M. Loïc Hervé. Eh oui !
M. Guillaume Gontard. Plus de signes religieux à la piscine et dans les compétitions sportives : nombre de nos compatriotes sportifs vont devoir passer sur le billot pour se faire enlever au laser leurs tatouages de crucifix… J’en passe et des meilleures : la liste est tristement longue.
Le journal Le Point, qui consacre pourtant sa une à l’islam une fois par mois, parle de « concours Lépine » et de « fièvre sénatoriale ». Il fut un temps où le Sénat se faisait au contraire une fierté de sa modération et de son rôle de garant des libertés publiques… Ce temps est visiblement révolu.
Pour abonder dans le sens de ce que disait Pierre Laurent, on ne distingue plus tellement ici ce qui différencie une partie de la droite radicalisée d’un Rassemblement national banalisé.
Au bout du compte, loin de conforter la République, votre projet de loi la saccage. La loi de 1901 est corsetée, celle de 1905 est piétinée. Aucune disposition ne traite du séparatisme social. C’est toute l’image de notre institution qui est entachée quand nous ne défendons plus la liberté, l’égalité et la fraternité.
Nous ne voterons pas ce texte, tout simplement parce que nous sommes profondément républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lagourgue. Nous achevons l’examen du projet de loi qui doit nous permettre de lutter contre les séparatismes.
Alors que l’intégrisme s’est progressivement développé en France, nous n’avons d’autre choix que de réaffirmer que les principes de la République doivent être respectés par tous. L’égalité entre tous nos compatriotes, notamment entre les femmes et les hommes, constitue l’un des fondements les plus essentiels de notre société. Ceux qui ne les respectent pas doivent être sanctionnés. La République ne cédera pas face aux obscurantismes.
Pour s’assurer du respect de ces principes, le texte prévoit de nouvelles obligations et de nouvelles procédures de contrôle.
Nous nous félicitons, à cet égard, que les financements provenant de l’étranger soient l’objet d’une attention particulière. Pendant trop longtemps, des puissances étrangères ont financé des organisations hostiles sur notre territoire. Il est nécessaire de mettre un terme à cette situation.
Le groupe Les Indépendants votera en faveur de ce projet de loi. Nous serons cependant très attentifs à son application. Il sera sans doute nécessaire d’en dresser le bilan après quelques années, afin de nous assurer que le dispositif reste efficace et pertinent. Il faudra aussi veiller aux moyens qui seront consacrés à l’application de ces nouvelles dispositions.
L’administration sera destinataire de nombreuses informations. Elle devra avoir les moyens de les traiter efficacement et d’agir lorsque c’est nécessaire.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Monsieur le ministre, vous nous avez invités à débattre pendant quinze jours du respect des principes de la République.
Lorsque notre groupe a voulu parler des séparatismes entre les riches et les pauvres et de la lutte contre l’évasion fiscale, l’impôt étant un devoir citoyen, vous nous avez dit que ce n’était pas à l’ordre du jour.
Quand nous avons voulu parler des discriminations que subissent nos compatriotes en raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de la couleur de leur peau, vous nous avez dit que ce n’était pas à l’ordre du jour. Vous les avez même niées.
Quand nous avons voulu parler de la nécessité que la République s’incarne partout, sur tous les territoires, dans les quartiers populaires, dans les territoires ruraux ou encore ultramarins, par la présence des services publics, vous nous avez dit que ce n’était pas à l’ordre du jour.
Lorsque nous avons voulu parler des relations diplomatiques que la France entretient avec certains États qui financent eux-mêmes le terrorisme, on a vu des sourires gênés…
J’espère que vous n’avez pas trouvé la droite sénatoriale trop molle quand elle a présenté un certain nombre d’amendements stigmatisant nos compatriotes musulmans dans cet hémicycle. De l’interdiction pour les mamans voilées d’accompagner les sorties scolaires jusqu’à l’interdiction des drapeaux dans les mariages, la liste est longue. Je n’y reviendrai pas.
D’ailleurs, il est assez marrant de voir que ceux qui parlent d’intégration à longueur de journée n’ont cessé de vouloir faire voter des amendements qui tendent à l’exclusion.
Enfin, chers camarades…
M. Loïc Hervé. Chers frères et sœurs ! (Sourires.)
Mme Éliane Assassi. C’est un joli mot, camarade !
M. Fabien Gay. Chers collègues, voulais-je dire (Nouveaux sourires.), un certain nombre d’entre vous ont évoqué la loi de 1905, la loi de 1901 qui a été changée, et les questions de liberté.
Par exemple, monsieur le ministre, une disposition relative à la liberté d’association, qui n’a pas fait grand bruit, mais qui devrait faire débat dans le pays dans les prochains jours, nous inquiète fortement : le fait que les quelque 17 millions de Françaises et de Français qui demandent une licence sportive seront désormais fichés, notamment par les préfectures, pour une question d’honorabilité. La question de l’inflation des fichiers des libertés publiques et individuelles nous interroge fortement.
Pour l’ensemble de ces dispositions, nous voterons contre ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. Alors que s’achève ce débat, je veux saluer tous mes collègues qui ont porté la parole gouvernementale durant ces quinze jours, après l’avoir fait à l’Assemblée nationale.
Peu de textes font naître autant de débats et donnent aussi fortement l’impression qu’ils vont changer profondément les choses, car il ne s’agit plus de se payer de mots, et le moment est grave.
Je veux remercier très sincèrement le Sénat des discussions que nous avons eues depuis quinze jours, en commission comme dans l’hémicycle, et même en dehors de celui-ci. Les débats politiques et techniques que nous avons pu avoir ont été parfois vifs, mais toujours respectueux.
Je remercie la commission des lois, notamment Mmes les rapporteures, ainsi que tous ceux qui ont contribué au débat.
Je regrette que les explications de vote ne correspondent pas tout à fait à l’esprit de concorde républicaine qui nous a animés, comme ceux qui suivent nos débats depuis quinze jours auront pu le constater. Nous étions d’accord pour dire qu’il existait un danger, même si toutes les solutions n’étaient pas à la hauteur et si d’autres allaient trop loin. D’ailleurs, le Gouvernement a été très respectueux du débat parlementaire, qu’il a eu le souci de ne pas préempter, en déposant moins d’une quinzaine d’amendements.
Le sénateur Max Brisson nous a rappelé qu’il ne fallait être ni excessif ni naïf. Telle a été la position du Gouvernement.
Je regrette les excès qu’il y a pu y avoir, notamment sur les dispositifs relatifs aux expressions religieuses, qui nous paraissent contraires à la Constitution et à l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
J’ai également relevé beaucoup de naïveté, certains considérant que nous pourrions lutter contre l’hydre qui nous attaque avec de simples beaux mots.
De ce point de vue, la position du Gouvernement est centrale : elle est à la fois ferme et conforme aux principes républicains. De très nombreuses dispositions viennent changer profondément, parfois avec l’appui de votre commission, mesdames les rapporteures, le travail que pourront faire le ministère de l’intérieur, la justice, l’éducation nationale, les élus locaux, qui le réclamaient depuis longtemps, pour faire face aux ingérences étrangères ou aux séparatismes.
Je crois qu’il ne faut pas non plus sous-estimer la révolution positive qui remet au goût du jour la loi de 1905. Bien loin de l’affaiblir, elle la renforce, mettant à disposition une police administrative des cultes améliorée et modernisée, qui correspond à la fois à l’esprit du législateur de l’époque et à la France d’aujourd’hui.
Au reste, nous avons longtemps discuté de sujets qui, je le crois, font honneur à la République, sans verser dans la stigmatisation, à quelques exceptions près.
Monsieur Ravier, j’ai entendu plusieurs fois dans votre bouche que nous étions déconnectés et loin des préoccupations des Français. Vous l’avez répété comme un mantra. Si j’étais facétieux, je vous dirais que, ayant été réélu à la tête de ma mairie, je ne pense pas être totalement déconnecté…
M. Stéphane Ravier. J’ai moi-même été réélu sénateur !
M. Gérald Darmanin, ministre. Je veux souligner que vos propos excessifs ne font pas toujours honneur au débat et contreviennent à la volonté unanime d’améliorer les textes. Au reste, votre position purement politicienne n’est pas conforme aux échanges que nous avons pu avoir précédemment en dehors des micros et des caméras. (Mme Éliane Assassi s’exclame.) Je le regrette profondément.
Je veux remercier chacune et chacun d’entre vous de ce débat. Je souhaite que la commission mixte paritaire soit conclusive, mais le Gouvernement ne pourra pas accepter un texte qui ne permettrait pas l’expression religieuse dans l’espace public, notamment sur le plan vestimentaire. C’est une limite que j’ai déjà fixée dans les discussions avec la commission, avec M. le président du Sénat et avec les groupes politiques. Si cette limite était franchie, le Gouvernement vous inviterait à en débattre de nouveau à l’occasion d’une nouvelle lecture. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi, dont l’intitulé est ainsi rédigé : projet de loi confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme.
J’ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Les Républicains, l’autre, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 112 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Pour l’adoption | 208 |
Contre | 109 |
Le Sénat a adopté.
5
Modification de l’ordre du jour
M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement sollicite du Sénat l’inscription à l’ordre du jour du mercredi 14 avril 2021, après les questions d’actualité, d’une déclaration, suivie d’un débat et d’un vote, en application de l’article 50-1 de la Constitution, relative à l’organisation des prochaines élections départementales et régionales.
Avec l’accord du groupe RDSE, son espace réservé serait reporté à l’issue de la déclaration du Gouvernement et le soir.
Pour l’organisation du débat à la suite de la déclaration du Gouvernement, nous pourrions prévoir un temps de parole pour les groupes politiques, à raison d’un orateur par groupe, de quatorze minutes pour le groupe Les Républicains, de douze minutes pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, de dix minutes pour le groupe Union Centriste, de huit minutes pour les autres groupes et de trois minutes pour les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
Par ailleurs, par courrier en date du 9 avril, le groupe RDSE demande de réduire à quarante-cinq minutes la durée de la discussion générale des deux textes inscrits à l’ordre du jour de son espace réservé.
Y a-t-il des observations ?…
Il en est ainsi décidé.
6
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mardi 13 avril 2021 :
À neuf heures trente :
Trente-six questions orales.
À quatorze heures trente et le soir :
Débat sur le thème « La loi Égalim ou comment sortir de l’impasse dans laquelle ce texte a plongé l’agriculture » ;
Proposition de loi tendant à inscrire l’hydroélectricité au cœur de la transition énergétique et de la relance économique, présentée par M. Daniel Gremillet (texte de la commission n° 508, 2020-2021).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt et une heures trente.)
Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
ÉTIENNE BOULENGER