Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Nous avons déjà eu ce débat la semaine dernière, au début de l’examen de ce texte. Il est fondamental que la loi puisse rappeler l’autorité de l’enseignant. Cette autorité est aujourd’hui fortement fragilisée et remise en question par des comportements qui sont souvent le fait de quelques élèves ou parents, et non de la majorité, mais qui mettent en difficulté les enseignants et les autres élèves de la classe. Il serait toutefois trop facile de se satisfaire du vote de cet amendement, en pensant qu’il réglera tous les problèmes.
Progressivement, année après année, on a délégitimé le rôle et l’autorité du professeur dans l’école et dans notre société. On a demandé aux enseignants de faire de plus en plus de choses, mais de moins en moins d’enseigner. On a exigé d’eux qu’ils améliorent leur savoir-faire, leur savoir-être, qu’ils développent des compétences transverses, mais on a oublié leur cœur de métier, leur retirant une partie de l’autorité que la société leur reconnaît et qui donne toute sa force à leur parole.
M. Max Brisson. Bravo !
Mme Cécile Cukierman. Ces problèmes, auxquels les enseignants sont confrontés de plus en plus souvent, quels que soient le lieu et le niveau d’enseignement, n’existaient pas voilà une vingtaine d’années. Le gamin qui ne voulait pas faire une sortie scolaire, on l’emmenait quand même ! Petit à petit, on a fragilisé le métier de professeur, son rôle et son utilité dans la société, avec pour conséquences les difficultés et parfois les drames que l’on connaît.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 24 decies.
Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je n’en suis pas certaine…
Mme la présidente. L’amendement n° 75 rectifié bis, présenté par MM. Grosperrin et Bascher, Mme Belrhiti, MM. Bonne et Bouchet, Mmes Boulay-Espéronnier et V. Boyer, M. Charon, Mmes Chauvin, de Cidrac, Deroche, Di Folco, Drexler, Dumont, F. Gerbaud et Goy-Chavent, MM. Grand, Gremillet et Husson, Mme Imbert, MM. Laménie, Paccaud, Panunzi et Perrin, Mme Raimond-Pavero et MM. Rapin, Rietmann, Saury, Savin et Segouin, est ainsi libellé :
Après l’article 24 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les missions des corps d’inspection intègrent de façon spécifique le respect par chaque établissement, dans son organisation comme dans son enseignement, des valeurs fondamentales de la République et de la laïcité.
La parole est à M. Jacques Grosperrin.
M. Jacques Grosperrin. Cet amendement vise à préciser le rôle des corps d’inspection. La dernière circulaire les concernant date de 2015, et je souhaiterais que l’on puisse intégrer à leurs missions le respect par chaque établissement des valeurs fondamentales de la République et de la laïcité.
La dégradation de certaines situations implique des contrôles accrus. Ces contrôles auront l’avantage de démontrer la priorité forte désormais donnée par la République au respect de ses principes fondamentaux. Ils existent déjà, certes, mais l’évaluation des établissements ou des enseignants doit véritablement se focaliser sur le respect des valeurs de la République, pour renforcer la promesse républicaine du vivre ensemble, indépendamment de l’appartenance familiale, religieuse ou géographique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?
M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis. Je partage l’avis de Jacques Grosperrin sur la dégradation de certaines situations en termes de respect des principes de la République et la nécessité de procéder à des contrôles plus approfondis et plus détaillés.
Il me semble donc utile de préciser dans la loi que, lors des contrôles, les missions des inspecteurs de l’éducation nationale doivent être particulièrement orientées vers le respect des principes de la République.
Jacques Grosperrin le rappelle de manière forte au travers de cet amendement, sur lequel la commission a émis un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Le respect des valeurs de la République et de la laïcité dans les établissements publics semble aller de soi. Vous considérez toutefois, monsieur Grosperrin, que cela irait sans doute mieux en le disant explicitement. Je suis enclin à aller dans votre sens.
Je rappelle que nous avons collectivement créé, dans la loi pour l’école de la confiance, le Conseil d’évaluation de l’école, une instance très importante qui permet aujourd’hui d’enclencher des processus d’évaluation des établissements, non seulement sur les enjeux de transmission des connaissances, mais aussi sous l’angle du climat scolaire – par exemple, la lutte contre le harcèlement – et du respect des valeurs de la République et de la laïcité.
Depuis septembre dernier, avec à sa tête la rectrice Béatrice Gille, ce conseil promeut avant tout une logique d’auto-évaluation, qui permet à chaque établissement de porter collectivement un regard sur lui-même et d’identifier les points d’amélioration.
Fort heureusement, les corps d’inspection ne fréquentent pas seulement les établissements pour procéder à des évaluations. Ils peuvent par exemple se rendre dans un établissement pour un sujet disciplinaire et constater à cette occasion que les valeurs de la République n’y sont pas pleinement respectées.
Dans ce contexte, votre amendement me semble faire sens. Il permet une explicitation utile, même si je pense qu’il est déjà appliqué pour l’essentiel. J’y suis donc favorable.
M. Max Brisson. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.
M. Jean-Raymond Hugonet. Devant cet enthousiasme collectif, je voudrais préciser un point qui m’est cher.
La liberté, l’égalité et la fraternité sont des valeurs de la République. La laïcité est un principe. La distinction est importante. Je ne pourrai donc pas voter cet amendement, qui introduit une confusion.
Ces valeurs et ces principes sont la base même de notre République. La laïcité est un principe qui découle de la liberté. Si nous faisons cette erreur d’appréciation, ce n’est pas la peine de discuter comme nous le faisons depuis des jours.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 24 decies.
L’amendement n° 76 rectifié bis, présenté par MM. Grosperrin, Babary et Bascher, Mme Belrhiti, M. Bouchet, Mmes Boulay-Espéronnier et V. Boyer, M. Charon, Mmes Chauvin, Deroche, Drexler, Dumont, F. Gerbaud et Goy-Chavent, MM. Grand, Gremillet et Husson, Mme Imbert, MM. Laménie, Paccaud, Panunzi et Perrin, Mmes Raimond-Pavero et Richer, MM. Rietmann et Saury et Mme Schalck, est ainsi libellé :
Après l’article 24 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le contrôle continu du diplôme national du brevet intègre une épreuve spécifique d’évaluation du socle des connaissances sur les valeurs de la République et de la laïcité.
La parole est à M. Jacques Grosperrin.
M. Jacques Grosperrin. Vous connaissez mon attachement au socle commun des compétences, monsieur le ministre. Nous avons eu l’occasion de travailler sur ce thème lorsque vous étiez Dgesco et que je siégeais dans une autre chambre parlementaire.
À travers cet amendement d’appel, je propose d’intégrer au brevet une épreuve spécifique d’évaluation du socle des connaissances sur les valeurs de la République. Elles sont déjà évaluées lors du contrôle continu, mais il faut à mon sens davantage sacraliser les choses.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?
M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis. J’entends l’appel de notre collègue Jacques Grosperrin, et je partage l’objectif de cet amendement. Le contenu des épreuves du brevet des collèges ne relève toutefois pas du domaine de la loi. En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Grosperrin, l’amendement n° 76 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Grosperrin. Non, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 76 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 77 rectifié, présenté par MM. Grosperrin et Bascher, Mme Belrhiti, MM. Bonne et Bouchet, Mmes Boulay-Espéronnier et V. Boyer, M. Charon, Mmes Chauvin, Deroche, Drexler, Dumont, F. Gerbaud et Goy-Chavent, MM. Grand et Gremillet, Mme Imbert et MM. Laménie, Paccaud, Perrin, Rietmann et Saury, est ainsi libellé :
Après l’article 24 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’apprentissage de la langue française dès l’enseignement primaire intègre les notions simples du vocabulaire des valeurs de la République.
La parole est à M. Jacques Grosperrin.
M. Jacques Grosperrin. Il s’agit là encore d’un amendement d’appel.
Alors qu’un plan est élaboré par le ministre pour l’apprentissage de la langue française en maternelle, nous voulons intégrer les notions simples du vocabulaire des valeurs de la République dès le plus jeune âge. J’admets que cela relève plus du cadre réglementaire ou des programmes que de la loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?
M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis. M. Grosperrin a donné l’avis de la commission en même temps qu’il lançait son appel. (Sourires.)
Nous partageons son souhait d’inculquer dès le plus jeune âge aux enfants le vocabulaire propre aux principes de la République. Ce sont aussi les mots de la présidente du Conseil supérieur des programmes. Nous demandons toutefois le retrait de cet amendement, dont l’objectif est déjà satisfait.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Grosperrin, l’amendement n° 77 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Grosperrin. Non, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 77 rectifié est retiré.
L’amendement n° 78 rectifié bis, présenté par MM. Grosperrin et Bascher, Mme Belrhiti, MM. Bonne et Bouchet, Mmes Boulay-Espéronnier et V. Boyer, M. Charon, Mmes Chauvin, de Cidrac, Deroche, Dumont, F. Gerbaud et Goy-Chavent, MM. Grand et Gremillet, Mme Imbert, MM. Laménie, Paccaud, Panunzi, Perrin et Rapin, Mme Richer et MM. Rietmann, Saury, Savin et Segouin, est ainsi libellé :
Après l’article 24 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les établissements du primaire et du secondaire organisent à chaque rentrée scolaire et lors d’événements particuliers un accueil républicain de l’ensemble des élèves.
La parole est à M. Jacques Grosperrin.
M. Jacques Grosperrin. Cet amendement vise à instaurer un accueil républicain des élèves à chaque rentrée scolaire, sur le modèle de ce qui existe outre-Atlantique, notamment au Canada.
Il est important de prévoir un temps ritualisé permettant de faire le lien entre républicanisme et universalisme. On pourrait envisager une formule souple, dont les modalités seraient laissées à l’appréciation de chaque établissement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?
M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis. Ce temps symbolique évoqué par Jacques Grosperrin a été institué par le ministre dès 2017. Il avait alors été décrit comme un temps républicain au cours duquel les élèves déjà présents l’an passé dans l’établissement accueillaient chaleureusement leurs nouveaux camarades en musique pour leur souhaiter la bienvenue.
Le droit existant permet déjà d’organiser un tel accueil. L’initiative nationale que je viens d’évoquer pourra sans doute être renouvelée lorsque les conditions sanitaires le permettront.
La commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Grosperrin, l’amendement n° 78 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Grosperrin. Non, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 78 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 79 rectifié bis, présenté par MM. Grosperrin et Bascher, Mme Belrhiti, MM. Bonne et Bouchet, Mme V. Boyer, M. Charon, Mmes Chauvin, Deroche, Drexler, Dumont, F. Gerbaud et Goy-Chavent, MM. Grand et Gremillet, Mme Imbert et MM. Laménie, Paccaud, Panunzi, Perrin, Rapin, Rietmann, Saury et Segouin, est ainsi libellé :
Après l’article 24 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un pacte est proposé aux enseignants à l’issue de leur formation initiale, intégrant un code de déontologie et la signature du règlement de l’établissement sur le respect et l’adhésion aux valeurs républicaines. Ce pacte se traduit sous forme d’une déclaration solennelle lors de l’entrée en fonction.
La parole est à M. Jacques Grosperrin.
M. Jacques Grosperrin. Cet amendement, plus important à mes yeux, vise à proposer aux enseignants à l’issue de leur formation initiale un pacte intégrant un code de déontologie et la signature du règlement de l’établissement sur le respect et l’adhésion aux valeurs républicaines. À ce jour, aucune disposition formelle de ce type n’existe. Le ministre a justement proposé que la laïcité puisse être enseignée dans les Inspé.
Dans d’autres corps, comme la police ou la gendarmerie, les fonctionnaires s’engagent à travers un pacte républicain. On pourrait s’en inspirer pour les enseignants : cette solennité permettrait de restaurer leur autorité et serait très utile au service public de l’éducation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?
M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis. Je comprends le sens de cette démarche solennelle proposée aux enseignants. Toutefois, dès lors qu’ils ont réussi le concours, les enseignants sont soumis aux mêmes droits et obligations que les autres fonctionnaires, y compris au respect des principes de la République. En conséquence, la commission sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je comprends très bien l’esprit de cet amendement. Notre maison éducation nationale a besoin de rituels, pour les élèves comme pour les adultes.
Les diplômes sont encore trop souvent donnés à la sauvette. C’est pourquoi j’encourage très fortement les cérémonies de remise du baccalauréat, même quelques mois après l’obtention du diplôme, pour bien marquer qu’une étape importante a été franchie dans la vie du lauréat. C’est vrai des fins d’année comme de tous les moments où les jeunes peuvent éprouver un sentiment de fierté et d’appartenance. Tout ce qui va dans ce sens est positif.
Nous encourageons également les cérémonies d’accueil des professeurs. Au-delà du rappel des valeurs de la République, il y a aussi une dimension d’intégration professionnelle, qui permet de se sentir fier d’appartenir à un corps.
Je considère toutefois, comme le rapporteur pour avis, que cet amendement est satisfait. En outre, la loi ne doit pas trop entrer dans les détails.
Je prends l’engagement de multiplier ces cérémonies d’accueil des nouveaux professeurs – j’ai déjà commencé à le faire –, afin de leur souhaiter la bienvenue dans l’école de la République.
Mme la présidente. Monsieur Grosperrin, l’amendement n° 79 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jacques Grosperrin. Non, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 79 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 36, présenté par MM. Sol et Mandelli, Mme Chauvin, MM. Calvet, Burgoa et Vogel, Mme Deroche, M. Savary, Mme Gruny, M. Genet, Mme Drexler, M. Gremillet, Mme Gosselin, M. Grand, Mme Bellurot, M. Bonne et Mme Joseph, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 24 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 312-15 du code de l’éducation, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il comprend également une sensibilisation, adaptée à l’âge des élèves, aux grandes questions de société et à la problématisation de leurs enjeux. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section …
Dispositions relatives à l’enseignement moral et civique
La parole est à Mme Sabine Drexler.
Mme Sabine Drexler. Les débats actuels complexes autour de la laïcité ou de la religion, à la suite notamment des terribles attentats, montrent l’importance de former les élèves aux grandes questions sociétales et, surtout, de les problématiser pour qu’ils puissent les comprendre et les assimiler.
Tel est l’objet de cet amendement, déposé par notre collègue Jean Sol.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?
M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis. L’objectif de cet amendement est d’ores et déjà satisfait.
L’article L. 312-15 du code de l’éducation, relatif à l’enseignement moral et civique, précise en effet que cet enseignement « vise notamment à amener les élèves à devenir des citoyens responsables et libres, à se forger un sens critique et à adopter un comportement réfléchi ». Les grandes questions sociétales en font partie. La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Drexler, l’amendement n° 36 est-il maintenu ?
Mme Sabine Drexler. Non, je le retire.
Mme la présidente. L’amendement n° 36 est retiré.
L’amendement n° 197 rectifié quinquies, présenté par Mme Deromedi, M. Retailleau, Mmes Puissat, V. Boyer et Lavarde, MM. Courtial, Cardoux, Panunzi, Meurant et Bascher, Mme Berthet, M. Grand, Mmes Thomas et Belrhiti, MM. Burgoa et Saury, Mme Canayer, M. Milon, Mmes Raimond-Pavero, Gosselin et Lopez, MM. Lefèvre, D. Laurent, Frassa et B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam et Chauvin, MM. de Nicolaÿ et Reichardt, Mmes Gruny et Imbert, M. Le Rudulier, Mme Pluchet, M. Tabarot, Mme Drexler, M. Gremillet, Mme de Cidrac, M. Cuypers et Mme Schalck, est ainsi libellé :
A. – Après l’article 24 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 131-8 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Au troisième alinéa, après le mot : « sanctions », sont insérés les mots : « administratives et » ;
2° Le septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il informe le président du conseil général du cas des enfants qui ont fait l’objet des mesures d’aide et d’accompagnement mentionnées au sixième alinéa. » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas où malgré les mesures d’aide et d’accompagnement prévues aux alinéas précédents, le défaut d’assiduité se poursuivrait en l’absence de motif légitime ou d’excuses valables, la suspension totale ou partielle des allocations familiales et de l’allocation de rentrée scolaire peut être décidée après avoir mis en demeure les personnes responsables de l’enfant en mesure de présenter leurs observations. La durée de la mesure de suspension est au plus égale à trois mois. Elle peut être renouvelée, par l’autorité l’ayant prononcée, dans la limite d’une durée maximale de suspension de douze mois. Le versement de ces allocations est repris dès constatation du rétablissement de l’assiduité par le directeur de l’établissement. »
II. – Après l’article L. 552-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 552-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 552-5. – Dans le cas prévu au dernier alinéa de l’article L. 131-8 du code de l’éducation, le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales suspend, sur demande de l’inspecteur d’académie, le versement de la part des allocations familiales et de l’allocation de rentrée scolaire due au titre de l’enfant en cause. L’inspecteur d’académie peut demander une suspension totale ou partielle de ladite part.
« Le rétablissement des allocations familiales et de l’allocation de rentrée scolaire s’effectue selon les modalités prévues au même article L. 131-8.
« Les modalités de calcul de la part due au titre de l’enfant en cause sont définies par décret en Conseil d’État. »
III. – Après l’article L. 222-4 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 222-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 222-4-…. – Lorsqu’il constate que malgré les mesures d’aide et d’accompagnement prévues à l’article L. 131-8 du code de l’éducation, le défaut d’assiduité se poursuit en l’absence de motif légitime ou d’excuses valables, le président du conseil général, saisi par l’inspecteur d’académie, peut :
« 1° Demander au directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales la suspension du versement de tout ou partie des prestations afférentes à l’enfant, en application de l’article L. 552-5 du code de la sécurité sociale ;
« 2° Saisir le procureur de la République compétent en vertu des articles L. 211-1 ou L. 211-2 du code de justice pénale des mineurs de faits susceptibles de constituer une infraction pénale ;
« 3° Saisir l’autorité judiciaire pour qu’il soit fait application, s’il y a lieu, des dispositions de l’article L. 552-6 du code de la sécurité sociale. »
B. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et de son intitulé ainsi rédigés :
Section …
Lutter contre l’évitement et l’absentéisme scolaire
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Le nombre d’enfants et d’adolescents qui sont dans les rues, le jour comme la nuit, alors qu’ils devraient être scolarisés ou chez leurs parents, est en constante augmentation. Ces enfants et adolescents laissés libres de leurs mouvements ne suivent plus régulièrement leur scolarité et se livrent à des troubles à l’ordre public pouvant aller jusqu’à entraîner la mort.
Dans ce contexte, les parents doivent être convoqués par l’inspecteur d’académie, qui aura ainsi la possibilité d’apprécier si les parents sont dépassés par leur enfant ou s’ils n’ont pas l’intention d’assumer leurs responsabilités parentales.
L’article 227-17 du code pénal dispose que « le fait, par le père ou la mère, de se soustraire […] à ses obligations légales au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de son enfant mineur est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. L’infraction prévue par le présent article est assimilée à un abandon de famille pour l’application du 3° de l’article 373 du code civil ».
Cet amendement a pour objet de donner un outil supplémentaire à l’inspecteur d’académie, à savoir la possibilité de demander la suspension totale ou partielle des prestations familiales et de l’allocation de rentrée scolaire, s’il est clairement démontré que les parents ne remplissent plus leur rôle d’éducation et de soins. Je souligne bien qu’il s’agit d’une possibilité, et non d’une mesure automatique.
Bien entendu, les parents en difficulté, essentiellement les familles monoparentales, pourront être aidés s’ils manifestent la volonté d’essayer de rétablir la situation. Les dispositifs existants le permettent. En revanche, en cas de démission parentale, il n’y a aucune raison de leur apporter une aide qui, de toute évidence, ne va pas à l’éducation de l’enfant. Les prestations qu’ils perçoivent au titre de cet enfant pourront donc être diminuées, voire supprimées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de la culture ?
M. Stéphane Piednoir, rapporteur pour avis. L’instruction, plus particulièrement l’école, joue un rôle fondamental dans la transmission des principes de la République. Cet amendement vise au respect de l’instruction obligatoire et de l’assiduité scolaire.
Tout d’abord, la suspension des allocations familiales n’interviendrait qu’après plusieurs étapes et au terme d’un dialogue avec la famille. Des mesures d’accompagnement social seraient d’abord proposées, puis il y aurait une mise en demeure des parents, qui pourraient expliquer la singularité de leur situation.
La suppression envisagée ne serait donc absolument pas immédiate. Elle n’interviendrait pas dès la première absence de l’enfant – j’anticipe sur les caricatures qui pourraient être faites –, ni même en cas d’absences répétées. Il faut quatre demi-journées d’absence non justifiées par mois pour déclencher un signalement, ce qui commence à faire beaucoup.
La réponse apportée serait donc progressive.
Ensuite, comme pour toute mesure de ce type, il y a une guerre des chiffres.
Certains ont analysé la mesure similaire mise en place par la loi Ciotti comme un échec, au motif que, sur les 600 allocations suspendues, seules 142 avaient été reversées parce que l’élève était revenu en cours, signe d’une efficacité toute relative… Ce calcul oublie toutefois, volontairement ou non, les 36 200 premiers signalements effectués par les établissements aux services académiques et les 28 000 premiers avertissements adressés aux familles qui en ont découlé. Sur ce nombre, seuls 458 enfants n’étaient pas retournés à l’école. À l’aune de ces chiffres, l’efficacité de la mesure avait donc plutôt été de l’ordre de 98 %.
Enfin, en plus de l’accompagnement social des familles par le conseil départemental, il y aura désormais un accompagnement de ces enfants et de leurs familles par les cellules de protection du droit à l’instruction, dont nous avons voté la création hier et qui permettront aussi de détecter des enfants échappant à cette obligation d’instruction.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je vais essayer d’être bref. Le sujet est important, mais ce n’est pas comme si nous en débattions pour la première fois…
Nous l’avons dit hier à propos de l’allocation de rentrée scolaire, il faut faire la distinction entre les différentes prestations sociales et leur degré de conditionnalité.
En l’état actuel du droit, nous ne sommes pas dépourvus d’outils pour faire pression sur les familles afin que l’obligation scolaire soit respectée. On peut considérer, comme cet amendement le suggère, qu’il est pertinent d’utiliser les allocations familiales. Le rapporteur pour avis a rappelé les interprétations divergentes des expériences en la matière. J’ai tendance à penser qu’il incombe surtout au ministre de l’éducation nationale et aux différentes autorités compétentes d’appliquer le droit et les outils existants.
Je partage votre souci de faire respecter l’obligation scolaire. S’il y a bien une chose qui m’anime, c’est la volonté de rendre effective la présence des enfants à l’école, un sujet qui n’est ni de droite ni de gauche.