette taxation sur le revenu des agriculteurs, nous proposons qu’elle s’applique tout d’abord à un taux relativement faible, de 0,09 euro par kilogramme d’azote, et n’entre en vigueur qu’en 2023. Cette échéance tient compte de l’urgence de la situation climatique tout en accordant un temps d’anticipation aux agriculteurs.
Par cet amendement, nous proposons également que le principe de cette taxe soit fortement porté par la France à l’échelon européen, et ce afin d’éviter les distorsions de concurrence. Pour autant, nous ne devons pas attendre que l’Europe agisse pour créer cette taxe, comme l’a proposé la commission. Les néonicotinoïdes l’ont montré : une décision prise en France peut entraîner toute l’Europe. Ne nous privons pas de ce rôle de précurseur.
Pour ce qui est par ailleurs des mesures d’accompagnement, nous estimons qu’elles doivent être fortement soutenues d’un point de vue financier. Ainsi, comme l’a indiqué notre collègue Olivier Jacquin, l’intégralité des ressources issues de cette redevance devrait-elle être affectée à l’accompagnement des agriculteurs.
Cet accompagnement doit passer par l’animation territoriale et par la formation. S’il est bien mené, le plan Éco’Azot introduit dans le projet de loi par la commission peut, à cet égard, présenter un intérêt. Cela suppose toutefois qu’il ne soit pas galvaudé comme l’est aujourd’hui le plan Écophyto.
Mme la présidente. L’amendement n° 1354 rectifié, présenté par MM. Jacquin, Pla et Devinaz, Mme Conway-Mouret, MM. Michau, Antiste, P. Joly et Todeschini, Mmes Rossignol et Bonnefoy, MM. Tissot, Kerrouche et Raynal et Mmes Briquet et Monier, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
En parallèle, l’accompagnement des filières agricoles en faveur de la transition agroécologique est renforcé.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Cet amendement tend à garantir que toute éventuelle redevance mise en place par le Gouvernement serait affectée au soutien des filières agricoles, notamment pour accompagner les investissements en faveur de la transition agroécologique.
Monsieur le ministre, vous connaissez cet amendement : il vous a été présenté dans les mêmes termes à l’Assemblée nationale, par Dominique Potier.
Je suis très curieux d’entendre l’avis de M. le rapporteur sur cet amendement de bon sens, qui vise à garantir l’usage vertueux des recettes de la redevance, dont on évitera ainsi qu’elle soit une taxe punitive pour les agriculteurs.
Mme la présidente. L’amendement n° 1103 rectifié, présenté par M. Gay, Mme Varaillas et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Parallèlement, le soutien à la recherche, à la diffusion et à la mise en pratique par les agriculteurs de méthodes et de techniques permettant de limiter le recours aux engrais azotés minéraux est renforcé.
La parole est à M. Gérard Lahellec.
M. Gérard Lahellec. Il est toujours rassurant de constater que subsistent encore, au sein de notre Haute Assemblée, des jardiniers de l’espace, autrement dit des paysans. (Sourires.)
Un débat comme celui-ci est toujours complexe. Les plus anciens d’entre nous se souviendront qu’après avoir débattu, voilà quelques années, d’un seuil de mise aux normes des bâtiments d’élevage, nous avions fixé celui-ci à 70 unités gros bovin (UGB) – choisissant cette référence, nous avions probablement considéré, à l’époque, que les exploitations qui se situaient en deçà de ce seuil étaient vouées à disparaître.
Dans le cadre du présent débat, l’approche est un peu plus universelle, car nous découvrons que les produits miraculeux d’hier peuvent être les poisons d’aujourd’hui. Il est bon, quoi qu’il en soit, que nous nous penchions sur cette grande question.
Ce n’est pas parce que notre objectif est de réduire, ou de tendre à réduire, l’utilisation des engrais de synthèse que nous devons nous opposer à la généralisation de pratiques nouvelles.
De manière générale, de telles pratiques doivent être agroécologiques et s’inscrire résolument dans une perspective de développement durable de toutes les productions agricoles. Cette exigence appelle en particulier, à mes yeux, la rotation des cultures, notamment des cultures légumières, et l’étude de l’absorption de l’azote et de l’ammoniac par les plantes – nous aurons peut-être un débat sur la méthanisation. Nous avons de toute façon besoin de développer l’agroécologie.
Par cet amendement, nous entendons souligner que l’effort de réduction de l’utilisation des engrais de synthèse suppose aussi l’instauration de mesures incitatives au développement d’une autre pratique, c’est-à-dire, précisément, de l’agroécologie. Se pose également, en filigrane, la question de la rémunération du travail paysan : faute de traiter cette question, rien de tout cela n’aurait de sens.
Mme la présidente. L’amendement n° 1918, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 9, dernière phrase
Remplacer cette phrase par trois phrases ainsi rédigées :
Il étudie son articulation avec la stratégie nationale sur les protéines végétales, et le programme Ambition bio 2022. Il étudie également l’impact écologique et économique de la création et de la mise en œuvre de certificats d’économies d’engrais azotés, ainsi que de la mise en place, en lien notamment avec les agences de l’eau, de mesures d’accompagnement et de paiements pour services environnementaux, permettant de rémunérer les pratiques agronomiques vertueuses sur le plan de la réduction de la fertilisation azotée minérale. Il étudie enfin le renforcement de l’accompagnement aux changements de pratiques systémiques des agriculteurs via la formation.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement de repli a pour objet de préciser le contenu du rapport afin de rendre celui-ci plus opérationnel, s’agissant de contribuer à l’objectif de réduction de la fertilisation azotée minérale.
Ainsi est-il proposé de supprimer la mention de « l’opportunité de fixer des taux différenciés en fonction des facteurs d’émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote des différents types d’engrais ». En effet, les émissions de protoxyde d’azote des engrais azotés étant très difficiles à différencier en fonction des produits et dépendant fortement de leurs conditions d’utilisation, cette solution n’est pas pertinente.
Par ailleurs, nous proposons que le rapport étudie l’opportunité de créer des certificats d’économies d’engrais azotés, afin de ne pas faire peser sur les seuls agriculteurs les efforts de réduction de la fertilisation azotée minérale, mais aussi la possibilité d’établir une rémunération des pratiques vertueuses, en particulier par la mise en place de paiements pour services environnementaux, ainsi que les modalités d’un renforcement de la formation, outil essentiel du changement des pratiques agricoles.
Ces solutions semblent davantage susceptibles de garantir un véritable changement de pratique au sein des exploitations, et ainsi de contribuer efficacement à l’atteinte des objectifs de réduction de la fertilisation azotée minérale.
Des alternatives existent. Elles supposent des changements de systèmes et le recours à l’agroécologie : allongement des rotations, avec l’introduction de légumineuses, travail sur les couverts végétaux, réorientation des exploitations en privilégiant l’optimisation des marges et de la valeur ajoutée sur le rendement des cultures, etc.
En revanche, les solutions permettant des ajustements à la marge, en lien avec l’utilisation d’outils technologiques tels que les satellites ou de matériels agricoles extrêmement sophistiqués, ne suffiront pas.
Mme la présidente. L’amendement n° 1355 rectifié, présenté par MM. Jacquin et Pla, Mme Conway-Mouret, MM. Antiste, P. Joly et Todeschini, Mme Rossignol et M. Kerrouche, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il étudie également l’impact écologique et économique de la création et la mise en œuvre de certificats d’économies d’azote en conformité avec la trajectoire de réduction des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote.
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Madame la présidente, si vous le permettez, je défendrai en même temps l’amendement n° 1356 rectifié.
Mme la présidente. L’amendement n° 1356 rectifié, présenté par MM. Jacquin et Pla, Mme Conway-Mouret, MM. Michau, Antiste, P. Joly et Todeschini, Mme Rossignol et M. Kerrouche, et ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il étudie également l’impact écologique et économique de la création et la mise en œuvre de certificats d’économies d’engrais azotés en conformité avec la trajectoire de réduction des émissions d’ammoniac et de protoxyde d’azote.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Olivier Jacquin. Par ces amendements visant à créer des certificats d’économies d’azote sur le modèle des certificats d’économies d’énergie, nous proposons un substitut à la taxation.
Les certificats d’économies d’énergie sont désormais bien connus. Ils existent dans de nombreux domaines relatifs à la protection de l’environnement et à la lutte contre le réchauffement climatique, tels que l’isolation. Ils demeurent toutefois très peu utilisés dans des secteurs entiers, dont l’agriculture.
On connaît les certificats d’économies de produits phytosanitaires ; nous nous en inspirons pour proposer, par ces amendements, deux déclinaisons, qui me semblent assez souples, d’un même dispositif de certificats d’économies d’azote.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces six amendements ?
M. Pascal Martin, rapporteur. L’amendement n° 1917 rectifié vise à instaurer une redevance sur les engrais minéraux azotés assortie d’un taux plus faible que celui qui a été précédemment proposé.
Encore une fois, la commission a fait le choix d’une logique d’accompagnement, écartant l’hypothèse d’une taxation dont les effets économiques et environnementaux seraient très négatifs à court et à moyen terme.
Je rappelle d’ailleurs que la plupart des pays qui ont fait le choix de mettre en place une telle redevance y ont finalement renoncé.
L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 1354 rectifié est satisfait : la logique du plan qui a été introduit en commission à l’article 62 consiste précisément à accompagner les agriculteurs dans la transition écologique.
Je demande donc le retrait de cet amendement, ainsi que, pour les mêmes raisons, de l’amendement n° 1103 rectifié. À défaut, l’avis serait défavorable sur ces deux amendements.
L’amendement n° 1918 tend à revenir sur la position de la commission, qui a souhaité que le rapport prévu au second alinéa du II de l’article 62 étudie l’opportunité de fixer des taux de redevance différenciés en fonction des facteurs d’émission d’ammoniac et de protoxyde d’azote des différents types d’engrais.
Par ailleurs, la rédaction proposée fait mention d’une stratégie et d’un programme qui n’ont pas d’existence législative.
Enfin, cet amendement tend à réintroduire, à l’article 62, la possibilité de créer des certificats d’économies d’engrais azotés, sur le modèle du dispositif prévu pour les produits phytopharmaceutiques aux articles L. 254-10 et suivants du code rural et de la pêche maritime.
Or la commission a supprimé cette mention, considérant qu’il s’agit d’un dispositif lourd sur le plan administratif, complexe à mettre en œuvre et qui constituerait, là encore, une spécificité française, alors que la commission privilégie une approche européenne du sujet.
Je demande donc le retrait de cet amendement, ainsi que, pour les mêmes raisons, des amendements nos 1355 rectifié et 1356 rectifié. À défaut, j’émettrai un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 1309, présenté par MM. Labbé, Dantec, Salmon, Fernique et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Afin d’atteindre l’objectif de réduction de 13 % des émissions d’ammoniac en 2030 par rapport à 2005 et l’objectif de réduction de 15 % des émissions de protoxyde d’azote en 2030 par rapport à 2015, les exploitations agricoles ne dépassent pas en moyenne par an une dose plafond d’azote total par hectare fixé à 140 kilogrammes. Ce plafond comprend l’azote organique et l’azote de synthèse.
La parole est à M. Joël Labbé.