Sommaire

Présidence de M. Georges Patient

Secrétaires :

M. Pierre Cuypers, Mme Patricia Schillinger.

1. Procès-verbal

2. Modification de l’ordre du jour

3. Communication relative à une commission mixte paritaire

4. Code mondial antidopage et lutte contre le dopage. – Adoption définitive en procédure accélérée d’un projet de loi

Discussion générale :

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée des sports

Mme Elsa Schalck, rapporteure de la commission de la culture

M. Jean-Pierre Decool

M. Thomas Dossus

M. Didier Rambaud

M. Bernard Fialaire

M. Jérémy Bacchi

M. Claude Kern

M. Jean-Jacques Lozach

M. Michel Savin

Clôture de la discussion générale.

Article unique

Amendement n° 2 rectifié ter de M. Claude Kern. – Retrait.

Amendement n° 3 rectifié de M. Jean-Jacques Lozach. – Retrait.

Amendement n° 1 rectifié bis de M. Michel Savin. – Retrait.

Adoption définitive de l’article unique du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance

5. Rappel au règlement

Mme Nathalie Goulet

6. Ratification de diverses ordonnances pour faire face à l’épidémie de covid-19. – Adoption définitive en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable

M. Bernard Delcros, rapporteur de la commission des finances

M. Paul Toussaint Parigi

M. Bernard Buis

M. Jean-Claude Requier

M. Pascal Savoldelli

M. Thierry Cozic

M. Stéphane Sautarel

M. Pierre Médevielle

Mme Sylvie Vermeillet

Clôture de la discussion générale.

Article 1er – Adoption.

Articles additionnels après l’article 1er

Amendement n° 1 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° 3 rectifié de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Articles 1er bis, 2 et 3 – Adoption.

Articles additionnels après l’article 3

Amendement n° 7 de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° 4 rectifié de M. Pascal Savoldelli. – Rejet.

Amendement n° 5 rectifié de M. Pascal Savoldelli. – Rejet par scrutin public n° 81.

Article 3 bis – Adoption.

Article additionnel après l’article 3 bis

Amendement n° 8 de la commission. – Retrait.

Article 4 – Adoption.

Vote sur l’ensemble

Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission.

Suspension et reprise de la séance

7. Réforme du courtage. – Adoption en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale :

Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable

M. Jean-François Husson, rapporteur de la commission des finances

M. Thani Mohamed Soilihi

M. Christian Bilhac

M. Éric Bocquet

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Isabelle Briquet

M. Pierre-Jean Verzelen

M. Paul Toussaint Parigi

M. Vincent Segouin

M. Marc Laménie

Clôture de la discussion générale.

Article unique

Amendement n° 2 du Gouvernement ; sous-amendements nos 9 de M. Jean-Michel Arnaud et 10 de M. Jean-François Husson. – Retrait du sous-amendement n° 9 ; adoption du sous-amendement n° 10 et de l’amendement modifié.

Amendement n° 7 de Mme Catherine Dumas. – Retrait.

Amendement n° 3 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 5 de Mme Catherine Dumas. – Retrait.

Amendement n° 4 de Mme Catherine Dumas. – Retrait.

Amendements identiques nos 1 rectifié de M. Jean-Michel Arnaud, 6 de Mme Catherine Dumas et 8 rectifié de M. Vincent Segouin. – Retrait des trois amendements.

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

8. Renouvellement des conseils départementaux et régionaux. – Adoption définitive des conclusions d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Discussion générale :

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté

Mme Cécile Cukierman

M. Arnaud de Belenet

M. Éric Kerrouche

M. Jean Louis Masson

M. Alain Marc

M. Guy Benarroche

M. Alain Richard

Mme Guylène Pantel

Mme Agnès Canayer

Clôture de la discussion générale.

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Vote sur l’ensemble

Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire.

Suspension et reprise de la séance

9. Code de la justice pénale des mineurs. – Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Discussion générale :

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

Mme Dominique Vérien

M. Jean-Pierre Sueur

M. Alain Marc

Mme Esther Benbassa

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Maryse Carrère

Mme Cécile Cukierman

M. Jean-Raymond Hugonet

Clôture de la discussion générale.

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Article 7

Amendement n° 1 du Gouvernement. – Réservé.

Article 11

Amendement n° 2 du Gouvernement. – Réservé.

Vote sur l’ensemble

Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.

10. Ordre du jour

COMPTE RENDU INTÉGRAL

Présidence de M. Georges Patient

vice-président

Secrétaires :

M. Pierre Cuypers,

Mme Patricia Schillinger.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du mercredi 10 février 2021 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

2

Modification de l’ordre du jour

M. le président. Par lettre en date du 15 février 2021, le Gouvernement demande que la suite de l’examen de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification soit inscrite à l’ordre du jour du jeudi 18 février, matin, et, éventuellement, à la suite des textes préalablement inscrits de l’après-midi et du soir.

En conséquence, l’examen des conclusions des commissions mixtes paritaires sur le projet de loi portant report du renouvellement général des conseils départementaux et sur le projet de loi relatif au code de la justice pénale des mineurs est avancé à ce soir.

Acte est donné de ces demandes.

3

Communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

4

 
Dossier législatif : projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l'efficacité de la lutte contre le dopage
Discussion générale (suite)

Code mondial antidopage et lutte contre le dopage

Adoption définitive en procédure accélérée d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l’efficacité de la lutte contre le dopage (projet n° 198, résultat des travaux de la commission n° 335, rapport n° 334).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre déléguée.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l'efficacité de la lutte contre le dopage
Article unique (début)

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée auprès du ministre de léducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée des sports. Monsieur le président, madame la rapporteure, chère Elsa Schalck, mesdames, messieurs les sénateurs, le dopage et, plus largement, les conduites dopantes ou addictives sont un fléau en ce qu’ils menacent l’intégrité de nos compétitions sportives comme la santé de nos sportifs, professionnels et amateurs.

Au-delà, ils faussent la performance, pénalisent les athlètes propres et attaquent fondamentalement l’esprit de loyauté et d’équité, qui fonde pourtant l’essence même des compétitions sportives.

Je salue à cet égard la décision du tribunal arbitral du sport du 17 décembre 2020, qui, grâce aux investigations menées par l’Agence mondiale antidopage (AMA) durant presque quatre ans, a reconnu la responsabilité des autorités russes dans la dissimulation organisée d’échantillons positifs et un programme centralisé de dopage entre 2011 et 2015.

La crédibilité de nos compétitions et la loyauté entre sportifs passent ainsi par des sanctions exemplaires lorsque les compétitions sont faussées.

J’en suis intimement convaincue, une politique efficace de prévention du dopage est une politique qui est l’affaire de tous : sportifs, ministère chargé des sports, désormais en lien étroit avec le ministère de l’éducation nationale, fédérations, agences mondiale et française de lutte contre le dopage, corps médical, communauté scientifique, médias, sponsors, mais aussi l’ensemble du public amateur de spectacles sportifs.

Aussi, dès mon arrivée au ministère des sports, en septembre 2018, j’ai tenu à placer les enjeux d’éthique au cœur de mes priorités.

Je considère en effet que le ministère des sports doit s’investir prioritairement dans les politiques publiques liées à la protection des pratiquants, qu’il s’agisse du sport de haut niveau ou du sport amateur.

Jean-Michel Blanquer et moi-même poursuivons une politique volontariste de lutte contre le dopage et toutes les formes de conduites addictives. Cette politique associe l’ensemble des parties prenantes, au premier rang desquelles figure l’AFLD, l’Agence française de lutte contre le dopage.

Ensemble, nous développons des programmes de formation et de sensibilisation des sportifs et de leur entourage ; nous accompagnons les fédérations et les établissements du ministère dans leur campagne de prévention et l’élaboration de leur stratégie ; et nous donnons les moyens humains et financiers nécessaires à une lutte efficace contre le dopage.

L’efficience de notre politique passe en effet nécessairement par les actions concrètes que nous menons.

Durant ma carrière de nageuse de haut niveau, j’ai profondément manqué d’informations sur les produits à risque et la lutte contre le dopage. Avec Witold Banka, le président de l’Agence mondiale antidopage, lui aussi ancien sportif, je partage la même détermination à former et impliquer les sportifs dans la préservation des valeurs de notre sport.

Le plan national de prévention du dopage et des conduites dopantes 2020-2024 et le guide d’accompagnement à destination des fédérations sportives illustrent ainsi l’engagement des pouvoirs publics français pour renforcer une culture commune de prévention et de vigilance, à tous les niveaux de l’organisation sportive.

Je présiderai d’ailleurs un comité de pilotage de ce plan national le 23 février prochain, pour faire un point d’étape avec tous les acteurs concernés.

L’engagement de l’État en faveur de la lutte contre le dopage est bien sûr aussi financier : en 2021, ce sont près de 12 millions d’euros que notre gouvernement investit en soutien des opérateurs de la lutte contre le dopage. La contribution annuelle de la France au fonctionnement de l’AMA s’établit, ainsi, à plus d’un million d’euros. Par ailleurs, la dotation attribuée par l’État à l’Agence française de lutte contre le dopage atteint près de 11 millions d’euros, pour permettre notamment des recrutements complémentaires ainsi qu’une augmentation du volume des contrôles, qui passeront ainsi de 7 000 à 10 000 en 2021.

Notre ambition s’inscrit dans la perspective de l’accueil à Paris des jeux Olympiques et Paralympiques en 2024. Cet événement planétaire doit nous permettre de changer la place du sport dans notre société, de l’inscrire durablement dans le quotidien de tous et, bien sûr, d’en faire le véhicule central d’un sport propre, loyal et digne.

J’en viens plus précisément au sujet pour lequel nous sommes réunis cet après-midi, à savoir la transposition des nouvelles dispositions du code mondial antidopage dans notre droit français.

Ce code, vous le savez, n’a pas de force contraignante directe à l’égard des États. C’est donc en application de la convention internationale contre le dopage dans le sport, adoptée en 2005 sous l’égide de l’Unesco (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture) et ratifiée par la France en 2007, qu’il nous appartient de transposer les dispositions du code mondial pour assurer la conformité de notre droit national.

Permettez-moi de rappeler brièvement la chronologie qui me conduit devant vous aujourd’hui, dans le cadre d’une procédure accélérée.

La version 2021 du code mondial antidopage a été adoptée en novembre 2019 en Pologne. Dès le 19 février 2020, j’avais déposé un projet de loi sur le bureau de l’Assemblée nationale, dont l’examen n’a malheureusement pas pu s’inscrire dans l’agenda parlementaire compte tenu des urgences liées à la pandémie.

Le 7 décembre dernier, les députés ont adopté à l’unanimité l’article unique du présent projet de loi, qui vise à habiliter le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnance pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l’efficacité de la lutte contre le dopage.

Je l’avais dit à l’Assemblée nationale, j’aurais souhaité pouvoir offrir, pour la première fois, un débat de fond à la représentation parlementaire sur les prochaines dispositions législatives du code du sport en matière de dopage.

Malheureusement, la crise sanitaire a bouleversé notre calendrier législatif. Je suis donc contrainte de procéder, comme les précédents gouvernements, par voie d’ordonnance, avec la confiance du Parlement.

Dans le cadre des travaux parlementaires menés avec Mme la rapporteure et les membres de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat, j’ai écouté les préoccupations exprimées et tenté de lever les inquiétudes. Devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite réitérer les engagements pris par le Gouvernement.

D’abord, concernant les pouvoirs d’enquête qui seront confiés à l’AFLD par la future ordonnance, le travail conjoint mené avec l’AFLD nous a permis de considérablement renforcer les prérogatives dont disposera l’Agence pour mener le plus efficacement possible une lutte antidopage complémentaire des procédures judiciaires pouvant être parallèlement engagées.

Comme aucune autre organisation antidopage nationale, les enquêteurs de l’AFLD pourront ainsi user d’une identité d’emprunt sur internet, accéder aux locaux professionnels et sportifs, se faire communiquer tout document utile ou encore convoquer et entendre toute personne de l’entourage d’un sportif en amont d’une procédure disciplinaire.

Le travail de rédaction de l’ordonnance a été long et minutieux, car, comme vous, je suis profondément attachée à préserver les libertés individuelles et la présomption d’innocence.

Quant au transfert, en janvier 2022, du laboratoire d’analyse au sein de l’UFR (unité de formation et de recherche) de pharmacie de l’université Paris-Saclay, c’est une chance immense pour notre lutte antidopage d’intégrer ce campus récemment reconnu « initiative d’excellence » par un jury international.

Grâce à vous, mesdames, messieurs les sénateurs, le ministère a accéléré la mise en œuvre d’une collaboration rapprochée avec l’université. Vous nous avez permis de faire progresser ce projet, afin d’en faire un laboratoire d’excellence ; je tiens à vous en remercier.

Désormais, un comité de pilotage se réunira tous les mois pour mettre en œuvre efficacement cette réforme et traiter de tous les sujets de façon positive.

Ce comité a vocation à élaborer le futur modèle économique du laboratoire, au travers de trois perspectives qui l’assureront de son rayonnement national et international : son fonctionnement courant, ses capacités d’investissement pérennes et la gestion de ses fonctions support.

Dès 2022, le ministère chargé des sports apportera à l’université des ressources à la hauteur de nos ambitions communes, pour la qualité des analyses, les investissements en matériels ainsi que les travaux de recherche. Une convention pluriannuelle liant l’État à l’université apportera toutes les garanties nécessaires.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je sais que, pour vous, le sujet de la lutte contre le dopage ne souffre aucune polémique partisane.

M. Michel Savin. Très bien !

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Le texte de l’ordonnance, que j’ai tenu à transmettre en toute transparence à la commission présidée par M. Laurent Lafon, recueille l’accord de l’AFLD et celui de l’AMA. J’envisage d’en saisir le Conseil d’État dans les tout prochains jours, pour être en mesure de présenter l’ordonnance définitive en conseil des ministres avant la fin du mois de mars.

Ainsi, nous pourrions, ensemble, avoir finalisé la transposition législative complète avant la date limite fixée par l’Agence mondiale au 12 avril prochain.

Je tenais, pour finir, à saluer la grande qualité des travaux de Mme la rapporteure et les échanges constructifs que nous avons pu avoir.

M. Max Brisson. Très bien !

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Je tiens également à remercier les équipes du ministère des sports et de l’AFLD pour leur travail, si précieux dans la rédaction du texte de l’ordonnance, qui se prolonge d’ores et déjà avec la mise à jour de la partie réglementaire du code du sport.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je compte sur vous pour nous permettre d’adopter ce texte dans les mêmes termes que l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

Mme Elsa Schalck, rapporteure de la commission de la culture, de léducation et de la communication. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi d’habilitation que nous examinons aujourd’hui est très technique, puisqu’il s’agit de permettre au Gouvernement, par voie d’ordonnance, de modifier plusieurs dizaines d’articles du code du sport pour les rendre conformes aux prescriptions du nouveau code mondial antidopage, adopté à l’automne 2019 dans le cadre d’une conférence internationale organisée par l’Agence mondiale antidopage (AMA).

Si les dispositions concernées par le projet de loi sont effectivement complexes, ses principes et ses objectifs sont au contraire très simples : ils visent tout simplement à renforcer l’éthique du sport.

Les questions qui se posent sont fondamentales : comment garantir l’équité des chances entre les sportifs ? Comment s’assurer que les comportements irréguliers seront identifiés, jugés et sanctionnés ? Comment préserver la santé des sportifs, lutter contre les tentations et dissuader les tentateurs ? Comment, enfin, créer une vraie culture de la prévention, grâce à la formation et l’information des sportifs et de leurs encadrants ?

Madame la ministre, nous partageons complètement votre souhait que le nouveau code mondial antidopage, qui comprend de nombreuses dispositions utiles pour rendre l’arsenal antidopage plus efficace, puisse être adopté au plus vite.

Le dopage est un véritable fléau qui doit être combattu, car il nuit aux valeurs mêmes que le sport véhicule. Nous avons par ailleurs un devoir d’exemplarité dans la perspective des grandes compétitions que nous allons accueillir, qu’il s’agisse de la coupe du monde de rugby en 2023 ou des jeux Olympiques et Paralympiques en 2024. Nous sommes donc résolument favorables aux dispositions prévues par ce nouveau code mondial antidopage, qui marque un changement de nature de la lutte antidopage, au travers de la mise en place d’une politique publique plus collégiale privilégiant la prévention grâce à l’information et à la formation.

Pour autant, vous comprendrez notre réticence à voir le Parlement privé, une fois de plus, de la possibilité d’examiner au fond les dispositions du code du sport concernées par le nouveau code mondial antidopage.

Vous nous l’accorderez, le Sénat n’est pas responsable du fait que nous n’examinions qu’aujourd’hui, le 16 février 2021, ce projet de loi qui aurait dû être adopté voilà plusieurs mois, pour permettre au nouveau code d’entrer en vigueur au 1er janvier 2021. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Claude Kern applaudit également.)

Dans ces conditions, quel est le rôle du Sénat ? Devons-nous adopter ce texte sans poser de questions, pour vous permettre de rattraper un peu le retard accumulé depuis plus d’un an ?

Bien évidemment, le Sénat ne pouvait faire l’économie d’un travail de fond sur le contenu du code mondial antidopage et les problèmes engendrés par sa mise en œuvre. Nous avons donc longuement auditionné l’ensemble des acteurs au mois de janvier, afin de nous faire notre propre opinion.

Comme vous le savez, ces auditions nous ont été précieuses pour identifier au moins deux sujets de préoccupation, qui n’ont pas permis à la commission d’adopter, voilà quinze jours, le projet de loi.

Je reviendrai sur ces deux points clés. À ce stade de nos échanges, je souhaite vraiment que les enjeux du débat d’aujourd’hui soient parfaitement clairs pour chacun d’entre nous.

Nous sommes conscients de l’intérêt qu’il y a à ce que le Sénat apporte son soutien à ce texte. Nous souhaitons tous une plus grande efficacité dans la lutte contre le dopage et le nouveau volet relatif à la prévention nous semble très prometteur pour renforcer l’éthique du sport.

Nous avons bien mesuré, par ailleurs, la contrainte de la date du 12 avril 2021, qui marque le terme du délai donné par l’AMA à la France pour se mettre en conformité. Mais le respect de ce délai ne peut avoir pour effet de nous priver des réponses que nous attendons sur les points qui font encore débat, d’autant que la date du 12 avril prochain constitue seulement une étape de la procédure de mise en conformité de l’AMA. Il n’existe donc aucune épée de Damoclès au-dessus de nos têtes qui justifierait de nous priver d’un débat.

Notre débat d’aujourd’hui est utile. Je souhaite d’ailleurs saluer, madame la ministre, la qualité de nos échanges. Vous-même et l’ensemble de vos collaborateurs avez été à l’écoute de nos interrogations, et je peux d’ores et déjà indiquer que vous avez commencé à apporter des réponses très positives à nos demandes d’éclaircissement.

Il est donc important, pour tous les acteurs du monde du sport, que vous puissiez cet après-midi nous confirmer ces avancées, mais aussi nous rassurer sur les quelques points qui demeurent en suspens, comme le confirment d’ailleurs les propos que vous venez de tenir.

Quels sont les sujets sur lesquels nous souhaitons vous entendre ? Ils sont au nombre de deux.

Le premier sujet concerne les pouvoirs d’enquête administrative de l’Agence française de lutte contre le dopage, l’AFLD. Ces pouvoirs sont aujourd’hui notoirement insuffisants pour lui permettre de remonter les filières et confondre tous les intervenants. L’AFLD demande depuis des années à obtenir des pouvoirs similaires à ceux dont disposent d’autres autorités indépendantes comme l’Autorité des marchés financiers, l’AMF. Or nous savons que le travail gouvernemental n’avait pas permis, jusqu’à récemment, d’aboutir sur la question de ces pouvoirs d’enquête.

Notre commission s’est donc engagée pour demander que l’AFLD dispose au moins de deux types de pouvoir d’enquête administrative : un pouvoir de convocation assorti d’un pouvoir de sanction pour les contrevenants et un droit à recourir à des identités d’emprunt, notamment pour réaliser des « coups d’achat ». Je précise que l’AMF bénéficie de ces deux compétences.

Nous le savons, vous vous êtes saisie ces derniers jours de ce dossier, qui a bien avancé. C’est pourquoi nous vous serions reconnaissants de nous préciser quels seront précisément les pouvoirs d’enquête de l’AFLD définis par l’ordonnance.

Le second sujet est également important à nos yeux puisqu’il concerne le laboratoire antidopage, qui doit quitter le giron de l’AFLD pour rejoindre la faculté de pharmacie de l’université Paris-Saclay.

Nous avons découvert, en auditionnant la présidente de cette université, que, à quelques mois du rattachement, elle ne disposait d’aucune indication sur le futur modèle économique de ce laboratoire, sur son budget prévisionnel et sur la prise en charge de sa masse salariale, alors même que le déménagement aura pour conséquence de priver le laboratoire des fonctions support que lui prodiguait jusqu’alors l’AFLD. Nous avons également été surpris d’apprendre que l’université n’avait jusqu’à présent reçu aucun accompagnement pour organiser ce rattachement.

Nous savons que, là encore, vos services se sont saisis du dossier et ont décidé de mettre en place le comité de pilotage, qui n’avait jamais été réuni.

M. Max Brisson. Il était temps !

Mme Elsa Schalck, rapporteure. Mais nous voudrions également connaître les intentions de l’État concernant le modèle économique et le financement des dépenses de fonctionnement de ce laboratoire. Il y va de l’avenir de cette université. Or, vous le savez, notre commission est également compétente en matière de recherche et d’enseignement supérieur.

Nous avons de nouveau échangé hier avec la présidente de l’université et nous souhaiterions maintenant connaître les garanties que l’État est prêt à lui apporter.

Madame la ministre, le rôle du Sénat n’est jamais de ralentir l’examen d’un texte. Il s’agit toujours de veiller à en améliorer les dispositions. Dans le cadre d’une ordonnance, il nous revient d’obtenir les éclaircissements et les garanties nous permettant de nous assurer que l’habilitation législative sera convenablement utilisée.

Notre vote de ce jour répondra, dans ces conditions, aux garanties que vous pourrez apporter à nos sujets de préoccupation. Je souhaite vivement qu’elles nous permettent de vous apporter dès aujourd’hui notre soutien à l’adoption de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues : « Le sport est dépassement de soi. Le sport est école de vie. » En quelques mots, Aimé Jacquet a très bien résumé ce que représente le sport. C’est un vecteur de valeurs important dans une société. L’activité physique et la pratique sportive sont également cruciales en termes d’équilibre et de santé. La France compte des millions de licenciés sportifs s’inscrivant chaque année dans nos clubs. J’aime à dire que la vie associative est la plus belle école de la démocratie.

Le sport représente des enjeux colossaux dans le monde, à la fois financiers ou encore d’influence. Bien souvent au cours de l’histoire, la politique et la diplomatie se sont invitées dans les rencontres sportives internationales dont la visibilité était importante. Le sportif doit être l’image d’un pays, d’une génération, le symbole d’une lutte et du courage.

Le dopage dans le milieu sportif est un poison à large spectre, tant il véhicule des idées contraires à celles que je viens d’exprimer. La lutte contre le dopage est un combat de tous les instants. Les évolutions et les adaptations systématiques des législations nationales et internationales rendent efficace cette lutte. La révision du code mondial antidopage a cet objectif.

Avant d’évoquer le projet de loi qui nous réunit cet après-midi, je souhaite associer à mes propos mon collègue sénateur du Nord, Dany Wattebled, qui a mis en valeur durant l’examen du dernier projet de loi de finances les impacts importants de la crise sur le milieu sportif et associatif dans notre pays.

Dans notre département du Nord, et plus largement dans la région des Hauts-de-France, nous sommes sensibilisés – cela vous surprendra peut-être – à la pratique sportive animale en compétitions et, donc, à la lutte contre le dopage animal.

La pratique en compétitions nationales et internationales du sport colombophile est l’une des spécialités de notre territoire. La lutte contre le dopage lors de ces compétitions se fait dans le cadre de critères précis. Je sais que la lutte contre le dopage animal est aussi encadrée dans le code mondial antidopage et dans le code du sport français, et je m’en réjouis.

Le projet de loi que nous étudions tend à habiliter le Gouvernement à mettre notre droit interne en conformité avec nos engagements internationaux en matière de lutte contre le dopage. Il me semble toutefois que le recours à une ordonnance est dommageable. Le sujet est délicat, et un débat parlementaire est toujours pertinent.

Je comprends cependant les contraintes de temps dues à la situation actuelle et la nécessité d’adopter rapidement ce texte. Je salue l’exigence de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication dans ses demandes de précisions et de garanties. C’est indispensable.

La France se prépare à accueillir des compétitions d’ampleur planétaire telles que la coupe du monde de rugby et les jeux Olympiques et Paralympiques. Chaque année, notre pays organise des rencontres de professionnels et d’amateurs. Le dopage n’y a pas sa place. Je salue la mise à jour par le code mondial antidopage des nouvelles catégories de substances interdites pour renforcer l’efficacité de la lutte, tout comme les modifications apportées concernant les sanctions, plus adaptables et flexibles.

Selon moi, l’Agence française de lutte contre le dopage a une mission cruciale. Elle doit être suffisamment renforcée et les entraves doivent être levées. À cet égard, j’espère que les garanties demandées par la commission seront adoptées.

Dans la mesure où je suis très attaché à l’indépendance des organismes de contrôle, les moyens financiers des laboratoires, particulièrement dans la lutte contre le dopage, sont, à mes yeux, nécessaires. Il serait impensable que, par manque d’argent, le fonctionnement du nouveau laboratoire antidopage soit restreint ou simplement empêché. Il n’est pas envisageable de sous-traiter nos analyses et, donc, notre lutte à des organismes qui seraient moins chers sur le marché.

Parce que le sport est une école de la vie, l’éducation joue le rôle de prévention. Les liens entre les échelons locaux, nationaux et internationaux sont précieux pour les règles antidopage et pour un sport propre, dont les valeurs restent celles de l’effort, du dépassement de soi, du courage et de l’esprit d’équipe.

Tous les acteurs en présence doivent partager le même objectif contre le dopage. C’est une responsabilité commune. Sans la collaboration de tous, la lutte contre le dopage perd de son efficacité. Et sans la lutte contre le dopage, le sport perd son cap, celui de rassembler, d’émouvoir, de faire vibrer et de vivre ensemble.

Le groupe Les Indépendants votera en faveur de ce texte si les garanties demandées par le Sénat font l’objet de réponses concrètes. (M. Claude Kern applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la France doit transcrire en droit interne la dernière version du code mondial antidopage, ce avant le 12 avril prochain. L’horloge tourne !

En cas de non-conformité, notre pays s’exposera à des sanctions, avec notamment l’interdiction de la participation de ses athlètes aux compétitions sportives internationales ou d’organisation d’épreuves sur son sol, ce que personne ne souhaite.

Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui tend donc à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance, afin de répondre à l’urgence de la mise en conformité de notre droit national avec le nouveau code mondial antidopage.

Pourquoi une telle urgence à agir maintenant, alors que le processus de révision du code mondial antidopage a été engagé en 2017 ? La raison tient à notre calendrier parlementaire, percuté par la crise sanitaire. Dans cette affaire, le Gouvernement ne peut être tenu responsable puisque son projet de loi d’habilitation à légiférer par ordonnance avait été déposé bien en amont, le 19 février 2020.

Il nous faut donc légiférer maintenant, dans l’urgence, certes, mais aussi avec responsabilité.

Sur le contenu de ce code antidopage, force est de le constater, il s’agit non pas d’une révolution, mais de quelques améliorations assez techniques et bienvenues visant à renforcer l’efficacité de la lutte contre le dopage.

Sont ainsi prévus : la protection des personnes dénonçant des actes de dopage, protection bienvenue pour les lanceurs d’alerte ; la création d’une nouvelle catégorie de substances englobant les stupéfiants utilisés dans un contexte sportif ; et l’assouplissement des sanctions pour les sportifs de loisirs. Ces réformes, plutôt consensuelles, sont saluées par l’ensemble des acteurs.

Toutefois, deux points en particulier ont retenu, en commission, l’attention du Sénat et l’ont empêché de voter le texte en l’état.

Tout d’abord, concernant les pouvoirs confiés à l’Agence française de lutte contre le dopage, nous souhaitons que cette agence soit dotée de pouvoirs supplémentaires, notamment de convocation, d’audition et d’enquête. Ces pouvoirs d’enquête administrative sont d’ailleurs prévus par le nouveau code mondial antidopage.

Ensuite, pour ce qui concerne le nouveau laboratoire antidopage, qui doit désormais être indépendant pour des raisons évidentes de lutte contre les conflits d’intérêts, des interrogations subsistent sur son modèle économique et les moyens nécessaires à son fonctionnement au sein de son organisme d’accueil, l’université Paris-Saclay.

C’est pourquoi ma collègue Monique de Marco et moi-même avons décidé de cosigner les trois amendements déposés par nos collègues. Il s’agit, madame la ministre, non pas de mettre en danger le processus législatif et de prendre le risque d’une seconde lecture en cas de vote non conforme au Sénat, mais simplement de vous permettre de lever tous les doutes qui pourraient subsister, auprès de la représentation nationale et du public qui nous regarde, concernant l’ordonnance que nous examinons aujourd’hui.

Je le sais, vous avez mené un important travail de concertation avec l’AFLD, Paris-Saclay et nos rapporteurs. Le débat d’aujourd’hui est l’occasion d’en faire part publiquement. Mais ce projet de loi est aussi l’occasion d’aborder un sujet central, celui de la prévention.

Madame la ministre, je crois comprendre que votre projet d’ordonnance prévoit simplement de confier aux fédérations sportives la tâche d’organiser des actions de prévention et d’éducation en lien avec votre ministère.

L’intention est louable, mais elle reste encore déclarative. Le même reproche peut d’ailleurs être adressé au code mondial antidopage lui-même, qui fait de l’éducation et de la prévention des valeurs centrales, sans pour autant expliquer comment mettre celles-ci en œuvre.

On ne peut s’empêcher de voir dans la lutte contre le dopage les mêmes errements que ceux de nos sociétés dans le cadre de la lutte contre les stupéfiants. Car les deux catégories de produits sont similaires, avec parfois les mêmes risques, les mêmes addictions et les mêmes dégâts pour la santé et l’intégrité physique. Ces questions ne seront pas simplement résolues en les limitant à la compétition du sport de haut niveau.

Le dopage n’est pas un acte accompli uniquement par des athlètes soucieux de s’assurer les meilleurs classements. C’est une pratique présente partout dans le sport, depuis les amateurs qui se procurent des produits douteux sur internet jusqu’aux sportifs de haut niveau aidés par des équipes médicales peu scrupuleuses.

Tous les sports, tous les milieux, sont concernés.

Ainsi, comme souvent, le tout-répressif montre-t-il ses limites. Il nous faut de l’éducation, de la prévention, mais aussi de l’accompagnement sanitaire, et des politiques de sortie de l’addiction.

Abstraction faite de ce débat nécessaire, auquel notre société ne pourra se soustraire encore trop longtemps, les sénatrices et sénateurs du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires reconnaissent les avancées contenues dans l’évolution présente du code mondial antidopage et souhaitent leur transcription dans le droit national.

C’est pourquoi, une fois levées les interrogations dont j’ai fait état, nous voterons ce projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud.

M. Didier Rambaud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au rugby comme en politique, le pack uni fait la force. Et si le XV de France vient d’en faire la démonstration, dimanche dernier, face à l’Irlande, le code mondial antidopage en est également le symbole.

Loin d’être superflu, le code mondial antidopage est l’outil qui permet d’harmoniser les politiques, les règles et les règlements antidopage des organisations sportives et des autorités publiques internationales. Assorti de huit standards, ce code est un outil nécessaire pour protéger le sport et son éthique des différentes formes de dopage. Il est aussi, me semble-t-il, un exemple rare de coopération politique efficace à l’échelle mondiale.

Le Comité international olympique (CIO), le Comité international paralympique, les fédérations internationales, les organisations nationales et régionales antidopage : voilà autant de signataires d’un code mondial antidopage qui fait consensus, puisque près de 700 organisations sportives l’ont accepté.

Mais vous n’êtes pas sans savoir, mes chers collègues, que ce code, comme tant d’autres, n’a jamais été conçu pour être un outil statique. Au contraire, il doit évoluer. Après deux révisions, en 2007 puis en 2013, le processus de révision pour 2021 est arrivé à son terme avec l’adoption à l’unanimité du code révisé en novembre 2019.

Cela ne vous aura pas échappé : le code 2021 est donc entré en vigueur le 1er janvier 2021. Pourtant, si les instances françaises sont bien évidemment signataires du code, sa mise en œuvre est aujourd’hui bloquée.

La raison en est simple : les règles issues de la nouvelle version du code n’ont pas été transposées en droit interne. Autrement dit, depuis le 1er janvier, le droit français n’est plus en conformité avec la nouvelle version du code mondial antidopage. Cela revient à constater que la France ne respecte pas la convention internationale contre le dopage dans le sport adoptée, voilà maintenant quinze ans, sous l’égide de l’Unesco.

Nous serons tous d’accord, dans cet hémicycle, pour nous résoudre à dire que la France doit respecter ses engagements internationaux. À défaut, elle s’expose à des sanctions, et non des moindres : interdiction pour notre pays d’organiser des compétitions régionales, continentales ou mondiales, et interdiction pour ses sportifs de participer auxdites compétitions.

Rien de surprenant, donc, à apprendre que la France fait l’objet d’un rappel à l’ordre. Le 11 janvier dernier, en effet, la présidente de l’Agence française de lutte contre le dopage a reçu un courrier de l’Agence mondiale antidopage (AMA) qualifiant de « critique » la non-conformité de notre droit avec les règles issues de la nouvelle version du code.

Ne nous voilons pas la face : c’est une mise en demeure que les autorités internationales nous adressent, nous enjoignant à nous mettre en conformité avec la nouvelle réglementation internationale avant le 12 avril 2021. Nous devons donc agir, et agir rapidement ! Sans plus attendre, nous devons autoriser le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance.

Mes chers collègues, il me semble qu’une telle autorisation est nécessaire, pour deux raisons.

Elle est nécessaire parce que nous devons permettre au Gouvernement d’assurer la mise en conformité du droit interne avec les nouvelles règles dans les plus brefs délais. N’aurions-nous pas honte d’être l’objet d’une sanction alors que notre pays s’apprête à organiser, entre autres, la coupe du monde de rugby en 2023 et les jeux Olympiques en 2024 ? Cela n’est pas sérieux, et nous méritons mieux. Ne gâchons ni l’héritage de notre histoire sportive ni les retrouvailles tant espérées entre le sport et les Français.

Elle est nécessaire, également, parce que notre pays doit poursuivre intelligemment sa lutte contre le dopage. Grâce aux avancées majeures proposées dans le code mondial antidopage révisé, la France peut dès maintenant mettre à jour son action en modulant davantage les sanctions et en améliorant la protection des lanceurs d’alerte.

La France doit entamer une mise à jour à la fois formelle et intellectuelle. Jusqu’à présent, la stratégie adoptée n’était pas optimale. Ces dernières années, la réglementation avait eu pour effet de dessaisir les fédérations en matière de lutte antidopage. Le projet de loi que nous votons cet après-midi permet de créer une politique de lutte contre le dopage axée sur la collaboration entre les différents acteurs du monde du sport : une lutte transformée, avec le collectif pour état d’esprit.

Comment ? En définissant un nouveau statut pour le laboratoire d’analyses antidopage, qui sera dorénavant un organe distinct de l’Agence française de lutte contre le dopage. L’objectif est de garantir l’indépendance administrative et opérationnelle des laboratoires vis-à-vis des agences antidopage. Dans cette lutte, il n’y a pas de place pour les conflits d’intérêts.

Le laboratoire de Châtenay-Malabry, qui est depuis 2006 un département de l’Agence française de lutte contre le dopage, ne peut plus être administré par celle-ci. Mme la ministre l’a rappelé : le projet d’intégration du laboratoire au sein de l’université Paris-Saclay est en très bonne voie, puisque le transfert prendra effet le 1er janvier 2022.

Le projet de loi autorise en outre le Gouvernement à renforcer les pouvoirs de l’Agence française de lutte contre le dopage. Avec des prérogatives élargies et un dispositif de recueil d’informations simplifié, l’AFLD sera mieux armée pour combattre les comportements dopants, protéger davantage les sportifs contre les tentations offertes en ligne et réprimer plus efficacement les violations.

Vu les délais impartis et la situation dans laquelle nous sommes, le groupe RDPI appelle à la responsabilité. Le Gouvernement a apporté les garanties demandées par la commission par la voix de Mme la rapporteure ; voter contre ce projet de loi retarderait l’échéance d’une mise en conformité déjà lambine. Pire encore, cela rendrait légitime la concrétisation du risque de sanctions à venir.

Mes chers collègues, le sujet de l’éthique sportive doit l’emporter sur toute autre considération politique. C’est pourquoi nous voterons pour ce projet de loi et vous appelons à faire de même. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire.

M. Bernard Fialaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avec la lutte contre le dopage et la conformité au code mondial antidopage, nous sommes loin du sport-santé et de l’exercice physique recommandé pour tous.

Le sport est un puissant promoteur de l’exercice physique pour tous. Les disciplines sportives ajoutent à cela une dimension pédagogique via la codification de leurs règles du jeu. L’apprentissage et les entraînements développent le goût de l’effort, le dépassement de soi, dans le respect des règles, des adversaires, des arbitres et des partenaires. La communion avec les spectateurs renforce la fraternité, et la dimension esthétique de certaines pratiques sportives embellit la vie.

Mais si une alimentation saine, une réhydratation, des compléments vitaminiques sont recommandés, les limites d’une bonne hygiène de vie ne doivent pas être franchies par la tentation de créer un « humain augmenté » par le dopage.

Les limites doivent être claires et reconnues. Les franchir est une tricherie et un très mauvais exemple pour une jeunesse dont le sport participe à l’épanouissement.

Le code mondial antidopage est conçu pour ça, et il est important de mettre notre droit interne en conformité avec ses règles, au titre de l’adhésion de la France à la convention internationale contre le dopage dans le sport.

Cette convention donne une force contraignante aux décisions et aux règles édictées par l’Agence mondiale antidopage.

La financiarisation de la société et la commercialisation du sport poussent à bien des abus et à bien des fautes. Il convient donc de donner des moyens efficaces d’enquête à l’Agence française de lutte contre le dopage. L’évolution des techniques de dopage, l’utilisation de nouvelles substances imposent de faire évoluer les règles et les moyens de contrôle.

La proximité de la coupe du monde de rugby, que nous accueillerons en 2023, et des jeux Olympiques de Paris, qui se dérouleront en 2024, oblige la France à être en règle avec le code mondial et à se doter de moyens de contrôle efficaces et indépendants.

C’est pourquoi, avec la commission, nous attendons des réponses concrètes sur le pouvoir d’enquête administrative de l’AFLD, signataire du code mondial antidopage, et la garantie que le laboratoire rattaché à la faculté de pharmacie de l’université Paris-Saclay se verra attribuer les moyens nécessaires pour assurer les analyses de contrôle antidopage en toute indépendance.

Je m’inquiète cependant d’une décision récente des États-Unis, le Rodchenkov Act, adopté en novembre dernier, qui assoit l’extraterritorialité du droit américain.

Les autorités américaines peuvent désormais poursuivre toute personne impliquée dans un système international de dopage, quelle que soit sa nationalité. Comment la France se positionne-t-elle face à une décision qui pourrait saper la capacité de l’Agence mondiale antidopage à accomplir sa mission de régulateur global ?

Madame la ministre, aidez-nous, en la matière, à nager en eau plus claire et plus étale !

M. le président. La parole est à M. Jérémy Bacchi.

M. Jérémy Bacchi. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « Plus vite, plus haut, plus fort », cette maxime qui fonde l’esprit olympique et sportif est un appel au dépassement de soi.

Malheureusement, elle semble avoir été mal comprise par certaines et certains.

Premièrement, s’il est bien évidemment question d’éthique, il est aussi question de santé publique. On ne compte malheureusement plus, depuis le cycliste Arthur Linton en 1896, les morts consécutives à l’absorption de produits dopants.

Deuxièmement, loin de réduire les personnes dopées à de « mauvais joueurs », il faut aller aux sources du dopage.

C’est d’autant plus essentiel qu’il n’est plus question d’une pratique propre au haut niveau : le dopage se retrouve à tous les étages du mouvement sportif. En ce sens, le devoir de prévention vaut lui aussi à tous les niveaux.

La professionnalisation du sport a entraîné tout un ensemble de mutations athlétiques. Qui aurait pu penser, voilà encore une cinquantaine d’années, que des sportifs pourraient faire des pointes à plus de 40 kilomètres-heure, ou qu’un milieu de terrain pourrait parcourir plus de 15 kilomètres en un match de football ?

De surcroît, et en lien avec cette évolution athlétique, les enjeux ne sont plus les mêmes qu’auparavant pour les sportifs, ni pour les structures qui les emploient. Pression de la performance dès le plus jeune âge, enjeux économiques toujours plus grands, médiatisation et starification massives, tous ces éléments participent indirectement à la peur de la mauvaise performance et peuvent, malheureusement, être un terreau favorable à la triche.

Troisièmement, on constate que les enjeux du sport dépassent largement aujourd’hui la question du divertissement, et même de l’économie. Ne faut-il pas voir dans les systèmes institutionnalisés de dopage la marque d’une volonté de faire du sport une arme diplomatique ?

Enfin, l’évolution des sciences médicales facilite grandement l’accès à certains produits ou leur détournement à des fins de dopage. Cette situation nous met au défi.

Le texte qui nous est proposé aujourd’hui est le bienvenu. Je sais, madame la ministre, que vous auriez souhaité qu’il soit adopté plus tôt ; nous aussi, évidemment. Je sais aussi, et je vous en sais gré, que vous avez souhaité un dialogue constant avec la représentation nationale afin de faciliter son adoption.

Toutefois, il souffre encore de certaines limites, à propos desquelles votre engagement reste uniquement oral.

Concernant tout d’abord les pouvoirs de l’AFLD, malgré les garanties que vous avez apportées à l’Agence depuis notre réunion de commission, l’ordonnance reste extrêmement floue. Pourtant, les demandes de l’AFLD sont plutôt simples : elle souhaite être dotée des prérogatives qui lui permettraient d’exercer les missions pour lesquelles elle a été créée en 2006.

Bien évidemment, cela demande de trouver un équilibre – vous le disiez dans votre propos introductif – entre libertés fondamentales et réel pouvoir d’enquête, sur le modèle de ce qui se fait à l’AMF, l’Autorité des marchés financiers. Mais limiter la capacité d’action de l’AFLD au pouvoir de contrôle dans le cadre des prélèvements biologiques ne peut être que problématique.

D’une part, la quasi-totalité des manquements aux règles antidopage ne sont pas repérables par analyse.

D’autre part, il importe, si l’on veut faire de l’AFLD le phare français de la lutte contre le dopage, de lui donner les moyens de mener ses enquêtes dès qu’un faisceau d’indices se présente.

Concernant ensuite le transfert du Laboratoire national de dépistage du dopage (LNDD) au sein de l’université Paris-Saclay – la question a déjà été posée –, l’université sera-t-elle accompagnée, y compris financièrement, dans sa nouvelle tutelle ?

Si oui, de quelle manière et par qui sera-t-elle ainsi accompagnée ? Quel statut le LNDD aura-t-il ? Quel lien organique entretiendra-t-il avec l’UFR de pharmacie ? Quand pouvons-nous espérer que soit créé un service commercial lui permettant de facturer ses prestations ? Son chiffre d’affaires sera-t-il suffisant pour maintenir et même amplifier son activité ?

Si non, qui viendra le soutenir ?

Vous le voyez, nous avons encore beaucoup de questions. Et selon les réponses qui y seront données, c’est toute la réussite du projet qui sera ou non sujette à caution. Soyons lucides, en effet : nous aurons beaucoup de mal à revitaliser la lutte contre le dopage avec une structuration déficiente et 2 500 contrôles en moins chaque décennie…

À ce double titre, il est tout de même regrettable que, presque un an et demi après la réunion de l’AMA à Katowice, et un an après le dépôt de ce projet de loi, nous soyons encore un peu dans le flou. Le dialogue mené ces quinze derniers jours semble avoir été plus intense et plus productif qu’au cours des douze mois précédents.

Malgré ses limites, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste votera ce texte, pour deux raisons.

Premièrement, parce que l’urgence nous l’impose : nous n’avons d’autre choix que de faire avec l’intransigeance bienvenue de l’AMA.

Deuxièmement, parce que ce texte contient aussi de vraies avancées, en matière d’individualisation et de proportionnalité des sanctions ou encore de protection des lanceurs d’alerte. À ce titre, madame la ministre, je souhaiterais savoir de quelle marge de manœuvre pourrait bénéficier la France pour soutenir le lanceur d’alerte Rui Pinto, poursuivi au Portugal pour son implication centrale dans la révélation des Football Leaks, dont les documents ont trait, entre autres, à des questions de dopage ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – MM. Lucien Stanzione et Bernard Buis applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Claude Kern. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP. – M. Michel Savin applaudit également.)

M. Claude Kern. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis l’adoption du premier code mondial antidopage, en 2003, deux versions l’ont fait évoluer, en 2009 et en 2015. La troisième, adoptée voilà un peu plus d’un an, lors de la cinquième conférence mondiale sur le dopage dans le sport, qui s’est tenue du 5 au 7 novembre 2019 à Katowice, en Pologne, est entrée en vigueur le 1er janvier dernier. Le projet de loi dont nous sommes conduits à débattre aujourd’hui vise ainsi à habiliter le Gouvernement à assurer, par voie d’ordonnance, la conformité de notre droit national avec les principes et standards du code mondial.

Rappelons que ce texte d’origine privée, donc sans effet direct, doit néanmoins être appliqué par la France, dans la mesure où nous sommes liés par la ratification de la convention internationale contre le dopage dans le sport de l’Unesco du 19 octobre 2005, qui prévoit notamment, dans son article 3, que les États parties s’engagent à « adopter des mesures appropriées aux niveaux national et international qui soient conformes aux principes énoncés dans le code [mondial antidopage] ».

Le but du code est de promouvoir la lutte antidopage par l’harmonisation universelle des principaux éléments de cette lutte. L’objectif est de protéger le droit fondamental des sportifs à participer à des activités sportives sans dopage, de promouvoir la santé et de garantir aux sportifs du monde entier l’équité et l’égalité dans le sport.

Or la France est aujourd’hui en retard ; nous pouvons dire que nous nous trouvons dans le trio de queue européen en ce qui concerne la transposition en droit interne des prescriptions du code mondial antidopage.

Il va sans dire que, pays hôte de la coupe du monde de rugby de 2023 et surtout des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, nous ne pouvons pas nous le permettre.

Je sais néanmoins l’attachement de la France à respecter ses engagements internationaux et, plus largement, à figurer parmi les nations actives pour la préservation de l’intégrité sportive et la protection des sportifs.

À ce titre, la France, sur le fondement, notamment, du deuxième alinéa de l’article 25 de la loi du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, avait engagé un vaste plan de modernisation de son dispositif de lutte contre le dopage visant à mieux prévenir ce fléau mais aussi à harmoniser son organisation avec les standards de l’Agence mondiale antidopage.

Elle avait ainsi modifié par ordonnance la procédure disciplinaire en vigueur en matière de lutte antidopage.

Or, malheureusement et encore une fois dans l’urgence, nous sommes sommés de nous mettre en conformité avec les normes édictées par l’AMA avant le 12 avril, ce qui est demain !

Cette transposition permettra de mettre en conformité le droit interne avec les principes du code mondial antidopage et ainsi d’intégrer les toutes dernières évolutions concernant la création de nouvelles violations des règles antidopage, la possibilité de moduler davantage les sanctions ou encore l’amélioration de la protection des lanceurs d’alerte.

L’un des enjeux majeurs est aussi d’assurer la séparation organique du laboratoire d’analyses antidopage d’avec l’AFLD, dans la continuité du processus de modernisation lancé avec la construction d’un nouveau laboratoire.

Enfin, cette transposition permettra de renforcer l’efficacité du dispositif de lutte contre le dopage, en facilitant le recueil d’informations par l’AFLD et la coopération entre les acteurs de cette lutte.

On attend donc de notre chambre haute qu’elle vote conforme ce texte pour répondre à cette nécessité de célérité – et je tiens à saluer l’excellent travail de notre rapporteure, Elsa Schalck.

Notre attente était forte à l’égard des engagements de l’État, qui se devaient d’être pragmatiques compte tenu des besoins inhérents à cet important chantier. Le dopage est un véritable fléau qui gangrène le sport, professionnel et amateur, et les moyens d’y faire face doivent être à la hauteur de la tâche.

L’objectif est bien d’inaugurer une nouvelle donne dans le but de fédérer désormais l’ensemble des acteurs – ministère, Agence nationale du sport (ANS), fédérations –, de développer des compétences en matière de détection du dopage et, enfin et surtout, de se doter de pouvoirs humains et financiers d’enquête structurés autour des sportifs.

Jusqu’à l’intervention, voilà quelques minutes, de Mme la ministre, nous étions plus que réservés quant à un vote conforme.

En effet, nous attendions du ministère qu’il prenne sans délai des engagements forts, d’une part, sous forme de garanties sur les moyens alloués à l’université Paris-Saclay, et, d’autre part, sur la structure même des pouvoirs d’enquête administrative accordés à l’AFLD – je citerai notamment le pouvoir de convocation et la faculté d’utiliser une identité d’emprunt par internet, pouvoirs dont disposent, je le rappelle, d’autres autorités indépendantes comme l’Autorité des marchés financiers.

En effet, aujourd’hui, la capacité d’action de l’AFLD se limite à un pouvoir de contrôle via la réalisation de prélèvements biologiques ne permettant pas de mettre en évidence l’ensemble des violations des règles antidopage prévues par le code du sport.

À ce titre, madame la ministre, l’intervention que vous venez de faire nous rassure, et je salue l’engagement, qui vient de nous être donné, d’armer comme il se doit l’AFLD pour combattre les comportements répréhensibles, dans un but de protection des sportifs avant tout. Nous attendons maintenant que vous confirmiez devant la représentation nationale les engagements du Gouvernement lors de l’examen des amendements.

Vous l’aurez compris : le groupe Union Centriste devrait voter finalement ce texte qui engage le Gouvernement dans le sens des garanties que nous demandions et que je viens d’énumérer. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et INDEP. – Mme Nicole Duranton applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Jean-Jacques Lozach. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’harmonisation internationale des régimes de contrôle et de sanction du dopage est fondamentale. Le système ne peut être accepté et respecté par la totalité des acteurs du monde sportif que si chacun est soumis aux mêmes règles, tant dans le cadre des épreuves nationales que dans celui des épreuves internationales.

À quoi servirait l’application d’un plan national de prévention du dopage et des conduites dopantes dans les activités physiques et sportives, et à quoi servirait notre politique de contrôle et de sanction, si à la moindre compétition internationale nos athlètes se trouvaient confrontés à des adversaires enfreignant la loi et violant le principe de l’équité dans la compétition ? Le talent et le travail doivent demeurer les moteurs de la performance.

Le présent projet de loi vise à habiliter le Gouvernement à procéder par voie d’ordonnance aux modifications législatives nécessaires pour assurer dans le droit interne le respect des principes du code mondial antidopage, l’échelon international fixant le cadre de la réflexion et de la coopération entre les différentes agences étatiques antidopage.

La France, qui figure parmi les pays leaders dans la lutte contre le dopage, a toujours veillé à créer les conditions juridiques nécessaires à la mise en œuvre complète du code mondial antidopage, édicté depuis 2003 par l’Agence mondiale antidopage et qui fait régulièrement l’objet d’évolutions. Ce code constitue la base juridique s’imposant à l’ensemble des pays signataires de la convention internationale contre le dopage dans le sport, adoptée en 2005 sous l’égide de l’Unesco.

La création de l’AMA et la rédaction du code mondial antidopage ont marqué une étape historique dans l’histoire des compétitions. Nous devons tout mettre en œuvre pour créer un environnement favorable à une opérationnalité optimale de l’Agence et du code – tel est l’enjeu essentiel de ce projet de loi.

La lutte antidopage nécessite une politique nationale et une politique internationale ; cette dernière est portée par l’AMA, dont les décisions sont parfois critiquées mais dont le rôle est incontournable. L’AMA doit être défendue et consolidée toujours davantage, notamment financièrement. Elle est financée à parts égales par le CIO, d’une part, et les gouvernements, d’autre part. Mais alors que 191 États ont adopté en 2005, à l’unanimité, la convention internationale de l’Unesco contre le dopage dans le sport, le budget de l’AMA s’élève seulement à 32 millions d’euros, soit 5 % du seul budget du PSG !

La loi du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs avait par avance mis la législation en adéquation avec la première version du code mondial antidopage. Puis trois révisions dudit code entraînèrent des mises en conformité de sa partie législative, successivement intervenues par voie d’ordonnance en 2010, 2015 et 2018.

Dans la continuité de cette mise en conformité régulière, il nous revient aujourd’hui d’adapter le droit national à la version du code mondial adoptée lors de la conférence mondiale de Katowice de 2019, version entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2021. La réforme organisationnelle se poursuit donc, étape après étape.

Mais le retard pris par la France a conduit l’AMA à lui adresser un rapport de mesures correctives qualifiant de « critique » cette irrégularité et lui accordant un délai de trois mois, soit jusqu’au 12 avril prochain. Il expose le pays à des sanctions lourdes de conséquences ; la France doit respecter ses engagements internationaux.

Mettons-nous un instant à la place du sportif de haut niveau et de son encadrement ; ils sont soumis à de multiples contraintes : contrôles réguliers, inopinés ou en compétition, localisation par le système dit « Adams » (système d’administration et de gestion antidopage), suivi longitudinal, etc.

Ils ne comprendraient pas que les efforts consentis soient contrariés par des difficultés, voire des entraves, à caractère administratif et institutionnel. D’où notre niveau d’exigence élevé quant à l’accomplissement des missions de l’AFLD, aux moyens qui lui sont accordés et à l’application du code mondial.

La mise en œuvre de telles sanctions aurait également des répercussions négatives en termes d’image dans la perspective de l’organisation de la coupe du monde de rugby de 2023 et des jeux Olympiques de 2024. L’enjeu est donc majeur pour la France, qui, précisément, s’est fixé des objectifs pour 2024, en nombre de médailles ou en augmentation du nombre de pratiquants ; elle doit également se fixer de hautes ambitions sur les plans déontologique et éducatif.

Concrètement, les nouveaux standards internationaux déclinés dans l’unique article de ce projet de loi offrent de réelles avancées.

Au sein de la commission d’enquête parlementaire sur l’efficacité de la lutte contre le dopage, nous avions identifié les obstacles auxquels cette lutte était confrontée : la loi du silence, l’internationalisation des trafics, internet – en quarante-huit heures, on peut se faire livrer de l’érythropoïétine (EPO) à domicile – et, parfois, les pressions politiques et les complicités institutionnelles, mais aussi les difficultés de détection de certains produits, l’apparition de nouveaux protocoles très individualisés, un paysage audiovisuel peu motivé par des campagnes de prévention, un manque d’informations transmises aux sportifs de haut niveau.

Ces difficultés demeurent, mais le contour des ordonnances envisagées dans ce projet de loi d’habilitation représente des avancées dans divers domaines : l’éducation et la prévention, la coordination des acteurs, la prise en compte des preuves non analytiques, l’individualisation des sanctions, l’actualisation de la liste des produits concernés, l’autonomisation des laboratoires, la protection des individus qui dénoncent des faits de dopage aux autorités, c’est-à-dire des lanceurs d’alerte ; tout cela va dans le bon sens.

Mais deux évolutions ont particulièrement alerté notre commission, au point que celle-ci a rejeté le texte lors de son examen le 3 février dernier, alors qu’il avait pourtant été adopté largement par l’Assemblée nationale quelques semaines plus tôt.

La première de ces évolutions a trait au statut du laboratoire d’analyses antidopage français, qui doit dorénavant être administrativement et opérationnellement indépendant de toute organisation antidopage, ce qui revient à acter sa séparation d’avec l’AFLD, qui, depuis 2006, l’administrait. Alors que le laboratoire et ses personnels doivent rejoindre la faculté de pharmacie de l’université Paris-Saclay au 1er novembre prochain, cette intégration semble souffrir d’un manque d’ingénierie et de moyens déployés.

Le laboratoire assumera lui-même le coût de son fonctionnement à partir de la rémunération des prestations qu’on lui achètera, de recettes extérieures, mais également de la subvention d’équilibre du ministère des sports, qui lui permettront de financer ses investissements. Il convient donc, madame la ministre, d’apporter les éclaircissements et les garanties indispensables à la réussite de ce projet. J’ajoute que les opérations de recherche et développement, éléments structurants de la lutte antidopage, apparaissent peu dans ce texte de mise en conformité.

Le second point d’achoppement concerne l’impossibilité pour l’AFLD, au regard du droit français actuel, de mener des enquêtes administratives, en dépit de ce que commande le code mondial antidopage. La doter de cette compétence renforcerait considérablement l’efficacité de ses actions d’investigation – je pense en particulier au pouvoir de convocation.

Sur ces points aussi, madame la ministre, nous souhaitons que les divergences apparues entre le ministère des sports et la chancellerie soient aplanies ; nous espérons que les avancées du code révisé se traduiront dans les termes de cette ordonnance.

Quant à la problématique des financements mis à disposition de l’AFLD, autorité administrative indépendante, elle demeure un véritable sujet, que notre commission, parmi d’autres, a soulevé.

Depuis la loi Herzog de 1965, qui a fait de la France le second pays au monde après la Belgique à se doter d’une législation réprimant le dopage, le Parlement a légiféré à de nombreuses reprises, avec une continuité évidente dans la recherche de l’efficacité. Cette action s’inscrit dans la durée, la France devant continuer à jouer un rôle moteur dans cette lutte, traduction d’une vision humaniste du sport. Je rappelle que la généralisation du passeport biologique et du suivi longitudinal est due à un amendement sénatorial.

Plus globalement, la lutte antidopage progresse, mais tout relâchement serait coupable. S’il semble de plus en plus difficile de passer entre les mailles du filet, les substances et les protocoles indécelables menacent toujours.

Nous sommes dans un système de tolérance zéro où la finalité est claire : l’éradication des substances prohibées. Mais il faut aussi reconnaître que la suspicion de dopage peut parfois ternir l’image d’une discipline sans preuve objectivement démontrée.

La relation sport-dopage est rythmée de drames, d’affaires, de scandales, depuis les jeux Olympiques antiques. Pour la période contemporaine, le décès du cycliste Tom Simpson, les affaires Festina, Puerto, Pistorius, Ferrari, Balco, le scandale Armstrong, le dopage d’État aux jeux Olympiques de Sotchi, les démêlés judiciaires de la Juventus de Turin, pour ne citer qu’eux, furent autant de révélateurs fracassants d’une réalité encore souvent dominée par le secret et le refus d’assumer ses responsabilités.

Les sportifs tricheurs ont souvent bénéficié d’un manque de transparence et de coopération entre les parties concernées, menaçant parfois la crédibilité même de la lutte antidopage.

La valorisation du rôle des sportifs repentis, véritables briseurs d’omerta, va dans le sens d’une meilleure connaissance du phénomène du dopage.

Les valeurs du sport, toujours prônées, mais souvent perverties, comptent la loyauté dans leur arsenal, mais également la sécurité sanitaire du pratiquant. Le dopage est bien un enjeu de santé publique. Il n’est pas lié à tel ou tel sport puisqu’il concerne l’homme face à la compétition.

Mais les mentalités évoluent : sont de moins en moins nombreuses les personnes qui pensent que le dopage n’existe pas ou n’est pas un problème dans le sport, ou qui remettent en cause la nécessité, voire les principes, de la lutte antidopage, ou bien encore qui veulent garder les yeux fermés sur ces pratiques délictuelles pervertissant la loyauté des compétitions.

Le sujet n’est plus vraiment tabou. Le combat contre le dopage est un combat juste ; nous devons en tirer les conséquences en donnant des moyens financiers et juridiques à l’ensemble des acteurs impliqués – et ils sont nombreux.

Madame la ministre, sur les trois sujets qui méritaient à nos yeux un éclaircissement et des garanties, nous prenons acte des avancées enregistrées ces derniers jours. Nous sommes prêts à voter ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, RDSE et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Michel Savin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Savin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en introduction de mon propos, je tiens à m’associer aux orateurs précédents pour vous féliciter, madame la rapporteure, de votre excellent travail.

Je tiens ici à témoigner de la qualité des auditions et de votre volonté de partager avec l’ensemble de vos collègues les problématiques soulevées lors de ces échanges. Je souhaite aussi remercier le président de notre commission, qui s’est fortement mobilisé sur ce dossier. C’est grâce à ce travail précis et empreint d’une volonté de coconstruction que nous abordons ce débat.

Ce projet de loi, qui était présenté comme une simple formalité pour assurer la conformité de notre code antidopage aux principes du code mondial antidopage, a fait apparaître quelques points qui méritent des réponses et des engagements précis du Gouvernement.

Nous sommes bien conscients que ce texte est d’une absolue nécessité ; nous le devons à nos athlètes et para-athlètes, qui portent chaque jour les couleurs de la France au plus haut niveau international. Nous ne pouvons pas nous résoudre à ce qu’ils ne puissent plus participer aux différentes compétitions en raison d’un manquement de la France.

De nouvelles dispositions vont permettre plusieurs avancées en termes d’antidopage, notamment en renforçant la coopération entre les acteurs. Ce point me paraît central et attendu, car il permettra d’accroître la responsabilisation de tous les acteurs, notamment des fédérations. Puisque celles-ci souhaitent s’impliquer plus largement dans la lutte contre le dopage, il convient de leur en donner les moyens nécessaires.

La lutte antidopage est un combat commun de chaque instant, et nous devons être intransigeants sur ce sujet. C’est pourquoi la mise en place d’une véritable politique de formation et d’information est une bonne chose. Nous connaissons l’engagement de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) sur le sujet.

Je tiens à saluer aussi certaines avancées, notamment sur l’aspect éducatif, qui est un point central pour les acteurs, comme peut l’être le renforcement des moyens d’action de l’AFLD, notamment au travers de pouvoirs d’enquête accrus.

Si cette mise à jour de la législation antidopage permet d’en renouveler l’efficacité, je tiens toutefois à exprimer plusieurs regrets s’agissant de ce texte.

Tout d’abord, sur la forme.

Lors des auditions, il nous a été indiqué à plusieurs reprises que nous étions dans l’obligation de voter conforme ce projet de loi, parce qu’il y a urgence à agir, que l’Agence mondiale antidopage (AMA) a laissé à l’AFLD un délai de trois mois pour se mettre en conformité, que la France fait partie des trois derniers pays à ne pas être en règle, qu’en cas de manquement le sport français serait sanctionné avec un risque d’exclusion de nos athlètes des compétitions internationales.

Alors que nous allons organiser la coupe du monde de rugby en 2023 et les jeux Olympiques et Paralympiques en 2024, cela ferait tache !

Le Gouvernement a laissé traîner le sujet, ce qui est regrettable. Car, avec les délais qui nous sont aujourd’hui imposés, c’est une nouvelle fois une occasion manquée d’avoir un véritable débat de qualité sur la lutte contre le dopage dans notre pays, sur les moyens qui y sont affectés et sur notre ambition commune en la matière.

Ensuite, sur le fond.

Lors des différentes auditions, nous n’avons pu que constater que de nombreux points restaient à régler en matière d’antidopage : sur les moyens, le financement, les partenariats, l’organisation, la collaboration entre les différentes instances, etc.

Nous le constatons donc, la situation est aujourd’hui est plus compliquée qu’il n’y paraît.

Je ne vais pas reprendre tous les aspects extrêmement bien évoqués par notre rapporteure et que je partage pleinement. Mais je voudrais revenir sur deux points déjà relevés par mes collègues et sur lesquels – vous les avez déjà abordés lors de votre propos liminaire, madame la ministre – nous avons besoin d’avoir des engagements précis de votre part.

D’abord, nous attendons des garanties sur les pouvoirs d’enquête de l’AFLD.

Il est nécessaire que l’ordonnance accorde à l’AFLD des compétences – je pense notamment au pouvoir d’enquête administrative – indispensables à son bon fonctionnement. Il faut que vous nous confirmiez cet élément. C’est pourquoi je soutiens pleinement l’amendement de mon collègue Claude Kern.

Par ailleurs, nous avons besoin de garanties concernant le nouveau laboratoire antidopage.

L’ordonnance doit définir le nouveau statut du laboratoire, dont le code mondial antidopage prévoit qu’il doit être dorénavant séparé de l’Agence.

Ce sera chose faite avec le nouveau laboratoire intégré au sein de l’université Paris-Saclay. Cette évolution est tout à fait essentielle pour s’assurer de son entière indépendance, administrative comme opérationnelle.

Des engagements doivent être pris à l’égard de l’université non seulement sur la compensation des charges, en particulier s’agissant des fonctions support, mais aussi sur le régime de responsabilité applicable au laboratoire, puisque celui-ci devrait être rattaché à la faculté de pharmacie tout en conservant son autonomie.

Ensuite, il faut apporter des garanties quant à la pérennité de ces financements.

Nous voulions pour cela être assurés que, au-delà du transfert par l’AFLD des moyens existants du laboratoire à l’université, votre ministère sera vigilant à définir dans les prochains mois le futur modèle de financement du laboratoire et sa programmation pluriannuelle, ce qui inclut en particulier l’équipement en matériel technique de pointe surtout dans la perspective des jeux de 2024.

Vos propos au début de la discussion générale nous ont rassurés, au moins sur ces points.

J’ai déposé un amendement pour prévoir que le modèle économique et les moyens nécessaires au fonctionnement du nouveau laboratoire seront déterminés dans le cadre d’une convention signée entre l’État et l’organisme d’accueil, en l’espèce l’université Paris-Saclay.

La clarification de ce modèle économique est un point essentiel auquel nous tenons ; là encore, j’espère que vous pourrez, madame la ministre, vous engager fermement sur ce point.

Je tiens toutefois à nous féliciter, car nos doutes ont d’ores et déjà produit une partie des effets escomptés avec la convocation du comité de pilotage, qui ne s’était encore jamais réuni.

Vous l’aurez compris, notre démarche collective correspond à la volonté affichée du Sénat d’être constructif. Nous prendrons nos responsabilités, mais nous soulignons également celles qui incombent au Gouvernement.

J’espère cependant que nos débats permettront d’avancer sur le sujet, et que nous aurons l’occasion de rassurer les acteurs de la lutte antidopage de notre pays. Nous le devons à nos sportifs et au mouvement sportif. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – M. Patrick Kanner applaudit également.)

M. le président. La discussion générale est close.

La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion de l’article unique du projet de loi adopté par l’Assemblée nationale.

projet de loi habilitant le gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l’efficacité de la lutte contre le dopage

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l'efficacité de la lutte contre le dopage
Article unique (fin)

Article unique

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnance toutes mesures relevant du domaine de la loi en matière de lutte contre le dopage afin d’assurer la mise en conformité du droit interne avec les principes du code mondial antidopage applicable à compter du 1er janvier 2021, de définir le nouveau statut du laboratoire antidopage et de renforcer l’efficacité du dispositif de lutte contre le dopage en facilitant le recueil d’informations par l’Agence française de lutte contre le dopage et la coopération entre les acteurs de cette lutte, dans le respect des principes constitutionnels et conventionnels en vigueur sur le territoire de la République.

II. – L’ordonnance prévue au I est prise dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi.

III. – Un projet de loi de ratification de l’ordonnance prévue au I est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de sa publication.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié ter, présenté par MM. Kern, Savin, Lozach, Lafon et Longeot, Mme Lassarade, MM. Bourgi et Menonville, Mmes Férat et Vérien, MM. Houpert et de Nicolaÿ, Mme Herzog, MM. Burgoa et Regnard, Mme Demas, M. B. Fournier, Mme Perrot, M. Laugier, Mmes Saint-Pé, Ventalon et Muller-Bronn, MM. Canevet, Vogel, Haye, E. Blanc et Chatillon, Mme Dumont, MM. Pellevat, Wattebled et Levi, Mme Billon, MM. Bouchet, Folliot et Moga, Mme Artigalas, MM. Piednoir, Decool et Chauvet, Mme Lopez, MM. Reichardt, Brisson, Le Nay, Détraigne, Chasseing et Charon, Mmes Deroche, Di Folco et de La Provôté, MM. P. Martin, Dossus, Genet et Gremillet, Mme Gatel, M. Klinger, Mme Mélot, MM. Lagourgue et J.M. Arnaud, Mme de Marco et M. Laménie, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

1° Supprimer les mots :

applicable à compter du 1er janvier 2021

2° Après la deuxième occurrence du mot :

dopage

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

en facilitant :

II. – Après l’alinéa 1

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

1° Le recueil d’informations par l’Agence française de lutte contre le dopage, notamment à travers des capacités d’enquête administrative, telles qu’un pouvoir de convocation et d’audition, l’usage d’une identité d’emprunt par voie électronique, un droit de communication de pièces et documents et un pouvoir de visite de locaux sportifs et professionnels ainsi que, sous le contrôle du juge des libertés et de la détention, de tout autre lieu ;

2° La coopération entre les acteurs de cette lutte.

La parole est à M. Claude Kern.

M. Claude Kern. Je serai bref pour ne pas prolonger inutilement les débats. Le présent amendement tend à détailler les pouvoirs d’enquête administrative qu’il convient de confier à l’AFLD pour lui permettre d’exercer ses nouvelles missions prévues par le code mondial antidopage, parmi lesquelles figurent, en particulier, un pouvoir de convocation et d’audition et la capacité à utiliser une identité d’emprunt sur les sites internet.

Madame la ministre, je vous remercie de nous confirmer les engagements du Gouvernement que vous avez évoqués lors de la discussion générale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Elsa Schalck, rapporteure. La commission a rendu un avis de sagesse dans l’attente des garanties apportées par Mme la ministre.

Il nous paraît important que, s’agissant de la question des pouvoirs d’enquête, nous puissions avoir des éclaircissements et des précisions sur deux points : le pouvoir de convocation et la possibilité pour l’AFLD d’utiliser une identité d’emprunt.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Je me réjouis d’abord de notre volonté partagée d’avoir, en France, une Agence française de lutte antidopage dotée de pouvoirs d’enquête. Je l’ai dit dans mon propos introductif, aucune autre organisation antidopage dans le monde ne disposera de telles prérogatives. Alors même que cet enjeu ne constitue pas une exigence de conformité au code mondial antidopage, j’ai partagé, tout comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, la préoccupation de l’AFLD de renforcer ses moyens d’enquête afin de lui permettre de lutter encore plus efficacement contre ce fléau qu’est le dopage.

Monsieur le sénateur, vous avez pu constater que figurent dans le projet d’ordonnance, dont la rédaction est quasiment terminée et que vous avez – je le suppose – consulté, puisque nous l’avons adressé à M. le président de la commission et à Mme la rapporteure, les pouvoirs d’enquête que vous avez cités, notamment celui d’emprunter une identité pour vérifier la vente de produits dopants sur internet. Sachez aussi que les dispositions de cette ordonnance sont le fruit d’un travail conjoint entre les services du ministère et l’AFLD. Nous avons eu des échanges à ce sujet. Il n’y a pas de contradiction entre la chancellerie et le ministère des sports ; il y a au contraire une volonté de collaborer encore davantage.

Je me permets de vous dire en quelques secondes comment nous allons nous y prendre pour mettre en œuvre les actions de prévention contre le dopage : nous nous partagerons à trois – l’AFLD, le ministère et les fédérations sportives – le champ du public ciblé.

Je veux aussi insister sur l’importance de l’article 25 du projet de loi confortant le respect des principes de la République qui est actuellement en discussion à l’Assemblée nationale : cet article permettra de nouer une relation différente entre l’État et les fédérations sportives. Le contrat de délégation « nouvelle génération » permettra aux fédérations de s’engager concrètement dans un plan d’action, avec des indicateurs, notamment pour suivre le plan de lutte contre le dopage : nous aurons à nos côtés des acteurs engagés.

Nous-mêmes, au ministère des sports, nous allons agir auprès des sportifs qui sont dans nos établissements d’État et se préparent à la haute performance.

Quant à l’AFLD, elle a eu des prérogatives de prévention renforcées. Nous lui donnerons aussi les moyens d’aller en ce sens pour assurer une collaboration dans le champ préventif, en complément de la sanction et donc des pouvoirs d’enquête que nous lui avons donnés.

Je vous invite donc, monsieur le sénateur, à retirer votre amendement, puisque nous avons, me semble-t-il, tous les deux le même objectif.

M. le président. Monsieur Kern, l’amendement n° 2 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Claude Kern. Je vous remercie pour ces précisions, madame la ministre.

Je retire mon amendement en espérant que votre projet d’ordonnance sera validé par le Conseil d’État.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Lozach, Savin, Kern et Todeschini, Mmes Herzog et Artigalas, MM. Houpert, Bourgi, Burgoa, Magner, B. Fournier et Pellevat, Mmes Meunier et Bonnefoy, MM. Roux, Michau et Lefèvre, Mme N. Delattre, M. Stanzione, Mme Lassarade, MM. Longeot, Montaugé, P. Joly, Grosperrin et Belin, Mme Dumas, MM. Decool, Piednoir, Redon-Sarrazy, Antiste et Bouchet, Mme Billon, MM. Cigolotti, Gold, Brisson, Vaugrenard et Guérini, Mme Berthet, MM. Le Nay, Détraigne et Chasseing, Mme Lepage, MM. P. Martin et Dossus, Mme Jasmin, M. Devinaz, Mme Gosselin, MM. Genet et Gremillet, Mmes Gatel et Mélot, M. Lagourgue et Mme de Marco, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer le mot :

six

par le mot :

trois

La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, les députés ont réduit le délai de l’habilitation de neuf à six mois. Le présent amendement vise à réduire encore davantage ce délai de six à trois mois, afin de permettre à la France de se mettre plus rapidement en conformité avec le code mondial antidopage.

Comme vous l’avez dit, madame la ministre, le projet d’ordonnance étant déjà rédigé à 90 %, il est essentiel que le Gouvernement expose à la représentation nationale les différentes étapes de l’adoption de la future ordonnance, notamment la date d’examen devant le Conseil d’État et de passage en conseil des ministres.

Vous aurez compris qu’il s’agissait d’un amendement de précision, pour savoir ce qui nous attend au cours des semaines et des mois à venir. Vous aurez également compris l’état d’esprit qui est le nôtre et qui est partagé par mes collègues ayant déposé les autres amendements.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Elsa Schalck, rapporteure. La commission a également émis un avis de sagesse sur cet amendement de précision, pour permettre à Mme la ministre d’apporter les garanties demandées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Monsieur Lozach, j’apprécie votre coaching très intense ! À l’Assemblée nationale, il en a été de même…

Comme vous l’avez dit, nous partageons le même objectif. Nous avons mis à profit ce temps où nous n’avons pas pu présenter le projet de loi à l’Assemblée nationale pour avancer dans le travail de rédaction.

Je vous promets que l’objectif sera atteint dans les trois mois. Je vous demanderai donc de retirer votre amendement ; sinon, son vote retardera encore le processus d’adoption du texte. Aujourd’hui, nous sommes prêts et le travail est fait à 99 %.

M. le président. Monsieur Lozach, l’amendement n° 3 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Jacques Lozach. Je retire mon amendement, monsieur le président. Il est hors de question pour nous de nous arcbouter sur une position qui pourrait paraître fortement dogmatique sur ce sujet.

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié est retiré.

L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Savin, Kern, Lozach, Lafon, Piednoir, Brisson, Grosperrin et Hugonet, Mme L. Darcos, M. D. Laurent, Mme Puissat, MM. Menonville, Paccaud, Belin, Laugier et Mouiller, Mme Joseph, M. Decool, Mme Belrhiti, MM. Cuypers, Pellevat et Bascher, Mmes Bourrat, Borchio Fontimp et Férat, MM. P. Martin et B. Fournier, Mmes Demas et Eustache-Brinio, M. Guerriau, Mmes Harribey et Dumont, MM. Chatillon et Lefèvre, Mmes M. Mercier, Deromedi, Ventalon et Lassarade, MM. Moga et Bouchet, Mmes Artigalas, Garnier et Imbert, MM. Pointereau, Reichardt, Détraigne, Chasseing, Charon, Wattebled, de Nicolaÿ et Duffourg, Mmes de La Provôté, Chauvin et Deroche, MM. Le Gleut et Laménie, Mmes Berthet et Primas, MM. Dossus, Genet et Gremillet, Mmes Gatel et Mélot et M. Lagourgue, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le statut du laboratoire antidopage mentionné au I est défini par une convention signée entre l’État et l’organisme d’accueil. Cette convention détermine notamment le modèle économique du laboratoire et les moyens qui lui sont nécessaires pour exercer ses missions.

La parole est à M. Michel Savin.

M. Michel Savin. Si cet amendement est voté, cela vous posera problème, madame la ministre ! Tout dépend donc de votre réponse : vous avez une responsabilité qui n’est pas mince…

Cet amendement est lié au travail collectif effectué avec la rapporteure, le président de la commission, Jean-Jacques Lozach, Claude Kern et de nombreux collègues. Il s’agit d’un amendement que je qualifierais d’appel, destiné à obtenir des précisions sur le modèle économique et les moyens, aussi bien de fonctionnement que d’investissement, qui seront dédiés au nouveau laboratoire.

Vous l’avez évoqué précédemment, nous avons besoin d’avoir un engagement sur le fait que la programmation sera pluriannuelle. Ce n’est pas simplement un engagement financier d’investissement dans le cadre du transfert du laboratoire ; c’est également une volonté de donner les moyens nécessaires en termes d’équipements à la pointe de la technologie, afin de permettre un travail dans les meilleures conditions possible, pour que la France redevienne le leader mondial en matière de lutte contre le dopage, ce qui était le cas il y a encore quelques années.

J’espère que, avec l’horizon de la coupe du monde de rugby en 2023 et des jeux Olympiques et Paralympiques en 2024, nous allons tous travailler dans ce même sens, afin de donner aux laboratoires les moyens de travailler dans les meilleures conditions.

Encore une fois, vous constatez, au travers de cet amendement comme de ceux de mes collègues, la volonté du Sénat d’être constructif et d’apporter un « plus » à ce texte. Monsieur le président, je vous annonce par avance que je retirerai cet amendement si la réponse de Mme la ministre est positive.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Elsa Schalck, rapporteure. Pour les mêmes raisons que pour les précédents amendements, la commission a émis un avis de sagesse dans l’attente de la réponse de Mme la ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roxana Maracineanu, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, je n’aimerais pas vous laisser sur l’impression que nous n’avions pris aucun lien avec l’université. Dès 2019, j’ai demandé à l’inspection générale d’aller rencontrer toutes les parties prenantes afin d’examiner la meilleure des solutions pour séparer, comme cela était demandé par l’AMA, le siège de l’AFLD du laboratoire.

La solution choisie a été une intégration à l’université Paris-Saclay. Nous avons repris contact avec la nouvelle présidente de cette université qui a été nommée en mars dernier, depuis votre intervention, mesdames, messieurs les sénateurs. Nous avons acté un échéancier, avec un comité de pilotage qui se réunira régulièrement et sera accompagné par l’inspection générale. Nous pouvons d’ores et déjà vous assurer que nous irons dans le sens que vous évoquez, c’est-à-dire une budgétisation pluriannuelle et un soutien aussi bien aux fonctions support qu’aux investissements, pour que ce laboratoire collabore en intelligence et en pertinence avec la faculté de pharmacie à laquelle il sera désormais rattaché.

Je vous saurais donc gré, monsieur le sénateur, de retirer votre amendement afin que ce projet de loi puisse être voté et que nous allions tous de l’avant.

M. le président. Monsieur Savin, l’amendement n° 1 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Michel Savin. Madame la ministre, j’aurai une simple demande : pouvez-vous, dans les prochains six à huit mois, nous faire un état des lieux de l’avancement de vos travaux avec l’agence et le laboratoire ? Cela permettrait à l’ensemble de mes collègues de connaître les progrès de ce dossier. Je pense qu’il serait bien que la Haute Assemblée ait régulièrement un point d’étape sur les travaux engagés.

Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié bis est retiré.

Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.

Je rappelle que le vote sur l’article vaudra vote sur l’ensemble du projet de loi.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’article unique du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté définitivement.) – (Applaudissements sur lensemble des travées, à lexception de celles du groupe CRCE.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à quinze heures cinquante-deux.)

M. le président. La séance est reprise.

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi habilitant le Gouvernement à prendre les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour assurer la conformité du droit interne aux principes du code mondial antidopage et renforcer l'efficacité de la lutte contre le dopage
 

5

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour un rappel au règlement.

Mme Nathalie Goulet. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 29 de notre règlement. Nous avons observé, depuis un certain temps, des recours multiples et variés à des cabinets d’avocats pour rédiger la loi et à des cabinets de conseil pour conseiller le Gouvernement, y compris sur la dette.

Cette porosité entre le public et le privé dans des domaines qui relèvent de la loi affaiblit, selon moi, notre Parlement. C’est la raison pour laquelle je souhaitais faire ce rappel au règlement de façon que nous puissions avoir au sein de notre Haute Assemblée un débat sur cette question. En effet, il me semble que, au fur et à mesure que le Gouvernement confie ces fonctions à des cabinets extérieurs, nous perdons encore un peu plus de pouvoir. Or nous savons très bien que nous en avons de moins en moins…

M. le président. Acte vous est donné de ce rappel au règlement, ma chère collègue.

6

 
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Discussion générale (suite)

Ratification de diverses ordonnances pour faire face à l’épidémie de covid-19

Adoption définitive en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 (projet n° 320, texte de la commission n° 330, rapport n° 329).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargée de léconomie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous examinons aujourd’hui un projet de loi qui ratifie quatre ordonnances, toutes prises en application de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19. Cette loi a donné une base législative aux mesures d’urgence que le Gouvernement avait prises pour gérer l’épidémie de covid-19 et ses lourdes conséquences sur la vie économique.

Nous nous rappelons tous, et vous particulièrement dans cet hémicycle, du contexte difficile dans lequel nous avons dû légiférer en mars dernier.

Quand le Gouvernement avait demandé au Parlement d’être habilité à prendre ces ordonnances, nous étions face à un scénario inouï : un virus inconnu avait mis notre pays, et même notre planète, à l’arrêt.

Je me souviens, alors que j’étais députée lors de la présentation de ces ordonnances au Parlement, de l’agilité à toute épreuve de notre administration pour faire face à cette urgence inédite.

Grâce à elle, nous avons pu, en quelques jours, mettre en place un des systèmes les plus protecteurs du monde pour nos entreprises et pour l’emploi.

En quelques jours, notre système était prêt à faire face de façon efficace : près d’un an plus tard, notre protection économique tient encore, grâce à son adaptation constante notamment permise par les travaux des parlementaires.

Il est des anniversaires plus heureux que d’autres. Je veux néanmoins saluer et remercier tous ceux qui, au sein de notre administration, ici et en services déconcentrés, ont accompagné au quotidien les parties prenantes de notre économie.

Vous le savez, le temps de l’urgence n’est pas encore révolu, et les mesures contenues dans ces ordonnances ont un rang législatif. Il convient donc que le Parlement s’en saisisse et les ratifie.

Après l’adoption de ce projet de loi de ratification, aménagé de quelques modifications rédactionnelles, par l’Assemblée nationale, il vous est proposé de ratifier le cadre juridique du fonds de solidarité. Ce sont presque 2 millions d’entreprises qui ont bénéficié de près de 12 milliards d’euros en 2020. Ce soutien est inégalé. Il a permis à nos entreprises de garder la tête hors de l’eau et le permet encore aujourd’hui, après plusieurs élargissements importants décidés au fil des mois.

Il vous est également proposé de ratifier une autre de nos réponses aux importants besoins de trésorerie des entreprises, à savoir l’ordonnance relative à l’octroi d’avances en compte courant par les organismes de placement collectif de capital investissement.

Le but était de permettre aux acteurs du capital investissement de renforcer leur soutien aux entreprises de leur portefeuille, en complément des importants moyens publics mobilisés. Ainsi, avec cette ordonnance, les fonds de capital investissement ont pu dépasser temporairement le plafond légal qui restreint, en temps normal, leur capacité à consentir des avances en compte courant aux entreprises dont ils sont actionnaires.

La ratification de cette ordonnance permettra de confirmer le délai dont bénéficient les acteurs pour revenir au régime de droit commun, d’ici au 30 juin 2022.

La même logique de régime dérogatoire permettant de renforcer le soutien aux entreprises prévaut pour la ratification de l’ordonnance du 17 juin 2020 relative à la commande publique. Cette dernière introduit, au sein du droit de la commande publique, des outils permettant de soutenir les opérateurs économiques les plus fragilisés par la crise.

En effet, elle permet aux entreprises en redressement judiciaire bénéficiant d’un plan de redressement de participer aux procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession.

Cette simplification permet de maintenir durablement l’activité mais aussi l’emploi de ces entreprises, tout en contribuant à l’apurement de leur passif avec la conclusion de nouveaux contrats. Aussi, elle ouvre aux PME un accès privilégié aux marchés publics globaux, en fixant à 10 % la part d’exécution minimale qui sera confiée par le soumissionnaire à des PME.

Ces deux mesures, pérennisées dans la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, dite loi ASAP, traduisent notre engagement fort, et tout à fait légitime, pour le tissu économique de proximité. Nous sommes convaincus que la relance passera par ces entreprises de nos territoires et que la commande publique peut, et surtout doit, être un accélérateur de la relance.

C’est la raison pour laquelle, jusqu’au 31 décembre 2023, la capacité économique et financière des candidats aux marchés publics ne pourra être évaluée sur les périodes où ils auraient pu directement subir les effets de la crise sanitaire.

Les dérèglements économiques de la période sont le fait du virus, pas du chef d’entreprise – il est toujours bien de le rappeler.

Enfin, je voudrais m’arrêter un moment sur l’article 3 du présent texte de loi, qui ratifie l’ordonnance portant réorganisation de notre banque publique d’investissement, Bpifrance.

Pour rappel, l’opération de réorganisation du groupe Bpifrance consiste à ce que l’ancienne filiale bancaire, Bpifrance Financement SA, absorbe la société faîtière Bpifrance SA, et devienne dès lors la nouvelle société mère du groupe.

Cette opération a notamment pour but de donner à l’établissement de crédit une solvabilité supplémentaire, laquelle lui permettra de jouer pleinement son rôle – rôle qu’il remplit parfaitement depuis le début de la crise – au service du financement des entreprises, en particulier dans le cadre de la relance. En effet, la banque Bpifrance consolide désormais à son bilan la filiale Bpifrance Participations, ce qui renforce son assise de fonds propres et multiplie son ratio de solvabilité par environ 2,5.

Prenons un exemple : sans cette opération, le lancement d’un prêt vert destiné à financer 1,5 milliard d’euros d’investissements visant à aider les entreprises à assurer leur transition écologique et énergétique aurait mis la banque sous tension prudentielle.

Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, en ratifiant l’ordonnance du 17 juin 2020, vous sécuriserez juridiquement cette nouvelle organisation pour l’ensemble des partenaires contractuels de Bpifrance, lesquels se fondent, comme sur tout marché, sur la confiance. Or, je le sais, nous partageons tous ici l’objectif de renforcer la sécurité juridique des dispositifs qui viennent en aide à nos entreprises, dans un contexte économique particulièrement difficile depuis bientôt un an, et surtout de permettre à celles-ci d’aborder la reprise et la relance de la meilleure façon possible. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Bernard Delcros, rapporteur de la commission des finances. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis a pour objet de ratifier plusieurs ordonnances prises par le Gouvernement, dans le cadre de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19.

Vous venez de le rappeler, madame la secrétaire d’État, ces ordonnances concernent le fonds de solidarité, des adaptations du droit applicable à la commande publique, les avances en compte courant des fonds d’investissement et, surtout, la réorganisation de Bpifrance

Il nous est proposé, à l’article 1er, de ratifier l’ordonnance du 10 juin 2020 relative au fonds de solidarité, qui a prolongé le dispositif du fonds de solidarité jusqu’à la fin de l’année 2020 et a complété les modalités du contrôle de l’administration.

Je veux saisir cette occasion pour rappeler que le soutien apporté par le fonds de solidarité aux petites et moyennes entreprises a été tout à fait vital. Les derniers chiffres sont là pour le démontrer : plus de 15 milliards d’euros ont ainsi été accordés à près de 2 millions d’entreprises.

En complément du fonds de solidarité, les prêts garantis par l’État (PGE), l’activité partielle et les exonérations de cotisations sociales constituent des leviers déterminants pour sauver l’économie et l’emploi ; je souhaite y revenir rapidement.

Près de 132 milliards d’euros de PGE ont été accordés en 2020 ; si ce mécanisme n’entraîne aucun coût budgétaire immédiat pour l’État, le risque de défaut des prêts pourrait se situer, d’après les évaluations disponibles, entre 3 % et 7 %, soit un coût de 5 milliards à 10 milliards d’euros.

L’activité partielle, deuxième dispositif, joue un rôle majeur ; elle a permis de préserver l’emploi et le maillage des entreprises dans les territoires. En 2020, cela a représenté un coût de 28 milliards d’euros et a concerné 8 millions de salariés.

Enfin, les secteurs les plus touchés par les restrictions ont bénéficié d’une exonération de charges patronales. Le coût de ce dispositif, lui aussi nécessaire, s’élève à 4 milliards d’euros pour 2020.

Je tiens à le rappeler, l’ensemble de ces mesures étaient absolument nécessaires et ont démontré leur efficacité.

Bien évidemment, des interrogations demeurent : dans un contexte de pandémie qui perdure, les entreprises seront-elles en mesure de rembourser la dette covid qu’elles auront accumulée pour traverser la crise sans affecter leur capacité de rebond ? Comment et selon quel calendrier envisager la sortie progressive de ces mesures exceptionnelles ?

En ce qui concerne les autres dispositifs de soutien aux entreprises visés par ce projet de loi, il est proposé, à l’article 2, de ratifier l’ordonnance du 17 juin 2020 portant diverses mesures – temporaires – en matière de commande publique.

Trois évolutions principales sont envisagées : permettre aux entreprises faisant l’objet d’un plan de redressement judiciaire de se porter candidates aux marchés publics et aux contrats de concessions ; étendre à l’ensemble des contrats globaux du code de la commande publique le critère d’une part minimale de 10 % d’exécution du contrat réservée aux PME, ce qui est très important ; et imposer aux acheteurs publics de ne pas tenir compte de la baisse de chiffre d’affaires liée à la crise des candidats aux marchés publics ou contrats de concession.

Ces mesures sont utiles ; elles doivent permettre aux acheteurs publics, en particulier aux collectivités locales, de soutenir les entreprises et l’emploi dans tous les territoires.

Si les mesures de l’article 4 sont de nature plus technique, la logique est la même : il s’agit d’activer des leviers juridiques pour venir en aide aux entreprises. Ainsi, il est proposé de ratifier l’ordonnance du 17 juin 2020 relative à l’octroi d’avances en compte courant aux entreprises en difficulté par les organismes de placement collectif de capital investissement et les sociétés de capital-risque. Cette ordonnance relève temporairement la part d’actifs que ces fonds peuvent prêter aux entreprises dont ils sont actionnaires.

J’en arrive au sujet du projet de loi qui concentre le plus d’attention, à savoir l’article 3, qui ratifie l’ordonnance du 17 juin 2020 portant réorganisation de la Banque publique d’investissement et modifiant l’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement.

Cet article justifie, à lui seul, la demande du Gouvernement d’inscrire le présent projet de loi à l’ordre du jour, afin de sécuriser le contenu de cette ordonnance, en y apposant le sceau du législateur, pour deux raisons principales. La première est d’ordre purement juridique : l’ampleur de l’ordonnance est plus large que le champ de l’habilitation accordée en mars dernier. La seconde est d’ordre plus opérationnel, la sécurisation législative de l’ordonnance étant de nature à rassurer tant les investisseurs que la Banque centrale européenne.

En quoi consiste précisément cette restructuration ?

Depuis la création de la Banque publique d’investissement, en 2012, la structure de cet établissement reposait sur une société holding, Bpifrance SA, chapeautant trois entités principales : Bpifrance Financement, établissement de crédit ; Bpifrance Participations, entité intervenant en fonds propres ; et Bpifrance Assurance Export. Vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, la réorganisation consiste en une fusion-absorption de Bpifrance SA par sa filiale, l’établissement de crédit Bpifrance Financement, qui deviendrait la société de tête.

Cette opération présente deux intérêts : d’une part, elle permet à l’établissement de crédit de bénéficier de la consolidation de Bpifrance Participations et de multiplier ainsi par plus de cinq le montant de ses fonds propres, renforçant considérablement ses capacités de financement de l’économie ; d’autre part, elle simplifie l’organisation et la gouvernance de la structure.

C’est pourquoi, mes chers collègues, cette réorganisation, qui permet de renforcer le soutien de l’économie dans un moment où ce soutien est absolument nécessaire, bénéficie de l’appui de notre commission.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

M. Bernard Delcros, rapporteur. Toutefois, les modalités retenues par le Gouvernement emportent plusieurs conséquences, sur lesquelles je souhaite revenir.

La première concerne la détention du capital. Jusqu’à présent, la société de tête, intégralement publique, était partagée entre l’État et la Caisse des dépôts et consignations, à cinquante-cinquante. La filiale Bpifrance Financement, quant à elle, était détenue à 91 % par la société de tête publique et à 9 % par des investisseurs privés, essentiellement des banques françaises.

L’absorption par Bpifrance Financement de la société de tête se traduit donc par une modification des conditions de détention : 98,6 % du capital est détenu à parité par l’État et la Caisse des dépôts, et 1,4 % par des investisseurs privés. L’ordonnance, qui date de juin dernier, fixait un plancher de 95 % à la détention publique. Ce taux, retenu en amont de l’opération, a permis de préserver une certaine souplesse, alors que les valorisations respectives des deux entités fusionnées n’étaient pas encore définitivement arrêtées.

Cette contingence étant désormais surmontée, je solliciterai, au travers d’un amendement d’un collègue, l’avis du Gouvernement sur l’intérêt de sécuriser un haut niveau de détention publique et de supprimer des marges de manœuvre pouvant ne plus se justifier a posteriori.

La seconde conséquence de la réorganisation porte sur les comptes publics, car l’opération a pour effet de sortir Bpifrance du périmètre des administrations publiques prises en compte pour la dette, au sens des critères de Maastricht. L’entité de tête pourra ainsi s’endetter sans que cela soit comptabilisé dans les indicateurs maastrichtiens. Bpifrance continuera donc de bénéficier de conditions favorables grâce à la garantie de l’État et pourra ainsi augmenter la dotation de Bpifrance Participations sans conséquence sur le solde public. Je tenais à souligner cette donnée importante.

Enfin, un dernier point a retenu mon attention ; les fonds de garantie dédiés aux prêts aux PME sont abondés, depuis plusieurs années, par des redéploiements de crédits et des recyclages de dividendes. La nouvelle organisation issue de la fusion pourrait conduire à accroître ces pratiques, qui peuvent sembler en contradiction avec le principe d’universalité budgétaire, lequel veut que le Parlement ait à se prononcer sur l’usage des deniers publics.

C’est pourquoi j’ai souhaité vous alerter sur ce sujet, madame la secrétaire d’État, au travers d’un amendement visant à renforcer l’information du Parlement sur le financement de ces garanties.

M. Bernard Delcros, rapporteur. Je souhaite que la position du Gouvernement soit clarifiée sur cette question.

Ainsi, sous réserve des observations que j’ai formulées, la commission des finances propose d’adopter le projet de loi. (Mme Nathalie Goulet ainsi que MM. Yves Bouloux et Pierre Louault applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi. (M. Daniel Salmon applaudit.)

M. Paul Toussaint Parigi. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous tenons à rappeler, en préambule, la vigilance que nous devons tous avoir sur l’usage excessif des ordonnances, lesquelles tendent indubitablement, à long terme, à affaiblir l’exercice démocratique et à amoindrir notre rôle de législateur.

Les marges de manœuvre qui avaient été données au Gouvernement en début de crise sanitaire, face à l’urgence de la situation, ne doivent pas empêcher le contrôle démocratique de la représentation nationale ni faire glisser le régime sanitaire qui nous est imposé depuis désormais un an vers un régime d’ordonnances. Non seulement l’état d’urgence doit faire l’objet de ce contrôle parlementaire, mais les nombreuses ordonnances prises, dans des domaines extrêmement larges, dans le cadre de la lutte contre le covid-19 auraient déjà dû être soumises à la consultation des deux chambres et ratifiées dans leur intégralité.

Il est plus que jamais nécessaire, en période de crise, alors que l’urgence semble, hélas, devenir permanence, de renforcer la relation de confiance entre représentants et représentés et de ne point fouler aux pieds le dialogue et la concertation, si tant est que le souhait du Président de la République de « bâtir ensemble des réponses » ne soit pas un vœu pieu. Il est nécessaire, madame la secrétaire d’État, de rappeler que la concertation et le débat démocratique ne sont pas exclusifs d’une décision tout à la fois efficace et proportionnée, sauf à remettre en cause les piliers mêmes de notre République.

J’en viens désormais au fond du projet de loi.

Si la prolongation de l’existence du fonds de solidarité est bien évidemment nécessaire, sans doute sera-t-il besoin de prolonger encore ce dispositif, compte tenu de la situation actuelle et des évolutions attendues de l’épidémie.

Néanmoins, permettez-nous de le souligner, les conditions pour bénéficier de ce fonds, certes élargies à l’automne dernier, ont fait perdre de la clarté et de la visibilité à ce dispositif, dont l’impact pourrait être beaucoup plus important si vous acceptiez sa territorialisation ; cela permettrait un fonctionnement plus souple et la prise en charge de situations non prévues dans le cadre législatif et réglementaire actuel, et cela permettrait d’accompagner plus équitablement les entreprises en fonction de leur situation.

En outre, de nombreuses collectivités territoriales ont lancé des initiatives pour soutenir le tissu économique grâce à des aides spécifiques. Dans ce cadre, nous souhaiterions avoir des garanties sur la prise en compte, lors du contrôle de légalité, du caractère exceptionnel des difficultés actuelles.

Par ailleurs, nous saluons la décision de reporter d’un an les premiers remboursements des prêts garantis par l’État (PGE) ; c’est indispensable pour ne pas fragiliser davantage les entreprises déjà en difficulté.

Une question subsiste toutefois sur les effets à long terme des PGE pour les entreprises qui, face à l’alourdissement de leurs dettes, seraient confrontées aux difficultés de remboursement et, plus largement, à des problèmes de liquidité.

En ce qui concerne l’ouverture aux PME d’un accès privilégié aux marchés publics globaux, serait-il envisageable de pérenniser les dispositions de l’ordonnance, voire de rendre possible leur cumul avec les critères écologiques, sociaux, locaux, d’insertion ? C’est une piste que nous souhaiterions voir approfondie.

J’en terminerai avec la réorganisation de la Banque publique d’investissement, dont le renforcement des moyens d’investissement, dans un contexte de difficultés économiques pour les entreprises, est évidemment pour nous un motif de satisfaction, puisque le groupe doit investir près de 2,5 milliards d’euros dans des produits climat, composés de prêts verts destinés aux PME et aux ETI (entreprises de taille intermédiaire), afin de permettre à celles-ci de réaliser des économies d’énergie.

Enfin, de manière plus spécifique, j’appelle, à titre personnel, l’État à prendre en compte l’ampleur de la crise économique et sociale en Corse, ainsi que la volonté unanimement exprimée par l’Assemblée de Corse d’y faire face de manière adaptée, en raison des conséquences majorées de la crise pour ce territoire du fait de son insularité, de la spécificité de notre tissu économique et social et de la structure de nos recettes fiscales, les circulaires de droit commun étant moins adaptées à la situation corse.

Voilà les éléments que nous souhaitions porter à votre connaissance.

Nous voterons bien sûr la ratification de ces ordonnances, que la menace d’un troisième confinement justifie d’autant plus.

M. le président. La parole est à M. Bernard Buis. (M. Didier Rambaud applaudit.)

M. Bernard Buis. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, près d’un an après l’adoption de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, ce projet de loi de ratification est, pour nous tous, l’occasion de prendre un peu de recul par rapport aux mois interminables que nous venons de traverser. Cette situation exceptionnelle nous a conduits à confier au Gouvernement, comme la Constitution nous le permet, le soin de légiférer par ordonnances pour apporter une réponse massive à la crise.

Le 12 mars dernier, le Président de la République annonçait la fermeture des établissements scolaires ; le 14 mars vint l’annonce, par le Premier ministre, de la fermeture de tous les lieux publics non essentiels ; puis vint le confinement total, à partir du 17 mars, à douze heures. La France entrait alors, aux côtés de ses voisins européens, dans une longue période d’incertitude, à laquelle se mêlaient les lointains échos de l’inquiétante rumeur qui commençait à nous parvenir de Chine, car nous ignorions encore tout de ce qui nous attendait.

Tout s’est alors déroulé très vite. Dès le 18 mars suivant, le projet de loi d’urgence était transmis au Sénat et renvoyé à la commission des lois, tandis que la commission des finances de l’Assemblée nationale examinait le premier budget d’urgence ; le 19 mars, nous en terminions l’examen ; le 20 mars, le premier projet de loi de finances rectificative était adopté définitivement et, le 23 mars, les deux lois étaient promulguées.

Il n’aura fallu que quelques jours pour élaborer et adopter ces deux textes et prendre des mesures d’une ampleur inédite, qui nous auront permis de faire face à la crise. Qu’il me soit donc permis de rendre ici hommage à la mobilisation exceptionnelle des services centraux et déconcentrés de l’État ainsi qu’aux services du Sénat et de l’Assemblée nationale, qui n’ont pas manqué à leur devoir. Ces services ont travaillé nuit et jour pour produire leurs précieux rapports, pour guider, conseiller et éclairer nos travaux, dans une période pourtant bien mouvementée.

La brutalité de cette crise nous a conduits, je le disais, à habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances. Durant les trois premiers mois de l’épidémie, soixante-deux ordonnances ont été prises pour faire face à la crise et ont permis de soutenir les entreprises, les collectivités et l’ensemble des Français.

Le texte qui nous est présenté aujourd’hui en ratifie quatre.

La première ordonnance qu’il nous est proposé de ratifier est l’ordonnance du 10 juin 2020 relative au fonds de solidarité. Ce dispositif, d’une ampleur sans précédent, aura versé, rappelons-le, plus de 12 milliards d’euros à près de 2 millions d’entreprises. Dans la Drôme, le département dont je suis élu, plus de 120 millions d’euros auront été distribués à 17 215 entreprises. La rapporteure du texte à l’Assemblée nationale a souhaité élargir cet article pour ratifier également les autres ordonnances portant sur le fonds de solidarité, vital pour nombre d’entreprises.

La seconde ordonnance est celle du 17 juin 2020 portant diverses mesures en matière de commande publique. Elle a permis d’assouplir les conditions d’accès aux marchés et contrats de concession et de favoriser les PME, au même titre que l’ouverture des marchés de travaux sans publicité pour les lots de moins de 100 000 euros, adoptée lors de l’examen de la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, dite « ASAP ».

La troisième ordonnance a permis de mettre en place la réorganisation de la Banque publique d’investissement, afin de permettre à cet établissement de déployer et d’administrer des prêts aux entreprises.

La quatrième ordonnance, enfin, visait à faciliter l’octroi d’avances en compte courant aux entreprises en difficulté. C’est encore une mesure qui a permis d’apporter une réponse rapide et adaptée à la crise.

Nous pouvons nous réjouir, je crois, d’avoir l’occasion d’examiner ces ordonnances et de les ratifier afin d’en sécuriser définitivement les dispositifs. Nous pouvons également nous féliciter de l’ampleur de la réponse de l’État et du Gouvernement pour faire face à ta crise. Pour ces deux raisons, le groupe RDPI votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier. (M. Bernard Fialaire applaudit.)

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’examen de ce projet de loi ne devrait pas soulever les passions ; cela dit, il n’en s’agit pas moins d’un sujet d’importance au regard du grand nombre d’ordonnances prises l’an dernier, en raison de l’état d’urgence sanitaire.

Certes, il faut replacer ce nombre impressionnant – plus d’une centaine d’ordonnances adoptées en 2020, dont une soixantaine sur le fondement de la loi d’habilitation du 23 mars 2020 – dans le contexte plus large du recours croissant aux ordonnances depuis une vingtaine d’années, principalement pour la transposition de directives européennes et pour l’application de textes en outre-mer, le plus souvent des sujets très techniques ou spécifiques.

Le recours aux ordonnances avait été important sous le précédent quinquennat, avec l’état d’urgence lié aux attentats terroristes et la crise des frondeurs. Le gouvernement Philippe n’a pas été en reste, avec un nombre non négligeable de réformes adoptées par ce moyen, en particulier la réforme emblématique du code du travail en 2017-2018. L’année 2021 nous dira si cette tendance à la hausse se poursuit ou bien si nous allons revenir à un état plus « normal » des choses au regard de la procédure législative.

Un peu comme avec la dette publique, une marche supplémentaire a été franchie l’an dernier en matière de législation par ordonnances, dans un contexte, je l’ai indiqué, d’utilisation déjà élevée.

Cela pose la question du suivi et de l’exercice de la mission de contrôle des parlementaires : les ordonnances ont-elles bien été toutes ratifiées ? Le sont-elles toutes, habituellement ? Quelles sont les réelles marges de manœuvre des parlementaires lors de l’habilitation et lors de la ratification ? C’est une discussion qui mériterait d’être approfondie, au-delà du texte que nous examinons aujourd’hui.

Le présent projet de loi de ratification a été déposé dès le mois de juillet dernier, dans le respect des délais prévus dans la loi d’habilitation. On peut néanmoins regretter son inscription relativement tardive à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale et un examen dans la foulée au Sénat, ce qui ne nous laisse paradoxalement qu’un temps court.

Le texte ratifiait, dans sa version initiale, quatre ordonnances adoptées en juin 2020, en application de l’article 11 de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19. Je n’aurai rien de particulier à dire sur les différents articles.

Il va de soi qu’il faut ratifier l’ordonnance du 10 juin 2020 relative au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.

Simplement, je note que la première ordonnance à ce sujet – l’ordonnance du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité – avait été succincte du fait de l’urgence et qu’il avait fallu attendre la publication du décret d’application, quelques jours plus tard, pour connaître les détails du fonctionnement de ce fonds, ce qui avait pu représenter des difficultés de compréhension pour les interlocuteurs de la société civile, au premier rang desquels se trouvaient bien sûr les entreprises.

L’article 2, qui ratifie l’ordonnance du 17 juin 2020 portant diverses mesures en matière de commande publique n’appelle pas davantage de commentaires. Des mesures exceptionnelles et relativement techniques ont été effectivement prises dans ce domaine, l’an dernier, afin de faire face à la suspension, voire à l’arrêt, des chantiers, surtout pendant le premier confinement, au printemps.

L’article 3 ratifie une autre ordonnance datée du même jour, l’ordonnance du 17 juin 2020 portant réorganisation de la Banque publique d’investissement. Est ainsi opérée la fusion entre la société anonyme Bpifrance et sa filiale Bpifrance Financement, afin que le nouvel ensemble dispose de fonds propres plus importants, avec une participation publique qui reste très majoritaire. Les travaux de commission ont toutefois relevé que cette réorganisation amènerait à sortir la dette de Bpifrance du périmètre de la dette publique ; un élément supplémentaire à verser au débat qui grandit à ce sujet…

Enfin, l’article 4 ratifie une ordonnance relative à l’octroi d’avances en compte courant aux entreprises en difficulté, dans le contexte de ralentissement économique actuel, avec des dérogations sur le plafond d’octroi des avances et le champ des bénéficiaires.

Les députés ont adopté le présent projet de loi le 27 janvier dernier, avec quelques modifications qui vont dans le bon sens, en particulier la ratification de l’ensemble des dispositions relatives au fonds de solidarité prises par voie d’ordonnances, soit en réalité trois ordonnances distinctes.

Vous ne serez donc pas surpris, mes chers collègues, d’apprendre, après ces quelques remarques, que le groupe du RDSE se prononcera en faveur de l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe du RDSE. – M. Philippe Bonnecarrère applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli. (Mme Michelle Gréaume applaudit.)

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cela a été dit, le recours abusif aux ordonnances est un contournement du débat parlementaire.

Cela dit, je prendrai le temps qui m’est accordé pour aborder le fonds de solidarité, la commande publique ainsi que la refonte de Bpifrance.

Le Gouvernement a décidé de régler la crise sanitaire par ordonnances : soixante-deux ordonnances ont découlé des habilitations du Parlement, depuis la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19. Vous nous en soumettez quatre pour ratification, mais, je vous pose la question – non à vous individuellement, madame la secrétaire d’État, mais au Gouvernement –, quel sort réservez-vous aux cinquante-huit autres ? On attend la réponse… (Sourires.)

L’urgence peut justifier le recours à ce dispositif, mais il ne peut en aucun cas justifier que vous inscriviez dans la loi des habilitations que le groupe communiste républicain citoyen et écologiste considère comme floues et larges.

Le sort réservé à Bpifrance est particulièrement significatif : l’ordonnance procède à une réorganisation totale de sa gouvernance et ses activités, alors que vous n’étiez autorisé qu’à « renforcer sa capacité à accorder des garanties ». Aujourd’hui, l’amorce d’un long processus de dépossession de la banque publique par les acteurs privés est à l’œuvre, sans que nous puissions refuser l’accès des actionnaires à son conseil d’administration. Les règles du débat parlementaire nous contraignent à valider cette décision stratégique ; croyez-moi, nous saurons nous en souvenir.

L’objectif consistant à permettre à Bpifrance d’accorder massivement des prêts aux entreprises était louable – ça l’est encore –, mais cela nous invite à beaucoup de prudence.

Quelque 660 000 entreprises, soit 20 % d’entre elles, se sont endettées auprès des banques commerciales à des taux d’intérêt supérieurs à 2 % ; je le rappelle, l’État emprunte à cinquante ans au taux négatif de 0,14 %. C’est une rémunération importante pour les établissements de crédit, dans un contexte de taux bas et alors que 90 % du risque est couvert par l’État. En résumé – vous m’excuserez pour la formule –, pendant la crise, les banques s’enrichissent, avec une certaine complicité de l’État…

Le risque de non-remboursement des prêts garantis par l’État pourrait atteindre, selon Nicolas Dufourcq, directeur de Bpifrance, 7 % des souscripteurs. Ce scénario découle du faible taux de refus – 3 % – et représente un effet d’aubaine pour les acteurs bancaires, qui pourraient sortir de l’opération avec 2 milliards d’euros de bénéfice, quand l’État devra couvrir 8 milliards d’euros de pertes.

Le volume de prêts accordés est deux fois moins important que ce qu’avait prévu le Gouvernement et 65 % des entreprises qui en ont bénéficié ne le décaisseront pas. L’exclusion du champ des administrations publiques de la nouvelle BPI permet de s’affranchir des règles de déficit budgétaire, d’éviter le risque de contradiction avec le principe d’universalité budgétaire et de limiter l’autorisation du Parlement. Les crédits de la BPI risquent donc d’échapper au contrôle de ce dernier.

Nous avons déjà eu l’occasion de saluer la création, pour faire face à la crise sanitaire, du fonds de solidarité, vous le savez. Pour autant, ce dispositif nous semble souffrir encore d’une grande complexité et d’une grande illisibilité.

Les entreprises subissent, dans leur activité, les conséquences de la crise. Je ne prendrai qu’un seul exemple pour illustrer leur incertitude. Pardonnez-moi de parler du département dont je suis élu – d’autres pourraient citer le leur –, mais, dans le Val-de-Marne, le 11 février dernier, 19,6 % des entrepreneurs individuels n’avaient toujours pas touché leur versement du fonds de solidarité du mois de décembre ; qu’est-ce que cela veut dire ? Cela représente 4 500 entrepreneurs individuels. Pourtant, vous-même l’admettez, cette aide leur est indispensable pour couvrir leurs charges fixes, qu’ils ne peuvent payer en retard.

Un cinquième des entreprises auraient bénéficié à tort du fonds de solidarité. Or, après avoir dépecé les services du fisc – nous avons longtemps évoqué ce sujet dans cette enceinte et avons même soutenu à la quasi-unanimité des amendements relatifs aux moyens donnés à ces services –, vous êtes dans l’obligation de recruter des contractuels pour pallier cette carence de personnel. Il est impératif de récupérer les 30 millions d’euros ciblés.

Vous devez concilier contrôle et réactivité dans le versement des aides. Il y va du destin de nos entreprises fragilisées.

La condition de la confiance retrouvée exige la garantie pendant plusieurs mois d’un montant minimum par catégorie d’entreprises. Notre amendement déclaré irrecevable allait dans ce sens, en prévoyant le versement d’un pourcentage de chiffres d’affaires perdu pour toutes les entreprises, loin de l’aide inéquitable de 1 500 euros, eu égard à leur situation économique. Il faudrait aussi en finir avec le principe de seuil, qui, par exemple, exclut une entreprise au motif qu’elle n’aurait perdu que 49 % de son chiffre d’affaires et non la moitié, conformément aux règles actuelles.

Pour conclure, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre groupe comprend une partie de vos réponses à la crise, mais nous vous demandons de bien vouloir soutenir nos propositions pour améliorer le texte. Si ces amendements étaient retenus, nous voterons le texte. À défaut, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic.

M. Thierry Cozic. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes aujourd’hui réunis pour examiner un projet de loi qui fait l’objet d’un consensus assez large. La situation de crise que nous traversons l’exige : de manière transpartisane, nous devons nous montrer à la hauteur des difficultés auxquelles notre pays fait face.

Ce n’est jamais de gaieté de cœur que nous acceptons de déléguer à l’exécutif notre précieux pouvoir de législateur, acquis par nos illustres prédécesseurs dans les conditions que l’on sait, mais l’urgence de la situation nous y contraint.

La première ordonnance prolonge l’existence du fonds de solidarité et renforce l’échange d’informations entre administrations. Il s’agit donc d’un outil incontournable pour soutenir notre tissu économique. Son rôle est essentiel pour les entreprises les plus en difficulté.

La deuxième ordonnance comprend plusieurs dispositifs dérogeant temporairement au code de la commande publique. Elle introduit divers outils qui permettent de soutenir les opérateurs économiques les plus fragilisés par la crise.

La troisième modifie l’organisation de Bpifrance, renforçant sa solidité financière, ce qui permettra des volumes de garantie de prêts plus importants. La Banque publique d’investissement va devoir jouer un rôle prépondérant dans le cadre du plan de relance.

À ce titre, l’établissement public, en simplifiant sa structure, a fusionné sa holding de tête et sa filiale Bpifrance Financement. L’opération doit permettre d’augmenter le niveau des fonds propres et d’accroître sa capacité de financement des entreprises, mais nous ne sommes pas dupes sur le jeu d’écriture qu’implique une telle fusion.

Sur ce sujet, je tiens à vous rappeler, mes chers collègues, que, lors de l’examen, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, de la mission « Économie », j’attirais déjà votre attention, à cette même tribune, sur les débudgétisations, lesquelles sont en contradiction avec le principe d’universalité budgétaire et nuisent à la sincérité budgétaire. Je note qu’un amendement présenté par le rapporteur tend à prendre en compte ce problème.

Enfin, l’article 4 du projet de loi permet de ratifier l’ordonnance du 17 juin 2020 qui contribue à répondre aux besoins de trésorerie concomitants à la crise.

Par ailleurs, je note, s’agissant du contenu de nos débats à venir, que nous allons examiner six amendements. Tous visent à créer un article additionnel. J’en déduis que personne ne remet en cause le projet de loi qui nous est soumis, comme je l’ai indiqué.

Au-delà de ces considérations techniques sur le contenu du texte, un constat plus général s’impose sans doute.

Depuis l’arrivée de la nouvelle majorité présidentielle en 2017, suivie de la crise des gilets jaunes, et, désormais, avec la crise sanitaire, nous constatons tous une sorte de recul des prérogatives du Parlement ou, du moins, une montée en puissance de pratiques gouvernementales basées sur le mépris ou, a minima, un certain maintien à distance du Parlement, qui ne peut plus pleinement exercer correctement sa mission constitutionnelle.

D’après La Boétie, « La première raison de la servitude volontaire, c’est l’habitude », cette habitude qui nous fait supporter le pouvoir d’un seul comme s’il était notre tout, cette habitude dans laquelle nous sommes plongés depuis un an au rythme des 20 heures annonçant couvre-feu, confinement, déconfinement, nouveau couvre-feu,…

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Qu’auriez-vous fait ?

M. Thierry Cozic. … cette habitude qui rend si anxieux nos concitoyens ne sachant plus à quel saint se vouer.

La Constitution de la Ve République permet au Président en place de prendre des décisions unilatéralement et de décréter que ses décisions personnelles sont l’intérêt commun. Cela ruine la politique, au sens non pas partisan – il y a bel et bien une majorité et une opposition –, mais au sens de l’action publique, précisément comme bien commun.

Mes chers collègues, comprenez-moi bien : je ne suis pas en train de dire raisonnablement à la tribune que le Gouvernement a failli dans sa prise de décision. Je tiens juste à souligner que les grands absents du processus décisionnel depuis le début de cette crise sont les élus du Parlement, ces élus remplacés par un conseil de défense qui se veut à la fois omniscient et omnipotent, qui décide de tout alors même que la composition de ses membres ne fait l’objet d’aucune onction démocratique.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Comme nous tous !

M. Thierry Cozic. En tant que membre de la commission des finances, je veux également souligner toute l’ironie qui consiste à confier à une commission extraparlementaire la mission de rendre un rapport sur la « dette covid », alors que c’est précisément notre rôle. Je m’étonne d’ailleurs que le Gouvernement n’ait pas directement transmis cette tâche au cabinet McKinsey, puisqu’il semble que ce soit dans l’air du temps…

Encore une fois, c’est non pas tant le phénomène que je dénonce – notre démocratie peut sans doute s’en accommoder – que son ampleur, dans une stratégie politique assumée qui vise à essayer de convaincre que, entre le Président sortant et le Rassemblement national, il n’y a pas d’alternative.

La crise sanitaire a eu pour effet d’exacerber tous les maux de notre société que, jusqu’à présent, nous ne voulions voir. Notre système de gouvernance politique n’y a pas échappé. On le voit bien, le présidentialisme est au régime présidentiel ce que l’intégrisme est aux religions, ce que l’absolutisme est aux monarchies, ce que le sectarisme est aux convictions. Ce n’est pas le fait qu’il y ait une présidence de la République qui est en cause : c’est le fait que la République soit aux mains du Président. (Mme la secrétaire dÉtat sexclame.)

En agissant par ordonnances, le Gouvernement pose des difficultés certaines, du moins quand le processus est utilisé dans de telles proportions. Au risque d’être trivial, je dirais que trop d’ordonnances tuent sans doute la démocratie parlementaire.

Et, de grâce, madame la secrétaire d’État, il n’est pas utile de me renvoyer aux pratiques des gouvernements Rocard ! C’était il y a très longtemps, et les circonstances étaient très différentes.

La situation sanitaire légitime le recours aux ordonnances, mais le fait que nous soyons amenés à légiférer dix mois après que le Gouvernement eut reçu l’autorisation d’écrire la loi et sept mois après qu’il l’eut effectivement écrite ne peut que nous interpeller. Ces délais démontrent, comme à l’accoutumée, l’indifférence profonde que vous portez au Parlement, lequel, dans votre esprit, semble se limiter à une caisse enregistreuse de décisions que vous avez déjà prises.

« Autant l’union fait la force, autant la discorde expose à une prompte défaite », énonçait Ésope. Nous pensons que l’union devrait être plus forte entre le Gouvernement et le Parlement. Le pays y gagnerait, et c’est parce que nous ne voulons pas de défaite pour la France que le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ne s’opposera pas aux mesures que vous avez édictées de manière unilatérale.

En conséquence, nous voterons favorablement ce texte (M. Julien Bargeton ironise.), mais nous appelons l’attention de tous sur la situation critique qui est collectivement la nôtre et sur l’affaiblissement du Parlement que notre époque connaît. Il faudra rapidement revenir à un fonctionnement plus conforme à l’esprit de notre Constitution. Le parlementarisme rationalisé n’est pas un parlementarisme au rabais. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Sautarel. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi d’urgence économique du 23 mars 2020, votée au début du premier confinement dans le cadre de la lutte contre la crise sanitaire, a autorisé le Gouvernement à prendre des ordonnances pour faire face aux conséquences de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter celle-ci.

Comme l’a rappelé notre rapporteur, soixante-deux ordonnances ont été publiées depuis.

Le présent projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale le 27 janvier dernier, a pour objet de ratifier quatre d’entre elles, datant de juin 2020, afin d’en sécuriser juridiquement le dispositif. J’en resterai donc à ce cadre législatif et technique.

L’article 1er tend ainsi à ratifier l’ordonnance du 10 juin 2020 relative au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation.

Cette ordonnance a prorogé le fonds de solidarité jusqu’à la fin de l’année 2020, ce qui a permis de soutenir 2 millions d’entreprises l’année dernière, essentiellement des TPE et des PME, à hauteur de 13 milliards d’euros. Chacun mesure combien cela fut nécessaire. La ratification de l’ordonnance va permettre de ratifier le cadre juridique du fonds.

L’article 2 a quant à lui pour objet de ratifier l’ordonnance du 17 juin 2020 portant diverses mesures en matière de commande publique. Cette ordonnance concerne les conditions d’accès aux marchés publics. Elle rend cet accès possible aux entreprises en redressement judiciaire qui bénéficient d’un plan de redressement.

Cette mesure vise à soutenir les entreprises en difficulté du fait de la crise actuelle, qui n’auront plus besoin d’une habilitation. Il s’agit donc d’une mesure de simplification bienvenue dans le cadre de la relance économique, dont la commande publique constitue l’un des leviers importants.

Cette relance doit aussi passer par la dimension territoriale.

De ce point de vue, l’ordonnance va aussi permettre de privilégier les PME de proximité, en ouvrant aux petites et moyennes entreprises un accès privilégié aux marchés publics globaux, par la fixation à 10 % de la part d’exécution minimale qui sera confiée par le soumissionnaire à des PME, et ce jusqu’au 31 juillet 2021. C’est essentiel pour nos entreprises.

De surcroît, l’ordonnance prévoit que les critères d’accès aux marchés publics ne tiennent pas compte des conséquences, pour les entreprises, de la crise sanitaire. Ainsi, comme vous l’avez souligné, madame la secrétaire d’État, la baisse de chiffre d’affaires liée à l’épidémie ne pourra pas entrer en ligne de compte lors de l’examen par les acheteurs publics de la capacité économique d’une entreprise, cette baisse étant liée à un facteur externe.

L’article 3 vise à ratifier l’ordonnance du 17 juin 2020 portant réorganisation de la Banque publique d’investissement et modifiant l’ordonnance du 29 juin 2005 relative à celle-ci. Cette ordonnance réorganise la BPI en fusionnant Bpifrance SA et sa filiale Bpifrance Financement, afin d’augmenter la solidité financière de l’ensemble pour pouvoir augmenter le volume de prêts accordés aux entreprises dans le contexte actuel. Cette réforme a permis, par exemple, de lever 400 millions d’euros lors du premier confinement, sans dotation de l’État supplémentaire, l’opération de réorganisation faisant plus que doubler le ratio de solvabilité de Bpifrance.

Cette mesure avait été censurée comme cavalier dans le projet de loi ASAP. Pour le Gouvernement, il s’agit, en ratifiant l’ordonnance, de sécuriser juridiquement le dispositif.

Enfin, l’article 4 prévoit la ratification de l’ordonnance du 17 juin 2020 relative à l’octroi d’avances en compte courant aux entreprises en difficulté par les organismes de placement collectif de capital investissement et les sociétés de capital-risque afin de renforcer le soutien financier apporté aux entreprises en difficulté dans le contexte de ralentissement économique actuel. Cette ordonnance permet des dérogations temporaires pour l’octroi de ces avances, qui sont un instrument important de renforcement des fonds propres des entreprises, en instaurant la possibilité d’impliquer le secteur privé en sus du secteur public.

Les organismes de placement collectif de capital investissement et les sociétés de capital-risque peuvent soutenir les entreprises touchées par la crise dont elles sont actionnaires au-delà du plafond légal habituel, correspondant à 15 % de leur actif. Ce plafond est, en effet, temporairement porté à 20 % jusqu’au 30 juin 2022.

Au-delà, je pense que nous devrions ouvrir un débat sur les quasi-fonds propres des entreprises, en particulier sur le recours aux prêts participatifs, qui pourraient répondre à plusieurs enjeux afin d’assumer un effort d’investissement post-crise.

Nous le voyons, ces quatre ordonnances ne posent pas de difficultés et vont dans le bon sens, celui du soutien à nos entreprises, qui se trouvent dans une situation compliquée.

C’est pourquoi le groupe Les Républicains votera en faveur de ce projet de loi, conformément à la position de notre commission des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle.

M. Pierre Médevielle. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, voilà un an jour pour jour, le dimanche 16 février 2020, les journaux et le glas annonçaient le premier décès lié à l’épidémie de covid-19 en France. Personne ne pouvait alors imaginer que, un an plus tard, le bilan dépasserait 80 000 morts et que notre pays connaîtrait une récession sans précédent depuis 1945.

Je me permets cette mise au point historique pour mieux rappeler la fulgurance avec laquelle le virus nous a frappés. Le 14 mars 2020, moins d’un mois après l’enregistrement du premier décès, le Gouvernement décidait de confiner le pays. Le 25 mars, une ordonnance était prise pour créer le fonds de solidarité et aider les petites entreprises face à la crise.

Dans ce contexte, le Parlement a soutenu le Gouvernement en lui donnant la possibilité d’agir rapidement et efficacement par voie d’ordonnances. Ce n’est certainement pas la meilleure façon de légiférer en temps normal, mais c’est sans doute la meilleure manière d’agir avec la réactivité nécessaire en temps de crise.

Voilà donc près d’un an que notre pays fait face à la pandémie. Loin de se résorber, celle-ci s’est installée dans la vie quotidienne et nous devons malheureusement encore aujourd’hui adapter nos réponses économiques à la crise sanitaire.

C’est tout particulièrement le cas pour le fonds de solidarité. Depuis sa création, en mars dernier, les critères d’éligibilité, le niveau des aides dispensées et la pérennité de ce fonds n’ont cessé d’évoluer à mesure que notre pays s’enfonçait dans la crise. Mais sa vocation, elle, n’a pas changé.

Je crois que nous pouvons tous attester de l’efficacité du dispositif dans nos territoires. Certes, les restaurants, les bars, les théâtres et tant d’autres établissements encore ne demandent qu’à rouvrir au plus vite. Mais tous saluent l’efficacité du fonds de solidarité, qui a été mis en place dans l’urgence et qui est progressivement monté en charge.

C’est pourquoi il semble aujourd’hui tout à fait cohérent de poursuivre les efforts dans ce sens. La possibilité d’étendre la prise en charge à certains coûts fixes, en fonction des secteurs, pourrait aussi s’avérer pertinente dans les mois qui viennent.

En tout état de cause, l’article 1er du projet de loi que nous examinons aujourd’hui s’inscrit dans cette logique de réponse cohérente en soutien au tissu économique des territoires, singulièrement à nos artisans et à nos PME.

L’article 2, bien qu’il ne concerne pas le fonds de solidarité, s’inscrit également dans cette logique de soutien aux entreprises des territoires, en activant un puissant levier d’action, à savoir la commande publique.

Nous savons tous ici combien ce levier est important pour nombre de nos PME. C’est pourquoi les assouplissements prévus par l’article 2, qui vise notamment à permettre à des entreprises en redressement de se porter candidates et de mieux intégrer les PME dans les offres publiques, sont pertinents.

D’ailleurs, le Sénat avait déjà adopté ces mesures lors de l’examen du projet de loi ASAP voilà un an. Je doute qu’il ait changé d’avis depuis, la crise n’ayant fait que renforcer la pertinence de ces mesures, qui n’ont jamais paru aussi salutaires qu’aujourd’hui.

Avant de conclure, mes chers collègues, je souhaite dire un mot de la réforme de Bpifrance prévue par l’article 3. Je soutiens l’objectif affiché de renforcer ses fonds propres, afin de porter sa capacité de financement à 50 milliards d’euros d’ici à 2024. Cette mesure participe elle aussi à la cohérence de notre réponse économique à la crise sanitaire.

Mais cette restructuration ne doit pas nous encourager sur le mauvais chemin de la dette. En effet, en faisant ainsi sortir la nouvelle structure faîtière des critères de Maastricht, nous soulageons artificiellement le fardeau de notre dette aux yeux de nos partenaires européens, avec lesquels nous avons pris, en responsabilité, des engagements de solidarité. Plus que jamais, le sort de nos finances publiques dépendra de la bonne santé de nos entreprises, qui ont contracté des prêts garantis par l’État, et du respect de nos engagements européens.

Malgré ce point de vigilance, le groupe Les Indépendants votera en faveur de ce texte, qui constitue une nouvelle pierre au solide édifice de la relance. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la crise sanitaire que nous traversons depuis maintenant près d’un an est inédite, et les conséquences économiques qu’elle a entraînées sont considérables.

Dans ces conditions, le Parlement a, dès le mois de mars 2020, été invité à habiliter le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances. Entre mars et juin, soixante-deux ordonnances ont ainsi été prises, dont plusieurs ont évidemment eu trait aux domaines économique et financier.

Certes, le projet de loi dont le Sénat est aujourd’hui saisi ratifie seulement quatre d’entre elles, mais il s’agit d’ordonnances importantes, relevant toutes du champ législatif des deux commissions des finances du Parlement.

La première ordonnance, datée du 10 juin 2020, est relative au fonds de solidarité créé par l’ordonnance du 25 mars 2020, qu’elle a modifié et prorogé avant que la loi de finances pour 2021 ne le reconduise de nouveau. Le remaniement à diverses reprises de ce fonds aura permis d’ajuster les modalités de subventions suivant les secteurs, les catégories d’entreprises et l’impact économique subi, de façon à adapter le plus efficacement possible le soutien public à l’évolution et aux conséquences de la pandémie.

Le fonds de solidarité a ainsi permis de soutenir à ce jour près de 2 millions d’entreprises parmi les plus touchées par la crise, représentant un engagement budgétaire de l’ordre de 15 milliards d’euros, dont 45 millions d’euros au bénéfice de plus de 6 200 entreprises de mon département du Jura.

La réponse donnée par l’État fut rapide, diversifiée et massive : fonds de solidarité, chômage partiel, prêts garantis par l’État, report et sans doute, à terme, annulation au moins partielle des charges fiscales et sociales ont représenté un large panel d’aides, qui, nous l’espérons tous, permettront aux entreprises de surmonter la crise et, demain, d’amorcer la reprise.

Sur ce sujet, pourriez-vous nous éclairer, madame la secrétaire d’État, sur l’éventuelle annulation des charges fiscales et sociales ? C’est une question cruciale pour toutes les entreprises bénéficiaires.

Pour mener à bien le soutien, nous savons que les agents de la direction générale des finances publiques (DGFiP) s’emploient sans relâche au déblocage rapide des aides que sollicitent les entreprises. Les contreparties à cette rapidité sont l’exigence et l’existence d’un contrôle rigoureux des bénéficiaires par l’administration fiscale, afin de traquer toute fraude. C’est ce que prévoit cette ordonnance, en offrant aux services fiscaux la possibilité de contrôler les bénéficiaires pendant une période de cinq ans. Nous nous en réjouissons. Nous nous félicitons de l’équilibre trouvé entre efficacité économique et équité sociale.

La deuxième ordonnance, qui date du 10 juin 2020, assouplit opportunément les règles d’accès à la commande publique, essentiellement au bénéfice des PME. Certaines des dispositions qu’elle contient ont d’ores et déjà été inscrites dans le marbre législatif, à la faveur de la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, dite « ASAP ». Là encore, nous nous félicitons de ce que la crise ait été propice au pragmatisme et profitable à tous.

La troisième ordonnance porte réorganisation de la Banque publique d’investissement. Cette réorganisation, qui a permis d’augmenter les fonds propres de Bpifrance, donc sa capacité de financement des entreprises, est, elle aussi, un motif de satisfaction pour les membres du groupe Union Centriste.

Comme l’a rappelé notre collègue et rapporteur Bernard Delcros, que je tiens ici à saluer pour la qualité du travail effectué, la réorganisation de Bpifrance vise, au moyen d’une fusion-absorption de Bpifrance SA par l’établissement de crédit Bpifrance Financement, à surmonter le déséquilibre de la structure du point de vue de ses fonds propres.

Outre la simplification de l’organisation et de la gouvernance de Bpifrance, cette réorganisation va permettre à l’établissement de crédit de bénéficier de la consolidation de Bpifrance Participations et, ainsi, de multiplier par plus de cinq le montant de ses fonds propres, qui devraient passer de 4 à 25 milliards d’euros, soit une augmentation de ses capacités à financer l’économie de l’ordre de 50 milliards d’euros d’ici à 2024.

Un autre avantage significatif de la réorganisation concerne les modalités d’intervention de Bpifrance et leurs effets sur les comptes publics. La société de tête n’étant plus comptabilisée au sein des administrations publiques, Bpifrance pourra désormais, grâce à la garantie de l’État, s’endetter dans des conditions favorables sans que cela soit comptabilisé selon les critères de Maastricht. Les bénéfices de la réorganisation pour le soutien et la relance de notre économie seront immédiats, puisque, comme cela a été rappelé par notre rapporteur, un premier emprunt de 3 milliards d’euros est déjà prévu.

Enfin, la quatrième ordonnance vise à faciliter l’octroi aux entreprises en difficulté d’avances de trésorerie en compte courant. Nous approuvons cette mesure, particulièrement bienvenue dans le contexte que nous connaissons. Elle participe pleinement aux réponses économiques qu’il nous faut apporter à l’épidémie de covid-19.

Les membres du groupe Union Centriste se réjouissent aujourd’hui d’avoir l’occasion de débattre du contenu de ces ordonnances avant que leur soit conférée pleine valeur législative. Nous vous l’avons suffisamment rappelé, madame la secrétaire d’État : le Gouvernement ne doit pas exciper de la difficulté et de l’urgence de la situation pour contourner le Parlement et ses prérogatives. Nous avons ici été entendus et nous nous en félicitons, allant même jusqu’à espérer que la démarche sera prolongée dans les semaines et les mois à venir.

Quoi qu’il en soit, vous l’aurez compris, notre groupe votera en faveur de cette ratification. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l’article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 1

Article 1er

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, l’article 18 de l’ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l’épidémie de covid-19 et l’ordonnance n° 2020-705 du 10 juin 2020 relative au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 sont ratifiés.

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 3 rectifié

Articles additionnels après l’article 1er

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, les mots : « d’au plus » sont remplacés par le mot : « de ».

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement vise à ce que chaque prolongation du fonds de solidarité soit prise pour une durée minimale de six mois. La raison est simple : il s’agit de redonner au tissu économique et associatif du pays les conditions pour sortir de l’incertitude liée à la crise sanitaire.

Il y a un problème de conditionnalité de la stabilité des actions de l’exécutif national, madame la secrétaire d’État : les chefs d’entreprise et les responsables d’association ne sauraient être suspendus à l’interview de tel ou tel ministre ! On ne peut pas nous dire le 12 décembre, au micro de Jean-Jacques Bourdin, que le fonds de solidarité universel et l’aide de 1 500 euros s’arrêteront à la fin du mois de décembre et décider de les prolonger de deux mois le 8 février !

Vous allez me dire que ce sont des ajustements. Pour ma part, je pense que cela traduit deux problèmes : l’existence de tergiversations et la déconnexion du temps politique de celui des chefs d’entreprise ou des responsables associatifs.

Notre groupe, tout en étant critique sur la gestion du prêt garanti par l’État, estime que la durée apporte la confiance. Pour les entreprises et les responsables associatifs, les charges ne s’arrêteront pas avec la disparition du virus ! Nous souhaitons tous ici avec force que le virus disparaisse d’ici à deux ou trois mois, voire dans les semaines qui viennent, mais, aujourd’hui, les garanties ne sont pas là.

Notre société a besoin de durée et de solidité, madame la secrétaire d’État. À cet égard, prévoir une durée minimale de six mois pour chaque prolongation du fonds de solidarité permet une lisibilité : cela donne un cap aux chefs d’entreprise, donc aux salariés, ainsi qu’aux responsables associatifs. Il faut faire de même pour le chômage partiel. Cela apportera la confiance.

Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Delcros, rapporteur. Cet amendement tend à ce que chaque prorogation du fonds de solidarité soit d’une durée de six mois au minimum.

La loi de finances pour 2021 a précisé les conditions selon lesquelles le pouvoir réglementaire peut prolonger l’existence du fonds de solidarité. Dans un premier temps, le fonds a été mis en place jusqu’au 16 février. Par un décret en date du 8 février dernier, il a été prolongé jusqu’au 30 juin prochain. Si le fonds devait être maintenu après le 16 août, en tout état de cause, le Parlement sera consulté.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, dont elle comprend le fondement, mais qui ne semble pas opérant ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Comme l’a souligné le rapporteur, le fonds a été prolongé jusqu’au 30 juin 2021.

Je comprends le sens de votre amendement, monsieur Savoldelli. Toutefois, lors de l’examen du PLFR 4, en novembre dernier, notamment pour tenir compte de la nouvelle période de confinement, les parlementaires ont doté le fonds de solidarité de crédits supérieurs aux besoins pour permettre de tuiler les dispositifs et éviter ainsi toute rupture de charge. Je me permets de le souligner, car on ne le rappelle pas toujours… Si nous n’avions pas vu un peu plus grand dans le PLFR 4, avec 11 milliards d’euros, nous n’aurions sans doute pas pu rassurer les entreprises et les accompagner aussi bien ces dernières semaines.

Le fonds de solidarité évolue – vous nous le reprochez, et c’est tout le sens de votre amendement – en fonction de la situation sanitaire. Plus vite nous en aurons fini avec ce virus, plus vite nous sortirons de toutes ces aides, certes indispensables, mais qui témoignent de la mise sous perfusion de notre économie. Ce que les entrepreneurs attendent surtout, et c’est l’ancienne entrepreneure qui parle, c’est de sortir de tous ces fonds de solidarité et d’accompagnement et de voir notre économie retrouver son fonctionnement normal.

Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. Monsieur Savoldelli, l’amendement n° 1 est-il maintenu ?

M. Pascal Savoldelli. Oui, monsieur le président.

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 1
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Article 1er bis

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 3-1 de l’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, il est inséré un article 3-… ainsi rédigé :

« Art. 3-…. – Les conditions d’éligibilité et d’attribution des aides du fonds de solidarité sont conditionnées par un nombre d’emplois équivalent au solde de l’année précédente. »

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement est cohérent avec notre position constante lors de l’examen des quatre lois de finances rectificatives et de la loi de finances pour 2021.

Il est encore temps de conditionner les aides du fonds de solidarité au maintien des salariés dans l’emploi. Il ne peut pas y avoir deux poids deux mesures : on ne peut pas sanctionner des chômeurs et ne pas sanctionner les grandes entreprises qui ne tiennent pas leurs engagements.

Bruno Le Maire, dans cet hémicycle, comme lors de son audition par la commission des finances, avait invité les entreprises du CAC 40 qui touchaient des aides publiques à ne pas verser de dividendes. Lorsqu’elles l’ont fait, y a-t-il eu des sanctions ? Non ! Pas davantage quand elles ont licencié ou mis leurs salariés au chômage partiel !

C’est une question de responsabilité et de justice. Notre groupe pense qu’il faut des règles claires. Quand on bénéficie de la solidarité nationale, on ne licencie pas. Nous ne sommes pas dupes sur les aides, les fonds de solidarité, les prêts garantis par l’État, l’activité partielle ou les reports de cotisations sociales et patronales. Il n’existe aucune donnée sur les licenciements dans les entreprises bénéficiant du fonds de solidarité : c’est le vide total.

Dans le Val-de-Marne, l’État a versé 336 millions d’euros à 40 000 entreprises. En soustrayant les entrepreneurs individuels que j’évoquais en discussion générale, le fonds de solidarité a distribué 176 millions d’euros à 17 000 entreprises. C’est beaucoup d’argent, et il en faudrait peut-être encore davantage, mais il faut des règles : on ne peut pas à la fois toucher l’argent public et provoquer du chômage partiel. Comment peut-on me dire ensuite que, six mois, c’est beaucoup trop long pour donner une perspective aux entreprises et qu’il faut attendre le prochain débat au Parlement pour permettre aux chefs d’entreprise d’avoir une certaine visibilité en termes de commandes et de trésorerie ?

Madame la secrétaire d’État, les 2 163 licenciements au sein du ministère de l’économie votés en loi de finances amputent la capacité de l’administration à procéder au versement des aides dans les temps et à effectuer les contrôles nécessaires. Les agents ont ainsi réalisé 100 000 contrôles dans seulement 5 % des entreprises et n’ont récupéré que 3 millions sur les 30 millions d’euros usurpés.

Il s’agit d’un amendement d’appel, d’un amendement politique, j’en conviens. Il ne s’agit pas de s’opposer à l’aide publique aux entreprises, mais d’y mettre des conditions. Ce qui vaut pour les citoyens doit valoir aussi pour les entreprises, et particulièrement pour les plus grandes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Delcros, rapporteur. Conditionner le bénéfice du fonds de solidarité au maintien des emplois est une rigidité qui pourrait fragiliser à la fois l’entreprise et les emplois.

Le fonds de solidarité est indispensable, mais il ne remplace pas l’activité et ne garantit pas que l’entreprise bénéficiaire ne sera pas fragilisée. Cette dernière peut se trouver dans une situation si précaire que sa survie dépend de sa capacité à ajuster ses effectifs à son activité. Or, si cet amendement était adopté, les entreprises seraient même dans l’obligation de reconduire les CDD arrivés à leur terme pour conserver le même niveau d’emplois.

Par ailleurs, en retenant le critère d’un nombre d’emplois équivalent à celui de l’année précédente, les auteurs de cet amendement en viennent à interdire à une entreprise de bénéficier du fonds de solidarité pour recruter un salarié supplémentaire.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Monsieur Savoldelli, je vous reconnais le mérite de la cohérence, tant en ce qui concerne vos propos que vos combats. Nous avons aussi notre cohérence : ce qui maintient l’activité et l’emploi, c’est davantage la confiance que le contrôle.

Si votre amendement était adopté, le signal envoyé aux PME-TPE, créatrices de 99 % des emplois dans nos territoires, serait désastreux. En tant que secrétaire d’État chargée de l’économie sociale et solidaire, je suis bien placée pour constater le taux de non-recours aux aides des petites structures. Mettre en œuvre ce type de contrepartie rigide ne servirait qu’à casser encore plus la confiance.

Comme l’a souligné le rapporteur, bénéficier d’un fonds de solidarité ne permet en rien au chef d’entreprise de garantir un niveau d’emplois stable, a fortiori au regard de la durée de cette crise. Si ce dispositif était adopté, beaucoup d’entreprises, et notamment les plus petites, renonceraient tout simplement à bénéficier du fonds de solidarité.

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Je pense qu’il faut effectivement offrir un maximum de souplesse pour que les fonds aillent à ceux qui en ont véritablement besoin.

Les services de Bercy ont fait diligence pour attribuer les aides, et il faut les en féliciter. Il est bien évidemment légitime de s’intéresser à la situation de certaines entreprises et de lutter contre la fraude.

Madame la secrétaire d’État, sur les 750 000 dossiers déposés au titre du recours au fonds de solidarité en décembre dernier, 110 000 sont encore en attente. Quelles en sont les raisons ? Est-ce à cause des contrôles accrus ?

Deux mois après avoir formulé leur demande, il me semble important que les entreprises reçoivent le soutien qu’elles attendent et qui leur a été promis pour faire face à leurs nombreux engagements.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Je vais tenter de vous répondre, monsieur Canevet, même si je ne dispose pas de toutes les informations.

Je ne pense pas que les contrôles soient responsables de ces files d’attente, mais plutôt les modifications opérées au sein du fonds de solidarité. Les nouveaux cadrages – jusqu’à 10 000 euros – supposent de mettre en place une nouvelle organisation. J’ai demandé des informations plus précises que je partagerai avec le Sénat aussitôt qu’elles me seront parvenues.

Il me semble également important de rappeler le caractère rétroactif des dispositifs. J’entends bien que l’aide attendue en janvier ou en février n’était pas forcément au rendez-vous, mais elle sera libérée de manière rétroactive.

Encore une fois, l’évolution du périmètre du fonds de solidarité est sans doute à l’origine de cette petite file d’attente.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 3 rectifié
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article 2

Article 1er bis

(Non modifié)

Au 1° de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-705 du 10 juin 2020 précitée, le mot : « premier » est remplacé par le mot : « deuxième ». – (Adopté.)

Article 1er bis
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article 3

Article 2

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2020-738 du 17 juin 2020 portant diverses mesures en matière de commande publique est ratifiée. – (Adopté.)

Article 2
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 7

Article 3

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2020-739 du 17 juin 2020 portant réorganisation de la Banque publique d’investissement et modifiant l’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement est ratifiée. – (Adopté.)

Article 3
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 4 rectifié

Articles additionnels après l’article 3

M. le président. L’amendement n° 7, présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 1A de l’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elle privilégie la transformation de la dette des entreprises en quasi-fonds propres dans les secteurs industriels et stratégiques ».

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Nous souhaitons tous le retour « à la normale », sans chômage partiel ni prêts garantis par l’État, mais nous serons alors dans une situation des plus délicates, face à un mur de faillites et de destructions d’emplois. Ce processus est d’ailleurs déjà à l’œuvre.

Cet amendement vise donc à renforcer l’intervention de Bpifrance en permettant à la Banque publique d’investissement de transformer certains prêts en quasi-fonds propres pour enrayer la spirale de la dette privée. Il s’agit de prioriser les PME-TPE opérant sur des secteurs reconnus stratégiques. On ne peut en effet prétendre ériger la relocalisation industrielle du pays en priorité et laisser s’écrouler le tissu productif.

Il s’agit de nouveau d’un amendement d’appel. Peut-être ne sera-t-il pas adopté, mais nous devons tous prendre conscience que les faillites, les destructions d’emplois, vont faire très mal ! Va-t-on anticiper et engager les fonds de Bpifrance pour venir en aide aux entreprises ? En l’espèce, l’exécutif ne s’ingérerait pas dans le destin industriel de la France, mais fixerait un cap en désignant les filières stratégiques pour la relance et en permettant d’injecter de l’argent dans les entreprises concernées.

L’endettement privé, qui s’élève aujourd’hui à 175 milliards d’euros dans notre pays, est vertigineux. Nous avons déjà connu la crise des subprimes en 2008. Nous courons un risque d’insolvabilité d’une partie de cette dette privée, ce qui retombera directement sur la dette publique, par effet boomerang. Il s’agit donc plutôt d’un amendement constructif et positif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Delcros, rapporteur. Il s’agit d’un sujet important. Les PGE ont vocation à être remboursés. On sait déjà que 5 milliards à 10 milliards d’euros ne pourront l’être, n’y ajoutons pas volontairement d’autres non-remboursements.

Les prêts participatifs, décidés par le Gouvernement, ont vocation à alimenter les fonds propres des entreprises. Ils seront accordés par le réseau bancaire, à hauteur de 20 milliards d’euros, à partir de mars ou d’avril. Il me semble donc inutile de faire intervenir la BPI sur l’alimentation en fonds propres des entreprises. Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Comme il s’agit d’un amendement d’appel, monsieur Savoldelli, je me fais un devoir et un plaisir de répondre à cet appel.

Oui, monsieur le rapporteur, 20 milliards d’euros de prêts participatifs et d’obligations subordonnées seront lancés dans les prochaines semaines pour renforcer en priorité les quasi-fonds propres et les bilans des PME et ETI de tous les secteurs, notamment des secteurs stratégiques et industriels ! Plusieurs instruments complémentaires existent, en sus de Bpifrance : prêts garantis, garantie de fonds propres ou en quasi-fonds propres, soutien à l’innovation, intervention en véritables fonds propres…

Je partage votre souci d’anticipation, monsieur Savoldelli, mais anticiper n’est pas forcément imaginer le pire. Je m’entretenais ce matin avec la direction générale du Trésor au sujet des défaillances : force est de constater que les dispositifs de soutien ont permis de maintenir un certain nombre de nos entreprises, qui ne sont pas en situation de défaillance. Le pessimisme est d’humeur, mais l’optimisme de volonté. Je suis volontairement optimiste : en janvier dernier, 96 % de l’activité économique a été maintenue. Je m’autorise le doux songe de penser que nous n’avons pas nécessairement devant nous une cascade de faillites…

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

M. Jérôme Bascher. Une fois n’est pas coutume, je suis d’accord avec Pascal Savoldelli.

Je ne partage pas votre analyse, madame la secrétaire d’État – hélas ! Certes, l’optimisme est de volonté, mais les chiffres et la réalité sont cruels : l’économie est totalement sous perfusion. C’est la raison pour laquelle, comme l’explique parfaitement l’Insee, paradoxalement, il y a eu moins de défaillances en 2020 que les années précédentes. C’est logique : si vous fonctionnarisez tout le monde, il n’y a pas de défaillances ! Or c’est exactement ce qui a été fait. Toutefois, toutes les entreprises, notamment de restauration, qui ne travaillent plus depuis un an ont « bouffé » leur trésorerie – c’est leur mot, c’est leur détresse.

Il faudra recapitaliser, comme l’a souligné Pascal Savoldelli. Quand vous fusionnez Bpifrance et Bpifrance financement, il s’agit bien de recapitaliser, d’augmenter la capacité de Bpifrance de lever des fonds. C’est tout du moins comme cela que les choses ont été présentées à ceux qui ont finalement eu à en décider, notamment aux parlementaires membres de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, après la censure de l’ordonnance.

Oui, nous aurons besoin de recapitaliser et de quasi-fonds propres ! Oui, Bpifrance va participer à ce mouvement ! Mais ce ne sera pas suffisant, pas plus que les prêts participatifs.

Il s’agit d’un bon amendement. Je ne le voterai pas, car il ne tourne pas réellement, mais je m’abstiendrai, en soutien à mon ami Pascal Savoldelli.

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.

M. Vincent Segouin. Comme Jérôme Bascher, je suis d’accord avec l’amendement d’appel de Pascal Savoldelli – ce dont je ne suis pas coutumier non plus.

Nous avons accordé des PGE à hauteur de 25 % du chiffre d’affaires, à rembourser sur cinq ans. La moyenne de rentabilité des entreprises étant de 2 %, la capacité de remboursement des PME-TPE est de 10 % du chiffre d’affaires. Je ne vois pas comment elles pourront rembourser ces 25 %.

Nous n’avons pas le choix, il faudra recapitaliser les entreprises. J’ai déjà interrogé Bruno Le Maire à deux reprises, sans obtenir de réponse. J’imagine que vous n’en avez pas non plus, madame la secrétaire d’État… (Mme la secrétaire dÉtat s’exclame.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 7.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 7
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 5 rectifié

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le 3° du I de l’article 6 de l’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« … Contribuer et pérenniser les financements de longs termes dans les entreprises stratégiques afin de garantir la souveraineté sanitaire, technologique et s’inscrivant dans la transition écologique du pays. »

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement nous donne l’occasion de discuter des orientations de Bpifrance.

Mon propos va rejoindre beaucoup de questions posées au Gouvernement depuis toutes les travées de cet hémicycle : pourquoi s’être retiré du capital de certaines entreprises, notamment dans le secteur de la recherche vaccinale ? Pourquoi Bpifrance a-t-elle retiré 25 millions d’euros, soit 9 % de son capital ? C’est davantage un débat de stratégie, d’orientation de politique d’investissement et de souveraineté.

En regardant les choses de près, nous avons pu mettre certains de vos collègues en difficulté. Je me rappelle avoir interrogé à ce sujet Agnès Pannier-Runacher, qui a dû reconnaître que les doses de vaccin Valneva allaient être livrées plus tard que les autres…

La question se pose du rôle et de la place de Bpifrance en termes de politique de financement des investissements à la fois d’urgence et d’avenir – car la question du virus ne se refermera pas comme une simple parenthèse. Les épidémies possibles et les dangers sanitaires à venir constituent un vrai sujet. C’est là qu’il faut mettre le paquet !

Il faut une maîtrise publique complète des investissements de Bpifrance. On peut ensuite toujours discuter des choix et des orientations, mais la souveraineté nationale demeure. À partir du moment où ils entrent au capital, les acteurs privés, et c’est normal, ont une vision beaucoup plus étroite et ne se soucient que de profitabilité.

L’amendement que je présenterai dans quelques instants, en lien avec celui-ci, avait reçu un avis de sagesse de la commission des finances. J’espère convaincre le rapporteur de maintenir cet avis… (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Delcros, rapporteur. Bpifrance intervient déjà en participation dans des entreprises. Sa capacité d’intervention va encore être renforcée par la fusion.

Une fois encore, mieux vaut éviter d’ajouter des rigidités. Les dispositions de cet amendement renvoient aux seules entreprises stratégiques : qu’entendez-vous par là ? Certaines entreprises, non stratégiques, peuvent avoir besoin d’être soutenues, notamment dans le domaine de l’innovation.

Par ailleurs, Bpifrance et la Banque des territoires vont engager 40 milliards d’euros sur le plan Climat.

Enfin, les investissements dans les entreprises stratégiques sont au cœur des missions de l’Agence des participations de l’État.

Ne rajoutons pas une contrainte supplémentaire : la commission est défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Avis défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 4 rectifié
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article 3 bis

M. le président. L’amendement n° 5 rectifié, présenté par MM. Savoldelli, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du deuxième alinéa du a du 1° de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-739 du 17 juin 2020 portant réorganisation de la Banque publique d’investissement, le taux : « 95 % » est remplacé par le taux : « 98,6 % ».

La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Cet amendement vise à maintenir une maîtrise publique de Bpifrance à hauteur de 98,6 %, plutôt que 95 % – un taux de 100 % aurait été irrecevable…

Cette fusion entre la société mère et sa filiale marque l’entrée au capital, donc au conseil d’administration, d’acteurs privés. Notre groupe considère que la nouvelle organisation constitue une poussée progressive de ces derniers au sein de la Banque publique d’investissement. De 0 %, on passe à 1,4 %, puis à 5 % avec cette ordonnance : qui sait quel sera, à terme, le sort du bras économique de l’État dans le financement des PME-TPE ?

L’économiste et journaliste Luc Fayard donne cette définition de l’actionnaire : « Personne morale amorale, affectée d’un trouble oculaire spécifique : dans des comptes financiers, elle ne peut lire que la ligne du bas, celle du résultat. » Nous avons encore constaté cette amoralité des actionnaires avec le versement des dividendes en pleine crise sanitaire, malgré l’octroi d’aides publiques.

Dans son rapport de novembre 2016, la Cour des comptes avait souligné les bons résultats nets du groupe et la solidité financière de ses activités. Nous parlons tout de même d’un résultat net de 1,02 milliard d’euros en 2018 et de 1,36 milliard d’euros en 2017. Pourquoi s’en priver ?

La question du rôle de l’État actionnaire se pose au travers de cette incursion des acteurs privés. Nous sommes nombreux à fustiger le rôle de l’État dans le financement de l’économie ; nous le sommes un peu moins en temps de crise sanitaire – dont acte ! Reconnaissez tout de même que cette arrivée du privé est incohérente.

Dès la création de la BPI, en 2012, nous disions qu’elle ne devait pas financer de « canards boiteux » ni rester dans les failles du marché pour laisser les activités les plus profitables aux acteurs privés. Ces derniers peuvent se rémunérer indirectement sur les fameux canards boiteux, grâce à leur détention d’une fraction du capital de la BPI.

Le privé faisant irruption dans le capital de la société mère, nous vous demandons de céder les participations de la BPI, notamment dans les grandes entreprises cotées du CAC 40, à l’Agence des participations de l’État.

In fine, nous vous demandons de clarifier la doctrine d’investissements des deux entités et de sécuriser ces participations et leur rémunération au seul profit de l’État. Cet amendement vous est donc extrêmement favorable, madame la secrétaire d’État.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Bernard Delcros, rapporteur. La commission souhaite entendre le Gouvernement sur ce sujet.

Le seuil minimum de détention publique était fixé à 95 % avant la fusion, lorsque les valorisations n’étaient pas encore arrêtées. Il est aujourd’hui de 98,6 %. Peut-il être intéressant, madame la secrétaire d’État, de consolider la détention publique à ce niveau ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Monsieur Savoldelli, le Gouvernement partage totalement votre préoccupation de garantir à Bpifrance un contrôle et un actionnariat publics. Or le fait que l’État et la Caisse des dépôts et consignations conservent conjointement une participation minimale de 95 % suffit largement pour le garantir.

Pour preuve du maintien de ce contrôle public, la composition du nouveau conseil d’administration de la société et les modalités de nomination du directeur général demeurent inchangées.

Par ailleurs, vous évoquez l’arrivée d’actionnaires minoritaires. Ce n’est pas une arrivée. Des actionnaires minoritaires privés étaient déjà au capital de Bpifrance financement : c’est le fruit de l’histoire. Une telle présence a un sens, puisqu’elle permet un alignement d’intérêts entre la banque publique et les établissements de place. C’est d’ailleurs une condition pour que ces banques et les sociétés de financement privées puissent bénéficier des garanties de prêts.

La participation conjointe de l’État et de la Caisse des dépôts et consignations à 95 % est très clairement de nature à répondre au souci, que je comprends, de garantir le contrôle public sur Bpifrance. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?

M. Bernard Delcros, rapporteur. Les arguments de Mme la secrétaire d’État sont convaincants. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 5 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 81 :

Nombre de votants 331
Nombre de suffrages exprimés 319
Pour l’adoption 80
Contre 239

Le Sénat n’a pas adopté.

Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 5 rectifié
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article additionnel après l'article 3 bis - Amendement n° 8

Article 3 bis

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2020-739 du 17 juin 2020 précitée est ainsi modifiée :

1° Au premier alinéa de l’article 1er, après le mot : « procédé », sont insérés les mots : « , conformément aux dispositions du code de commerce, » ;

2° L’article 2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du dernier alinéa du a du 1°, les sigles : « (UE) » et : « (EEE) » sont supprimés ;

b) Au b du 2°, après le mot : « cinq », il est inséré le mot : « représentants » ;

c) Le 4° est ainsi modifié :

– au a, après le mot : « alinéa », sont insérés les mots : « du I » ;

– à la seconde phrase du second alinéa du c, les mots : « approbation par le » sont remplacés par les mots : « l’approbation du » ;

3° Au premier alinéa du II de l’article 3, les mots : « loi du 23 mars 2020 susvisée » sont remplacés par les mots : « la loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 » ;

4° Le I de l’article 4 est ainsi modifié :

a) La seconde phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : « du présent I » ;

b) À la fin du dernier alinéa, le mot : « article » est remplacé par la référence : « I » ;

5° Au second alinéa du II de l’article 5, après la référence : « l’article 1er », sont insérés les mots : « de la présente ordonnance ». – (Adopté.)

Article 3 bis
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Article 4

Article additionnel après l’article 3 bis

M. le président. L’amendement n° 8, présenté par M. Delcros, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l’article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La seconde phrase du 5° du I de l’article 179 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 est complétée par les mots : « , ainsi que du niveau des financements dédiés aux fonds de garantie gérés par la société anonyme Bpifrance et de l’évolution des politiques relatives à ces garanties ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Bernard Delcros, rapporteur. Cet amendement concerne les recyclages des dividendes ou les redéploiements de crédits internes à Bpifrance qui viennent alimenter des fonds de garantie. Certes, une telle pratique existe déjà, mais nous savons que la fusion et la réorganisation de Bpifrance vont la renforcer. Or, d’une certaine manière, ces mécanismes contournent l’autorisation parlementaire, comme l’a d’ailleurs rappelé la Cour des comptes en 2016.

Par cet amendement, je souhaite alerter le Gouvernement pour qu’il rende compte de l’ensemble de l’effort financier de l’État en faveur des petites et moyennes entreprises, afin que le Parlement soit informé sur les moyens consacrés aux fonds de garantie. Je rappelle qu’il s’agit tout de même de fonds publics.

Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous nous apporter des assurances et clarifier les intentions du Gouvernement à cet égard ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Monsieur le rapporteur, je vous remercie de cet amendement. La membre du Gouvernement que je suis aujourd’hui partage sans réserve votre souci relatif à la pérennité du financement de garanties de prêts du groupe Bpifrance. J’ai d’ailleurs travaillé sur cette question durant les trois ans et demi au cours desquels j’ai siégé au sein de la commission des finances de l’Assemblée nationale. J’ai également souhaité à de nombreuses reprises que l’on améliore l’information, puisque j’avais aussi l’honneur de siéger au sein du conseil de Bpifrance en tant que parlementaire.

Cette activité est absolument historique. Elle a fait ses preuves. Le Gouvernement y croit. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle une enveloppe de plus de 400 millions d’euros lui est consacrée en loi de finances pour 2021.

Vous le savez, il existe différents moyens de financer cette activité de garantie. Il peut s’agir de crédits budgétaires, mais également de reprises de provisions ou d’utilisation des dividendes. L’opération de fusion n’apporte pas de changement sur ce plan.

Il est en revanche plus que souhaitable que le Parlement puisse continuer de débattre en profondeur de l’avenir et des grands paramètres de l’activité de garantie de Bpifrance. Pour les exercices 2019 et 2020, alors qu’aucun crédit n’a été exécuté, l’activité de garantie de Bpifrance a bien été décrite dans les projets annuels de performance et dans les rapports annuels de performance.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement prend devant vous l’engagement non seulement de maintenir cette pratique à l’avenir, mais également d’augmenter le niveau d’information disponible dans les documents budgétaires. Je vous propose ainsi que cela fasse l’objet d’un jaune dédié aux liens entre Bpifrance et l’État, ce qui garantit la transmission des informations précises sur les activités de Bpifrance en la matière.

Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, mais sur le fondement d’un engagement ferme, qui, bien au-delà de ma personne, se traduira par un jaune budgétaire.

M. le président. Monsieur le rapporteur, l’amendement n° 8 est-il maintenu ?

M. Bernard Delcros, rapporteur. Madame la secrétaire d’État, compte tenu de l’engagement ferme que vous venez de prendre, engagement dont je vous remercie, je retire cet amendement. Mais, encore une fois, l’information du Parlement est très importante.

M. le président. L’amendement n° 8 est retiré.

Article additionnel après l'article 3 bis - Amendement n° 8
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 4

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2020-740 du 17 juin 2020 relative à l’octroi d’avances en compte courant aux entreprises en difficulté par les organismes de placement collectif de capital investissement et les sociétés de capital-risque est ratifiée. – (Adopté.)

Vote sur l’ensemble

Article 4
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté définitivement.)

M. le président. Mes chers collègues, à la demande du Gouvernement, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19
 

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Dossier législatif : proposition de loi relative à la réforme du courtage de l'assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement
Discussion générale (suite)

Réforme du courtage

Adoption en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement (proposition n° 312, texte de la commission n° 332, rapport n° 331).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la réforme du courtage de l'assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement
Article unique (début)

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargée de léconomie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la proposition de loi que nous examinons cet après-midi est une réforme attendue par les courtiers et par les consommateurs. Nous avions eu l’occasion d’en débattre lors de l’examen de la loi Pacte, texte pour lequel j’ai un intérêt tout particulier, et sur l’initiative de sénateurs, notamment MM. Bizet et Yung, avec le soutien du Gouvernement et de la commission spéciale du Sénat. Comme présidente de la commission spéciale à l’Assemblée nationale sur la loi Pacte, j’avais à l’époque pleinement soutenu l’objectif de mieux accompagner les activités de courtage. Puis, le Conseil constitutionnel a finalement considéré l’article concerné comme un cavalier législatif.

C’est un honneur d’être aujourd’hui devant vous, et peu de temps après le passage du texte à l’Assemblée nationale, pour réaffirmer notre désir commun en faveur d’une telle réforme. Ce texte apporte des réponses pragmatiques à nos entreprises de courtage pour pérenniser et renforcer la confiance des Français à leur égard, et donc leur viabilité. Il répond à la nécessité de protéger le consommateur, par la promotion d’un haut niveau d’exigence professionnelle pour l’ensemble du secteur.

Au cours des dix dernières années, nous avons renforcé les règles en matière de protection du consommateur dans la sphère financière. Pourtant, force est de constater que ces règles ne sont pas toujours respectées : il y a, d’un côté, le manque de responsabilité de certains acteurs ; il y a aussi, de notre côté, parfois un manque de contrôle. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) n’est en mesure de réaliser que 70 contrôles par an, alors que nous avons près de 40 000 courtiers et mandataires en assurances et 13 000 courtiers et mandataires en opérations de banque et services de paiement.

Au détriment de tous les professionnels de bonne foi, un tel contexte a permis le développement de pratiques malhonnêtes. Pour citer quelques exemples, nous pouvons parler du développement des garanties d’assurance construction placées chez des acteurs situés en dehors de nos frontières, à Gibraltar notamment. Faute de provisionnement adéquat, ces sociétés ont fait faillite en cascade à partir de la fin de l’année 2017, laissant les assurés sans aucune protection. Nous en avons tiré les leçons à l’échelon européen par un meilleur contrôle des activités transfrontalières. Mais nous devons aussi en tirer les leçons en France s’agissant de la distribution de garanties que l’on sait parfois douteuses.

Je pense également à la pratique du démarchage téléphonique en assurance, qui s’est multipliée ces dernières années. La loi du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux était une première réponse. Je crois que nous pouvons aller plus loin pour contrer les purs schémas d’escroquerie et le démarchage abusif. J’aurai l’occasion de vous présenter un amendement du Gouvernement en ce sens ; j’espère qu’il trouvera consensus ici.

Pour que les Françaises et les Français puissent donner au courtage toute la confiance que ce métier mérite, il paraît indispensable que celui-ci s’organise, en actant la création d’associations professionnelles agréées, dont la relation avec l’ACPR sera consacrée dans la loi. Ces associations agréées seront chargées du suivi de l’activité et de l’accompagnement de leurs membres. À ce titre, elles offriront un service de médiation et vérifieront les conditions d’accès et d’exercice de l’activité, ainsi que le respect des exigences professionnelles, dans une logique de conseil et d’accompagnement.

Dans le souci de favoriser la diversité nécessaire pour que chaque professionnel se sente à son aise, plusieurs associations seront créées. À ce jour, huit associations professionnelles ont déjà indiqué être prêtes à déposer leur dossier d’agrément. Cela démontre que le secteur est déjà en ordre de marche et, encore une fois, que cette réforme est attendue ou, en tout cas, trouve d’ores et déjà une réponse dans la pratique des professionnels.

Les acteurs exerçant des activités en France au titre de la libre prestation de services ou de la liberté d’établissement pourront également adhérer à ces associations professionnelles agréées. Le droit européen ne nous permet pas de les y contraindre. Il s’agira donc d’une faculté, mais il est probable que la grande majorité de ces acteurs souhaiteront y recourir dès lors que cette adhésion constituera, pour les clients français, une marque de sérieux, d’engagement et un gage de confiance dans leur courtier.

Concrètement, les associations agréées seront encadrées par des règles qui garantiront leur indépendance et leur impartialité.

Quant aux professionnels, ils disposeront également de garanties importantes. Ainsi, la demande d’adhésion à l’association donnera lieu à une réponse dans un délai maximum de deux mois à compter de la date de réception d’un dossier complet. En cas de refus, celui-ci devra être strictement motivé et pourra faire l’objet d’un recours devant les tribunaux.

En dehors d’une modification opérée en commission sur laquelle je vous proposerai de revenir un peu plus tard, le Gouvernement apporte aujourd’hui tout son soutien à cette proposition de loi nécessaire à la pérennité de notre réseau de courtage, en particulier des courtiers de proximité, dont la présence est si importante pour les assurés. Nous souhaitons qu’elle puisse être promulguée dans les meilleurs délais, afin que sa mise en œuvre puisse intervenir au printemps 2022 pour permettre une transition du secteur et renforcer dans la durée la présence des courtiers auprès des Français, en toute confiance.

En cet après-midi, je vais m’autoriser une formule facile qui – on ne va pas se mentir – a laissé de marbre vos collègues députés, mais dont je ne doute pas qu’elle trouvera à vos oreilles une plus juste résonance : nous faisons une réforme pour le courtage, mais pas une réforme pour le court terme ! (Exclamations amusées sur de nombreuses travées.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, en remplacement de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson, rapporteur de la commission des finances. Je ferai part à Albéric de Montgolfier de ces applaudissements, à qui, je l’ai bien compris, ils étaient adressés. (Sourires.)

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons la proposition de loi relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement, introduite par notre collègue députée Valéria Faure-Muntian, sur laquelle le Gouvernement a engagé la procédure accélérée et qui a été adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale. Mon collègue Albéric de Montgolfier, qui a été désigné rapporteur par la commission des finances et qui a travaillé sur ce texte, ne pouvait malheureusement pas être des nôtres cet après-midi. Il m’a donc chargé de le remplacer.

Sans refaire l’historique complet du texte, rappelons qu’il s’agit d’une initiative ancienne. Il reprend un dispositif introduit par amendement sur l’initiative du Sénat par plusieurs collègues des groupes Les Républicains et La République En Marche dans le cadre du projet de loi Pacte. Ce dispositif avait finalement été censuré comme cavalier par le Conseil constitutionnel.

Sur le fond, la présente proposition de loi, examinée au sein de la commission des finances le 3 février, ambitionne d’organiser l’accès et l’exercice des professions de courtiers en assurances et en opérations de banque et en services de paiement. Les échanges que nous avons pu avoir en commission traduisent un constat clair : cette proposition de loi ne va pas révolutionner la profession de courtage en assurances et en services de paiement. Surtout, elle ne permettra pas de régler certaines difficultés majeures rencontrées par les courtiers et les consommateurs, sur lesquelles je reviendrai par la suite. Malgré tout, elle nous semble constituer un premier pas bienvenu, permettant d’accompagner les acteurs face aux défis réglementaires et commerciaux que doit relever la profession et de diffuser les bonnes pratiques au bénéfice des consommateurs.

En effet, l’article unique de la présente proposition de loi prévoit la mise en place d’un système d’adhésion obligatoire à des associations professionnelles agréées par l’ACPR, qui seront principalement chargées d’accompagner ces professionnels, de fournir un service de médiation et de vérifier certaines conditions d’accès et d’exercice de leur activité. Ce système s’inspire de celui qui a été mis en place par la loi de sécurité financière de 2003 pour les conseillers en investissements financiers, dont l’AMF (Autorité des marchés financiers) dresse un bilan positif. Je précise que ces associations existent déjà et que six à huit d’entre elles devraient être agréées.

L’entrée en vigueur de la réforme, initialement prévue pour le 1er janvier 2021, a été reportée au 1er avril 2022 par nos collègues députés, pour tenir compte du décalage du calendrier lié à la crise. La mise en œuvre de cette réforme est donc largement anticipée par les acteurs du secteur, et ce depuis la loi Pacte. Ils ne sont et ne seront donc pas pris au dépourvu.

Les travaux de la commission des finances ont permis de faire évoluer le texte adopté par l’Assemblée nationale sur deux points essentiels.

Tout d’abord, nous avons étendu les missions confiées à l’Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance (Orias), en prévoyant qu’il exerce le contrôle de l’honorabilité non seulement des dirigeants des structures concernées, mais également de leurs salariés : en clair, l’absence de condamnation pénale. Actuellement, l’Orias tient un registre des intermédiaires et dispose à ce titre d’un accès automatisé et sécurisé au bulletin n° 2 du casier judiciaire pour vérifier les conditions d’honorabilité des seuls dirigeants.

Dans sa première version, la proposition de loi aurait imposé aux associations agréées de demander les documents justifiant de l’honorabilité des dirigeants et salariés, ce qui aurait représenté une charge administrative non négligeable, pour un niveau de garantie plus faible. Il nous a donc semblé préférable de confier à l’Orias l’ensemble du contrôle des conditions d’honorabilité des dirigeants et salariés, dans la mesure où cet organisme dispose des habilitations et de processus de vérification déjà rodés.

Le deuxième aménagement substantiel apporté lors de l’examen en commission concerne les domaines pour lesquels le droit européen interdit de confier aux associations des pouvoirs de contrôle, à savoir la fourniture de conseils, les pratiques de vente et la prévention des conflits d’intérêts. Pour ces derniers, nous avons permis aux associations agréées d’édicter des recommandations à l’égard de leurs membres. Cette évolution permettra aux associations de promouvoir les bonnes pratiques professionnelles et commerciales sans pour autant créer d’obligations pour leurs adhérents.

Cela étant, malgré les ambitions affichées par ses auteurs dans l’exposé des motifs, cette proposition de loi ne permettra pas de régler certaines problématiques pourtant majeures rencontrées par les courtiers et les consommateurs.

D’une part, la proposition de loi n’apportera pas de solution aux dysfonctionnements de la libre prestation de services, qui s’est traduite – Mme la secrétaire d’État l’a rappelé – par des défaillances successives de plusieurs assureurs étrangers dont les polices étaient souscrites par des particuliers ou des professionnels en France, notamment – hélas ! – dans le domaine de l’assurance construction ou en automobile. En effet, le droit européen interdit de soumettre à une adhésion obligatoire les courtiers exerçants en France au titre de la libre prestation de service ou de la liberté d’établissement.

D’autre part, la proposition de loi ne mettra pas fin aux pratiques commerciales déloyales parfois observées dans le secteur. En effet, les associations professionnelles ne seront pas habilitées à contrôler le respect des pratiques de vente et du devoir de conseil vis-à-vis des clients.

Le système proposé diffère sur ce point de celui qui est en vigueur pour les conseillers en investissements financiers, qui peuvent être contrôlés à ce titre par l’association à laquelle ils adhèrent. Le règlement général de l’AMF impose même un contrôle sur place de chacun des membres au moins une fois tous les cinq ans. Il n’y a rien d’équivalent dans la proposition de loi, mais il s’agit, là encore, non d’un choix, mais d’une contrainte du droit européen, qui ne permet pas aux autorités publiques de déléguer leurs pouvoirs de contrôle dans ces domaines dans le champ de l’assurance.

En dépit de ces deux limites, je pense qu’il s’agit d’un pas dans la bonne direction. En effet, si les courtiers font l’objet d’un encadrement croissant à l’échelon européen avec la directive de 2016 sur la distribution d’assurances, les conditions d’exercice qui leur sont imposées sont peu contrôlées. Pour vous donner un ordre de grandeur, l’ACPR réalise 70 contrôles par an, alors que 24 470 courtiers et 32 557 intermédiaires en opérations de banque et services de paiement sont immatriculés à l’Orias. Vous voyez le ratio

Le turnover – je serais tenté de dire la « pratique éphémère » – est massif. Albéric de Montgolfier a insisté sur le fait que 11 000 intermédiaires ne sont pas renouvelés chaque année. En outre, les exigences d’accès à la profession sont souvent peu respectées.

Avec le système proposé, les associations pourront désormais vérifier que les conditions d’exercice sont remplies, en particulier l’obligation d’offrir un service de médiation, de se former régulièrement et de souscrire à une garantie financière adéquate. C’est particulièrement nécessaire dans un secteur très atomisé où l’essentiel des acteurs – vous l’avez compris – sont des TPE.

L’obligation d’adhésion devrait par ailleurs permettre de limiter le turnover et de décourager les projets professionnels les moins aboutis. Le coût de cette adhésion n’apparaît pas prohibitif. D’après les auditions, il se situerait autour de 500 euros en moyenne, avec une modulation selon la taille de l’entreprise.

Il faut également garder à l’esprit que de nombreux intermédiaires ont déjà adhéré sur une base volontaire aux associations existantes et que la souscription comprend certains services, comme la médiation, auxquels les courtiers auraient de toute façon été tenus de souscrire. À plus long terme, la présence de plusieurs associations professionnelles nous paraît également de nature à susciter une modération de ces tarifs, dans une logique à la fois de concurrence et d’attractivité.

Enfin, comme il ne s’agit pas d’embêter inutilement des professions déjà bien encadrées, soulignons que les agents généraux sont exclus du champ de l’obligation d’adhésion, y compris pour leurs activités accessoires de courtier. En effet, les assureurs opèrent une sélection stricte des candidats à l’exercice de la profession d’agent général, leur imposent des obligations de formation bien supérieures au minimum requis par le droit européen et les auditent régulièrement.

Au total, et compte tenu des contraintes du droit européen, il nous semble donc que l’équilibre trouvé doit permettre de structurer la profession sans excès de zèle. C’est pourquoi la commission des finances vous invite à adopter cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. le président de la commission des finances et M. Jean-Claude Requier applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui reprend un amendement porté par notre collègue Richard Yung et l’ensemble de notre groupe lors de l’examen de la loi Pacte, amendement qui avait également été soutenu par Jean Bizet et des membres de son groupe. Le Sénat l’avait alors très largement adopté, avec le plein soutien du rapporteur Michel Canevet et du Gouvernement. L’Assemblée nationale l’avait ensuite repris à l’identique, moyennant quelques aménagements rédactionnels. Finalement, le Conseil constitutionnel, à l’issue de la navette parlementaire, avait choisi de le censurer comme « cavalier législatif ».

C’est ainsi que nous nous retrouvons, deux ans plus tard, à examiner la proposition de loi de notre collègue députée Valéria Faure-Muntian, qui reprend cette disposition. Je ne doute pas qu’elle sera accueillie au Sénat avec le même enthousiasme qu’en 2019. Comme le rappelait Richard Yung dans son amendement initial, cette disposition tend à répondre à une situation qui n’a fait que s’aggraver au cours des dernières années et à laquelle il est urgent de remédier.

Les marchés d’intermédiation bancaire et assurantielle se sont fortement développés dans un contexte historique de taux bas et d’essor de l’offre de produits financiers. Le contrôle exercé sur cette offre est assuré par l’ACPR, mais n’est plus tout à fait adapté à ces nouvelles structures et à un marché d’intermédiation de plus en plus éclaté. C’est pour cette raison que la proposition de loi écarte l’option d’une surveillance directe par l’ACPR, pour confier cette mission à des associations agréées.

En effet, l’ACPR réalise un peu moins d’une centaine de contrôles par an, face à un marché de près de 13 000 courtiers et mandataires en opérations bancaires et services de paiement et de plus de 40 000 courtiers en assurances. L’ACPR n’est manifestement pas en mesure d’assurer seule l’encadrement du secteur du courtage. Cette proposition de loi présente donc une solution équilibrée qui prend exemple sur le dispositif existant pour les conseillers en investissements financiers, fondé sur l’intervention d’associations agréées et qui permet un contrôle efficace du secteur.

Les associations agréées auront un rôle complémentaire de ceux de l’ACPR et de l’Orias. Il ne s’agit nullement de retirer des compétences à ces organismes, comme certains semblent s’en inquiéter, mais au contraire de les seconder et de les renforcer.

J’aimerais ici reprendre un exemple qui avait été cité lors de l’examen de la loi Pacte et qui se produit malheureusement encore trop souvent, celui d’un client de bonne foi qui aurait souscrit une assurance construction auprès d’un courtier installé en France. Mais lorsqu’il souhaite déclarer un sinistre et faire jouer son assurance, la société, curieusement domiciliée à Chypre, Malte ou Gibraltar, a disparu et n’est plus là pour honorer son engagement.

Nous le voyons bien, il est urgent d’améliorer les conditions de commercialisation des produits d’assurance et de services bancaires et il est essentiel de responsabiliser les courtiers sur les produits qu’ils vendent. C’est au fond l’objectif de l’amendement n° 2 du Gouvernement, qui tend à mieux encadrer les démarchages téléphoniques et à interdire les ventes « en un temps », qui se transforment encore trop souvent en escroqueries visant les personnes âgées ou les plus vulnérables.

Vous venez de le préciser, madame la secrétaire d’État, à ce jour, huit associations professionnelles ont déjà indiqué être prêtes à déposer leur dossier d’agrément. C’est une excellente réponse à ceux qui demandent de retarder de nouveau l’entrée en vigueur de la proposition de loi.

Cette réforme est attendue par les professionnels et par les consommateurs. La date du 1er janvier 2022 prévue pour son entrée en vigueur me semble être un bon compromis entre le temps qu’il faudra laisser aux acteurs pour s’adapter à la nouvelle réglementation et la nécessité d’encadrer au plus vite les mauvaises pratiques de certains.

J’aimerais enfin répondre à ceux qui relevaient à juste titre en commission que les acteurs étrangers exerçant des activités en France ne seraient pas obligatoirement soumis à ces nouvelles obligations, en raison d’un droit européen qui ne permet pas de les y contraindre.

Il ne faut pas oublier l’effet d’entraînement d’une telle mesure sur l’ensemble du secteur, car l’adhésion à une association agréée constituera pour les clients français un gage de fiabilité. C’est un cercle vertueux qui permettra d’assainir peu à peu le marché et de rétablir la confiance en responsabilisant les acteurs.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI soutiendra cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, recensé dès 1538 dans Le Trésor de la langue française, le terme « courtier » recouvre des activités aussi anciennes que diverses, liées par définition à tout type d’activité commerciale. Il désigne un intermédiaire des échanges chargé de la mise en relation, ou encore de l’entremise d’un vendeur et d’un acheteur potentiels.

Le mot « courtier » trouve ses origines dans l’occitan « corratier » ; c’est un coureur ou une personne qui court pour réaliser des opérations commerciales. On le trouve au Moyen Âge sur les marchés ou dans les ports. Outre le fait qu’il doit avoir de bonnes jambes, le courtier doit aussi savoir créer et entretenir d’excellentes relations avec les différentes parties concernées. Parfaitement informé, il sait qui vend et qui souhaite acheter.

À cette époque, chaque courtier avait sa spécialité propre. Dans mon département, le courtier en vin était un personnage particulièrement important.

En finances, le courtier peut être un intermédiaire qui agit soit sur les marchés financiers pour le compte de tiers, soit en mettant en relation deux parties avec pour objectif qu’elles contractent ensemble.

Le courtage est devenu une activité très présente en bourse et dans les activités financières en général, mais il a fortement décliné ou s’est transformé, ces dernières années, avec l’automatisation du trading et la numérisation. Aujourd’hui, il se développe particulièrement dans le domaine des brevets, de la propriété intellectuelle et le commerce des données, sans oublier, de façon plus anecdotique, le courtage matrimonial…

L’objet de cette proposition de loi, repris d’une disposition censurée de la loi Pacte de 2019, est plus restreint, dans la mesure où il porte sur le courtage dans le domaine des assurances et des opérations de banque.

Sur le fond, il y a peu de choses à ajouter à ce qui a été dit. Le texte a déjà été amendé à l’Assemblée nationale et lors de l’examen en commission.

La volonté du Gouvernement de faire avancer ce sujet semble intacte, malgré la situation économique fortement bouleversée depuis un an par la pandémie. Il est vrai que cette réforme devait initialement entrer en vigueur au 1er janvier…

On peut regretter certains « angles morts » de la proposition de loi, comme le courtage en immobilier, secteur différent il est vrai, mais qui intéresse nos concitoyens. Si ce texte n’est pas un texte « fourre-tout », le terme de courtage lui-même reste très large, car il y a autant de métiers et d’intermédiaires que d’activités commerciales.

L’application stricte de l’article 45 de la Constitution réduit l’initiative parlementaire à des ajustements techniques, là où il y aurait matière à mieux encadrer un certain nombre d’activités qui relèvent du courtage. Je salue néanmoins les avancées présentes et remarque que le texte recouvre bien des activités telles que le courtage en crédit immobilier.

Les courtiers en opérations de banque répondent au terme de « IOBSP » – intermédiaires en opérations de banque et services de paiement. Comme les courtiers en assurances, ils apparaissent très nombreux… On peut attendre de l’adoption du présent texte que ces secteurs s’organisent davantage, du fait de la nécessité d’effectuer des démarches supplémentaires d’agrément. Cela devrait avoir un effet bénéfique pour le consommateur, dans le respect des règles de juste concurrence.

L’obligation d’adhésion à des associations professionnelles agréées par l’ACPR permettra, espérons-le, un meilleur contrôle, tout en conservant un système souple et la liberté d’établissement et de services. Son objectif, présenté lors des débats sur la loi Pacte, est avant tout de lutter contre certains abus, comme dans la vente de contrats d’assurance construction ou automobile, où des clients ont pu être abusés par des sociétés frauduleuses parfois domiciliées à l’étranger.

L’examen à l’Assemblée nationale a apporté un certain nombre de modifications ou de précisions. Les refus d’adhésion par les associations devront être motivés, et les professionnels bénéficieront de moyens de recours. À l’inverse, les associations agréées pourront informer les autres associations d’un retrait de la qualité de membre. Surtout, l’entrée en vigueur est décalée au printemps 2022 du fait de la crise sanitaire, in extremis avant la fin du quinquennat !

La commission des finances du Sénat a, quant à elle, introduit une condition d’honorabilité des courtiers, tant salariés que dirigeants. Je m’en réjouis.

Je note, à la suite du rapporteur, les limites intrinsèques du texte, qui doit respecter le cadre défini au niveau européen par la directive sur la distribution d’assurances de 2016, dite « DDA », laquelle interdit une coopération trop poussée entre les pouvoirs publics et les représentants du secteur, au nom de la liberté de service et de la non-interférence avec les autorités étrangères homologues.

Comme pour le texte précédent sur la ratification d’ordonnances, on peut regretter le délai de transmission court entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

En conclusion, après ces différentes remarques, j’indique que le groupe du RDSE votera en faveur de l’adoption de cette proposition de loi, qui va dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « il existe des contrats pour vous protéger contre toutes les calamités imaginables, sauf contre les démarcheurs de compagnies d’assurances ». (Mme la secrétaire dÉtat sesclaffe.) Ce proverbe populaire pointe le paradoxe que propose de résoudre cette proposition de loi. Malheureusement, il n’en sera sans doute rien, tant son dispositif nous paraît inutile, voire contre-productif, et coûteux pour les acteurs de l’intermédiation en assurance.

Je voudrais revenir sur la principale déviance qui nécessite une intervention législative ferme : le cas des acteurs de l’assurance intervenant en libre prestation de services, ou LPS.

Le grand public avait découvert leur existence au moment du scandale qui avait éclaté dans le secteur de l’assurance construction. Des dizaines de milliers d’assurés, qui avaient souscrit des assurances via des courtiers grossistes auprès d’assureurs exerçant en LPS, se sont retrouvés bien démunis lorsque leurs problèmes ont commencé. Les pratiques frauduleuses des LPS sont désormais bien connues : concurrence déloyale sur les prix et faillite lorsqu’il faut payer les sinistres.

La problématique est malheureusement diffuse. La spécificité des contrats dits « décennaux » fait peser pendant dix ans le risque de s’exposer aux pratiques frauduleuses de certaines compagnies d’assurances parfois établies dans des paradis fiscaux. Le cas de Gibraltar en est un exemple : on compte une entreprise d’assurance pour 700 habitants dans ce paradis fiscal, contre une pour 220 000 en France.

L’auteure et rapporteure du texte à l’Assemblée nationale reconnaît que les assureurs en LPS constituent « un problème très complexe et sensible ». Pourtant, ce texte ne résoudra pas la problématique des acteurs en libre prestation de services en difficultés financières ou même en faillite, dont les contrats demeurent distribués par des courtiers français. Les acteurs en LPS ne souscriront pas à ces associations, non seulement parce que l’adhésion pourrait coûter jusqu’à 500 euros, mais surtout parce qu’ils n’y seront pas contraints. Nous considérons qu’il s’agit d’une rupture d’égalité entre acteurs français et européens.

Cette proposition de loi risque finalement de subir le même sort que la disposition contenue dans la loi Pacte, en s’exposant, non pas à une censure du Conseil constitutionnel cette fois, mais à une contestation au motif de sa non-compatibilité avec le droit européen. En imputant aux associations créées la mission de s’assurer « du respect des exigences professionnelles », le texte s’expose en effet, au-delà du caractère vague de cette notion, à un risque de non-conformité avec la directive européenne sur la distribution des assurances de 2016. Ces associations se trouveraient dans une situation problématique au regard de la nécessité de préserver les prérogatives de contrôle de l’ACPR. La directive européenne est explicite sur les missions de contrôle, qui doivent être exercées par « des autorités publiques » ou « des organismes reconnus par le droit national », et non par « des associations dont les membres comprennent directement ou indirectement des entreprises d’assurance et des intermédiaires d’assurance ».

Plutôt que de risquer d’empiéter sur les attributs du régulateur, il serait sûrement préférable de renforcer les missions de l’ACPR et de l’Orias.

La confusion dans les rôles de chaque institution n’épargne pas les syndicats professionnels, qui se chargent d’ores et déjà de la veille juridique, de faciliter la formation professionnelle et d’assurer des missions de médiation par l’entremise de la « médiation de l’assurance ». Ce sont d’ailleurs ces mêmes syndicats professionnels qui créeront les associations agréées dont il est question dans cette proposition de loi. Il est difficile de ne pas y voir un paradoxe.

Les syndicats vont alors se départir de certaines de leurs missions et activités. Ils en sortiront affaiblis et verront le nombre de leurs membres diminuer autant que les cotisations perçues. En creux se dessine le risque que le dialogue social de la branche professionnelle se délite et que le Gouvernement dispose des coudées franches pour imposer ses vues au secteur.

Les associations agréées ne joueront pas non plus ce rôle de dialogue, car elles seront atomisées. Il pourrait en exister entre quatre et six. Quel est le fondement d’une telle concurrence ?

L’adhésion étant obligatoire, un acteur unique nous paraissait plus adapté, d’autant que les associations seront amenées à délivrer des recommandations. Celles-ci formuleront pour les mêmes acteurs de l’assurance des conseils différents. Leur portée, au-delà d’ajouter de la confusion, sera donc nulle.

Je ne reviens pas sur les risques de conflit d’intérêts de l’auteure de la proposition de loi, qui ont été mis en lumière par Mediapart. Même si elle déclare ne pas s’être posé de questions « sur le coup » à propos de son lien avec le think tank Intermedius, elle a changé d’avis en déclarant après le dépôt du texte un lien d’intérêt bénévole avec la structure.

Enfin, il est tout de même curieux de constater que ce texte, pourtant construit par les acteurs du secteur, ne contente au fond pas grand monde. Pour les sénateurs et les sénatrices du groupe CRCE, nul besoin d’ajouter une strate inutile, qui, contrairement à l’objectif affiché, n’améliorera pas la protection du consommateur. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.

M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, présentée par notre homologue députée de la Loire Valéria Faure-Muntian, la proposition de loi que nous examinons vise à réguler et à structurer les activités de courtage en assurances et en opérations de banque et services de paiement. Ce texte entend non seulement accompagner les professionnels d’un secteur aujourd’hui largement éclaté, mais également garantir aux consommateurs une meilleure protection, en renforçant un cadre juridique jugé trop évasif. Le dispositif qui nous est proposé dans ce texte reprend pour l’essentiel les dispositions de l’article 207 du projet de loi Pacte, que le Conseil constitutionnel avait censurées au motif qu’il s’agissait de cavaliers législatifs.

Nous nous accorderons tous sur ce constat : le droit en vigueur n’offre pas de cadre suffisant aux métiers de courtier en assurances et d’intermédiaire en opérations de banque et en services de paiement. Or l’expansion du marché et, à travers elle, la nécessité d’un meilleur contrôle des exigences professionnelles requises invitaient le législateur à se saisir du sujet à bras-le-corps.

Les marchés d’intermédiation bancaire et assurantielle ont en effet connu une forte croissance ces dix dernières années. Depuis 2010, le nombre de courtiers en assurances a ainsi progressé de 25 %. Celui d’intermédiaires en opérations de banque et de services de paiement a, quant à lui, bondi de 60 % depuis 2016. Cette augmentation exponentielle s’explique de différentes façons. Elle tient tout à la fois aux habitudes nouvelles prises par les consommateurs, à la politique monétaire accommodante de la Banque centrale européenne et aux nouveaux produits d’épargne mis en place à la faveur de la loi Pacte.

L’activité de courtage s’est en somme développée plus rapidement qu’elle ne s’est organisée et professionnalisée. Afin d’y remédier, la présente proposition de loi s’inspire directement du modèle de corégulation appliqué aux conseillers en investissements financiers, lequel est fondé sur une obligation d’adhésion à une association professionnelle agréée par l’Autorité des marchés financiers.

Très concrètement, aussi bien pour les courtiers d’assurance ou de réassurance que leurs mandataires et les intermédiaires en opérations de banque et de services de paiement, le texte prévoit d’instaurer l’autorégulation des secteurs d’intermédiation bancaire et assurantielle, en s’appuyant sur une adhésion obligatoire à des associations professionnelles, agréées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Ces associations professionnelles auront pour but d’offrir à leurs membres un service de médiation, d’accompagnement et d’observation de leur activité, mais aussi de vérifier le respect des conditions d’accès et d’exercice de leur activité.

Deux raisons principales conduisent le groupe Union Centriste à soutenir l’esprit et le contenu de la proposition de loi qui nous est ici soumise.

Tout d’abord, l’accompagnement des intermédiaires de l’assurance et des services bancaires, qui, pour la grande majorité, sont des TPE, se voit opportunément renforcé. Ces intermédiaires trouveront désormais des interlocuteurs fiables au sein de ces associations pour les conseiller, afin qu’ils se conforment aux évolutions du cadre réglementaire de leur profession. Nous nous en réjouissons.

Ensuite, le choix d’une assurance ou de services bancaires est un moment important dans la vie de nos concitoyens et des consommateurs, qui peuvent à cette occasion s’engager pour de très longues années dans un plan de remboursement. Il est donc de notre devoir de leur garantir une protection nécessaire, ce que prévoit le présent texte. Là aussi, nous nous en félicitons.

Le groupe Union Centriste n’en est pas moins sensible aux lacunes soulevées par le rapporteur, Albéric de Montgolfier, dont nous voulons saluer le travail accompli au nom de la commission des finances. Nous pouvons en effet regretter que le dispositif ne soit pas en parfaite adéquation avec les ambitions affichées par les auteurs de la proposition de loi.

Certes, ce décalage ne leur est pas entièrement imputable, les insuffisances du texte, en particulier quant au contrôle des conditions de commercialisation des produits d’assurance, tenant – cela a été rappelé à plusieurs reprises – aux fortes contraintes du droit européen qui pèsent sur notre législation nationale. Ainsi la réglementation européenne empêche-t-elle de soumettre à une adhésion obligatoire les intermédiaires étrangers exerçant en France au titre de la libre prestation de services ou de la liberté d’établissement, un écueil qui, hélas, risque de poser de sérieux problèmes d’équité…

De même la réglementation européenne empêche-t-elle rigoureusement de transposer aux courtiers en assurances et aux intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement le modèle de corégulation qui existe pour les CIF. Là encore, cela constitue un obstacle préjudiciable et une limite au texte que nous examinons.

Quoi qu’il en soit, cette proposition de loi constitue un premier pas, un premier pas nécessaire, un premier pas utile pour mieux réguler la profession de courtier. C’est d’autant plus vrai que le dispositif issu du texte transmis par l’Assemblée nationale a pu être substantiellement enrichi par la commission des finances du Sénat. Le transfert du contrôle de l’honorabilité des dirigeants et des salariés à l’Orias, de même que la faculté offerte aux associations professionnelles d’émettre des recommandations vis-à-vis de leurs membres en matière de pratiques commerciales et professionnelles vont ainsi dans le bon sens

Vous l’aurez donc compris, mes chers collègues, le groupe Union Centriste soutiendra cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. le rapporteur applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Isabelle Briquet. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons a pour objectif d’organiser l’autorégulation des professionnels du courtage en assurances. Elle intervient à la suite de la censure de la loi Pacte par le Conseil constitutionnel, qui avait vu, à l’époque, dans les dispositions reprises par ce texte des cavaliers législatifs. En ce sens, je le note, nous avons affaire à un projet de loi sous forme de proposition de loi. De ce fait, nous ne disposons pas d’une étude d’impact à proprement parler.

Le secteur du courtage compte de très nombreux acteurs et connaît un très fort turnover. Des scandales récents ont révélé la nécessité de le réguler davantage dans le but de remédier aux dysfonctionnements réglementaires constatés et, ainsi, de mieux protéger les consommateurs. Ce texte très technique, ramassé en un seul article, souhaite donc structurer ce secteur autour d’associations professionnelles agréées à adhésion obligatoire.

Cette réforme de la profession du courtage concerne près de 56 000 professionnels, lesquels sont soumis aujourd’hui à un premier autocontrôle du fait de leur enregistrement au registre de l’Orias, cet enregistrement étant nécessaire pour exercer. Un second contrôle peut intervenir de la part de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l’ACPR, chargée de vérifier la véracité des documents transmis à l’Orias et les pratiques des courtiers. À ce titre, l’ACPR a encore récemment sanctionné un courtier pour des manquements en matière de démarchage commercial. Pour mémoire, ces organismes ont été mis en place à la suite de la crise financière de 2008 afin de garantir les services assurantiels.

Les contrôles effectués par l’ACPR sont trop peu nombreux : seulement 70 en 2020. Cette proposition de loi entend donc y remédier.

Pourtant, malgré les bonnes intentions des auteurs, le contenu du texte est décevant et loin des ambitions formulées dans l’exposé des motifs. Alors qu’il nous est présenté comme un renforcement des garanties pour le consommateur, dans les faits, ce texte consiste en la création d’associations de contrôle.

D’une part, ce texte n’apportera pas de solution aux dysfonctionnements de la libre prestation de services, alors même que de nombreuses défaillances ont été relevées dans le secteur du bâtiment et de l’assurance automobile. De même, rien n’est précisé quant au devoir de conseil vis-à-vis des clients.

D’autre part, c’est une manière pour l’autorité de régulation de déléguer sa mission de contrôle à des acteurs privés ayant leurs propres règlements. C’est donc une régulation de marché et en même temps un recul de l’État…

Cette autorégulation par associations professionnelles risque donc de générer des baronnies sur le marché, favorisant de fait les grosses entreprises de courtage. Elle organise donc une dérive oligopolistique sur un marché qui n’en a pas nécessairement besoin, et cela au détriment des consommateurs. Contrairement à l’intention présentée par les auteurs, concentrer de la sorte les acteurs sur le marché mènerait à pousser les prix à la hausse par le mécanisme d’offre et de demande.

Enfin, cette réforme génère une surlégislation en créant un intermédiaire supplémentaire entre les professionnels et les instances nationales de régulation.

Je vous avoue, mes chers collègues, mon scepticisme quand, lors du PLF, on supprime l’obligation d’adhésion à des organismes de gestion agréés, qui jouent un rôle similaire sur un autre marché, avant d’adopter quelques semaines plus tard la logique parfaitement inverse avec ce texte.

Une simple réforme réglementaire aurait pu permettre d’augmenter la fréquence des contrôles de l’ACPR. En effet, avec près de 6 millions d’euros de cotisations récoltées, elle devrait avoir les moyens de se consacrer à ces contrôles. Peut-être aurait-il été opportun d’examiner la situation d’un peu plus près avant de déléguer purement et simplement ses missions à des associations agréées.

De même, afin de protéger davantage les consommateurs, il serait nécessaire que les courtiers aient recours à des services de médiation. Pour les y inciter, un justificatif mentionnant ces services pourrait être exigé lors du renouvellement de l’inscription au registre de l’Orias.

Autre point important : cette réforme souligne également les besoins de formation continue et d’accompagnement. Cette problématique dépasse largement le secteur bancaire et assurantiel et nécessiterait une réflexion plus large. Pour autant, en l’espèce, l’Orias pourrait, là encore, demander aux intermédiaires, au titre de la formation continue, tout document attestant des formations suivies et de la qualité de celles-ci.

Avant de conclure, j’ajouterai deux remarques de méthode sur cette réforme.

En premier lieu, je regrette, comme je l’ai déjà dit, l’absence d’une étude d’impact qui aurait éclairé ce texte très technique. Une telle étude aurait pu démontrer pour quelles raisons nous devrions organiser un marché plus concentré et en quoi cette organisation aurait pu être favorable aux consommateurs. En effet, malgré la volonté affichée de protection des consommateurs, il n’y a rien dans ce texte qui garantisse une augmentation des droits ou la possibilité d’un recours.

En second lieu, au regard de la crise sociale inédite que nous traversons, le groupe socialiste ne comprend pas l’urgence d’une lecture de cette proposition de loi en procédure accélérée et sur le temps gouvernemental. Il y a effectivement de vraies urgences à traiter dans notre pays. Elles sont sanitaires, sociales et environnementales. Par ailleurs, ce texte de loi ne mérite pas d’être travaillé dans l’empressement d’un calendrier contraint par les échéances électorales à venir.

Ces dispositions, qui entendent réguler un secteur d’activité, désarment en fait la puissance publique au lieu de lui donner les moyens d’exercer ses missions et d’effectuer les contrôles qui seraient nécessaires à la réelle protection des consommateurs. Ces derniers sont quand même les laissés-pour-compte de ce texte alors qu’ils en étaient la principale justification.

Cependant, au-delà de la méthode qui n’est pas la bonne et ne permettra pas d’être efficace, ce texte a le mérite d’engager la réflexion sur une problématique réelle. Nous serons à cet égard très attentifs quant à la traduction réglementaire de ce texte de loi une fois son adoption actée.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, le groupe socialiste s’abstiendra sur ce texte, qui n’apporte pas de solutions en matière de protection des consommateurs. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Pierre-Jean Verzelen. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, sous des aspects très techniques, le texte que nous examinons aujourd’hui renvoie à une réalité bien connue de nos concitoyens : quiconque a déjà souhaité comparer différentes offres d’assurance ou de prêt a éprouvé le besoin d’être aidé dans ses démarches.

C’est justement le rôle du courtier que d’apporter cette aide. Le courtage opère comme un intermédiaire entre l’assureur ou la banque, d’une part, et le client, d’autre part. Son rôle consiste à agréger différentes offres de prestation afin de faire jouer la concurrence et d’apporter les solutions les mieux adaptées aux besoins des clients.

Comme pour toute offre d’intermédiation entre le fournisseur d’une prestation et son bénéficiaire, le courtier crée de la valeur quand il génère de la confiance entre l’un et l’autre. Il s’agit de trouver, pour le client, l’offre la mieux adaptée et au meilleur prix.

Aujourd’hui, cette profession regroupe des acteurs très nombreux et très divers. Sont ainsi immatriculés au registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance 25 000 courtiers en assurances, 34 000 intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement et près de 7 700 entreprises étrangères intervenant en prestation de services ou en libre établissement sur le sol français.

Il est utile de rappeler ces chiffres, car ils illustrent bien la réalité du marché du courtage en assurances et en opérations de banque. Ainsi, lorsqu’ils cherchent à souscrire une police d’assurance ou s’apprêtent à s’engager dans un crédit, les consommateurs font face à une myriade d’acteurs qui n’ont ni les mêmes statuts ni les mêmes exigences en matière de transparence.

La profusion des acteurs – des TPE et des entreprises individuelles dans l’immense majorité des cas – peut être analysée comme la preuve que ce marché n’a pas encore tout à fait trouvé son point d’équilibre. En tout cas, cette profusion est un terreau propice aux fraudes fiscales et commerciales.

Ce risque de fraude ne peut être le fruit que de quelques-uns, mais ils nuisent à la profession. Comme je l’ai dit, les acteurs de cette profession créent de la valeur, parce qu’ils génèrent de la confiance. Lorsque le doute existe à cause de certains, c’est l’ensemble des acteurs qui en font les frais et, au bout de la chaîne, le consommateur.

C’est pourquoi le groupe Les Indépendants soutient le principe de cette démarche de réforme : il apparaît judicieux de renforcer les contrôles prudentiels réalisés sur les entreprises.

La création d’associations professionnelles à adhésion obligatoire, soumises à l’agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, doit permettre de rendre l’offre de courtage plus lisible et plus transparente pour les consommateurs.

J’ai entendu les arguments selon lesquels l’entrée en vigueur de ce dispositif était précipitée. C’est vrai que la date, fixée par l’Assemblée nationale au 1er avril 2022, ne laisse guère plus d’un an aux acteurs et aux nouvelles associations professionnelles pour s’organiser. Mais cet argument omet le fait que les concertations ont été engagées dès 2018 et que le Parlement avait déjà voté cette réforme dans le cadre du projet de loi Pacte avant que le Conseil constitutionnel ne supprime les articles concernés au motif qu’ils constituaient des cavaliers législatifs.

Je pense que nous devons avant tout veiller à ce que cette réorganisation de la profession ne fasse pas peser sur les acteurs économiques, par le biais des cotisations d’adhésion, des surcoûts qui seraient répercutés sur les consommateurs.

Mis à part ce point de vigilance, notre groupe soutient cette réforme, qui nous semble aller dans l’intérêt des consommateurs. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Emmanuel Capus. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi.

M. Paul Toussaint Parigi. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui a pour objectif d’encadrer et de surveiller l’activité des courtiers en assurances. C’est un objectif que nous partageons, car l’autorégulation souhaitée doit servir à protéger le consommateur – or cet impératif majeur est au cœur de notre mission de législateur. Dès lors, la seule question qui vaille en réalité est de savoir si ce texte y concourt vraiment. Permettez-nous d’en douter au regard des nombreuses questions que soulève ce texte.

Tout d’abord, rappelons que, d’inspiration gouvernementale, cette proposition de loi issue de la majorité à l’Assemblée nationale s’apparente – disons-le clairement – à un projet de loi qui ne dit pas son nom. Preuve de cette ambiguïté à peine cachée, l’oubli initial du gage pour la charge supplémentaire créée par la nouvelle compétence d’agrément des associations par l’ACPR.

Ensuite, le texte fait l’économie d’une étude d’impact qui aurait sans doute été utile pour apprécier le dispositif proposé, dont le fonctionnement reste ardu et que vous nous demandez de voter presque à l’aveugle.

En outre, nous nous interrogeons sur l’articulation du texte avec le droit européen. Si la directive de 2016 prévoit bien que des courtiers peuvent fonder des associations de cadrage, il reste que les activités de contrôle doivent être réservées à l’autorité publique.

Le problème sous-jacent réside précisément dans la faiblesse des moyens de contrôle de l’État. Alors que les acteurs de ce secteur sont près de 50 000, ce nombre augmentant de manière exponentielle, l’ACPR n’effectue qu’une moyenne de 70 contrôles par an. Dès lors, n’aurait-on pas eu plus intérêt à étudier la possibilité de renforcer les moyens de l’ACPR pour qu’elle puisse suivre l’évolution du secteur ?

Par ailleurs, nous nous interrogeons sur les modalités d’application de la réforme : elles doivent être précisées par décrets en Conseil d’État, c’est-à-dire sans aucune intervention du Parlement.

En l’absence d’étude d’impact, ce texte pose problème. Les gagnantes semblent être les associations professionnelles, qui bénéficieront de cotisations, sans que rien assure l’efficacité de l’autorégulation évoquée.

L’adhésion obligatoire des courtiers constitue pour lesdites associations une manne financière considérable. Elles sont de fait en situation de conflit d’intérêts : en excluant un de leurs membres, elles perdront leur cotisation. Dès lors, quelle sera leur motivation réelle à agir en faveur de l’autorégulation ? Pire encore, ces associations professionnelles au service des courtiers pourraient devenir des groupes d’intérêts et aggraver le problème initial de régulation.

N’aurait-il pas été préférable de taxer les banques, les assurances et les courtiers à hauteur de leurs dépenses consacrées à la mise en conformité aux règles prudentielles afin de financer un contrôle externe et renforcer les moyens de l’ACPR et de l’AMF ? À cette condition, la puissance publique aurait peut-être pu s’assurer que certains ne profitaient pas de l’aubaine constituée par un désert juridique et un encadrement assez évasif.

Dès lors, ce texte, certes amélioré en commission, semble répondre partiellement aux objectifs, pourtant louables, que ses auteurs lui ont fixés, mais au risque de me répéter, il est impossible, en l’absence d’étude d’impact, d’évaluer les effets de cette réforme.

Il nous semblait que, au regard de la crise que traverse la France et des terribles difficultés qu’endurent les citoyens, la mise en place de dispositifs de soutien à leur égard était plus prioritaire. Aussi aurions-nous largement préféré discuter de la place que prennent les assurances dans le soutien à la population, alors que le contexte sanitaire, économique et social extrêmement préoccupant exige une mobilisation sans faille du Parlement.

C’est donc au regard du droit du Parlement à légiférer dans des conditions acceptables et de ne pas être réduits à une fonction d’approbation, mais également, car aucun élément n’accrédite l’idée d’une meilleure protection du consommateur, que nous conservons des doutes réels, et qui nous paraissent légitimes, sur l’utilité de voter en faveur de ce texte, qui nous laisse circonspects, tant sur la forme que sur le fond. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Vincent Segouin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, alors que nous devions marcher vers une simplification massive de l’administration, alors que nous ne cessons de dénoncer, comme une majorité de Français, le poids de la suradministration, des normes et des régulations dans tous les domaines, comme la santé ou la recherche, et alors que nous avons supprimé les centres de gestion dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021, nous nous réunissons aujourd’hui, contrairement à toute attente, afin de débattre sur la création d’une nouvelle obligation administrative pour les courtiers en assurances. Cette obligation est évidemment doublée d’une charge financière non productive.

Pour tout vous avouer, j’avais d’abord déposé un amendement de suppression de l’article unique de cette proposition de loi lors de son examen en commission des finances ; je considérais que les efforts de simplification n’étaient pas respectés et que l’Orias pouvait remplir cette tâche sans créer de strate supplémentaire. Cependant, au cours de nos échanges en commission, j’ai pris conscience que le nombre des inscriptions et résiliations des intermédiaires en assurances et de leurs mandataires était considérable : pas loin de 11 000 chaque année. J’ai également pris conscience que les courtiers en assurances devaient remplir des obligations de médiation, de formation et de garanties financières. Cet aspect est aujourd’hui peu suivi compte tenu de la taille moyenne des structures.

En revanche, je ne vous cache pas que j’espérais que cette proposition de loi protégerait les assurés des courtiers étrangers, mais aussi des sociétés d’assurance immatriculées dans des pays européens qui exercent aujourd’hui en France au titre de la libre prestation de services, les fameux LPS, et ce sans les obligations de solvabilité ou de garantie financière que doivent respecter les entreprises françaises. Mais rien sur ce sujet – je le regrette.

Dans le texte que nous examinons aujourd’hui, il est proposé que les courtiers en assurances qui dépendent de l’autorité de contrôle, à savoir l’ACPR, et sont immatriculés à l’Orias dès leur installation et dont l’adhésion est renouvelée chaque année soient adhérents d’une association professionnelle à partir du 1er avril 2022. Les associations agréées assureront, moyennant une cotisation annuelle d’environ 500 euros qui sera à la charge du courtier, la médiation pour les litiges entre courtiers et clients et l’information sur les nouvelles règles législatives ou normatives et sur la garantie financière ; elles vérifieront le respect des exigences professionnelles, en particulier l’obligation de formation. Le contrôle et la sanction des mauvaises pratiques resteront à la charge de l’ACPR, et l’Orias poursuivra ses missions sans étendre ses compétences.

Ces associations auront la possibilité de prévenir l’ACPR et les autres associations en cas d’irrégularité, mais elles pourront également édicter des recommandations en termes de bonnes pratiques ou de prévention des conflits d’intérêts. J’espère que ces recommandations seront d’ordre général et ne se transformeront pas en obligations nouvelles se traduisant en contraintes pour les professionnels du courtage dans les prochaines années. Le risque, c’est bien qu’à nouveau la libre concurrence et la recherche d’innovation fassent les frais de ce formalisme normatif contraignant.

Il est indispensable pour un assuré de pouvoir juger lui-même de la compétence d’un courtier motivé par le mérite et la passion. L’uniformisation des pratiques serait contraire à l’intérêt de l’assuré. Le Gouvernement s’était d’ailleurs engagé à défendre la liberté d’entreprendre et d’innover, mais quelle ne fut pas ma surprise en voyant l’amendement qu’il a déposé en dernière minute et qui a pour but d’imposer à tout intermédiaire en assurances d’enregistrer ses conversations téléphoniques avec ses clients et de les archiver pendant deux ans, le but étant prétendument de limiter le démarchage commercial des plateformes d’appel.

L’idée est louable, si c’est pour éviter le démarchage commercial par des plateformes à distance qui ne respectent pas la vulnérabilité des personnes, mais l’amendement reste compliqué à accepter pour les professionnels, assureurs et banquiers, qui ne pourront appeler un prospect ou un client pour lui faire une nouvelle offre sans enregistrer la conversation. C’est une disposition compliquée, alors que nous développons la mobilité, les portables et le télétravail. Compliquée aussi, car elle impose des normes aux professionnels de proximité, qui, aujourd’hui, ne posent pas de problème.

On peut également se demander si cet amendement est conforme à la Constitution, puisqu’il impose quelque chose aux assureurs et aux banquiers, mais pas aux autres démarcheurs.

Enfin, est-ce que cet amendement suffira pour stopper le démarchage par les plateformes situées à l’étranger ? Je n’en suis pas sûr. De ce fait, vous ne réglerez pas le problème réel, mais vous handicaperez des professionnels de proximité qui travaillent sur l’ensemble du territoire.

Je regrette que cet amendement ait été déposé sans concertation avec les professionnels de l’assurance et de la banque. La commission des finances a d’ailleurs déposé un sous-amendement afin que cette disposition soit revue avec les professionnels et mieux adaptée à l’objectif.

En conclusion, je dirai que cette proposition de loi impose à nouveau un coût non productif aux courtiers en assurances du territoire, sans régler le problème de la concurrence étrangère peu scrupuleuse. Cependant, j’estime qu’elle a le mérite d’assurer la médiation pour les courtiers, ainsi que la formation, l’information et la garantie financière. Il serait en revanche inutile de l’étendre aux agents généraux et mandataires de leur compagnie, qui, à l’instar des banques, ont déjà mis toutes ces obligations en œuvre. Pour toutes ces raisons, je voterai ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc Laménie. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, je tiens à remercier les auteurs de cette proposition de loi, qui porte sur un domaine méconnu et très complexe : le courtage en assurances, en opérations de banque et en services de paiement.

Dans le contexte actuel, ce secteur joue un rôle important. Je rappelle que ces activités de courtage se sont beaucoup développées ces dernières années, et il est naturel que le législateur joue son rôle en la matière, ce qu’il avait d’ailleurs fait au moment de l’examen de la loi Pacte – plusieurs collègues l’ont rappelé. Alors que nous traversons une crise sanitaire, il est essentiel de préserver nos entreprises et les soutenir.

Comme l’a rappelé notre collègue Vincent Segouin, les acteurs de ce secteur sont nombreux et diversifiés : 24 470 courtiers et 32 557 intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement sont immatriculés au registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance.

Sur bien des sujets, il existe en France beaucoup de textes, de couches, de strates, et de nombreuses personnes se plaignent de la complexité ainsi créée. Les entreprises rencontrent de réelles difficultés de ce point de vue.

Les parlementaires ont reçu de nombreux messages à propos de cette proposition de loi, certains en sa faveur, d’autres plus réservés. Un seul texte ne règle pas tous les problèmes et aucun n’est parfait, mais il est quand même important de soutenir le monde économique, tout en défendant les consommateurs.

Un collègue évoquait précédemment la suppression des centres de gestion agréés, et il faut rappeler que beaucoup d’entreprises sont obligées de faire appel à des experts-comptables, car cette matière est de plus en plus complexe.

En tout cas, plusieurs associations professionnelles ont marqué leur opposition à cette proposition de loi et à cette réforme et elles ont fait part de leurs réticences à l’ensemble des parlementaires.

En conclusion, je suivrai l’avis de notre rapporteur sur les différents amendements qui ont été déposés et je soutiendrai ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la réforme du courtage de l'assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement
Article unique (fin)

Article unique

I. – Le chapitre III du titre Ier du livre V du code des assurances est ainsi modifié :

1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Règles spéciales à certaines catégories d’intermédiaires » ;

2° Sont ajoutés des articles L. 513-3 à L. 513-9 ainsi rédigés :

« Art. L. 513-3. – I. – Aux fins de leur immatriculation au registre mentionné au I de l’article L. 512-1, les courtiers d’assurance ou de réassurance, personnes physiques et sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés pour l’activité de courtage d’assurance, et leurs mandataires, personnes physiques non salariées et personnes morales, adhèrent à une association professionnelle agréée chargée du suivi de l’activité et de l’accompagnement de ses membres. Cette association professionnelle représentative offre à ses membres un service de médiation, vérifie les conditions d’accès et d’exercice de leur activité ainsi que leur respect des exigences professionnelles et organisationnelles et offre un service d’accompagnement et d’observation de l’activité et des pratiques professionnelles, notamment par la collecte de données statistiques. La phrase précédente ne s’applique pas aux conditions d’honorabilité, dont la vérification est assurée par l’organisme qui tient le registre mentionné au même I.

« Les courtiers ou sociétés de courtage d’assurance ou leurs mandataires exerçant des activités en France au titre de la libre prestation de services ou de la liberté d’établissement peuvent également adhérer à une association professionnelle agréée mentionnée au présent I.

« II. – Ne sont pas soumises à l’obligation d’adhésion à une association professionnelle agréée prévue au I les personnes suivantes, y compris, le cas échéant, lorsqu’elles exercent le courtage d’assurance à titre de mandataire d’intermédiaire d’assurance :

« 1° Établissements de crédit et sociétés de financement ;

« 2° Sociétés de gestion de portefeuille ;

« 3° Entreprises d’investissement ;

« 4° Agents généraux d’assurance inscrits sous un même numéro au registre mentionné à l’article L. 512-1.

« L’obligation d’adhésion à une association professionnelle agréée prévue au I du présent article n’est pas applicable aux mandataires d’intermédiaires d’assurance agissant en vertu des mandats délivrés par l’une des personnes mentionnées aux 1° à 3° du présent II.

« Art. L. 513-4. – La demande d’adhésion à l’association professionnelle agréée donne lieu à une réponse dans un délai de deux mois à compter de la date de réception par l’association d’un dossier complet. Dans le cas où l’association professionnelle agréée refuserait une adhésion, elle motive sa décision dans la réponse. La décision de refus d’adhésion peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve le siège de l’association.

« L’association peut notifier à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sa décision de refus d’adhésion, ainsi qu’aux autres associations professionnelles mentionnées au I de l’article L. 513-3.

« Art. L. 513-5. – I. – Les associations professionnelles mentionnées au I de l’article L. 513-3 sont agréées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, qui vérifie leur représentativité, la compétence et l’honorabilité de leurs représentants légaux et administrateurs, l’impartialité de leur gouvernance, appréciée au regard de leurs procédures écrites, ainsi que leur aptitude à assurer l’exercice et la permanence de leurs missions au travers de moyens matériels et humains adaptés.

« L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut retirer, selon des modalités prévues par décret, l’agrément d’une association professionnelle mentionnée au même I lorsque celle-ci ne satisfait plus aux conditions auxquelles était subordonné son agrément.

« II. – Ces associations établissent par écrit et font approuver par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution au moment de leur agrément les règles qu’elles s’engagent à mettre en œuvre pour l’exercice de leurs missions telles que définies à la seconde phrase du premier alinéa du I de l’article L. 513-3 ainsi que les sanctions qu’elles sont susceptibles de prononcer à l’encontre des membres. Elles font également approuver toute modification ultérieure de ces règles.

« Elles peuvent formuler des recommandations à l’intention de leurs membres relatives à la fourniture de conseils, aux pratiques de vente et à la prévention des conflits d’intérêts.

« Elles établissent un rapport annuel sur leurs activités ainsi que sur celles de leurs membres sous une forme agrégée, qu’elles adressent à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

« Art. L. 513-6. – I. – Le retrait de l’adhésion peut être décidé par l’association à la demande du courtier, de la société de courtage ou du mandataire. Il peut également être décidé d’office par l’association si le courtier, la société de courtage ou le mandataire ne remplit plus les conditions ou les engagements auxquels était subordonnée son adhésion, s’il n’a pas commencé son activité dans un délai de douze mois à compter de son adhésion, s’il n’exerce plus son activité depuis au moins six mois ou s’il a obtenu l’adhésion par de fausses déclarations ou par tout autre moyen irrégulier.

« Tout retrait de l’adhésion est notifié à l’organisme qui tient le registre mentionné à l’article L. 512-1.

« Lorsqu’il est prononcé d’office, le retrait de l’adhésion est notifié à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et prend effet à l’expiration d’une période dont la durée est déterminée par l’association.

« Lorsque le retrait de l’adhésion est prononcé d’office, l’association peut également décider d’informer les autres associations professionnelles mentionnées au I de l’article L. 513-3 de sa décision.

« La décision de retrait peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve le siège de l’association.

« II. – L’association professionnelle n’est pas compétente pour sanctionner les manquements de ses membres qui relèvent exclusivement de la compétence de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution telle que prévue à l’article L. 612-1 du code monétaire et financier.

« Art. L. 513-7. – I. – Les représentants légaux, les administrateurs ainsi que les personnels et préposés des associations mentionnées au I de l’article L. 513-3 du présent code sont tenus au secret professionnel dans le cadre des missions mentionnées au même I, dans les conditions et sous les peines prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

« Ce secret ne peut être opposé ni à l’organisme qui tient le registre mentionné au I de l’article L. 512-1 du présent code, ni à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ni à l’autorité judiciaire agissant dans le cadre soit d’une procédure pénale, soit d’une procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’égard d’une personne mentionnée à l’article L. 612-2 du code monétaire et financier. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut obtenir de l’association toute information nécessaire à l’exercice de sa mission.

« II. – Par dérogation au I de l’article L. 612-17 du code monétaire et financier, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut communiquer aux associations mentionnées au I du présent article des informations couvertes par le secret professionnel lorsque ces informations sont utiles à l’accomplissement par les associations des missions mentionnées au I de l’article L. 513-3 ou à l’organisme qui tient le registre mentionné au I de l’article L. 512-1 pour l’accomplissement de ses propres missions.

« Ces renseignements ne peuvent être utilisés par les associations ou par l’organisme précités que pour l’accomplissement de leurs missions et seulement aux fins pour lesquelles ils ont été communiqués. Les informations transmises demeurent couvertes par le secret professionnel.

« Art. L. 513-8. – Les courtiers ou les sociétés de courtage d’assurance ou leurs mandataires informent l’association dont ils sont membres de toute modification des informations les concernant et de tout fait pouvant avoir des conséquences sur leur qualité de membre de l’association. Ils sont tenus d’informer dans les meilleurs délais l’association lorsqu’ils ne respectent pas les conditions ou les engagements auxquels était subordonnée leur adhésion.

« Art. L. 513-9. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions et modalités d’application du présent chapitre. »

II. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le chapitre IX du titre Ier du livre V est complété par une section 5 ainsi rédigée :

« Section 5

« Adhésion et exercice des associations professionnelles des intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement

« Art. L. 519-11. – I. – Aux fins de leur immatriculation au registre mentionné à l’article L. 546-1, les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement mentionnés à l’article L. 519-1 et leurs mandataires adhèrent à une association professionnelle agréée chargée du suivi de l’activité et de l’accompagnement de ses membres. Cette association professionnelle représentative offre à ses membres un service de médiation, vérifie les conditions d’accès et d’exercice de leur activité ainsi que leur respect des exigences professionnelles et organisationnelles et offre un service d’accompagnement et d’observation de l’activité et des pratiques professionnelles, notamment par la collecte de données statistiques. La phrase précédente ne s’applique pas aux conditions d’honorabilité, dont la vérification est assurée par l’organisme qui tient le registre mentionné au I de l’article L. 512-1 du code des assurances.

« Les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement exerçant en France au titre de la libre prestation de services ou de la liberté d’établissement peuvent également adhérer à une association professionnelle agréée mentionnée au présent I.

« II. – L’obligation d’adhérer à une association professionnelle agréée prévue au I du présent article ne s’applique pas aux personnes mentionnées aux 2° et 3° du I de l’article R. 519-4, ni aux mandataires de ces derniers mentionnés au 4° du I du même article R. 519-4, ni aux personnes mentionnées au III dudit article R. 519-4.

« Art. L. 519-12. – La demande d’adhésion à l’association professionnelle agréée donne lieu à une réponse dans un délai maximum de deux mois à compter de la date de réception par l’association d’un dossier complet. Dans le cas où l’association professionnelle agréée refuserait une adhésion, elle motive sa décision dans la réponse. La décision de refus d’adhésion peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve le siège de l’association.

« L’association peut notifier à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution sa décision de refus d’adhésion, ainsi qu’aux autres associations professionnelles mentionnées au I de l’article L. 519-11.

« Art. L. 519-13. – I. – Les associations professionnelles mentionnées au I de l’article L. 519-11 sont agréées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, qui vérifie leur représentativité, la compétence et l’honorabilité de leurs représentants légaux et administrateurs, l’impartialité de leur gouvernance, appréciée au regard de leurs procédures écrites, ainsi que leur aptitude à assurer l’exercice et la permanence de leurs missions au travers de moyens matériels et humains adaptés.

« L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut retirer selon des modalités prévues par décret l’agrément d’une association professionnelle mentionnée au même I lorsque celle-ci ne satisfait plus aux conditions auxquelles était subordonné son agrément.

« II. – Ces associations établissent par écrit et font approuver par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution au moment de leur agrément les règles qu’elles s’engagent à mettre en œuvre pour l’exercice de leurs missions telles que définies à la seconde phrase du premier alinéa du I de l’article L. 519-11 ainsi que les sanctions qu’elles sont susceptibles de prononcer à l’encontre de leurs membres. Elles font également approuver toute modification ultérieure de ces règles.

« Elles peuvent formuler des recommandations à l’intention de leurs membres relatives à la fourniture de conseils, aux pratiques de vente et à la prévention des conflits d’intérêts.

« Elles établissent un rapport annuel sur leurs activités ainsi que sur celles de leurs membres sous une forme agrégée, qu’elles adressent à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

« Art. L. 519-14. – I. – Le retrait de l’adhésion peut être décidé par l’association à la demande de l’intermédiaire en opérations de banques et en services de paiement. Il peut également être décidé d’office par l’association si l’intermédiaire en opérations de banques et en services de paiement ne remplit plus les conditions ou les engagements auxquels était subordonnée son adhésion, s’il n’a pas commencé son activité dans un délai de douze mois à compter de son adhésion, s’il n’exerce plus son activité depuis au moins six mois ou s’il a obtenu l’adhésion par de fausses déclarations ou par tout autre moyen irrégulier.

« Tout retrait de l’adhésion est notifié à l’organisme qui tient le registre mentionné à l’article L. 546-1.

« Lorsqu’il est prononcé d’office, le retrait de l’adhésion est notifié à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et prend effet à l’expiration d’une période dont la durée est déterminée par l’association.

« Lorsque le retrait de l’adhésion est prononcé d’office, l’association peut également décider d’informer les autres associations professionnelles mentionnées au I de l’article L. 519-11 de sa décision.

« La décision de retrait de la qualité de membre peut faire l’objet d’un recours devant le tribunal judiciaire dans le ressort duquel se trouve le siège de l’association.

« II. – L’association professionnelle n’est pas compétente pour sanctionner les manquements de ses membres qui relèvent exclusivement de la compétence de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution telle que prévue à l’article L. 612-1.

« Art. L. 519-15. – I. – Les représentants légaux, les administrateurs ainsi que les personnels et préposés des associations mentionnées au I de l’article L. 519-11 du présent code sont tenus au secret professionnel dans le cadre des missions mentionnées au même I, dans les conditions et sous les peines prévues aux articles 226-13 et 226-14 du code pénal.

« Ce secret ne peut être opposé ni à l’organisme qui tient le registre mentionné au I de l’article L. 546-1 du présent code, ni à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ni à l’autorité judiciaire agissant dans le cadre soit d’une procédure pénale, soit d’une procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’égard d’une personne mentionnée à l’article L. 612-2. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut obtenir de l’association toute information nécessaire à l’exercice de sa mission.

« II. – Par dérogation au I de l’article L. 612-17, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut communiquer aux associations mentionnées au I du présent article des informations couvertes par le secret professionnel lorsque ces informations sont utiles à l’accomplissement par les associations des missions mentionnées au I de l’article L. 519-11 ou à l’organisme qui tient le registre mentionné au I de l’article L. 546-1 pour l’accomplissement de ses propres missions.

« Ces renseignements ne peuvent être utilisés par les associations ou par l’organisme précités que pour l’accomplissement de leurs missions et seulement aux fins pour lesquelles ils ont été communiqués. Les informations transmises demeurent couvertes par le secret professionnel.

« Art. L. 519-16. – Les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement informent l’association dont ils sont membres de toute modification des informations les concernant et de tout fait pouvant avoir des conséquences sur leur qualité de membre de l’association. Ils sont tenus d’informer dans les meilleurs délais l’association lorsqu’ils ne respectent pas les conditions ou les engagements auxquels était subordonnée leur adhésion.

« Art. L. 519-17. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions et modalités d’application de la présente section. » ;

2° Le I de l’article L. 612-2 est ainsi modifié :

a) Après le 13° du A, il est inséré un 14° ainsi rédigé :

« 14° Les associations professionnelles agréées mentionnées au I de l’article L. 519-11. » ;

b) Le B est complété par un 12° ainsi rédigé :

« 12° Les associations professionnelles agréées mentionnées au I de l’article L. 513-3 du code des assurances. » ;

3° L’article L. 745-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 745-7. – I. – Sous réserve des dispositions d’adaptation prévues aux II et III, sont applicables en Nouvelle-Calédonie les articles mentionnés dans la première colonne du tableau ci-après, dans leur rédaction indiquée dans la seconde colonne du même tableau :

 

« 

Articles applicables

Dans leur rédaction résultant de

L. 519-1

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises

L. 519-1-1

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation

L. 519-2

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-3 et L. 519-3-1

la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière

Premier alinéa de l’article L. 519-3-2

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-3-3

la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 précitée

L. 519-3-4

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-4

l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement

L. 519-4-1 et L. 519-4-2

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 précitée

L. 519-5

la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires

L. 519-6

la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation

L. 519-6-1

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 précitée

L. 519-11, à l’exception du second alinéa du I

la loi n° … du … relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

L. 519-12 à L. 519-17

la loi n° … du … relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

L. 571-15

la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière

L. 571-16

l’ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs

« II. – Pour l’application du I :

« 1° Les références au code des assurances sont remplacées par les références aux dispositions équivalentes applicables localement ;

« 2° Les dispositions relatives aux associations professionnelles sont remplacées par les dispositions applicables localement ayant le même effet ;

« 3° Les mots : “registre mentionné au I de l’article L. 546-1” sont remplacés par les mots : “registre mentionné à l’article 1er de la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’assurance”.

« III. – Pour l’application du I :

« 1° À la première phrase du II de l’article L. 519-1, les mots : “ni aux établissements de crédit, aux établissements de monnaie électronique qui fournissent des services de paiement, aux établissements de paiement et aux personnes physiques salariées d’un établissement de crédit, d’un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement ou d’un établissement de paiement, intervenant en libre prestation de services,” sont supprimés ;

« 2° Le premier alinéa de l’article L. 519-1-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« “Les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement peuvent fournir à leurs clients un service de conseil en matière d’opérations relatives à des contrats de crédit immobilier, à l’exclusion des opérations de regroupement de crédit.

« “Constituent des contrats de crédit immobilier pour l’application du présent article les contrats de crédit garantis par une hypothèque, par une autre sûreté comparable ou par un droit lié à un bien immobilier à usage résidentiel et les contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété sur un terrain ou un immeuble existant ou à construire.” ;

« 3° À la fin de l’article L. 519-5, la référence : “L. 353-5” est remplacée par la référence : “L. 353-4” ;

« 4° À la fin du dernier alinéa de l’article L. 519-6, la référence à l’article L. 353-5 est remplacée par la référence aux dispositions équivalentes applicables localement ;

« 5° À la fin du II de l’article L. 519-11, les mots : “, ni aux personnes mentionnées au III dudit article R. 519-4” sont supprimés ;

« 6° Au dernier alinéa du I de l’article L. 519-14, le mot : “judiciaire” est remplacé par les mots : “de première instance” ;

« 7° À l’article L. 519-15, les références aux procédures de liquidation judiciaire sont remplacées par les références aux procédures équivalentes applicables localement. » ;

4° L’article L. 755-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 755-7. – I. – Sous réserve des dispositions d’adaptation prévues aux II et III, sont applicables en Polynésie française les articles mentionnés dans la première colonne du tableau ci-après, dans leur rédaction indiquée dans la seconde colonne du même tableau :

 

« 

Articles applicables

Dans leur rédaction résultant de

L. 519-1

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises

L. 519-1-1

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation

L. 519-2

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-3 et L. 519-3-1

la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière

Premier alinéa de l’article L. 519-3-2

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-3-3

la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 précitée

L. 519-3-4

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-4

l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement

L. 519-4-1 et L. 519-4-2

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 précitée

L. 519-5

la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires

L. 519-6

la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation

L. 519-6-1

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 précitée

L. 519-11, à l’exception du second alinéa du I

la loi n° … du … relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

L. 519-12 à L. 519-17

la loi n° … du … relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

L. 571-15

la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière

L. 571-16

l’ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs

« II. – Pour l’application du I :

« 1° Les références au code des assurances sont remplacées par les références aux dispositions équivalentes applicables localement ;

« 2° Les dispositions relatives aux associations professionnelles sont remplacées par les dispositions applicables localement ayant le même effet ;

« 3° Les mots : “registre mentionné au I de l’article L. 546-1” sont remplacés par les mots : “registre mentionné à l’article 1er de la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’assurance”.

« III. – Pour l’application du I :

« 1° À la première phrase du II de l’article L. 519-1, les mots : “ni aux établissements de crédit, aux établissements de monnaie électronique qui fournissent des services de paiement, aux établissements de paiement et aux personnes physiques salariées d’un établissement de crédit, d’un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement ou d’un établissement de paiement, intervenant en libre prestation de services,” sont supprimés ;

« 2° Le premier alinéa de l’article L. 519-1-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« “Les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement peuvent fournir à leurs clients un service de conseil en matière d’opérations relatives à des contrats de crédit immobilier, à l’exclusion des opérations de regroupement de crédit.

« “Constituent des contrats de crédit immobilier pour l’application du présent article les contrats de crédit garantis par une hypothèque, par une autre sûreté comparable ou par un droit lié à un bien immobilier à usage résidentiel et les contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété sur un terrain ou un immeuble existant ou à construire.” ;

« 3° À l’article L. 519-5, la référence : “L. 353-5” est remplacée par la référence : “L. 353-4” ;

« 4° À la fin du dernier alinéa de l’article L. 519-6, la référence à l’article L. 353-5 est remplacée par la référence aux dispositions équivalentes applicables localement ;

« 5° À la fin du II de l’article L. 519-11, les mots : “, ni aux personnes mentionnées au III dudit article R. 519-4” sont supprimés ;

« 6° Au dernier alinéa du I de l’article L. 519-14, le mot : “judiciaire” est remplacé par les mots : “de première instance” ;

« 7° À l’article L. 519-15, les références aux procédures de liquidation judiciaire sont remplacées par les références aux procédures équivalentes applicables localement. » ;

5° L’article L. 765-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 765-7. – I. – Sous réserve des dispositions d’adaptation prévues aux II et III, sont applicables dans les îles Wallis et Futuna les articles mentionnés dans la première colonne du tableau ci-après, dans leur rédaction indiquée dans la seconde colonne du même tableau :

 

« 

Articles applicables

Dans leur rédaction résultant de

L. 519-1

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises

L. 519-1-1

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 sur les contrats de crédit aux consommateurs relatifs aux biens immobiliers à usage d’habitation

L. 519-2

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-3 et L. 519-3-1

la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière

Premier alinéa de l’article L. 519-3-2

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-3-3

la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 précitée

L. 519-3-4

la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 précitée

L. 519-4

l’ordonnance n° 2013-544 du 27 juin 2013 relative aux établissements de crédit et aux sociétés de financement

L. 519-4-1 et L. 519-4-2

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 précitée

L. 519-5

la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires

L. 519-6

la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation

L. 519-6-1

l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 précitée

L. 519-11, à l’exception du second alinéa du I

la loi n° … du … relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

L. 519-12 à L. 519-17

la loi n° … du … relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement

L. 571-15

la loi n° 2014-1662 du 30 décembre 2014 portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière

L. 571-16

l’ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs

« II. – Pour l’application du I :

« 1° Les dispositions relatives aux associations professionnelles sont remplacées par les dispositions applicables localement ayant le même effet ;

« 2° Les mots : “registre mentionné au I de l’article L. 546-1” sont remplacés par les mots : “registre mentionné à l’article 1er de la loi n° 2005-1564 du 15 décembre 2005 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de l’assurance”.

« III. – Pour l’application du I :

« 1° À la première phrase du II de l’article L. 519-1, les mots : “ni aux établissements de crédit, aux établissements de monnaie électronique qui fournissent des services de paiement, aux établissements de paiement et aux personnes physiques salariées d’un établissement de crédit, d’un établissement de monnaie électronique qui fournit des services de paiement ou d’un établissement de paiement, intervenant en libre prestation de services,” sont supprimés ;

« 2° Le premier alinéa de l’article L. 519-1-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« “Les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement peuvent fournir à leurs clients un service de conseil en matière d’opérations relatives à des contrats de crédit immobilier, à l’exclusion des opérations de regroupement de crédit définies aux articles L. 314-10 et L. 314-13 du code de la consommation.

« “Constituent des contrats de crédit immobilier pour l’application du présent article les contrats de crédit garantis par une hypothèque, par une autre sûreté comparable ou par un droit lié à un bien immobilier à usage résidentiel et les contrats de crédit destinés à permettre l’acquisition ou le maintien de droits de propriété sur un terrain ou un immeuble existant ou à construire.” ;

« 3° À la fin de l’article L. 519-5, la référence : “L. 353-5” est remplacée par la référence : “L. 353-4” ;

« 4° À la fin du dernier alinéa de l’article L. 519-6, la référence à l’article L. 353-5 est remplacée par la référence aux dispositions équivalentes applicables localement ;

« 5° À la fin du II de l’article L. 519-11, les mots : “, ni aux personnes mentionnées au III dudit article R. 519-4” sont supprimés ;

« 6° Au dernier alinéa du I de l’article L. 519-14, le mot : “judiciaire” est remplacé par les mots : “de première instance”. » ;

6° Le I des articles L. 746-2, L. 756-2 et L. 766-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, la référence : « du A » est remplacée par les références : « des A et B » ;

b) Le deuxième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« L’article L. 612-1 est applicable dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2020-1595 du 16 décembre 2020.

« L’article L. 612-2 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la réforme du courtage de l’assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement. »

III. – (Non modifié) Les I et II du présent article entrent en vigueur le 1er avril 2022.

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Au début

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Après l’article L. 112-2-1 du code des assurances, il est inséré un article L. 112-2-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 112-2-2. – I.- Sauf lorsqu’il s’agit de sollicitations intervenant dans le cadre de l’exécution d’un contrat en cours et ayant un rapport avec l’objet de ce contrat, y compris lorsqu’il s’agit de proposer au consommateur des produits ou des services afférents ou complémentaires à l’objet du contrat en cours ou de nature à améliorer ses performances ou sa qualité, lorsqu’un distributeur au sens du III de l’article L. 511-1 contacte par téléphone un souscripteur ou un adhérent éventuel en vue de conclure un contrat d’assurance qui n’entre pas dans le cadre de l’activité commerciale ou professionnelle du souscripteur ou de l’adhérent éventuel :

« 1° Il recueille au début de la conversation, immédiatement après avoir satisfait aux obligations prévues au premier alinéa du 2° de l’article R. 112-4, l’accord préalable du souscripteur ou de l’adhérent éventuel à la poursuite de la communication. À défaut d’accord explicite de ce dernier, le distributeur met fin à l’appel sans délai et s’abstient de le contacter à nouveau.

« Même après avoir recueilli l’accord préalable et explicite du souscripteur ou de l’adhérent éventuel à la poursuite de la communication, le distributeur demeure tenu à tout moment de mettre fin sans délai à l’appel dès lors que le souscripteur ou l’adhérent éventuel manifeste une absence d’intérêt ou son souhait de ne pas donner suite à la proposition commerciale. Dans un tel cas, le distributeur s’abstient de le contacter à nouveau.

« 2° Il s’assure que le souscripteur ou l’adhérent éventuel peut résilier son contrat en cours concomitamment à la prise d’effet du contrat proposé si son offre concerne un risque déjà couvert.

« 3° Il s’assure, avant la conclusion à distance du contrat, de la bonne réception par le souscripteur ou l’adhérent éventuel des documents et informations prévus aux I, III et IV de l’article L. 112-2-1, l’article L. 112-2 et les articles mentionnés au premier alinéa de l’article L. 521-6 du présent code et par le premier alinéa de l’article L. 222-6 du code de la consommation.

« Le distributeur est tenu de respecter un délai minimal de vingt-quatre heures entre la réception par le souscripteur ou l’adhérent éventuel des documents et informations mentionnés au 3° du présent I et tout nouveau contact par téléphone fixé après accord exprès du souscripteur ou de l’adhérent éventuel.

« II. – Le souscripteur ou l’adhérent éventuel ne peut consentir au contrat qu’en le signant. Cette signature ne peut être que manuscrite ou électronique. Elle ne peut intervenir au cours d’un appel téléphonique et moins de vingt-quatre heures après la réception des documents et informations mentionnés au 3° du I.

« Dans tous les cas, un distributeur ne peut signer un contrat pour le compte du souscripteur ou de l’adhérent éventuel.

« III. – À la suite de la signature du contrat, le distributeur informe sans délai le souscripteur ou adhérent, par écrit ou sur tout autre support durable, de son engagement, de la date de conclusion et de prise d’effet du contrat, de son éventuel droit de renonciation et de ses modalités d’exercice, notamment l’adresse à laquelle la notification de la renonciation doit être envoyée ainsi que les modalités d’examen des réclamations que le souscripteur peut formuler au sujet du contrat.

« IV. – Afin de garantir le respect des droits des souscripteurs ou des adhérents éventuels, les distributeurs enregistrent, conservent et garantissent la traçabilité de l’intégralité des communications téléphoniques intervenues avant la conclusion du contrat d’assurance et ce pendant une période de deux années.

« V. – Les infractions aux dispositions du présent article sont constatées et sanctionnées par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution dans les conditions prévues à la section 2 du chapitre unique du titre Ier du livre III.

« Ces infractions constituées par le non-respect par les distributeurs des dispositions relatives au processus de commercialisation, telles que mentionnées aux I, II et III et au premier alinéa du IV du présent article peuvent également être recherchées et constatées par les agents mentionnés aux articles L. 511-3 et L. 511-21 du code de la consommation, dans les conditions prévues à l’article L. 511-6 du même code.

« Les conditions d’application du présent article sont définies en tant que de besoin par décret en Conseil d’État. »

La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Cet amendement, qui a été mentionné lors de la discussion générale, vise à mieux encadrer le démarchage téléphonique afin de protéger les consommateurs : on ne peut plus tolérer – je crois que nous sommes tous d’accord sur ce point – que certains acteurs mènent des campagnes d’appels visant à profiter de la fragilité de nos compatriotes pour leur faire souscrire des garanties inutiles. Ces pratiques sont minoritaires, mais elles sont en réalité un fléau pour tout le monde et nuisent considérablement à la crédibilité du secteur.

La disposition qui vous est proposée ici fait l’objet d’un consensus de place ; elle se base sur l’avis du Comité consultatif du secteur financier adopté en novembre 2019. Concrètement, le Gouvernement propose de renforcer l’information des souscripteurs ou adhérents éventuels et d’interdire explicitement les ventes dites « en un temps ».

Cet amendement vise à préciser les modalités d’information et de recueil de la signature du consommateur, à responsabiliser les acteurs impliqués dans la chaîne de distribution et à conférer aux autorités de contrôle la capacité de s’assurer du plein respect des dispositions auxquelles ces acteurs sont soumis.

Enfin, cet amendement tend à prévoir une obligation de conservation des enregistrements des appels de vente pendant une période de deux années. L’intention du Gouvernement est bien d’agir pour encadrer le démarchage téléphonique, pas la relation quotidienne entre assureurs et assurés ; les échanges liés à des contrats en cours ne sont pas concernés ni les échanges avec des clients professionnels. Ces dispositions s’appliquent en revanche aux nouveaux produits proposés à des particuliers.

M. le président. Le sous-amendement n° 9, présenté par M. J.M. Arnaud, est ainsi libellé :

Amendement n° 2

1° Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 112-2-2. – I. - Lorsqu’un distributeur au sens du III de l’article L. 511-1 contacte par téléphone un souscripteur ou un adhérent éventuel en vue de conclure un contrat d’assurance qui n’entre pas dans le cadre de l’activité commerciale ou professionnelle du souscripteur ou de l’adhérent éventuel, alors que ce dernier n’a pas au préalable sollicité l’appel ou engagé de démarches vis-à-vis du distributeur sur le produit pour lequel il est sollicité :

2° Alinéas 5 et 6

Compléter ces alinéas par les mots :

pour un même objet

3° Alinéa 7

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 2° Il s’assure auprès du souscripteur ou de l’adhérent éventuel que la prise d’effet du nouveau contrat, lorsqu’il concerne un risque déjà couvert, est concomitante à la date de prise d’effet de la résiliation du contrat existant couvrant ce risque.

4° Alinéa 10

Après le mot :

contrat

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

oralement sauf volonté explicite de souscripteur ou de l’adhérent éventuel, manifestée notamment par un comportement actif de ce dernier, la signature du contrat ne peut intervenir moins de vingt-quatre heures après la réception des documents et informations mentionnés au 3° du I.

5° Alinéa 12

Remplacer les mots :

sans délai

par les mots :

dans les meilleurs délais

6° Alinéa 13

Supprimer cet alinéa.

7° Alinéa 15

Supprimer les mots :

et au premier alinéa du IV

8° Alinéa 16

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.

M. Jean-Michel Arnaud. Ce sous-amendement vise à resserrer le champ d’application du dispositif présenté par le Gouvernement. Cela étant, je le retire au profit de celui que va présenter M. Husson dans quelques secondes, qui est très proche.

M. le président. Le sous-amendement n° 9 est retiré.

Le sous-amendement n° 10, présenté par M. Husson, est ainsi libellé :

Amendement n° 2

A. – Alinéa 8

Remplacer les mots :

l’article L. 112-2 et les articles mentionnés au premier alinéa de l’article L. 521-6

par les mots :

aux articles L. 112-2, L. 521-2 à L. 521-4 et L. 522-1 à L. 522-6

B. – Alinéa 9

Remplacer la référence :

présent I

par la référence :

I du présent article

C. – Alinéa 13

Remplacer les mots :

garantir le respect des droits des souscripteurs ou des adhérents éventuels

par les mots :

permettre à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et à la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de contrôler le respect des obligations prévues au présent article

D. – Alinéa 15

Supprimer les mots :

premier alinéa du

E. – Dernier alinéa

Supprimer les mots :

en tant que de besoin

F. – Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé :

II. – Dernier alinéa

Remplacer les mots :

I et II

par le mot :

dispositions

La parole est à M. Jean-François Husson.

M. Jean-François Husson. L’amendement du Gouvernement vise à encadrer le démarchage téléphonique non sollicité réalisé par les distributeurs de produits d’assurances. Son objectif est d’éviter les ventes « en un temps » et de protéger les consommateurs contre certaines pratiques abusives.

Au-delà de quelques modifications rédactionnelles, le sous-amendement n° 10 prévoit deux aménagements importants.

Tout d’abord, il tend à fixer une date d’entrée en vigueur, ce que l’amendement du Gouvernement ne prévoit pas. Par parallélisme des formes avec les autres dispositions de la proposition de loi, dont la date d’entrée en vigueur a été décalée du 1er janvier 2022 au 1er avril 2022, il est proposé cette dernière date.

Ensuite, il a pour objet de restreindre les finalités d’exploitation des enregistrements des appels téléphoniques au contrôle du respect des seules obligations prévues par le dispositif. Le champ d’application prévu par le Gouvernement semble beaucoup trop large. Il est donc proposé de le restreindre.

Pour être complètement transparent avec vous, l’objectif est de trouver une voie de sortie pour la commission mixte paritaire. Surtout, je le dis à l’intention du Gouvernement, il est nécessaire de travailler sur ce sujet avec l’ensemble des parties prenantes, professionnels et usagers, pour faire en sorte que le dispositif soit efficace, opérant et sans lourdeur inutile et qu’il reçoive le soutien de tous. Les situations de démarchage abusif doivent absolument être combattues avec vigueur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur. Je change de rôle. (Sourires.)

L’avis est favorable sur l’amendement du Gouvernement, à la condition, non négociable, que le sous-amendement n° 10, que j’ai présenté à titre personnel, soit adopté.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 10 ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Ce sous-amendement apporte des précisions légistiques et rédactionnelles que le Gouvernement juge fort pertinentes. L’avis est donc favorable.

Pour autant, je souhaite préciser de nouveau que nous préférerions que ce texte entre en vigueur au début de l’année 2022 plutôt qu’au 1er avril.

M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 10.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2, modifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 7, présenté par Mme Dumas, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 4 et 35

1° Deuxièmes phrases

Remplacer les mots :

représentative offre à ses membres un service de médiation, vérifie les conditions d’accès et d’exercice de leur activité ainsi que leur respect des exigences professionnelles et organisationnelles

par les mots :

vérifie le respect des exigences en matière de formation et de développement professionnel continus

2° Dernières phrases

Supprimer ces phrases.

II. – Après les alinéas 4 et 35

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« L’organisme qui tient le registre mentionné au I de l’article L. 512-1 vérifie les conditions d’accès et d’exercice de leur activité ainsi que leur respect des exigences professionnelles et organisationnelles visées, à l’exception de l’obligation de formation continue.

« En outre, l’organisme vérifie qu’un recours effectif à un dispositif de médiation de la consommation est garanti.

La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. Lors de l’examen du texte en commission des finances, plusieurs amendements du rapporteur, Albéric de Montgolfier, ont été adoptés. L’un d’entre eux confie le contrôle du respect des conditions d’honorabilité des courtiers à l’Orias, tant pour les dirigeants que pour les salariés.

En cohérence avec cette disposition, il conviendrait de confier à ce même organisme l’ensemble du contrôle des conditions d’accès et d’exercice d’activités, ainsi que le respect des exigences professionnelles et organisationnelles. À ce jour, l’Orias exerce déjà une partie des missions prévues par la présente proposition de loi. Par conséquent, l’exercice par l’association professionnelle de la vérification des conditions d’accès d’exercice de l’activité des courtiers, ainsi que le respect des exigences professionnelles aboutirait à dédoubler les missions de l’Orias.

Par ailleurs, je souligne que cela représenterait une charge administrative et financière non négligeable pour l’association professionnelle.

Enfin, j’ajoute que l’élargissement des missions de l’Orias nécessite un simple décret pour compléter le dispositif qui existe déjà et qui est prévu aux articles R. 512-1 et suivants du code des assurances.

Pour l’ensemble de ces raisons et parce qu’il vaut toujours mieux faire simple que compliqué, je vous remercie d’apporter votre soutien à cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

II. – Alinéa 35, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. La modification apportée par la commission sur ce point précis tend à réserver à l’Orias l’ensemble des vérifications d’honorabilité érigées par la loi, qu’il s’agisse de l’honorabilité des dirigeants ou de celle des salariés.

La vérification de l’honorabilité des dirigeants est d’ores et déjà une compétence de l’Orias, et le Gouvernement n’entend pas y toucher. En revanche, nous avons la conviction que les associations peuvent aussi accompagner les entreprises de courtage pour les aider à remplir leurs obligations d’honorabilité. Par exemple, elles peuvent aider les dirigeants à collecter les déclarations de leurs salariés, comme le droit l’exige. Le Gouvernement propose donc de revenir au texte antérieur pour permettre cet accompagnement.

M. le président. L’amendement n° 5, présenté par Mme Dumas, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Cette association professionnelle offre à ses membres un service de médiation, vérifie sur la base des déclarations desdits membres les conditions d’accès et d’exercice de leur activité, leur respect des exigences professionnelles mentionnées à l’article L. 511-2, offre un service d’accompagnement et assure une mission d’observation de l’activité et des pratiques professionnelles notamment par la collecte de données statistiques.

II. – Alinéa 35, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Cette association professionnelle offre à ses membres un service de médiation, vérifie sur la base des déclarations desdits membres les conditions d’accès et d’exercice de leur activité, leur respect des exigences professionnelles mentionnées à l’article L. 519-3-3, offre un service d’accompagnement et assure une mission d’observation de l’activité et des pratiques professionnelles notamment par la collecte de données statistiques.

La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. La proposition de rédaction du nouvel article L. 513-3 du code des assurances vise à mettre à la charge des associations professionnelles une obligation de vérification des conditions d’accès et d’exercice de l’activité de ses membres, ainsi que de leur respect des exigences professionnelles.

La rédaction actuelle de la dernière phrase de l’alinéa 4 tend à retenir une interprétation extensive de la notion d’exigence professionnelle, qui engloberait l’ensemble des exigences applicables à la profession, qu’elles soient d’origine législative ou réglementaire. Cela contreviendrait expressément aux dispositions des articles 12, 3 et 10 de la directive sur la distribution d’assurances (DDA), qui autorise les États européens à déléguer à des associations professionnelles le contrôle des conditions d’accès à la profession. La présente proposition de loi s’inscrit d’ailleurs dans cette démarche. Ces mêmes articles interdisent aussi de déléguer tout autre contrôle à des associations professionnelles et les réservent expressément et exclusivement aux autorités nationales compétentes.

Aussi, pour lever toute ambiguïté, qui inscrirait potentiellement le présent texte en violation de la directive sur la distribution d’assurances, il est proposé de compléter l’alinéa comme suggéré afin de cantonner les exigences professionnelles aux seules conditions de capacité professionnelle et de formation continue. Il est également proposé de modifier l’alinéa 35 relatif aux courtiers en opérations de banque et services de paiement, ainsi qu’à leurs mandataires, dans les mêmes termes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur. Je sollicite le retrait de l’amendement n° 7 présenté par notre collègue Catherine Dumas. Pour dire les choses clairement, son adoption réduirait l’utilité des associations professionnelles au bénéfice de l’Orias. La commission s’est opposée au transfert de ces missions à cet organisme, constatant par ailleurs que ce registre n’est pas adapté pour les mettre en œuvre.

De plus, cet amendement aurait pour conséquence de priver les courtiers en assurances et les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement d’une plus-value que nous percevons comme essentielle dans la proposition de loi, à savoir l’accès à un service de médiation. En commission, nous avons donc opté pour une solution de compromis, en précisant les missions des associations et en transférant à l’Orias le seul contrôle de l’honorabilité pour les dirigeants comme pour les salariés.

Je suis naturellement défavorable à l’amendement n° 3 du Gouvernement, puisqu’il revient sur un apport substantiel de notre commission des finances. Je veux rappeler les deux motifs qui justifient notre position.

D’abord, l’Orias vérifie automatiquement les conditions d’honorabilité des dirigeants grâce à l’accès au bulletin n° 2 du casier judiciaire. Puisque la procédure existe, comme je l’ai dit pour le précédent amendement, autant l’utiliser.

Ensuite, cette vérification aurait l’inconvénient d’être une charge administrative supplémentaire pour les associations professionnelles, avec une fiabilité moins élevée, puisque celles-ci n’ont pas directement accès au casier judiciaire. Essayons de faire simple et efficace pour chaque outil ou institutions. Quand ces pratiques sont déjà prévues, autant se cantonner au strict nécessaire.

Enfin, je demande le retrait de l’amendement n° 5, qui a déjà été rejeté par la commission. Son adoption par notre assemblée reviendrait à restreindre de façon excessive les missions des associations professionnelles agréées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Pour ne pas être redondante, je dirai juste que je partage l’avis de M. le rapporteur sur les amendements nos 7 et 5. En revanche, je ne partage évidemment pas sa position sur l’amendement n° 3.

M. le président. Madame Dumas, les amendements nos 7 et 5 sont-ils maintenus ?

Mme Catherine Dumas. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 7 et 5 sont retirés.

Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mme Dumas, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Remplacer les mots :

formuler les recommandations

par les mots :

promouvoir les bonnes pratiques professionnelles

La parole est à Mme Catherine Dumas.

Mme Catherine Dumas. En matière de commercialisation et de protection de la clientèle, l’ACPR contrôle le respect des dispositions législatives et réglementaires, ainsi que des codes homologués par le ministre chargé de l’économie.

Toujours en matière de pratique de vente et de protection de la clientèle, le législateur a confié à l’ACPR la mission de veiller au respect des codes de conduite approuvés par elle, à la demande d’une association professionnelle, ainsi que des bonnes pratiques de la profession que cet organisme constate ou recommande.

Ainsi, il appartient réglementairement à l’ACPR, et à elle seule, de dégager des bonnes pratiques à l’intention des professionnels soumis à son contrôle en matière de commercialisation et de protection de la clientèle.

Il vous est donc proposé de modifier l’alinéa 17 en ce sens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur. Je propose de nouveau à notre collègue de retirer son amendement.

Les associations professionnelles peuvent formuler des recommandations en matière de pratiques commerciales. Cela ne remet pas en cause le fait que l’ACPR reste la seule autorité de contrôle dans ce domaine, ce qui est pour moi le plus important. Les associations professionnelles et leurs règles sont agréées et approuvées par l’ACPR : à mon sens, il n’y a pas lieu de changer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Mme Catherine Dumas. Je retire l’amendement !

M. le président. L’amendement n° 4 est retiré.

Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 1 rectifié est présenté par MM. J.M. Arnaud et Levi, Mme Vérien et MM. Henno, Canevet, Louault, Chauvet et P. Martin.

L’amendement n° 6 est présenté par Mme Dumas.

L’amendement n° 8 rectifié est présenté par MM. Segouin et Cuypers, Mme Thomas, MM. Brisson, Burgoa, Pellevat et Chevrollier, Mme Garriaud-Maylam, M. Rietmann, Mme Deromedi, M. Saury, Mme Raimond-Pavero, MM. Duplomb, J.M. Boyer et Piednoir, Mme Estrosi Sassone et MM. Laménie et Bouchet.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 116

Remplacer la date :

1er avril 2022

par la date :

1er janvier 2023

La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.

M. Jean-Michel Arnaud. Le présent amendement vise à réduire les charges, notamment juridiques et financières, qui seraient supportées par les dirigeants des cabinets de courtage si la réforme était mise en œuvre.

Quant aux associations professionnelles chargées de cette mise en œuvre, il est essentiel qu’elles aient le temps, avant même l’entrée en vigueur du dispositif, de s’organiser non seulement sur le plan matériel, notamment par la création d’un système informatique dédié qui, à ce jour, n’existe pas sur le marché, mais également sur le plan des ressources humaines, par des recrutements importants et de formation, ou sur le plan financier.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous proposons une modification de l’alinéa 116 pour substituer à la date du 1er avril 2022 la date du 1er janvier 2023, soit neuf mois de délai supplémentaire pour une bonne intégration des nouveaux dispositifs de la réforme par les acteurs concernés.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, pour présenter l’amendement n° 6.

Mme Catherine Dumas. La proposition de loi alourdit les obligations des cabinets de courtage en mettant à leur charge une condition supplémentaire d’adhésion à une association professionnelle.

La crise sanitaire liée à la pandémie s’est transformée en une crise sociale et économique qui affecte, à des degrés d’intensité variable, l’ensemble des secteurs d’activité. Elle se traduira immanquablement par une montée sensible du taux de chômage et une augmentation du nombre de défaillances d’entreprises. Alors que leurs chiffres d’affaires de 2020 ont été relativement préservés en raison des particularités de notre cycle de production, les courtiers vont entrer dans une crise à leur tour et y demeurer jusqu’à ce que leurs clients parviennent à se redresser.

La mise en place de cette réforme, dans le contexte actuel, va venir accroître la pression juridique et économique sur les cabinets de courtage. Quant aux associations professionnelles qui sont chargées de mettre en œuvre cette réforme, il est essentiel qu’elles aient le temps, avant même l’entrée en vigueur du dispositif, de s’organiser tant sur le plan matériel, notamment par la création d’un système informatique dédié qui, à ce jour, n’existe pas, que sur les plans humain et financier.

Pour l’ensemble de ces raisons, cet amendement vise à préserver la pérennité du secteur de courtage, compte tenu du contexte actuel, et à laisser le temps aux différents acteurs de se préparer à une mise en application efficiente des mesures issues de cette réforme.

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié.

M. Vincent Segouin. Je veux juste ajouter un point.

Pour bien comprendre la crise qui va arriver chez les courtiers, il faut savoir que la majorité des contrats sont calculés par rapport au chiffre d’affaires de l’année n-1. En 2020, il n’y a donc pas eu d’impact ; c’est seulement en 2021 que les effets de la crise se feront sentir, d’autant qu’il y aura des faillites de sociétés et, partant, des résiliations. C’est pourquoi nous aurions souhaité que la réforme s’applique au 1er janvier 2023, et non au 1er avril 2022.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur. Je pense avoir déjà indiqué l’avis de la commission.

Je rappelle que cette réforme est annoncée depuis 2018. Le Gouvernement avait prévu son entrée en vigueur le 1er janvier 2021. L’Assemblée nationale, dans une forme de grande sagesse – c’est plus rare à l’Assemblée nationale qu’au Sénat –, a opté pour le 1er avril 2022 en raison de la crise sanitaire. Cette date présente un autre avantage : le renouvellement de l’Orias se faisant au 1er janvier de chaque année, on évite les erreurs d’aiguillage et le mélange des genres.

Le principe, comme je l’ai dit au sujet du démarchage abusif, est de retenir le 1er avril 2022. Madame la secrétaire d’État, j’ai entendu votre petit désaccord, mais je pense que le Gouvernement gagnerait à écouter la voix des deux assemblées et à retenir cette date. Il ne faut pas remettre la réforme aux calendes grecques. À mon sens, le délai proposé est raisonnable.

Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis sera défavorable sur l’entrée en vigueur de la réforme au 1er janvier 2023.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Olivia Gregoire, secrétaire dÉtat. Nous sommes défavorables, comme vous pouvez l’imaginer, à une entrée en vigueur de la réforme en 2023, mais le Gouvernement, qui gagne toujours à écouter les parlementaires, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au Sénat, a entendu l’appel du rapporteur, qui a vaincu notre désaccord. Effectivement, il paraît sage de retenir la date du 1er avril 2022 proposée à la fois par l’Assemblée nationale et par le Sénat. Cela nous semble être le bon timing.

M. le président. Monsieur Arnaud, l’amendement n° 1 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Michel Arnaud. Non, je le retire.

Mme Catherine Dumas. Je retire également mon amendement !

M. Vincent Segouin. Moi aussi !

M. le président. Les amendements nos 1 rectifié, 6 et 8 rectifié sont retirés.

Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.

Je rappelle que le vote sur l’article unique vaudra vote sur l’ensemble de la proposition de loi.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’article unique de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quinze, est reprise à vingt et une heures, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article unique (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la réforme du courtage de l'assurance et du courtage en opérations de banque et en services de paiement
 

8

 
Dossier législatif : projet de loi portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique
Discussion générale (suite)

Renouvellement des conseils départementaux et régionaux

Adoption définitive des conclusions d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique (texte de la commission n° 364, rapport n° 363).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique
Article 1er

M. Philippe Bas, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons à la fin d’un parcours qui nous a permis de trouver un accord entre députés et sénateurs, réunis au sein de la commission mixte paritaire. Je veux m’en réjouir.

Cet accord repose sur des fondements solides. Vous avez permis que nous l’obtenions, madame la ministre, en annonçant fermement les dates des 13 et 20 juin, qui ne figurent pas dans le projet de loi, pour l’organisation des élections départementales et régionales. C’était important pour nous, de même qu’il était important d’avoir la garantie qu’il serait demandé au conseil scientifique, le 1er avril prochain, de se prononcer non pas sur l’opportunité de tenir ou pas les élections départementales et régionales en juin, mais seulement sur les conditions dans lesquelles la sécurité du scrutin pourrait être améliorée, ce qui fera l’objet d’un rapport du Gouvernement au Parlement.

Nous sommes heureux que vous ayez accepté le système de la double procuration et les dispositions que nous avions prises sur la prise en charge des matériels et équipements nécessaires à la sécurité du scrutin de juin prochain.

Nous avons également adopté des dispositions qui concernent les machines à voter.

Les machines à voter existent depuis 1969. Ce n’est pas que ce soit un instrument archaïque, mais, à la différence du vote électronique, il a déjà été beaucoup éprouvé dans les soixante-six villes qui y ont recours, à tel point, d’ailleurs, que le Conseil constitutionnel, en 2007, dans les observations qu’il a rendu publiques sur le scrutin présidentiel de cette même année, s’est inquiété des sources d’insécurité dans la mesure du vote que pouvait comporter l’utilisation de ces machines. Aussi, dès 2008, un moratoire a été décidé pour qu’il n’y ait pas davantage de villes qui les utilisent. De fait, elles restent aujourd’hui, je le répète, au nombre de soixante-six. Depuis 2008, ces communes ont beaucoup hésité à investir pour les remplacer et assurer leur maintenance dans des conditions satisfaisantes, ce qui ajoute encore à la préoccupation qu’avait pu exprimer, à propos de l’élection présidentielle de 2007, le Conseil constitutionnel.

Sur l’initiative de la majorité à l’Assemblée nationale, un amendement a été adopté dans notre texte, que les sénateurs membres de la commission mixte paritaire ont accepté. Que prévoit-il ? Un rapport doit être remis par le Gouvernement au Parlement dans les six mois pour envisager les conditions du recours aux machines à voter. C’est dire si votre majorité à l’Assemblée nationale considère, comme nous-mêmes, d’ailleurs, que l’utilisation de ces dispositifs ne va pas de soi et que l’alerte donnée, voilà maintenant plus de dix ans, par le Conseil constitutionnel est pleinement justifiée.

Dès lors, madame la ministre, vous avez certainement anticipé la suite de mon propos, ce qui ne me dispense pas de le tenir. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ce matin, nous avons été stupéfaits de découvrir un amendement déposé par le Gouvernement sur un autre texte, d’ailleurs assez technique, à savoir celui qui est relatif à l’élection du Président de la République. Cet amendement, sans attendre le rapport inscrit dans le texte dont nous délibérons ce soir, tend à prévoir que, l’année prochaine, non pas pour une petite élection, mais pour l’élection présidentielle, mère de toutes les élections, on puisse, d’une part, étendre le recours aux machines à voter et, d’autre part, le faire alors que la campagne présidentielle ne serait pas achevée, c’est-à-dire, avant le dimanche du premier tour, un jour de la semaine que le Gouvernement pourrait choisir par la voie d’un décret. (Marques dindignation sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. Gilbert Bouchet. Ça alors !

M. Philippe Bas, rapporteur. Je dois dire que cette méthode de travail devant le Parlement est choquante. La commission des lois débattra demain de ce texte, sur le rapport de M. Le Rudulier, mais il a déjà été voté par l’Assemblée nationale. Il fera donc l’objet d’une commission mixte paritaire sans que l’Assemblée nationale ait débattu de cette mesure, qui serait ainsi adoptée dans la plus totale improvisation.

M. Philippe Bas, rapporteur. J’y insiste, cette façon de faire a beaucoup choqué sur toutes les travées du Sénat. Cette absence de respect des règles minimales du débat parlementaire, de la délibération, de la concertation, de la réflexion, a beaucoup surpris. Nous en arrivons à nous demander comment on peut envisager un seul instant de recourir à une expérimentation aussi hasardeuse lors d’un vote qui engage à ce point l’avenir de la Nation.

M. Philippe Bas, rapporteur. J’ajoute que le dispositif technique est pour le moins surprenant ; il est également lacunaire, et il questionne la constitutionnalité de cette initiative.

Il inquiète en raison des difficultés de conservation des votes, qui seront stockés pendant plusieurs jours, et ce dans une centaine de grandes villes. Oui, cela concerne non pas quelques citoyens français, mais des millions de nos concitoyens !

On s’interroge sur les risques de double vote entre la machine à voter, par exemple le mercredi, et le vote du dimanche, ainsi que sur l’impossibilité d’un recomptage manuel dans les bureaux de vote. On s’interroge aussi sur la sincérité d’un vote, qui ne pourrait pas, par hypothèse, être modifié entre ce mercredi ou ce jeudi et le dimanche, alors que la campagne continuerait et que des événements majeurs pourraient advenir, des événements susceptibles de modifier le sens du vote pour les électeurs qui, avant la fin de la campagne, auraient bénéficié de cette facilité.

Quelles peuvent bien être les motivations réelles d’un tel amendement ? (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.) Est-ce que, véritablement, la motivation consistant à permettre aux familles de partir en week-end et de voter quand même est satisfaisante pour la démocratie, s’agissant d’une élection qui a toujours donné lieu à une très forte participation, et ce à juste titre ?

Madame la ministre, alors que notre texte comporte la remise d’un rapport sur les machines à voter pour dans six mois, il est impossible que, ce soir, nous n’ayons pas ensemble un échange à cet égard. J’ajoute que, à mes yeux, mais également aux yeux de beaucoup de nos collègues, y compris ceux de votre majorité à l’Assemblée nationale, lesquels se sont exprimés sur ce sujet en fin d’après-midi, il est impossible que vous mainteniez cet amendement. Je veux croire qu’il sera retiré. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de lintérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je vais me concentrer sur le projet de loi qui nous réunit ce soir. J’espère que vous ne m’en voudrez pas.

La situation sanitaire, vous le savez, questionne les modalités d’exercice de notre démocratie. Nos débats, dans votre hémicycle comme à l’Assemblée nationale, ont permis de compléter utilement le texte proposé par le Gouvernement. Nous donnons ainsi à nos concitoyens des garanties qui leur permettront de choisir en toute sécurité leurs représentants dans les conseils départementaux et les conseils régionaux.

Je remercie le Parlement de la qualité des travaux qui ont ainsi été réalisés. Les débats, comme le travail réalisé dans les commissions et en commission mixte paritaire, ont permis d’aboutir à un texte opérationnel et à la hauteur de l’enjeu démocratique que représentent ces deux élections importantes.

La commission mixte paritaire a finalisé un texte qui tient compte des apports des deux chambres. Plusieurs mesures, auxquelles le Parlement tenait tout particulièrement, vont ainsi concourir à la bonne tenue du double scrutin de juin prochain.

Il s’agit tout d’abord de bien éclairer le Parlement par un rapport, qui sera remis au plus tard le 1er avril prochain par le Gouvernement. Il portera sur la situation sanitaire et les conditions dans lesquelles le scrutin pourra se tenir. Je rappelle, à cet égard, qu’il n’y a pas de clause de revoyure automatique dans le projet de loi. Cette question a été soulevée plusieurs fois dans les débats : s’il fallait décaler de nouveau le scrutin, ce que, je le répète, le Gouvernement ne souhaite pas, il faudrait que le Parlement vote une nouvelle loi.

Nous avons également été attentifs aux demandes exprimées par le Sénat et l’Assemblée nationale sur la possibilité pour les citoyens qui souhaiteront voter par procuration de pouvoir en confier deux à un même mandataire. Le Gouvernement s’est rangé à l’avis du Parlement sur ce point, dès lors que cette mesure reste limitée aux seuls scrutins locaux de juin prochain et motivée par le contexte épidémique que nous connaissons.

Le Gouvernement a aussi soutenu la mesure de l’Assemblée nationale sur les numéros verts. Sera donc autorisé pour ce double scrutin l’accès des électeurs à un numéro vert gratuit, aux frais du candidat, qui pourra par ce biais, s’il le souhaite, répondre à leurs questions.

De plus, plusieurs mesures souhaitées par le Parlement permettront de faciliter la participation à la vie démocratique des candidats. Je pense, par exemple, à la publication d’un guide du mandataire financier, ou encore au report de la date limite de dépôt des comptes de campagne.

Enfin, le Gouvernement s’est rangé à l’avis des deux chambres sur la date de fin de mandat pour les conseillers régionaux qui seront élus en juin prochain. Cette fin de mandat sera donc fixée à mars 2028, et non à décembre 2027, comme nous le souhaitions initialement. Votre proposition a, il est vrai, l’avantage de rétablir une échéance connue pour les conseils régionaux, mars étant le mois au cours duquel aurait dû se dérouler ce scrutin.

Le texte issu de la commission paritaire a aussi tenu compte des informations que nous avons données au cours des débats parlementaires.

Sur la question très attendue des dates de ce double scrutin, je rappelle la position claire, je l’espère, que j’ai tenue, à la demande de l’ensemble des parlementaires, devant l’Assemblée nationale la semaine dernière : les élections départementales et régionales se tiendront bien les 13 et 20 juin prochain. Ce sont les dates que le Sénat demandait. Dès la promulgation de la loi que nous examinons aujourd’hui en lecture définitive, le texte de convocation des électeurs sera signé et publié avec ces dates.

Cette visibilité est nécessaire pour les électeurs, les candidats, comme pour les élus qui siègent actuellement dans les départements et les régions. L’engagement que nous avons pris sera tenu.

Le deuxième engagement pris par le Gouvernement est de faciliter l’organisation de ce double scrutin, dans le contexte particulier que nous connaissons en ce moment.

Lors du débat de ce texte au Sénat, nombre d’entre vous ont insisté sur la fourniture d’équipements de sécurité. L’État l’avait déjà fait pour les élections municipales ; il est bien prévu qu’il fournisse aux communes – à ses frais, bien sûr – tous les équipements nécessaires pour organiser le double scrutin dans les conditions sanitaires les plus satisfaisantes possible.

Je vous avais également indiqué que plusieurs mesures réglementaires étaient prévues pour mutualiser certaines fonctions dans les bureaux de vote. Je crois que nous avons ainsi pu répondre à une attente forte exprimée par le Parlement, qui s’était fait le relais de l’inquiétude des communes qui organisent les bureaux de vote et doivent être en mesure d’anticiper le déroulement du vote.

Permettez-moi aussi, à cette occasion, de remercier tous les élus et les électeurs qui se mobilisent à chaque scrutin pour tenir ces bureaux de vote et qui participent au dépouillement. Vous savez mieux que personne que c’est un rôle essentiel pour la démocratie.

Au-delà de ce double scrutin, les débats qui ont eu lieu depuis l’automne sur les textes électoraux expriment à mon sens le souhait d’une modernisation des modalités du vote. À l’Assemblée nationale comme au Sénat, de nombreux amendements ont été déposés sur les questions relatives au vote électronique, aux machines à voter, ou encore au vote anticipé ; plusieurs appels ont été lancés par des parlementaires à cette occasion.

Certaines des pistes qui ont été évoquées se heurtent à des principes constitutionnels ; d’autres propositions supposeraient des évolutions techniques qui ne nous semblent pas forcément opérantes aujourd’hui, parce qu’elles nécessiteraient d’avoir des garanties suffisantes, notamment quant à l’identité de la personne qui vote. Néanmoins, le Gouvernement a entendu cet appel. Nous travaillons à répondre à cette attente de modalités nouvelles d’expression du suffrage sans mettre en risque la validité d’un scrutin.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, les élections des conseils départementaux et des conseils régionaux pourront donc se dérouler les 13 et 20 juin prochain dans les meilleures conditions possible au vu de l’épidémie que nous connaissons. Ce rendez-vous démocratique majeur sera ainsi tenu. Encore une fois, nos échanges, nos débats et votre travail ont permis de compléter utilement le dispositif proposé ; je vous en remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite, au nom de mon groupe, mais aussi, plus largement, de toutes celles et de tous ceux qui vont faire vivre la démocratie à l’occasion de la tenue de ces élections dans les semaines qui viennent, me féliciter de l’évolution de ce débat. Quand le texte est arrivé au Sénat, il n’était encore question que d’une éventualité ; beaucoup d’interrogations demeuraient quant à la capacité de tenir ces élections au mois de juin prochain. Aujourd’hui, une volonté unanimement partagée est manifeste : nous portons tous l’ambition de permettre la tenue de ces élections les 13 et 20 juin prochain, soit dans un peu moins de dix-sept semaines.

Ce délai nous impose évidemment de travailler sur un certain nombre de points pour sécuriser le jour du vote et la capacité des citoyens à voter, mais également, comme je l’avais exprimé au cours de notre débat il y a quelques semaines, pour sécuriser la campagne électorale et l’accès de tous les candidats au temps nécessaire et indispensable pour que nos concitoyennes et nos concitoyens puissent voter en toute connaissance de cause.

Je veux également m’associer aux propos de notre rapporteur. Bien évidemment, madame la ministre, comme vous l’avez exprimé avec un peu d’ironie et, peut-être, de facilité, cela ne concerne pas ce texte. Vous n’avez donc pas souhaité y répondre, mais nous aurons l’occasion d’y revenir jeudi. En tout cas, je partage la réaction de notre rapporteur : surprise, au départ, mais aussi colère, en fin de compte. Nous avons fortement rappelé combien il faut faire attention en matière d’évolution des processus électoraux : il convient toujours, à l’évidence, de favoriser le vote, mais sans donner le sentiment que, au nom d’une telle facilitation, on s’arrange avec la règle. Dans un pays qui traverse tout de même une très importante crise de confiance politique, il ne faut pas donner l’impression que l’on agit à certains moments comme cela nous arrange.

Mme Marie Mercier. Très bien !

Mme Cécile Cukierman. Je ne dis pas que c’est forcément l’objet de votre amendement, mais c’est bien ainsi qu’il est ressenti. Qui plus est, l’amendement que vous avez déposé, qui tend tout de même à bouleverser le processus électoral, porte sur l’élection du Président de la République, qui constitue selon notre Constitution, quoi que nous en pensions par ailleurs, l’élection suprême ! (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, UC et Les Républicains.)

M. Philippe Bas, rapporteur. Bien sûr !

Mme Cécile Cukierman. Eh bien, je vous le dis : faisons très attention à la manière dont cela peut être perçu ! In fine, ce n’est pas simplement la majorité présidentielle, mais l’ensemble des forces politiques qui pourraient en payer les conséquences.

Je voudrais, dans le reste du temps qui m’est imparti, soulever deux autres points.

En premier lieu, des inquiétudes nous remontent très fortement quant à l’organisation dans nos communes de deux scrutins le même jour. On évoque la possibilité de simplifier le déroulement du vote, en offrant notamment un seul isoloir pour les deux scrutins. Il faut examiner comment on peut faciliter, dans les plus petites communes, la tenue du vote de la manière la plus sécurisée possible, tant du point de vue sanitaire qu’au regard du processus électoral.

En second lieu, je veux dire mon regret à la lecture du mail que nous avons reçu de France Télévisions à l’issue de la commission mixte paritaire.

Une proposition avait été faite au Sénat pour répondre à la situation particulière que nous connaissons, où les temps offerts aux différents candidats pour leur campagne seront inévitablement inégalitaires, ce qui offre une prime au sortant. Cette mesure, qui exprimait une volonté d’égalité dans les derniers jours de campagne, n’a pas été retenue, mais France Télévisions doit vraiment s’interroger sur sa capacité à faire vivre le débat démocratique. Notre objectif n’était pas de lui imposer une obligation supplémentaire, mais bien de la renforcer dans son rôle d’information et d’éducation civique et politique, dont nous avons besoin pour faire vivre collectivement la démocratie dans notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. le rapporteur, Mme Françoise Gatel et M. Olivier Rietmann applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud de Belenet. (Mme Françoise Gatel applaudit.)

M. Arnaud de Belenet. Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, le présent texte, qui a été présenté en conseil des ministres le 21 décembre 2020 et que nous examinons aujourd’hui dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire, met en œuvre la recommandation principale du rapport Debré, à savoir le report au mois de juin 2021 du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique. C’est l’essentiel : la crise sanitaire que nous traversons le commande, et il aurait été dommageable pour le Parlement que nous ne trouvions pas de consensus sur ce projet de loi.

Initialement, ce texte comportait quatre articles ; aujourd’hui, il en comporte quatorze. Le Sénat a très largement contribué à son enrichissement. Je pense particulièrement à la proposition sénatoriale d’un nouveau calendrier électoral permettant de revenir au droit commun plus rapidement, dès mars 2028, à la possibilité d’une double procuration, si chère à notre rapporteur Philippe Bas, à la prise en charge par l’État des équipements assurant la sécurité sanitaire de nos concitoyens lors de ces élections, à l’utilisation d’une même machine à voter pour les deux scrutins – je ne reviendrai pas sur l’utilisation d’autres machines à voter pour d’autres scrutins… –, au délai supplémentaire octroyé aux candidats pour déposer leur compte de campagne, ou encore à l’autorisation donnée aux départements et aux régions d’adopter leur budget primitif pour 2021 et leur compte administratif pour 2020 jusqu’au 31 juillet 2021.

Saluons la sagesse des deux rapporteurs et particulièrement celle de Philippe Bas, rassuré par l’engagement du Gouvernement de renoncer à l’inscription d’une date butoir dans la rédaction de l’article 1er de ce projet de loi.

Concernant le fameux rapport prévu à l’article 2, la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire aboutit à un consensus plus que satisfaisant.

Je me réjouis que l’amendement déposé par Alain Richard tendant à allonger à dix-neuf jours, au lieu de douze, la durée de la campagne officielle ait été repris par l’Assemblée nationale, puis par la commission mixte paritaire.

J’avais évoqué, en première lecture, les difficultés matérielles que pourraient rencontrer les radios publiques et France Télévisions pour la diffusion des clips de campagne pour les élections régionales. Il me faut saluer l’article 6 bis, dont la rédaction finale élargit aux élections régionales la proposition sénatoriale de diffuser des programmes pédagogiques sur le rôle et le fonctionnement des assemblées départementales.

Je vous confirme donc, mes chers collègues, que le groupe Union Centriste salue l’esprit de compromis qui a permis l’adoption rapide et nécessaire de ce texte. Bien évidemment, il le soutiendra. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI. – Mmes Catherine Di Folco et Guylène Pantel applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche. (M. Olivier Jacquin applaudit.)

M. Éric Kerrouche. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, alors que le sujet de ce projet de loi paraît périphérique, on y aborde de fait un élément déterminant du fonctionnement de la démocratie : la périodicité des élections. Il s’avère qu’un consensus a été trouvé en commission mixte paritaire pour accepter que ces élections se tiennent au mois de juin ; c’était important.

Comme le rappelle Yves Mény dans son dernier ouvrage, la périodicité est la règle de la démocratie : « La démocratie possède un trait qui n’appartient pratiquement qu’à elle : le rapport au temps. Le pouvoir que le peuple concède à ses dirigeants ne l’est que pro tempore. La démocratie offre un double mécanisme protecteur au peuple souverain : éviter qu’il ne soit dépossédé de sa faculté de rester maître des horloges et garantir périodiquement des élections. »

C’est ce que nous faisons, car il y a eu un consensus politique pour faire en sorte que ces élections puissent se tenir au mois de juin, comme le préconisait le rapport Debré. Pour autant, c’est la version du Gouvernement et de l’Assemblée nationale qui a prévalu : les dates exactes des 13 et 20 juin ne sont pas inscrites dans ce texte, quand bien même ces dates sont systématiquement réaffirmées par le Gouvernement. Pourquoi alors ne pas les avoir inscrites dans le texte ?

Nous avons encore quelques doutes du fait, notamment, du périmètre retenu pour le rapport du conseil scientifique, doutes renforcés par la prolongation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin et par le fait qu’il est précisé dans le texte que le conseil scientifique prendra en compte la notion de « risque sanitaire ». Cela seul ouvre une petite porte qui peut nous amener à douter.

Ce texte procède à un report pratiquement sec des élections, à droit constant. Quelques éléments ont déjà été développés : la mise en place d’un numéro d’appel gratuit des candidats pour les électeurs, dont la portée ne sera sans doute pas très importante ; l’augmentation de 20 % du plafond des dépenses de campagne, compte tenu de l’allongement de la période de prise en compte des dépenses électorales dans les comptes de campagne ; l’allongement d’une semaine de la durée de campagne officielle et son passage à trois semaines ; une communication sur le rôle et le fonctionnement des conseils départementaux et régionaux, au détriment d’un mécanisme que nous aurions souhaité plus ambitieux – j’y reviendrai.

Les doubles procurations ont été reconduites. Ce système a été maintes fois critiqué, car il est inégalitaire socialement et dans son utilisation. Après avoir voulu supprimer cette disposition, l’Assemblée nationale y est finalement revenue, mais en a retiré la possibilité de déterritorialisation.

Ont également été maintenus les articles 8 et 9, adoptés par le Sénat, qui étendent jusqu’au 31 juillet 2021 la faculté pour les régions et les départements de voter le budget primitif et le compte administratif ; ce sera utile pour certaines collectivités.

C’est à peu près tout, avec la mise en place de la proposition portée par Jean-Pierre Sueur d’obliger les instituts de sondage à communiquer leurs marges d’erreur.

Ce texte génère forcément des regrets. Qu’il le reconnaisse ou non, le Gouvernement connaît depuis un an des difficultés avec le droit électoral. On constate un refus presque systématique d’adapter notre droit électoral à la période particulière que nous traversons. Il y a quelques heures encore, on aurait pu faire le même reproche au projet de loi organique relatif à l’élection du Président de la République, mais cela a changé brusquement : je reviendrai sur les nouvelles dispositions arrivées par effraction !

Tout se passe comme si l’on refusait de réellement penser les échéances et la nécessité de les adapter. D’une certaine façon, les élections municipales ont été le péché originel : des hésitations, aucune volonté d’adaptation et l’attente d’un retour à la normale dont on savait pourtant qu’il ne serait pas rapide.

On ne prévoit ici ni vote par correspondance ni vote anticipé, alors que le Gouvernement y réfléchissait déjà, manifestement. En l’espèce, la cerise est l’article 4 ter, qui demande qu’un rapport sur le recours aux machines à voter soit remis au plus tard le 1er octobre 2021 ; si j’ai bien compris, cette disposition sera caduque avant même d’avoir servi.

Pour conclure, je rappellerai que le Portugal, la Catalogne ou encore le Kosovo ont récemment tenu des élections. Il n’y a aucune raison de ne pas en tenir, en tout cas aucune raison sanitaire, au vu des adaptations qui ont pu être mises en œuvre dans de multiples pays. C’est d’autant plus saisissant que l’histoire de notre droit de vote et des modes de scrutin est bien l’histoire de l’adaptation : c’est la lutte contre l’arbitraire social, la façon dont on a encadré celui-ci de sorte que le droit électoral soit de plus en plus efficace. Depuis un an, tout cela manque, alors même que nous traversons une période tout à fait particulière qui aurait justifié de telles évolutions. Ce blocage est assez étonnant, alors même que de multiples exemples d’adaptation existent ailleurs. Certes, nous ne sommes pas forcément les meilleurs, mais la question se pose : pourquoi ne va-t-on pas plus loin ?

Alors, nous voterons forcément en faveur de ce texte, parce que nous voulions que les élections aient lieu en juin, mais nous le voterons avec un regret, celui de ce report sec, qui ne sert pas la cause de notre démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, en tant que sénateur non inscrit, je suis particulièrement attaché à ce que notre indépendance par rapport aux partis politiques soit respectée et notamment à ce que puisse exister, dans le nuancier politique, la catégorie « divers ». Il devrait être impossible pour le préfet de décider arbitrairement d’attribuer telle ou telle étiquette à tel ou tel candidat.

J’avais déposé deux amendements sur ce sujet lors de l’examen en première lecture de ce texte. J’avais été un peu surpris que notre rapporteur m’ait rétorqué que le problème avait déjà été largement réglé : « Le terme “divers” doit désormais être utilisé pour tous les candidats qui n’ont pas d’attache politique. » Mme le ministre avait ajouté ceci : « Nous considérons également que cette question a déjà été débattue et tranchée. » Seulement, je n’avais pas ce jour-là sous la main la fameuse circulaire dont on dit qu’elle a tout réglé ; je n’ai donc pas pu répondre avec des éléments concrets.

Je profite des trois minutes dont je dispose aujourd’hui pour citer cette circulaire ministérielle du 3 février 2020 : « La nuance, quant à elle, est attribuée de manière discrétionnaire par vos services… » – ceux du préfet s’entend – « … à partir des grilles annexées à la présente circulaire. Il est tout à fait possible qu’elle soit différente de l’étiquette déclarée par le candidat. »

On n’a donc strictement rien changé ! C’est un énorme mensonge que de dire que l’affaire a été réglée : le préfet a toujours la possibilité d’attribuer une nuance contre la volonté d’un candidat ou d’un élu. Cette attribution arbitraire est extrêmement choquante pour des gens qui ont choisi d’être candidats ou, une fois élus, de siéger en tant que non inscrit.

Le pire est que l’on prétend que tout est réglé par la rubrique « divers », alors que la même circulaire indique : « Si les candidats ne revendiquent aucune étiquette particulière et… » – la condition qui suit est soulignée ! – « … seulement s’il est avéré qu’ils ne sont rattachables à aucune sensibilité politique précise, vous leur attribuerez la nuance “divers”. » C’est donc le préfet qui décide que tel ou tel candidat ou élu ne peut être rattaché à rien et qu’il convient donc de lui mettre l’étiquette « divers ». Ce n’est pas la personne qui décide de son choix, mais le préfet et l’administration !

Finalement, quand on veut noyer son chien, on l’accuse de la rage ! C’est bien ce qui a été fait avec mes amendements. On s’est moqué du monde,…

Mme la présidente. Il faut conclure, monsieur Masson !

M. Jean Louis Masson. … on s’est moqué de moi, on s’est moqué de nos concitoyens ! Je tenais à le dire, car c’est extrêmement regrettable.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les élections régionales et départementales étaient prévues au mois de mars prochain. Ces élections locales sont une composante essentielle de la démocratie. Or la gravité du contexte sanitaire a balayé toutes nos certitudes. La persistance de l’épidémie a conduit le Gouvernement à s’interroger sur la faisabilité de l’organisation de ces scrutins.

Le projet de loi portant report du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique a pour objet principal de prévoir le report de ces scrutins de mars à juin 2021. Je souhaite rappeler l’importance de ces élections.

Les élus qui s’y engagent permettent de faire vivre nos collectivités. Il me faut saluer ces femmes et ces hommes qui soutiennent l’entretien de nos routes, la rénovation d’un collège ou d’un lycée, ces femmes et ces hommes qui coordonnent des plans d’aide sociale à l’enfance ou aux personnes âgées, ces femmes et ces hommes qui accompagnent hôpitaux, Ehpad et entreprises.

Je me réjouis donc que la commission mixte paritaire soit parvenue à une rédaction commune de l’ensemble des dispositions restant en discussion, car le report de ces scrutins constitue une décision sensible et exceptionnelle, directement et exclusivement liée au contexte pandémique que nous traversons. Je me félicite de l’esprit d’écoute et de dialogue constructif qui a prévalu.

Le projet de loi, qui comportait initialement quatre articles, a été enrichi au Sénat de plusieurs modifications et ajouts ; je suis heureux qu’un grand nombre de nos apports aient été maintenus. En effet, l’Assemblée nationale en a accepté la majorité. Je voudrais citer l’échéance fixée à mars 2028 des prochains mandats, le recours à la double procuration, ou encore l’extension du délai de dépôt des comptes de campagne. Je pense aussi à la mention spécifique des marges d’erreur dans les sondages publiés, ou encore à la mise en place d’une campagne de communication audiovisuelle institutionnelle prévue par l’article 6 bis, campagne que l’Assemblée nationale a d’ailleurs étendue aux élections départementales.

Un esprit consensuel a permis d’aboutir au maintien des articles 8 et 9, adoptés par le Sénat, qui étendent jusqu’au 31 juillet 2021 la faculté pour les régions et les départements de voter leur budget primitif et leur compte administratif.

Je suis ravi de toutes les dispositions prévues dans le projet de loi pour assurer la protection des votants, et je me réjouis que l’État fournisse lui-même aux communes, à ses frais, les équipements adaptés permettant d’assurer la sécurité sanitaire du scrutin. À cet égard, je fais confiance aux maires et à leurs équipes pour organiser au mieux ces élections, dans le respect des gestes barrières.

Madame la ministre, chers collègues, les incertitudes demeurent fortes en raison de l’émergence de différents variants, qui affectent la rapidité des contaminations, et du risque de saturation des hôpitaux. Néanmoins, notre pays est parvenu à tenir des scrutins l’an dernier. Malgré les graves difficultés sanitaires, notre démocratie tient le cap. Notre groupe votera donc ce texte. (M. Alain Richard applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guy Benarroche. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, devant l’incompréhension qui s’est exprimée face à sa gestion des temps démocratiques depuis le report des élections municipales de l’an dernier, l’exécutif a cherché à anticiper les difficultés possibles. Il a donc fait appel à Jean-Louis Debré, qui a remis le 13 novembre 2020 un rapport au Premier ministre sur les modalités d’organisation et le report de la date des élections régionales et départementales.

Nul besoin de rappeler combien l’incompréhension et l’incertitude des parlementaires face à des décisions unilatérales et tardives, basées sur les données fournies par un conseil instauré et choisi par l’exécutif et rendues publiques selon un calendrier aléatoire, ont pu laisser des traces.

Ce texte exprime dans son article 1er l’opinion unanime des scientifiques et des formations politiques sur l’impossibilité de maintenir un scrutin en mars et le consensus formé en faveur d’un report en juin 2021 plutôt qu’à l’automne, sachant que les scientifiques interrogés pour le rapport Debré estimaient que cette saison était plus propice à une reprise de l’épidémie, sans parler du faible impact d’une campagne menée pendant les mois d’été, ou du télescopage avec la préparation budgétaire de ces collectivités.

Je note le maintien par la commission mixte paritaire dans l’article 1er bis d’un apport de notre commission, à savoir les dispositions déjà prises pour le deuxième tour des élections municipales de 2020 permettant une double procuration pour un mandataire. À titre personnel, je suis très réservé sur cette double procuration. Les procurations, pratiquées de longue date, nous sont plus familières que d’autres modes de scrutin à distance, mais elles restent peu sûres et ne garantissent pas la sincérité du vote.

Mon incrédulité s’est encore accrue, de même que mes regrets, quand j’ai constaté que, tout en conservant la double procuration, la commission mixte paritaire avait en revanche supprimé deux points majeurs du texte sénatorial.

Ont d’abord été supprimées les procurations familiales, qui permettent à un citoyen d’aller voter pour ses parents même s’il n’est pas inscrit dans la même commune ; leur suppression me semble résulter d’une méconnaissance des territoires et des dynamiques familiales. Cet apport récent traduisait dans les faits le rite républicain d’accompagner ses proches, souvent fragiles, pour voter.

La possibilité pour les citoyens de faire appel à des OPJ pour établir leur procuration en dehors des mairies et commissariats a également été supprimée. Le but de cette disposition essentielle était de permettre à chaque citoyen qui ne peut comparaître devant les OPJ d’obtenir que les autorités compétentes se déplacent à cet effet.

Notre groupe s’interroge également sur la mutualisation des machines à voter pour les deux élections et surtout sur l’ouverture par l’article 4 ter de la possibilité de développement de l’usage de ces machines à voter. Je ne reviendrai pas sur l’amendement déposé par le Gouvernement sur le projet de loi organique relatif à l’élection présidentielle ; nous en reparlerons jeudi.

Venons-en à l’analyse de la situation sanitaire par le comité scientifique. En plus de rendre public sans délai ce rapport, le Sénat, suivi par l’Assemblée nationale, a souhaité rappeler que notre interlocuteur doit rester le Gouvernement, qui nous remettra lui-même un rapport à partir de l’avis des scientifiques. Ce rapport devra nous indiquer comment sécuriser la mise en œuvre des élections, y compris pour la campagne, qui pourrait être mise à mal par le prolongement de l’état d’urgence sanitaire, qui a servi de base à des décrets limitant les rassemblements, réunions ou activités sur la voie publique à six personnes, décrets qui seront toujours en vigueur.

Notre groupe se félicite de ce que la commission mixte paritaire ait conservé l’article 6 bis prévoyant une campagne d’information audiovisuelle sur les élections régionales et départementales.

Restent beaucoup de questions sans réponse. Qu’envisagez-vous, madame la ministre, si une seule région est dans une situation sanitaire critique, ce que peut laisser présager la montée des variants dangereux dans le Grand Est ? Quelle décision privilégieriez-vous, et selon quels critères, si dans l’ensemble d’une région un seul département présente des caractéristiques épidémiologiques inquiétantes ?

Pour toutes ces raisons, même si le consensus d’un vote en juin nous convient, du fait de toutes nos réserves sur l’évolution de la situation sanitaire, sur la réalité d’un nécessaire dialogue entre l’exécutif et l’ensemble des mouvements politiques et sur l’existence possible d’une vraie campagne électorale, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Richard. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. Alain Richard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte dont nous débattons ce soir représente un aboutissement. Nous le saluons, car il va rencontrer, me semble-t-il, une approbation très large, en conclusion du débat sur le changement de dates des élections départementales et régionales.

Cette conclusion restera sans écho : malheureusement, c’est la loi du genre, notre système de communication et d’information, trop instantané, se polarise sur les éléments de polémique ou de débat superficiel qui marquent la présentation initiale d’un texte ; une fois que le problème évoqué au début est levé et que l’on aboutit à un ensemble de bonnes solutions, ce qui me semble être le cas dans le présent texte, plus personne n’en parle. Heureusement, notre rapporteur a trouvé un nouvel élément permettant de remettre un peu de sel dans notre débat (M. Julien Bargeton sesclaffe.), en évoquant une autre disposition, dont nous discuterons sans doute beaucoup plus calmement dans les prochains jours ; de la sorte, il y aura quand même quelques vibrations !

Je veux simplement souligner que ce texte remplit son objectif ; il va même un peu au-delà. On y clarifie les dates de vote et celles des renouvellements ultérieurs ; on y crée les conditions nécessaires pour que le rapport des instances sanitaires éclaire à partir d’avril le Gouvernement et le Parlement sur les conditions du vote. Les procurations sont facilitées, la protection des lieux de vote est prévue.

Pour répondre aux demandes des uns et des autres, et pour essayer de parer les difficultés de la campagne et les problèmes de déroulement du vote qui peuvent survenir dans les bureaux de vote au vu du contexte particulier, plusieurs dispositions utiles ont été adoptées, grâce à un bon dialogue entre le Gouvernement et les deux chambres du Parlement : l’adaptation de la durée de la campagne, la modification du délai de dépôt du compte de campagne et des délais de candidature, ou encore la remise en activité des machines à voter et leur adaptation au double scrutin.

Sur l’audiovisuel, comment dire ?… Quelle surprise que France 3 soulève des objections pour diffuser les clips de campagne ! Nous savons depuis juste quarante ans qu’elle a horreur de cela, qu’elle considère que c’est une perte d’audience, mais aussi de ressources pour la créativité de la chaîne. Comme prévu, elle nous a expliqué que c’était carrément impossible… Malgré tout – il faut le saluer –, des débats seront organisés.

Cela étant, dans une situation où les moyens de campagnes affirmatifs pour chaque liste de candidats de faire valoir son message et ses propositions aux citoyens, le débat, alors qu’il tourne forcément à la contradiction et à la polarisation, n’est pas tout à fait un moyen de remplacement de la possibilité de défendre ses idées sur un mode positif. Il faudra cependant se contenter de cela.

Nous pouvons dire modestement que nous avons accompli un travail législatif correct, avec un effort de réponse aux défis que nous rencontrions pour l’organisation de ces élections. On peut tout de même en tirer une conclusion positive, qui n’intéressera peut-être personne : nous sommes à tout le moins capables de compréhension entre futurs concurrents dans ces élections. C’est un signe encourageant de crédibilité démocratique. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Guylène Pantel. (Applaudissements sur des travées du groupe RDSE.)

Mme Guylène Pantel. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le consensus auquel a abouti la commission mixte paritaire, s’il a de quoi nous satisfaire, ne doit pas nous éloigner de notre but : garantir la sécurité de nos concitoyens qui participeront à ces scrutins. Je suis pleinement favorable à la tenue de ces élections. Je regrette donc que certains aient pu évoquer leur report plus par intérêt politique que par réelle considération pour la santé publique.

Les exemples dans les pays voisins nous le prouvent : lorsque les gestes barrières sont respectés, les électeurs n’encourent que très peu de risques à venir voter. Ce qui me préoccupe le plus est de savoir si nos concitoyens se déplaceront les 13 et 20 juin prochain. Ne nous voilons pas la face : peu d’entre eux savent que des élections vont se tenir en juin. Nous risquons, hélas ! de battre des records d’abstention au vu de ce qui s’est déjà produit lors des municipales de 2020. À l’improvisation du premier tour avait succédé une organisation plus forte du second, plus sécurisante pour les agents électoraux et les assesseurs, qui sont en première ligne lors des opérations de dépouillement.

S’agissant du présent texte, les membres du groupe du RDSE restent favorables à l’augmentation des plafonds de campagne, au dépôt différé des comptes de campagne ou encore aux doubles procurations. Ils saluent également le fait que le texte validé par la commission mixte paritaire prévoie la diffusion sur les chaînes du service public de programmes institutionnels visant à expliquer le rôle et le fonctionnement des conseils devant être renouvelés. De telles dispositions avaient notamment été introduites par notre collègue Maryse Carrère.

L’ensemble de ces éléments constitue une première étape, mais je crains que cela ne soit pas suffisant, tant les préoccupations de nos concitoyens résident aujourd’hui ailleurs. Nombre d’entre eux sont préoccupés par la sortie de crise. C’est donc à nous, politiques, qu’il revient d’y répondre. Il serait trop facile de faire peser l’abstention sur les seuls électeurs… Par les idées que nous défendons à travers nos programmes pour ces élections, nous avons le pouvoir et le devoir d’élargir le champ des possibles et d’offrir des solutions à ceux qui sont frappés par la crise.

Vous l’aurez compris, au regard de ces remarques, le groupe du RDSE votera les conclusions de la commission mixte paritaire, de la même façon qu’il avait approuvé le texte lors de son examen en première lecture. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe RDPI. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Canayer. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Agnès Canayer. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, « une démocratie doit être une fraternité ; sinon, c’est une imposture », déclarait Antoine de Saint-Exupéry. Ces mots justes nous renvoient directement à une notion fondamentale que nous oublions parfois à l’heure de la crise sanitaire, celle de la participation.

La participation et la confiance sont les maillons essentiels de la démocratie. C’est pourquoi nous nous félicitons de l’adoption en commission mixte paritaire du projet de loi visant à reporter les élections départementales et régionales. À l’heure où la pandémie de la covid-19 fait ressortir les maux les plus profonds de notre société et génère un mal-être sans précédent, nous nous devons de réaffirmer au sein de cet hémicycle, garant des libertés, les valeurs de notre démocratie représentative.

Devant cette situation, il faut bien le reconnaître, le report était essentiel pour permettre la tenue d’une campagne dans des conditions propres à conserver le pluralisme et le débat entre tous les candidats à ces élections. Ces dernières ont parfois été reléguées au rang d’élections mineures, alors qu’elles sont si importantes pour nos collectivités locales.

La covid-19 bouleverse nos institutions. Le durcissement des mesures de couvre-feu, puis de confinement, a rapidement fait apparaître qu’il serait difficile d’observer un retour à la normale d’ici au mois de mars prochain et, a fortiori, d’organiser une campagne électorale. Réunies à la mi-février, les assemblées ont donc pris acte de ce report aussi logique qu’inévitable. Telle est en tout cas la position exprimée par le Sénat et réaffirmée en commission mixte paritaire, ce qui revient à acquiescer au principe de ce report de trois mois. Oui, l’épidémie bouleverse nos institutions, nos libertés publiques et nos échéances institutionnelles !

Nous avons largement débattu et amendé ce projet de loi, et mon groupe se félicite de l’accord de nos deux chambres, qui confirme la volonté d’une démocratie apaisée. Nous sommes réalistes face aux impératifs sanitaires et calendaires. Cela ne signifie pas pour autant que nous acceptons de mettre durablement entre parenthèses le principe constitutionnel de périodicité des scrutins. Ces élections doivent avoir lieu – et auront lieu –, non seulement pour l’équilibre de nos institutions, mais aussi pour garantir que la parole de nos concitoyens soit entendue et que notre démocratie perdure.

Comme l’a dit notre rapporteur Philippe Bas, « la démocratie ne saurait être confinée ». Reporter les élections départementales et régionales au mois de juin 2021 doit permettre de préparer leur bon déroulement. Cela n’a rien d’impossible, loin de là : nombre de nos voisins européens organisent ou ont organisé des scrutins cette année. Nous avons pu l’observer en Catalogne, pas plus tard que le week-end dernier. Tout aussi près de chez nous, l’Allemagne organisera plusieurs élections régionales et nationales à partir du mois de mars… C’est pourquoi les dates préconisées par le Sénat des 13 et 20 juin 2021 pour l’organisation des scrutins nous satisfont. Nous pouvons collectivement nous féliciter que le Gouvernement les ait retenues.

Reste que ce report imposé par la situation est loin d’être anodin et ne doit pas constituer le premier pas d’une démarche de procrastination, par laquelle on verrait les élections être systématiquement repoussées au moindre rebond de l’épidémie. Il nous faut vivre avec ce virus, et, si la situation perdurait, nous devrions nous adapter tant dans notre manière de faire campagne que dans notre processus de vote.

Ce texte adopté en commission paritaire permettra le recours aux doubles procurations et garantira la fourniture par l’État d’équipements de protection adaptés dans les bureaux de vote. Ces mesures nous sont familières, en ce qu’elles avaient déjà été proposées par le Sénat, l’an dernier, en marge des discussions sur le deuxième tour des élections municipales. De plus, notre chambre haute s’est assurée de la tenue d’un double scrutin pour éviter une fragmentation de la participation et garantir à nos administrés simplicité et sécurité sanitaire.

Malheureusement, certaines de nos propositions ont été écartées, notamment celles qui étaient relatives à la déterritorialisation des procurations. C’est regrettable, car elles auraient pu utilement contribuer à restaurer la confiance des électeurs et lutter contre l’abstention, redoutable en période de crise sanitaire.

Après plus d’un an de crise et de sacrifices, les Français méritent de renouer avec leurs droits de participation à la chose publique – au-delà d’un droit, c’est une nécessité.

D’autres apports du Sénat continuent de figurer dans le projet de loi et procèdent à des ajustements bienvenus du déroulement des scrutins et du fonctionnement des collectivités. C’est par exemple le cas de l’adaptation du calendrier budgétaire des régions et des départements, intégrée par les amendements de notre collègue Catherine Di Folco, qui permet, là encore, d’ajuster nos institutions à la crise actuelle.

L’adaptation et la métamorphose de la démocratie doivent également passer par la prise en considération des nouveaux moyens électoraux, au bénéfice de nos électeurs. En tant qu’élue du Havre, qui recourt aux machines à voter depuis 2005, j’ai moi-même souhaité en sécuriser l’utilisation pour ce double scrutin départemental et régional. Ce n’est pas une première, puisque des tests ont été réalisés dès 2008 pour des scrutins municipal et départemental… Je me félicite de ce que cet amendement ait été repris par l’Assemblée nationale.

Avec une efficacité qui n’est plus à prouver et habilitées à recevoir un double scrutin, les machines à voter permettent de voter dans un seul et unique bureau, en minimisant les risques de contamination. Elles diminuent aussi le nombre de personnes engagées dans la gestion des bureaux de vote – point qui n’est pas négligeable en période de crise sanitaire –, permettant ainsi d’envisager une organisation simplifiée et adaptée aux plus petites communes.

À l’heure où la démocratie cherche à se réinventer, le débat autour du moratoire des machines à voter prendra une place prépondérante dans les discussions que nous tiendrons à l’avenir. Le regain d’intérêt que ces machines suscitent ces derniers jours rompt totalement avec la frilosité gouvernementale manifestée depuis 2007, date à laquelle le moratoire a été décidé, sans que personne ait pu démontrer véritablement les risques liés à leur utilisation.

Espérons que les communes qui le souhaitent pourront rapidement se doter de machines nouvelle génération, une fois le moratoire levé. Espérons aussi que les discussions qui auront lieu jeudi prochain ne soient pas l’arbre qui cache la forêt de l’utilisation régulière et constante des machines à voter dans de nombreuses communes…

Quoi qu’il en soit, le projet de loi, tel qu’il ressort des travaux de la commission mixte paritaire, nous semble satisfaisant. Notre groupe votera donc en sa faveur, dans le seul but de montrer que, face à la crise, la démocratie fait bloc. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat examinant après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

projet de loi portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de corse, de guyane et de martinique

Discussion générale (suite)
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Article 1er bis

Article 1er

I. – Compte tenu des risques sanitaires liés à l’épidémie de covid-19, les premier et second tours du prochain renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux, de l’Assemblée de Corse et des assemblées de Guyane et de Martinique ont lieu en juin 2021. Les mandats en cours sont prolongés en conséquence.

II. – Le mandat des conseillers départementaux, des conseillers régionaux, des membres de l’Assemblée de Corse et des conseillers aux assemblées de Guyane et de Martinique élus en juin 2021 prend fin en mars 2028.

Article 1er
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Article 2

Article 1er bis

I. – Compte tenu des risques sanitaires liés à l’épidémie de covid-19, le présent article s’applique aux élections mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi.

II. – Par dérogation à l’article L. 73 du code électoral, chaque mandataire peut disposer de deux procurations, y compris lorsque ces procurations sont établies en France.

Si cette limite n’est pas respectée, les procurations qui ont été dressées les premières sont les seules valables. La ou les autres procurations sont nulles de plein droit.

III et IV. – (Supprimés)

V. – Au sein du bureau de vote, des équipements de protection adaptés sont mis à la disposition des électeurs qui n’en disposent pas et des personnes participant à l’organisation ou au déroulement du scrutin.

Les dépenses résultant du présent V sont à la charge de l’État.

Article 1er bis
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Article 2 bis

Article 2

Au plus tard le 1er avril 2021, le Gouvernement remet au Parlement, au vu d’une analyse du comité de scientifiques mentionné à l’article L. 3131-19 du code de la santé publique, un rapport sur l’état de l’épidémie de covid-19, sur les risques sanitaires à prendre en compte et sur les adaptations nécessaires à la tenue des scrutins et des campagnes électorales les précédant.

Ce rapport et l’analyse du comité de scientifiques sont rendus publics sans délai.

Article 2
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Article 4

Article 2 bis

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques publie un guide du candidat et du mandataire actualisé et spécifique aux élections mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi en tenant compte de leur condition d’organisation eu égard à la situation sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 et des dispositions de la présente loi.

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Article 2 bis
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Article 4 bis A

Article 4

Pour les élections mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi :

1° La période pendant laquelle s’appliquent les interdictions prévues au troisième alinéa de l’article L. 51 et à l’article L. 52-1 du code électoral, qui commence le 1er septembre 2020, est prorogée jusqu’à la date du tour de scrutin où chaque élection est acquise ;

1° bis L’article L. 50-1 du même code n’est pas applicable ;

2° La période prévue à l’article L. 52-4 dudit code pendant laquelle le mandataire recueille les fonds destinés au financement de la campagne et règle les dépenses en vue de l’élection, qui commence le 1er septembre 2020, est prorogée jusqu’au dépôt du compte de campagne du scrutin concerné ;

3° Les plafonds des dépenses prévus à l’article L. 52-11 du même code sont majorés de 20 %.

Article 4
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Article 4 bis B

Article 4 bis A

Pour les élections mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi :

1° Par dérogation à l’article L. 47 A du code électoral, la campagne électorale pour le renouvellement des conseils départementaux est ouverte à partir du troisième lundi qui précède le premier tour du scrutin ;

2° Par dérogation à l’article L. 353 du même code, la campagne électorale pour le renouvellement des conseils régionaux est ouverte à partir du troisième lundi qui précède le premier tour du scrutin ;

3° Par dérogation à l’article L. 375 dudit code, la campagne électorale pour le premier tour de scrutin de l’élection des conseillers de l’Assemblée de Corse est ouverte à partir du troisième lundi qui précède celui-ci ;

4° Par dérogation à l’article L. 558-25 du même code, la campagne électorale pour le premier tour de scrutin de l’élection des conseillers aux assemblées de Guyane et de Martinique est ouverte à partir du troisième lundi qui précède celui-ci.

Article 4 bis A
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Article 4 bis

Article 4 bis B

Pour les élections régionales et les élections de l’Assemblée de Corse et des assemblées de Guyane et de Martinique mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi :

1° Par dérogation à l’article L. 350 du code électoral, les déclarations de candidature pour le premier tour sont déposées au plus tard le cinquième lundi qui précède le jour du scrutin, à midi ;

2° Par dérogation à l’article L. 558-22 du même code, les déclarations de candidature pour le premier tour sont déposées au plus tard le cinquième lundi qui précède le jour du scrutin, à midi.

Article 4 bis B
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Article 4 ter

Article 4 bis

Pour les élections mentionnées au I de l’article 1er, une même machine à voter peut être utilisée pour les élections régionales et pour les élections départementales.

Dans ce cas, le bureau de vote est commun aux deux scrutins. Le président du bureau de vote s’assure publiquement, avant le commencement des scrutins, que la machine à voter fonctionne normalement et que tous les compteurs sont à la graduation zéro pour chacun des scrutins.

Article 4 bis
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Article 5

Article 4 ter

Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2021, un rapport sur la possibilité de recourir aux machines à voter pour les communes qui le souhaitent, dans la perspective des prochaines échéances électorales. Ce rapport précise les conditions dans lesquelles les communes souhaitant recourir à ce dispositif pourront le faire.

Article 4 ter
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Article 6

Article 5

Pour les élections mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi, la date limite mentionnée au II de l’article L. 52-12 du code électoral est fixée au 17 septembre 2021 à 18 heures.

Pour les élections régionales et les élections de l’Assemblée de Corse et des assemblées de Guyane et de Martinique mentionnées au I de l’article 1er de la présente loi, le délai de deux mois prévu au premier alinéa de l’article L. 118-2 du code électoral est porté à trois mois à compter de la date limite fixée au premier alinéa du présent article.

Article 5
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Article 6 bis

Article 6

(Supprimé)

Article 6
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Article 8

Article 6 bis

I. – Pour les élections mentionnées au I de l’article 1er, des programmes du service public de la communication audiovisuelle sont consacrés à expliquer le rôle et le fonctionnement des conseils départementaux, des conseils régionaux, de l’Assemblée de Corse et des assemblées de Guyane et de Martinique ainsi que les modalités et les dates des scrutins.

II. – Au premier tour, les programmes sont diffusés à partir du troisième lundi qui précède le scrutin, jusqu’à la veille du scrutin à zéro heure.

III. – Au second tour, les programmes sont diffusés à partir du lundi suivant le premier tour, jusqu’à la veille du scrutin à zéro heure.

IV. – Le Conseil supérieur de l’audiovisuel fixe les conditions de production, de programmation et de diffusion des programmes, après consultation des présidents des sociétés nationales de programme.

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Article 6 bis
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Article 9

Article 8

I. – Au titre de l’exercice 2021, par dérogation à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1612-2 du code général des collectivités territoriales, le budget de la région ou du département est adopté au plus tard le 31 juillet 2021. Toutefois, lorsque les informations indispensables à l’établissement du budget ne lui ont pas été communiquées avant le 15 juillet 2021, l’organe délibérant dispose de quinze jours à compter de la date de communication pour l’arrêter.

II. – Par dérogation aux troisième et quatrième alinéas de l’article L. 1612-1 du code général des collectivités territoriales, jusqu’à l’adoption du budget pour l’exercice 2021, le président de la région ou du département peut, sur autorisation de l’organe délibérant, engager, liquider et mandater les dépenses d’investissement, dans la limite des sept douzièmes des crédits ouverts au budget de l’exercice précédent, non compris les crédits afférents au remboursement de la dette.

Article 8
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 9

Par dérogation à la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 1612-12 du code général des collectivités territoriales, le vote de l’organe délibérant de la région ou du département sur l’arrêté des comptes au titre de l’année 2020 peut intervenir jusqu’au 31 juillet 2021.

Mme la présidente. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 9
Dossier législatif : projet de loi portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté définitivement.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique
 

9

 
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs
Discussion générale (suite)

Code de la justice pénale des mineurs

Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2019-250 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs (texte de la commission n° 342, rapport n° 341).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs
Article 1er bis A

Mme Agnès Canayer, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, tout engagement génère des compromis. C’est le propre même de notre système bicaméral, qui impose la conciliation des points de vue, sans renier ses convictions, pour aboutir à l’adoption de réformes conformes à l’intérêt général. C’est dans cet esprit que le Sénat a abordé l’examen du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs.

Je me félicite de ce que, grâce à nos échanges avec le rapporteur de l’Assemblée nationale, Jean Terlier, et avec M. le garde des sceaux, nous ayons pu parvenir à un accord en commission mixte paritaire qui entérine des avancées attendues dans la lutte contre la délinquance des mineurs. En effet, la réforme de l’ordonnance du 2 février 1945 était devenue urgente. Les signaux de son épuisement sont nombreux, à commencer par des délais de jugement des mineurs délinquants trop longs, dix-neuf mois en moyenne – des mois qui durent des siècles quand on a 17 ans… Cette lenteur ne permet plus à la justice d’apporter une réponse pénale efficace aux mineurs, souvent devenus majeurs lors de leur jugement. Le taux d’incarcération en détention provisoire de plus de 80 % des mineurs emprisonnés prouve, là aussi, la faillite de notre système pénal.

Mais urgence ne veut pas dire précipitation. Certes, la réforme de la procédure pénale des mineurs est un sujet mûrement réfléchi qui a mis du temps à se réaliser. Dès 2008, le rapport Varinard proposait au garde des sceaux de l’époque l’introduction de la césure. Depuis lors, pendant dix ans, de nombreux rapports parlementaires ont alimenté la réflexion sur la lutte contre la délinquance des mineurs, tels que celui, réalisé par nos anciens collègues Catherine Troendlé et Michel Amiel, qui était relatif à la réinsertion des mineurs incarcérés.

La réforme s’est accélérée en novembre 2018, à l’occasion de l’examen du projet de loi de programmation de la justice, lors duquel l’adoption d’un amendement autorisa le Gouvernement à procéder à la réforme du droit pénal applicable aux mineurs par voie d’ordonnance. Un an plus tard, l’ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs était publiée ; je vous propose désormais de la ratifier.

La modification de la procédure pénale applicable aux mineurs est une réforme attendue par l’ensemble des acteurs de la justice des mineurs – magistrats spécialisés, avocats, éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse, greffiers… –, mais elle engage aussi la transformation de leurs pratiques professionnelles, ce qui génère de nombreuses craintes. C’est pourquoi cette réforme d’ampleur doit entrer en vigueur dans les meilleures conditions possible, sans précipitation.

Nous nous félicitons que l’Assemblée nationale et le Gouvernement aient accepté de s’en remettre à la sagesse du Sénat, qui, d’emblée, a proposé l’entrée en vigueur de ce texte, non pas au 31 mars 2021, comme cela était initialement prévu, mais au 30 septembre de la même année. La crise de la covid-19 et la grève des avocats en 2020 ont considérablement bouleversé le fonctionnement des juridictions, notamment de celles qui sont spécialisées dans la justice des mineurs. Nombre d’entre elles n’ont pas pu résorber suffisamment le stock d’affaires en cours de manière à pouvoir assimiler, à compter du 31 mars prochain, une nouvelle réforme dans des conditions satisfaisantes. En outre, nous espérons que le report de son entrée en vigueur au 30 septembre permettra que les logiciels informatiques dédiés soient mis à jour.

Ce report voulu par le Sénat doit servir la réforme du nouveau code de la justice pénale des mineurs, car nous sommes persuadés que les nouveaux outils juridiques permettront de mieux répondre à l’évolution de la délinquance des mineurs. C’est pourquoi le Sénat a, dans sa grande majorité, considéré que la césure, qui est au cœur de la réforme en ce qu’elle allie une audience de culpabilité, un temps éducatif et une audience de sanction, permettra non seulement d’accélérer la procédure, mais surtout de favoriser sa compréhension par le jeune qui en fait l’objet. L’efficacité de la réponse pénale réside dans la réactivité et la pédagogie.

Les sénateurs ont aussi considéré que la réforme devait aller au bout des principes cardinaux de la justice pénale des mineurs, tels qu’issus de l’ordonnance de 1945 et repris dans celle de 2019, s’agissant notamment de l’âge du discernement. Si celui-ci fait débat, nous pensons que l’âge pivot de 13 ans est conforme au droit positif français, et nous nous réjouissons que l’introduction de la définition du discernement dans la partie législative du code pénal des mineurs ait été reprise par les députés ; elle guidera le juge dans son appréciation.

En revanche, nous regrettons que le principe de spécialisation des juridictions pour les mineurs ne soit pas appliqué dans son ensemble. Dès lors, le recours au juge des libertés et de la détention (JLD), même habilité, pour la mise en détention du mineur avant l’audience de culpabilité, ne nous paraît pas totalement garantir le principe de spécialisation. De même, le maintien de la compétence du tribunal de police pour juger les mineurs auteurs de contraventions des quatre premières classes demeure une entorse au principe de spécialisation du juge des enfants, garant d’une justice plus éducative. Cependant, nous entendons l’argument du Gouvernement sur les difficultés qu’engendrerait un transfert supplémentaire de contentieux dans les cabinets des juges des enfants, alors même qu’ils doivent mettre en œuvre une réforme venant modifier leurs pratiques.

La réussite de la réforme dépendra des moyens humains et matériels, notamment informatiques, qui seront affectés aux juridictions des mineurs. Elle dépendra surtout de la fluidité et de l’agilité de la nouvelle procédure, pour mieux répondre à la délinquance des mineurs. Cela imposera un renforcement des liens entre magistrats spécialisés et éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse, afin qu’aucun temps de latence entre les différentes étapes de la procédure ne vienne allonger le temps judiciaire et que la continuité éducative soit pleinement assurée.

À cette fin, le Sénat a adopté plusieurs amendements, repris dans le texte de la commission mixte paritaire, ayant pour objet la numérisation du dossier unique de personnalité, l’obligation de fixer la date de mise en œuvre de la prise en charge éducative par la protection judiciaire de la jeunesse à l’audience de culpabilité et la possibilité de convoquer les parents par tous moyens afin d’éviter des reports d’audience pour de simples raisons formelles.

Enfin, l’introduction d’un stage de responsabilisation prononcé, en plus de l’amende, à l’encontre des parents de mineurs délinquants qui ne se rendent pas aux convocations du juge constitue une avancée dans leur nécessaire responsabilisation.

Vous l’aurez compris, le Sénat se satisfait du texte adopté en commission mixte paritaire. Notre chambre a été entendue sur bien des aspects, en manifestant une volonté de sagesse et de détermination dont nous pouvons nous féliciter. Ce nouveau code de la justice pénale des mineurs démontre notre attachement à la protection de l’enfance, à la responsabilisation des parents, à l’efficacité de la nouvelle procédure pénale et à la clarification du droit, pour une meilleure lutte contre la délinquance des mineurs. Nous vous invitons donc à adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, soixante-seize ans se sont écoulés depuis le 2 février 1945. C’est tout un symbole que nous consacrons aujourd’hui : adopter un code dédié à la justice pénale des mineurs, fondé sur les valeurs de la République voulues par le général de Gaulle. Les modifications successives en avaient fait un texte devenu illisible ; il fallait donc le moderniser.

« La question de l’enfance coupable est une des plus urgentes de l’époque présente », peut-on lire dans le préambule de l’ordonnance de 1945 ; ces mots sont toujours d’actualité en 2021. Nous répondons aujourd’hui aux attentes fortes de la société pour une justice des mineurs claire et efficace. Ce code renforce la primauté de l’éducatif, tout en permettant une réponse pénale cohérente et encadrée dans des délais de procédure.

En instaurant une réponse judiciaire plus proche de l’acte commis, nous rapprochons la justice de nos concitoyens. À proximité de leurs actes, les mineurs seront déclarés responsables pénalement ; avec souplesse, ils seront pris en charge par les services de la protection judiciaire de la jeunesse dans le cadre d’une mesure éducative unique modernisée.

Je souhaite remercier tous les parlementaires qui viennent d’acter des accords politiques rares à l’occasion de la commission mixte paritaire conclusive, puis, cet après-midi, lors du vote du texte à l’Assemblée nationale. Je tiens, madame la rapporteure Canayer, à saluer votre travail rigoureux et constructif, ayant permis d’aboutir à un texte équilibré. Guidés par l’intérêt supérieur du mineur, nos débats ont permis de faire ressortir le consensus démocratique que nous devions collectivement à nos enfants.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous étiez convaincus de la nécessité de cette réforme. Vous étiez aussi impatients de contribuer à l’enrichissement du texte et avez pu aborder des questions essentielles en introduisant la définition du discernement dans la partie législative du code. Vous avez souhaité garantir l’effectivité d’une prise en charge éducative rapide, en imposant la communication au mineur d’une date de mise en place de la mesure dès la première audience. Vous avez étendu l’accès direct au dossier unique de personnalité aux professionnels du secteur associatif habilité.

Vous avez su dépasser les inquiétudes légitimes liées à la nécessaire évolution des pratiques professionnelles, en actant un report de l’entrée en vigueur de la réforme au 30 septembre 2021. S’ouvre alors une nouvelle étape, celle de sa mise en œuvre. Soyez assurés que ce délai supplémentaire sera bien mis à profit pour préparer les acteurs de la justice des mineurs et faire en sorte qu’ils s’approprient ce texte, puisqu’ils seront chargés de mettre en œuvre ces nouvelles dispositions.

Vous avez tout au long des débats souhaité confirmer la confiance, mais aussi la reconnaissance que nous leur devons. Éducateurs, greffiers, magistrats, avocats : tous sont engagés dans la mission si difficile de redonner de l’espoir à nos enfants. Je veux plus particulièrement remercier toutes les équipes de la direction de la protection judiciaire de la jeunesse. C’est une grande direction, quotidiennement engagée dans la prise en charge des enfants, qui a fait la preuve de sa capacité normative à faire évoluer le droit des mineurs et, ainsi, toute notre société.

Vous avez, durant les débats, entendu vingt fois une célèbre phrase de l’ordonnance de 1945. Je veux ici une dernière fois la citer, pour clore la séquence parlementaire sur cette grande réforme : « La France n’est pas assez riche d’enfants pour qu’elle ait le droit de négliger tout ce qui peut en faire des êtres sains. » (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Vérien. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Dominique Vérien. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, chers collègues, je ne reviendrai pas sur le fond de cette réforme – j’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer à ce sujet. Je ne doute pas que chacun ici conserve à l’esprit les apports bienvenus de ce texte. C’est un texte nécessaire et équilibré, qui ne laisse pas le répressif prendre le pas sur l’éducatif et qui ne met pas non plus de côté l’impérative protection de notre société.

Je tiens avant tout à saluer le travail réalisé tant par la commission mixte paritaire que par notre rapporteur Agnès Canayer. Le Sénat et l’Assemblée nationale ont finalement réussi à se mettre d’accord sur un texte commun, grâce à un travail apaisé et constructif autour d’un sujet parfois sensible mais toujours exigeant.

Jean Terlier, rapporteur pour l’Assemblée nationale, a salué un texte « considérablement enrichi » et « l’esprit d’ouverture » dont a fait preuve le Sénat – c’est une position à laquelle je ne peux qu’entièrement souscrire. Nous pouvons aujourd’hui nous féliciter collectivement de l’esprit de responsabilité qui a guidé l’action du Parlement.

J’en profite pour vous adresser tous mes remerciements, monsieur le garde des sceaux : merci de permettre au texte d’Annick Billon de prospérer ; merci de reconnaître que la bonne idée peut venir du Sénat ; merci de nous aider à trouver la possibilité d’obtenir ce que nous n’avions pas obtenu en 2018 de votre prédécesseure.

Je salue enfin Annick Billon, qui a su tenir bon dans la tempête.

Mais revenons à nos mineurs auteurs et à ce texte de compromis.

Mon groupe, comme tous les professionnels qui nous avaient alertés, est satisfait du report de l’entrée en vigueur de cette réforme au 30 septembre prochain ; de la précision apportée sur le discernement du mineur, question centrale de cette réforme, en lien direct avec la présomption d’irresponsabilité pénale du mineur de 13 ans ; de la numérisation du dossier unique de personnalité et de la possibilité ouverte au personnel du secteur associatif habilité d’y avoir accès. Les acteurs de la justice étant nombreux, il arrive trop souvent que l’information ne circule pas entre eux comme cela devrait être le cas.

Nous sommes également satisfaits qu’une date de mise en œuvre des mesures éducatives soit communiquée lors de l’audience de culpabilité. Cela permettra de donner toutes ses chances à la réinsertion, dès le début de la procédure.

Enfin, nous sommes satisfaits de la convocation des parents « par tout moyen », ce qui confère une souplesse nécessaire au juge.

J’en viens à la question du juge des libertés et de la détention, qui constitue sans doute notre plus grand désaccord.

Certes, nos deux assemblées s’accordaient sur la nécessité, au nom du principe de l’impartialité du juge se prononçant sur la culpabilité, d’impliquer un autre magistrat concernant la détention provisoire. L’Assemblée nationale a choisi le JLD, tandis que nous souhaitions confier cette mission à un autre juge des enfants, au nom de la spécialisation. Au final, c’est la position de l’Assemblée nationale qui l’emporte.

Mme Dominique Vérien. Vous vous en doutez, monsieur le garde des sceaux, nous resterons particulièrement vigilants sur ce point et à l’écoute des remontées du terrain. Nous aurons probablement l’occasion dans quelque temps d’évaluer les effets de cette mesure, et je ne doute pas que les travaux d’une prochaine mission d’information de l’une de nos deux chambres viendront confirmer ou infirmer le bien-fondé de ce choix. Il sera toujours temps alors de le corriger si nécessaire.

Enfin, j’appelle votre attention sur ce dont dépendra à notre avis le succès ou l’échec de cette réforme : je veux parler ici de la protection judiciaire de la jeunesse, qui est la clé de voûte de la justice des mineurs, car elle porte, avec l’aide du secteur associatif habilité, l’essentiel du volet éducatif. C’est pourquoi la PJJ doit être dotée de moyens humains, financiers et matériels lui permettant d’accomplir sa mission. Son succès profitera tant aux mineurs, qui doivent avoir une réelle chance de se réinsérer, qu’à la société. L’enjeu est à cet égard bien plus grand que le texte qui nous occupe aujourd’hui.

Vous me permettrez d’établir un parallèle entre le présent texte et le projet de loi confortant le respect des principes de la République, ce texte visant aussi à protéger nos enfants contre les dérives radicales et du fondamentalisme religieux. Ces dernières années nous l’ont trop souvent douloureusement rappelé, ceux qui ont attaqué la France en son cœur étaient souvent connus des services de police pour des faits de délinquance alors qu’ils étaient mineurs, avant de basculer dans le séparatisme religieux. En rupture avec la société lorsqu’ils étaient mineurs, ils le furent avec la République et ses valeurs, une fois adultes.

En définitive, la PJJ doit pouvoir exercer pleinement son rôle éducatif afin de permettre la réinsertion des mineurs et leur éviter une récidive. Seul un accompagnement réel et exigeant le permettra. À nous de lui en donner les moyens.

Vous nous avez entendus concernant les enfants victimes, monsieur le garde des sceaux, je ne doute pas que vous nous entendrez sur la protection qu’il est indispensable d’apporter à l’ensemble des mineurs, en particulier à ceux qui se détournent du droit chemin.

Vous l’aurez compris, notre groupe votera ce texte de compromis. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, ce texte contient bien sûr des points positifs. Le seul fait qu’il sera adopté en est déjà un. Néanmoins, nos objections subsistent et font que, en toute honnêteté intellectuelle, nous ne pourrons l’approuver, et ce pour cinq raisons, que je vais expliquer au cours de ce débat démocratique.

Premièrement, nous pensons, et cela a d’ailleurs été dit à plusieurs reprises au cours du débat, que la spécialisation de la justice des mineurs est un principe qui doit être absolument respecté. Or tel n’est pas le cas dans ce texte. Je pense à deux dispositions que vous connaissez par cœur, madame la rapporteure.

Tout d’abord, la compétence du tribunal de police a fait sa réapparition, alors que le Sénat avait jugé qu’elle était totalement contraire au principe de spécialisation. Personne ne peut dire le contraire.

Ensuite, et cela vient d’être dit par Mme Vérien, le JLD réapparaît également et se voit confier un office qui devrait être celui du juge des enfants.

Il est clair que, sur ces deux points importants, le principe de spécialisation de la justice des mineurs n’est pas respecté.

Deuxièmement, le Sénat avait adopté un amendement visant à intégrer le secteur associatif habilité dans le code de la justice pénale des mineurs. Cet amendement a été supprimé en CMP. Je ne comprends pas pourquoi. Je ne sais pas qui, ici, pourra défendre l’idée selon laquelle cette loi ne doit pas prendre en compte le secteur associatif habilité. Il n’y a pas de raison. Comme il n’y a pas de raison, je comprends mal la position de la CMP.

Troisièmement, cette réforme ne permet pas de faire face au problème majeur du manque de moyens matériels et humains auquel sont confrontés les professionnels judiciaires et de la protection de l’enfance.

Monsieur le garde des sceaux, nous avons déjà salué ici l’augmentation de 8 % de votre budget, mais, concrètement, les moyens alloués à la justice des mineurs restent ce qu’ils sont, hélas ! et ce pour longtemps.

Quatrièmement, et c’est un point auquel nous avons été très sensibles, tous les amendements – je dis bien : tous les amendements – que nous avons proposés visant à faire primer l’éducatif sur le répressif et à faire du mineur délinquant un mineur à protéger n’ont reçu que des avis défavorables. Je ne comprends pas pourquoi ! Ces amendements auraient pourtant enrichi le texte et s’inscrivaient strictement dans la logique de l’ordonnance de 1945.

J’en viens à mon cinquième point, monsieur le garde des sceaux, que vous connaissez par cœur : la présomption irréfragable de non-responsabilité pénale d’un mineur de 13 ans, laquelle n’a pas été adoptée.

Nous avons beaucoup argumenté sur ce sujet, sur lequel nous avons remarqué votre ouverture d’esprit lorsque nous avons discuté ici même de la proposition de loi visant à protéger les jeunes mineurs des crimes sexuels – nous nous en souvenons tous – et réfléchi à l’instauration d’un seuil d’âge de 13 ou 15 ans. Un certain nombre d’entre nous ont voté pour un seuil de 15 ans. Vous relirez avec intérêt la réponse que vous avez faite.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je l’ai relue !

M. Jean-Pierre Sueur. Vous avez eu raison.

Vous avez montré que le cheminement de la pensée pouvait aboutir – je le mets à votre crédit. C’est très bien qu’il en soit ainsi. Beaucoup ont été satisfaits d’entendre vos déclarations à la télévision, mais vous eussiez pu le dire au Parlement.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je l’ai dit !

M. Jean-Pierre Sueur. Vous l’avez dit depuis.

Monsieur le garde des sceaux, nous pensons que l’absence de présomption irréfragable dans le texte est contraire au a du 3 de l’article 40 de la convention internationale des droits de l’enfant, qui prévoit que « les États parties s’efforcent de promouvoir l’adoption de lois, de procédures, […], et en particulier d’établir un âge minimum au-dessous duquel les enfants seront présumés n’avoir pas la capacité d’enfreindre la loi pénale ».

Voilà pourquoi nous ne pouvons pas adopter ce texte, en dépit des progrès qu’il peut receler. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marc.

M. Alain Marc. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la modernisation de la justice pénale des mineurs était attendue. En effet, l’ordonnance du 2 février 1945 est devenue difficilement lisible et compréhensible en raison de la sédimentation des réformes législatives : trente-neuf fois modifié, ce texte a perdu peu à peu efficacité et cohérence.

Ainsi, il ne permet plus de répondre aux exigences en matière de respect des droits de l’enfant et d’efficacité de la lutte contre la délinquance des mineurs. Aussi, l’ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs participe à atteindre l’objectif de modernisation de la justice pénale des mineurs.

Toutefois, nous déplorons un certain manque d’ambition, un acte manqué : nous espérions un véritable « code des mineurs » réformant à la fois l’enfance délinquante et l’enfance en danger. Malheureusement, l’enfant délinquant est en effet trop souvent un enfant victime de carences éducatives ou de l’absence de parents.

Réunie le 4 février dernier, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 11 septembre 2019 a été conclusive. Je me réjouis que, grâce à des efforts conjoints, des compromis aient été trouvés permettant d’aboutir à un accord, comme cela a souvent été le cas depuis le début de la législature.

À cet égard, je salue l’esprit de responsabilité et de consensus du Parlement. Je suis heureux qu’un certain nombre d’apports du Sénat aient été conservés. C’est le cas de l’introduction de la définition du discernement à l’article 1er ter A. C’est également le cas, à l’article 6, de la possibilité de numériser le dossier unique de personnalité, dont l’accès sera désormais autorisé au personnel du secteur associatif habilité afin de faciliter la circulation des informations entre les nombreux acteurs de la justice des mineurs.

La commission mixte paritaire a aussi jugé pertinent que la date de mise en place des mesures éducatives soit communiquée au mineur à l’issue de son audience de culpabilité et a conservé la disposition visant à permettre que la convocation des représentants légaux se fasse « par tout moyen ».

La CMP a également maintenu deux mesures qui protégeront nos mineurs et faciliteront leur réinsertion : l’obligation de disposer des réquisitions du parquet pour placer un mineur sous contrôle judiciaire, quel que soit le stade de la procédure, et l’effacement simplifié des dispenses de mesures éducatives et des déclarations de réussite éducative dans le casier judiciaire.

Enfin, concernant l’entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs, les députés, qui s’étaient montrés très attachés à la date du 31 mars 2021, se sont ralliés à la position du Sénat, qui proposait un report de six mois, au 30 septembre 2021, afin que les juridictions puissent préparer dans le calme la transition vers les nouvelles procédures.

Monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il apparaît particulièrement nécessaire de remplacer l’ordonnance de 1945 par un ensemble cohérent de mesures susceptibles de clarifier les procédures applicables et d’apporter une réponse plus efficace aux infractions commises par les mineurs.

Avant tout procédurale, cette réforme est équilibrée. Elle n’entraînera ni une moindre pénalisation ni une surpénalisation des mineurs, mais devrait permettre une meilleure organisation du procès. Notre groupe votera ce texte. (M. Alain Richard applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Esther Benbassa. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je le dis d’emblée : si cette commission mixte paritaire a été conclusive, un accord ayant été trouvé entre l’Assemblée nationale et le Sénat sur le présent texte, celui-ci ne convient pas au groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, au nom duquel je m’exprime devant vous.

Nous demandions la suppression dans le code de la justice pénale des mineurs de la mesure de retenue, pouvant aller jusqu’à douze heures, d’un jeune âgé de moins de 13 ans par un officier de police judiciaire, rappelant que la présomption d’irresponsabilité s’appliquait à ces mineurs.

Nous nous sommes opposés au maintien des dispositifs de surveillance électronique en cas d’assignation à résidence, avec port du bracelet électronique, rappelant qu’il ne s’agissait pas d’une mesure adaptée aux enfants et aux adolescents, qui ne la comprennent pas.

Nous demandions la suppression de l’article du code ouvrant la voie à une exception à l’excuse de minorité, estimant qu’il n’était pas concevable que le jeune âge de ces mineurs ne soit pas automatiquement pris en compte pour leur appliquer des atténuations de peine.

Nous demandions également l’inscription dans ce code de l’interdiction de l’utilisation des moyens de télécommunication audiovisuels, soit la visioconférence, tout au long d’une procédure mettant en cause un mineur, car celle-ci contrevient à l’intérêt supérieur de l’enfant.

Nous avions appelé de nos vœux l’instauration d’une présomption irréfragable d’irresponsabilité pénale pour les mineurs de moins de 14 ans, ce qui aurait permis à la France de se mettre en conformité avec la convention internationale des droits de l’enfant, tout en appliquant un seuil déjà retenu dans plusieurs autres pays européens.

Enfin, nous avions tenté de réaffirmer la primauté des mesures éducatives sur les mesures répressives en consacrant ce principe cardinal de la justice pénale des mineurs dans l’article préliminaire de ce code.

Aucune de ces améliorations ne figure dans le texte qui nous est présenté aujourd’hui. Nous ne pouvons que le regretter.

L’ordonnance de 1945 était un texte novateur et protecteur en matière de justice des mineurs, notamment parce qu’il était fondé sur une vision bienveillante du droit face à des jeunes en pleine construction. Aujourd’hui, nous déplorons que les mesures de contrôle se substituent aux mesures éducatives, que les solutions d’insertion retenues prennent de moins en moins en compte le projet de l’enfant, que le placement, qui avait pour but la protection du mineur, ait désormais une visée coercitive et, enfin, que le principe de spécificité de la justice des mineurs ne cesse de s’affaiblir du fait du dangereux rapprochement effectué entre ce droit et le droit pénal général, qui concerne avant tout les majeurs.

Ce texte ne nous satisfaisait pas en première lecture. Tel qu’il résulte des travaux de la CMP, il n’est toujours pas conforme à la vision de la justice pénale des mineurs que mon groupe et moi-même défendons. Nous voterons donc contre. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission mixte paritaire, qui s’est réunie le 4 février, est parvenue à un accord, et j’en suis très heureux. L’ordonnance de 1945 relative à l’enfance délinquante, qui avait fait l’objet d’une quarantaine de modifications, contribuant chaque fois à rendre son contenu un peu plus illisible pour l’ensemble des acteurs concernés, ne permettait plus de faire face aux enjeux de la nouvelle délinquance des mineurs.

Ce texte, sur lequel nous sommes parvenus à un compromis équilibré, est le fruit d’une longue réflexion sur le sujet. Entamée en 2008 par la commission Varinard, la réforme a joué l’Arlésienne jusqu’à l’ordonnance présentée le 11 septembre 2019.

Le nouveau code est d’une importance majeure, car il met en place une modernisation historique de la justice pénale des mineurs afin de faire face aux enjeux de la délinquance dans notre pays, laquelle fait régulièrement la une de l’actualité, tout en conservant ses principes fondateurs : la primauté de l’éducatif, la spécialisation des juridictions et l’atténuation de la responsabilité en fonction de l’âge.

La nouvelle procédure de mise à l’épreuve éducative renforcera le sens de la réponse pénale, et ce dans un délai raisonnable, aussi bien pour le mineur que pour la victime, qui bénéficiera d’une réparation plus rapide.

Conformément aux engagements du Gouvernement, un débat approfondi et constructif a pu s’engager au cours de la navette. Malgré les craintes initiales, et légitimes, liées au fait que la réforme se fasse par ordonnance, l’ensemble du code a pu être discuté et amendé. Et le Parlement l’a fortement enrichi !

Ainsi, l’Assemblée nationale a introduit dans la loi la référence à l’intérêt de l’enfant dès l’article préliminaire. Elle a renforcé les garanties dans le cadre de l’audition libre, interdit la visioconférence pour le placement en détention provisoire et simplifié le cumul des mesures éducatives et des peines.

Le Sénat, quant à lui, a inscrit dans la loi une définition du discernement, la numérisation du dossier unique de personnalité, auquel le secteur associatif habilité pourra avoir accès, ou encore la convocation des représentants légaux par tout moyen.

Les discussions se sont poursuivies lors de la réunion de la commission mixte paritaire sur les quelques points de divergence qui subsistaient entre nous. Permettez-moi d’ailleurs de saluer le travail considérable des rapporteurs et la très grande qualité de nos échanges.

Nous sommes parvenus à nous mettre d’accord, sans revenir sur les principes de spécialisation et d’impartialité, sur le rétablissement de la compétence du juge des libertés et de la détention en matière de placement en détention provisoire d’un mineur et sur celle du tribunal de police pour les contraventions les moins graves.

Le report au 30 septembre 2021 de l’entrée en vigueur de ce nouveau code paraissait indispensable au regard du retard pris en raison de la crise sanitaire et afin de permettre aux magistrats et à la protection judiciaire de la jeunesse de s’y préparer.

Bien sûr, la réussite de la présente réforme reposera sur les moyens mis à la disposition de la justice pénale des mineurs. La forte hausse des crédits alloués à la justice pour l’année 2021 démontre que la volonté politique est là. Mais, vous l’aurez compris, monsieur le garde des sceaux, nous serons nombreux à nous montrer vigilants quant à leur mise à disposition effective.

Pour l’ensemble des raisons évoquées, le groupe RDPI votera les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, chers collègues, même si, d’un point de vue statistique, la part des mineurs dans la délinquance générale reste stable, le ressenti est que la violence est de plus en plus grande chez nos jeunes. La délinquance a changé de nature. Aujourd’hui, près de la moitié des sanctions prononcées à l’égard des mineurs sont des peines alors que les mesures éducatives devraient être prioritaires et majoritaires.

C’est dire combien l’enjeu de ce texte était de taille, et nous nous réjouissons que la commission mixte paritaire ait été conclusive. Il s’agissait bien sûr d’apporter une réponse pénale adaptée à l’enfance délinquante, mais avant tout d’entretenir l’esprit de l’ordonnance de 1945, qui consacre la primauté de l’éducatif sur le répressif, la spécialisation des juridictions, ainsi que l’atténuation de la responsabilité en fonction de l’âge. Enfin, l’enjeu était de mieux accompagner les mineurs et de leur éviter de sombrer dans une délinquance durable.

Il n’est pas commun de se satisfaire du report de l’entrée en vigueur d’une réforme, mais permettez-moi de le faire ici. Une mise en œuvre de la réforme dès le mois prochain aurait été très compliquée et aurait donné lieu à l’application de deux procédures, qui se seraient chevauchées, comme nous l’avions indiqué en première lecture. Aussi, je me réjouis que la CMP ait pu trouver un accord sur ce point.

Concernant le discernement, là encore, un pas a été fait en notre direction, la définition que nous avons introduite à l’article 1er ter A ayant été retenue. La fixation d’un seuil de discernement est aussi la bienvenue, car elle permet à la France de se mettre en conformité avec les accords internationaux. Le choix d’une présomption simple est difficile, mais selon moi nécessaire, afin de limiter les effets de seuil et de laisser une libre interprétation au juge.

La CMP a enfin amélioré le texte à l’article 6 bis. Le texte prévoyait le doublement de l’amende encourue par les représentants légaux de mineurs poursuivis qui ne répondent pas à une convocation à comparaître devant un magistrat ou une juridiction pour mineurs. Son maintien aurait représenté une double peine pour des familles souvent très fragiles socialement et économiquement. Son remplacement par l’obligation de participer à un stage de responsabilité parentale est en ce sens une solution équilibrée.

Je ne réitérerai pas mes craintes sur l’audience unique, que je redoute de voir se généraliser, sur l’accent davantage mis sur la privation de liberté que sur les mesures éducatives ou encore sur les moyens financiers qu’il faudra continuer à mobiliser pour que cette réforme soit effective et qu’elle améliore considérablement le traitement de la jeunesse délinquante. Cette amélioration devra nécessairement passer par un recours plus faible à la détention provisoire, car l’enfermement n’est jamais une solution en soi. Il est même parfois, hélas ! le début d’un parcours carcéral continu.

Pour conclure, je rappellerai les propos que j’ai tenus lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2021. Monsieur le garde des sceaux, j’avais souhaité que nous ayons un réel débat sur un texte aussi fondateur, au vu des circonstances dans lesquelles il nous avait été présenté. Malgré la procédure accélérée et grâce au travail de nos deux assemblées – je remercie notre rapporteur Agnès Canayer pour son engagement sur ce texte –, je pense que le débat a pu être mené jusqu’au bout. Soyez assuré que le groupe du RDSE suivra de manière exigeante la mise en œuvre de ce nouveau code.

Comme nous l’avons fait en première lecture, nous voterons le texte tel qu’il résulte des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI et UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je vais le dire à mon tour : à l’issue de ce travail législatif, nous regrettons que l’on n’ait pas réfléchi à un code plus global traitant de l’enfance en danger dans son ensemble, du civil au pénal, comme nous y invite d’ailleurs le comité des experts des Nations unies.

À l’issue de nos débats, au regard des conclusions de la commission mixte paritaire, un certain nombre de questions demeurent sur les motifs qui ont conduit à cette réforme de la justice des mineurs. Je l’ai déjà dit, je le redis ici ce soir : on a parfois l’impression qu’elle n’a été guidée que par le souci de gagner du temps, mais aussi parfois de l’argent.

Alors, oui, on réaffirme collectivement les grands principes, à condition, finalement, que ceux-ci n’aient pas d’effets sur la hauteur des piles de dossiers en attente.

Alors, oui, on va plus vite, et c’est parfois nécessaire, mais on ne le fait pas toujours dans l’intérêt de l’enfant, plutôt dans celui de la justice, dont les moyens limités ne sont bien évidemment pas extensibles, en tout cas pas autant qu’on le voudrait.

Certes, comme vous le rappelez depuis cet automne, monsieur le garde des sceaux, le budget de la justice a augmenté de 8 %, mais nous savons que ces deniers publics supplémentaires sont principalement alloués à l’administration pénitentiaire et qu’ils ne viennent pas soulager les capacités d’instruction ou désengorger la justice des mineurs.

Comme nous l’avions dit lors du débat en première lecture, nous avons le sentiment que la justice des mineurs est de plus en plus calquée sur celle des majeurs. Finalement, tel était déjà le leitmotiv des derniers projets de loi d’organisation de la justice : aller un peu plus vite, toujours plus vite, avec des effectifs réduits. Malheureusement, ce texte n’y échappe pas.

Or le seul moyen d’accélérer les délais de jugement sans augmenter les effectifs est finalement de rogner le principe de la primauté de l’éducatif sur le répressif et le principe de l’atténuation de la responsabilité du mineur.

Nous proposions dans le débat d’inscrire le caractère irréfragable de la présomption de non-discernement au-dessous de 13 ans. Cela n’a pas été retenu.

Nous proposions également la restauration de la remise à parents ou ce que l’on qualifie d’admonestation. Cet amendement, qui avait été adopté au Sénat, a été rejeté par la commission mixte paritaire. La disparition pure et simple de ce dispositif n’est remplacée par aucune autre mesure.

Contrairement à ce qui a pu être dit, il s’agit non pas d’un « simple » entretien, mais bien du premier niveau des sanctions pénales pour un enfant. Il permet une meilleure graduation des condamnations, surtout pour ce qui concerne les plus jeunes. Vous l’avez d’ailleurs rappelé avec humour, le fait de ne pas être remis à leurs parents peut être considéré par certains comme une liberté.

À l’issue de cette commission mixte paritaire, nous avons un autre regret : la spécialisation des juridictions. Il est en effet dommage que nous n’ayons pas pu obtenir satisfaction à la suite du travail mené par le Sénat.

Vous l’aurez compris, nous ne voterons pas le texte issu de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – M. Guy Benarroche applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Raymond Hugonet. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, quelle joie qu’une discussion générale après une commission mixte paritaire conclusive ! Ne boudons pas notre plaisir.

L’accord trouvé en commission mixte paritaire est un double succès, dont le groupe Les Républicains se félicite.

D’une part, députés et sénateurs sont tombés d’accord sur le fond du texte, qui deviendra, demain, le nouveau code de justice pénale des mineurs.

D’autre part, les membres de la commission mixte paritaire ont accepté, sur l’initiative du Sénat, de reporter l’entrée en vigueur de la réforme, ce qui était indispensable.

À ce titre, je le rappelle, la présidente de la conférence des procureurs généraux, Marie-Suzanne Le Quéau, avait rappelé au Premier ministre, voilà quelques mois, que le refus d’un tel report serait un « non-sens ». Il s’agit donc d’un ralliement tardif, mais heureux, puisqu’il bénéficiera directement aux acteurs de cette justice singulière qu’est la justice pénale des mineurs.

Nous le disons de nouveau : ni les magistrats ni les moyens informatiques n’étaient prêts.

À l’évidence, trouver un compromis en commission mixte paritaire nécessitait de renoncer à certaines dispositions, et nous ne pouvons que regretter la disparition de deux apports du Sénat.

En premier lieu, le transfert au juge des libertés et de la détention de la compétence en matière de placement en détention provisoire d’un mineur aura bien lieu.

Le Sénat souhaitait que cette compétence soit confiée à un juge des enfants distinct de celui saisi, pour respecter l’impartialité, considérant que le juge des libertés et de la détention n’est pas nécessairement spécialisé en droit pénal des mineurs.

En second lieu, nous nous étions opposés à ce que le tribunal de police puisse juger les mineurs pour les contraventions des quatre premières classes.

Nous estimions en effet que certaines de ces contraventions sont graves – je pense aux violences volontaires, même si elles ne sont pas suivies d’une interruption totale de travail – et qu’elles pouvaient nécessiter un suivi éducatif particulier, afin d’éviter la récidive.

À cet égard, notre collègue député Jean Terlier estimait le nombre de poursuites à l’encontre de mineurs pour des contraventions des quatre premières classes à 5 000 affaires par an. Il jugeait à ce titre que, si l’on aspirait à « alléger le travail de la justice, ce n’était pas le moment de remettre dans le circuit un volume d’affaires aussi important ».

Cependant, l’on perçoit en creux que ce choix se fonde sur l’insuffisance de moyens humains. Il y a tout lieu de croire que la création d’environ 45 postes supplémentaires de juges des enfants, soit une hausse de 10 %, annoncée par Mme Nicole Belloubet lors de l’examen du budget pour 2020, ne suffit pas, pas plus que les « sucres rapides » chers à la Chancellerie, laquelle semble désormais trouver de l’inspiration dans le travail des nutritionnistes…

Néanmoins, plusieurs apports du Sénat ont été maintenus dans le projet de loi final. Ainsi, nous saluons l’interdiction du recours à la visioconférence pour la décision et la prolongation de la détention provisoire d’un mineur.

De même, nous nous félicitons de l’introduction de la définition « sénatoriale » du discernement – nous sommes des experts ! –, qui devait intervenir au niveau réglementaire et qui sera finalement inscrite dans la loi.

Le Sénat a également souhaité rendre possible la numérisation du dossier unique de personnalité et d’y donner accès au personnel du secteur associatif habilité, ce qui facilitera sans nul doute les échanges entre les professionnels chargés de la justice des mineurs.

La fluidité de la transmission des informations profite à tous, et la justice a tout à gagner quand les moyens lui sont donnés d’apporter des réponses rapides.

Enfin, une autre disposition issue du Sénat permettra l’effacement simplifié des dispenses de mesure et des déclarations de réussite dans le casier judiciaire.

Cet ajout nous semble particulièrement bienvenu, puisqu’il participe au relèvement éducatif et moral des mineurs, principe fondamental en matière de justice des mineurs, réaffirmé par le nouveau code de justice pénale des mineurs.

Alors qu’elle a régulièrement été qualifiée de « serpent de mer », cette réforme est sur le point d’aboutir. À cet égard, nous saluons la qualité des travaux préparatoires effectués en la matière, dont ceux qui sont issus de la mission d’information du Sénat sur la réinsertion des mineurs enfermés, menée par nos anciens collègues sénateurs Catherine Troendlé et Michel Amiel.

Le groupe Les Républicains du Sénat est donc favorable au texte tel qu’il est issu des travaux de la commission mixte paritaire, et appelle de ses vœux la réussite de cette réforme. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat examinant après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs

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Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs
Article 1er ter A

Article 1er bis A

À la fin de l’article 9 de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs, la date : « 31 mars 2021 » est remplacée par la date : « 30 septembre 2021 ».

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Article 1er bis A
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Article 1er ter B

Article 1er ter A

L’article L. 11-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Est capable de discernement le mineur qui a compris et voulu son acte et qui est apte à comprendre le sens de la procédure pénale dont il fait l’objet. »

Article 1er ter A
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Article 1er ter

Article 1er ter B

(Supprimé)

Article 1er ter B
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Article 2

Article 1er ter

Après le 3° de l’article L. 12-1 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :

« 3° bis Le juge des libertés et de la détention chargé spécialement des affaires concernant les mineurs ; ».

Article 1er ter
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Article 3

Article 2

Le titre préliminaire du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa de l’article L. 12-4, les mots : « l’effectue » sont remplacés par les mots : « effectue ce choix » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 13-1, après le mot : « réglementaires », sont insérés les mots : « en matière ».

Article 2
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Article 3 bis A

Article 3

Le titre Ier du livre Ier du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° A L’article L. 111-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « mineur » est remplacé par les mots : « enfant ou un adolescent » ;

b) (Supprimé)

1° L’article L. 111-3 est ainsi modifié :

a) Après la seconde occurrence du mot : « une », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « peine. » ;

b) Les 1° et 2° sont abrogés ;

2° L’article L. 112-2 est ainsi modifié :

a) À la seconde phrase du premier alinéa, le mot : « l’ » est supprimé ;

b) Le 7° est ainsi modifié :

– le mot : « vingt-trois » est remplacé par le nombre : « 22 » ;

– la première occurrence du mot : « six » est remplacée par le nombre : « 6 » ;

3° L’article L. 112-3 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, après la référence : « L. 112-2 », sont insérés les mots : « et les obligations et interdictions mentionnées aux 5° à 9° du même article L. 112-2 » ;

– la seconde phrase est supprimée ;

b) Le deuxième alinéa est supprimé ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 112-10, le mot : « conseil » est remplacé par le mot : « Conseil » ;

5° À la fin du 1° de l’article L. 112-14, les mots : « ainsi qu’au service de l’aide sociale à l’enfance » sont supprimés ;

6° Le troisième alinéa de l’article L. 112-15 est ainsi modifié :

a) Le signe : « , » est remplacé par le mot : « et » ;

b) Après le mot : « durée », il est inséré le signe : « , » ;

c) Après le mot : « an », il est inséré le signe : « , » ;

d) La première occurrence du mot : « et » est remplacée par les mots : « ainsi que » ;

7° L’article L. 113-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « qui en avait la garde » sont remplacés par les mots : « à laquelle il était confié » ;

b) Le dernier alinéa est complété par le mot : « public » ;

8° La section 2 du chapitre III est complétée par un article L. 113-8 ainsi rédigé :

« Art. L. 113-8. – À chaque entrée d’un mineur dans un établissement relevant du secteur public ou habilité de la protection judiciaire de la jeunesse, le directeur de l’établissement ou les membres du personnel de l’établissement spécialement désignés par lui peuvent procéder au contrôle visuel des effets personnels du mineur, aux fins de prévenir l’introduction au sein de l’établissement d’objets ou de substances interdits ou constituant une menace pour la sécurité des personnes ou des biens. Au sein de ces établissements, ces mêmes personnels peuvent, aux mêmes fins, procéder à l’inspection des chambres où séjournent ces mineurs. Cette inspection se fait en présence du mineur sauf impossibilité pour celui-ci de se trouver dans l’établissement. Le déroulé de cette inspection doit être consigné dans un registre tenu par l’établissement à cet effet. Ces mesures s’effectuent dans le respect de la dignité des personnes et selon les principes de nécessité et de proportionnalité. »

Article 3
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Article 4

Article 3 bis A

(Supprimé)

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Article 3 bis A
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Article 5 bis

Article 4

Le titre II du livre Ier du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° Au 2° de l’article L. 121-1, les mots : « jour amende » sont remplacés par le mot : « jours-amende » ;

2° À l’article L. 121-2, la référence : « 132-65 » est remplacée par la référence : « 132-62 » ;

3° L’article L. 121-3 est ainsi modifié :

a) Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Une des peines complémentaires énumérées à l’article 131-16 du code pénal. » ;

b) Le dernier alinéa est supprimé ;

4° L’article L. 122-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « de seize à dix-huit » sont remplacés par les mots : « d’au moins seize » ;

b) Au deuxième alinéa, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « dernier » ;

c) Au dernier alinéa, les mots : « de ces dispositions » sont remplacés par les mots : « du présent article » ;

5° L’article L. 122-2 est ainsi modifié :

a) Au 3°, après le mot : « respecter », il est inséré le signe : « , » ;

a bis) À la première phrase du dernier alinéa, après la référence : « 3° », sont insérés les mots : « du présent article » ;

b) La seconde phrase du même dernier alinéa est ainsi modifiée :

– au début, le mot : « Lorsque » est supprimé ;

– les mots : « a été prononcée à l’égard d’un mineur, ce placement » sont supprimés ;

5° bis Le premier alinéa de l’article L. 122-3 est complété par les mots : « , à l’exception du 3° » ;

6° Au deuxième alinéa de l’article L. 122-6, les mots : « s’ils exercent la garde du mineur » sont remplacés par les mots : « chez lesquels le mineur réside » ;

7° L’article L. 123-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « font » est remplacé par le mot : « fait » ;

b) Au dernier alinéa, la référence : « de l’article L. 521-26 » est remplacée par les mots : « prévues au troisième alinéa de l’article L. 423-4 » ;

8° À l’article L. 124-1, la troisième occurrence du mot : « mineurs » est remplacée par le mot : « mineures ».

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Article 4
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs
Article 6

Article 5 bis

L’article L. 231-6 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est complété par un 3° ainsi rédigé :

« 3° Les décisions du juge des libertés et de la détention rendues à l’égard des mineurs en matière de détention provisoire, sauf dans le cadre d’une information judiciaire. »

Article 5 bis
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs
Article 6 bis

Article 6

Le livre III du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° L’article L. 311-5 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est ainsi modifié :

– après le mot : « pas », sont insérés les mots : « à la convocation » ;

– le mot : « saisie » est remplacé par le mot : « saisi » ;

b) Au troisième alinéa, les mots : « s’ils » sont remplacés par les mots : « si les représentants légaux » ;

2° L’article L. 322-8 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « , lorsqu’à » sont remplacés par les mots : « lorsque, à » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « qu’il » sont remplacés par le mot : « celui-ci » ;

c) Après l’avant-dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il est disponible sous format numérique. » ;

3° Au 1° de l’article L. 322-9, le mot : « il » est remplacé par les mots : « ce dernier » ;

3° bis Au 2° de l’article L. 322-10, la première occurrence du signe : « , » est remplacée par le signe : « ; »

3° ter Le 4° du même article L. 322-10 est complété par les mots : « et du secteur associatif habilité saisi d’une mesure judiciaire concernant le mineur » ;

3° quater (nouveau) Au 5° du même article L. 322-10, les mots : « ainsi que les personnels du service ou de l’établissement du secteur associatif habilité saisi d’une mesure judiciaire concernant le mineur » sont supprimés ;

4° Le dernier alinéa de l’article L. 323-1 est complété par les mots : « jusqu’à sa majorité » ;

5° À la fin du dernier alinéa de l’article L. 323-2, le mot : « main-levée » est remplacé par le mot : « mainlevée » ;

5° bis L’article L. 331-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En matière correctionnelle, lorsque la juridiction envisage de placer un mineur de plus de seize ans sous contrôle judiciaire, elle sollicite les réquisitions du ministère public. » ;

6° À l’article L. 331-5, les mots : « main levée » sont remplacés par le mot : « mainlevée » ;

7° Au premier alinéa de l’article L. 331-7, après la référence : « L. 331-2 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

7° bis Le deuxième alinéa de l’article L. 333-1 est complété par les mots : « du présent code » ;

8° L’article L. 334-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « peut prononcer » sont remplacés par le mot : « prononce » ;

b) Le second alinéa est supprimé ;

9° Le chapitre IV du titre III est complété par un article L. 334-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 334-6. – Par dérogation à l’article 706-71 du code de procédure pénale, il ne peut pas être recouru à un moyen de télécommunication audiovisuelle pour statuer sur le placement en détention provisoire ou la prolongation de la détention provisoire d’un mineur, sauf si son transport paraît devoir être évité en raison de risques graves de trouble à l’ordre public ou d’évasion. »

Article 6
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Article 7

Article 6 bis

Au deuxième alinéa de l’article L. 311-5 du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, la deuxième occurrence du mot : « ou » est remplacé par le mot : « et ».

Article 6 bis
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Article 8

Article 7

Le livre IV du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° Après le mot : « office », la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 412-2 est supprimée ;

2° Au 1° de l’article L. 422-1, après le mot : « mineur », sont insérés les mots : « et à ses représentants légaux » ;

3° Le premier alinéa de l’article L. 422-2 est ainsi modifié :

a) Les mots : « de l’article 41-1 du code de procédure pénale relatif aux alternatives aux poursuites à l’égard d’un mineur » sont remplacés par les mots : « , à l’égard d’un mineur, de l’article 41-1 du code de procédure pénale relatif aux alternatives aux poursuites » ;

b) Les mots : « ses représentants légaux » sont remplacés par les mots : « les représentants légaux du mineur » ;

4° L’article L. 422-4 est ainsi modifié :

a) Aux trois premiers alinéas, les mots : « doit être » sont remplacés par le mot : « est » ;

b) Au dernier alinéa, après la seconde occurrence du mot : « à », il est inséré le mot : « une » ;

5° À l’article L. 423-3, les mots : « en matière de crime contre les mineurs » sont remplacés par les mots : « contre les mineurs en matière de crime » ;

6° (Supprimé)

7° À la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 423-6, les mots : « alinéas 4 à 6 » sont remplacés par les mots : « quatrième à sixième alinéas » ;

8° Au sixième alinéa de l’article L. 423-8, les mots : « de l’alinéa 3 » sont remplacés par les mots : « du troisième alinéa » ;

9° L’article L. 423-9 est ainsi modifié :

aa) À la fin du premier alinéa, les mots : « le juge des enfants afin qu’il soit statué sur ses réquisitions tendant » sont supprimés ;

ab) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 1° Le juge des enfants afin qu’il soit statué sur ses réquisitions tendant : » ;

ac) Au début du 1°, la mention : « 1° » est remplacée par la mention : « a) » ;

ad) Au début du 2°, la mention : « 2° » est remplacée par la mention : « b) » ;

ae) Au début du 3°, la mention : « 3° » est remplacée par la mention : « c) » ;

a) Le 4° est ainsi modifié :

– au début, la mention : « 4° » est remplacée par la mention : « 2° » ;

– la première phrase est ainsi rédigée : « Le juge des libertés et de la détention, pour le mineur âgé d’au moins seize ans et lorsque le tribunal pour enfants est saisi aux fins d’audience unique en application du troisième alinéa de l’article L. 423-4, afin qu’il soit statué sur ses réquisitions tendant au placement en détention provisoire du mineur jusqu’à l’audience, dans les conditions prévues aux articles L. 334-1 à L. 334-5. » ;

a bis) Après le même 4°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le procureur de la République avise sans délai le juge des enfants afin qu’il puisse communiquer au juge des libertés et de la détention tout élément utile sur la personnalité du mineur et, le cas échéant, accomplir les diligences prévues à l’article L. 423-10. » ;

a ter) Aux première et dernière phrases du sixième alinéa, après le mot : « enfants » sont insérés les mots : « ou le juge des libertés et de la détention » ;

b) À la même dernière phrase, les mots : « parents du mineur, ses représentants légaux » sont remplacés par les mots : « représentants légaux du mineur » ;

c) À l’avant-dernier alinéa, les références : « 1° et 2° » sont remplacées par les références : « a et b du 1° » ;

d) (nouveau) La dernière phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : « et du juge des libertés et de la détention » ;

9° bis À l’article L. 423-10, après la référence : « L. 423-9 », sont insérés les mots : « ou avisé de la saisine du juge des libertés et de la détention aux mêmes fins » ;

10° L’article L. 423-11 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « main levée » sont remplacés par le mot : « mainlevée » et les mots : « la modification ou la révocation » sont remplacés par les mots : « ou la modification » ;

b) Les deuxième à dernière phrases sont supprimées ;

c) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu’il constate que le mineur n’a pas respecté les obligations du contrôle judiciaire ou de l’assignation à résidence avec surveillance électronique, le juge des enfants peut, si les conditions prévues aux articles L. 334-4 ou L. 334-5 sont réunies, communiquer le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions et saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de révocation de la mesure de contrôle judiciaire ou d’assignation à résidence avec surveillance électronique et de placement du mineur en détention provisoire.

« Le mineur placé en détention provisoire, ou son avocat, peut, à tout moment, demander sa mise en liberté. La demande est adressée au juge des libertés et de la détention, qui communique immédiatement le dossier au procureur de la République aux fins de réquisitions et demande au juge des enfants tout élément utile sur la personnalité et l’évolution de la situation du mineur. Le juge des libertés et de la détention statue dans les cinq jours suivant la communication au procureur de la République dans les conditions prévues aux troisième et avant-dernier alinéas de l’article 148 du code de procédure pénale. » ;

11° À l’article L. 423-12, les mots : « doit avoir » sont remplacés par le mot : « a » ;

11° bis Au premier alinéa de l’article L. 423-13, après le mot : « enfants », sont insérés les mots : « ou le juge des libertés et de la détention » ;

11° ter À l’article L. 431-2, après le mot : « convoqués », sont insérés les mots : « par tout moyen » ;

12° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 432-2, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « dernier » et le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « second » ;

13° À la deuxième phrase du 2° de l’article L. 433-3, la première occurrence du mot : « précité » est remplacée par les mots : « du code de procédure pénale » et, à la fin, la seconde occurrence du mot : « précité » est remplacée par les mots : « du même code » ;

14° À l’article L. 434-4, les mots : « parents ou » sont supprimés ;

15° À l’article L. 435-1, après le mot : « examen », sont insérés les mots : « ou l’un de ses représentants légaux » ;

16° À l’article L. 435-2, après le mot : « mineur », sont insérés les mots : « ou l’un de ses représentants légaux ».

Article 7
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Article 9

Article 8

Le livre V du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° L’article L. 511-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ils peuvent également ordonner aux autres parties de se retirer au moment de l’examen de la situation personnelle du mineur, leurs avocats restant présents. » ;

2° À la dernière phrase du dernier alinéa de l’article L. 512-3, après la référence : « L. 513-4 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

3° L’article L. 513-4 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, le mot : « compte-rendu » est remplacé par les mots : « compte rendu » ;

b) Au quatrième alinéa, le mot : « ne » est supprimé ;

c) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, le mot : « quatrième » est remplacé par le mot : « cinquième » ;

3° bis L’article L. 521-9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Une date de mise en place des mesures éducatives est communiquée à l’intéressé à l’issue de l’audience. » ;

4° À l’article L. 521-10, le mot : « prononcé » est remplacé par les mots : « ou de l’assignation à résidence avec surveillance électronique prononcés » ;

5° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 521-16, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou d’une assignation à résidence avec surveillance électronique » ;

6° Au premier alinéa de l’article L. 521-17, les mots : « parents ou » sont supprimés ;

6° bis À la première phrase du second alinéa de l’article L. 521-18 et du premier alinéa de l’article L. 521-19, le mot : « second » est remplacé par le mot : « deuxième » ;

7° Au premier alinéa de l’article L. 521-21, après la première occurrence du mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou de l’assignation à résidence avec surveillance électronique » et, après la seconde occurrence du mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou d’assignation à résidence avec surveillance électronique » ;

8° L’article L. 521-22 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou de l’assignation à résidence avec surveillance électronique » ;

b) Au deuxième alinéa, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou d’assignation à résidence avec surveillance électronique » ;

8° bis À la fin de la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 521-23, le mot : « réquisition » est remplacé par le mot : « réquisitions » ;

9° À la première phrase du second alinéa du même article L. 521-23, la première occurrence du mot : « par » est remplacée par le mot : « pour » ;

10° La seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 531-3 est ainsi modifiée :

a) Les mots : « il est » sont remplacés par le mot : « elle » ;

b) Sont ajoutés les mots : « , sauf si elle décide de faire application des dispositions de l’article L. 521-27 ».

Article 8
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Article 10

Article 9

Le livre VI du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 611-1, les mots : « main levée » sont remplacés par le mot : « mainlevée » ;

2° À l’article L. 611-7, les mots : « en assistance » sont remplacés par les mots : « d’assistance » ;

2° bis À l’article L. 612-2, après le mot : « convoqués », sont insérés les mots : « par tout moyen » ;

3° À l’article L. 621-1, les mots : « de seize à dix-huit » sont remplacés par les mots : « d’au moins seize » ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 621-2, les mots : « de grande instance » sont remplacés par le mot : « judiciaire » ;

4° bis Le chapitre unique du titre II est complété par un article L. 621-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 621-3. – Lorsqu’il s’agit d’un aménagement de peine pour lequel le juge d’application des peines peut imposer au condamné une ou plusieurs des obligations prévues en matière de sursis probatoire, le juge des enfants peut également imposer au condamné une des mesures mentionnées à l’article L. 122-2. L’obligation de respecter les conditions d’un placement en centre éducatif fermé ne peut toutefois être prononcée que dans le cadre du placement extérieur et de la libération conditionnelle. » ;

5° L’article L. 631-3 est ainsi modifié :

a) Aux premier et second alinéas, le mot : « fiches » est remplacé par le mot : « décisions » ;

b) Après la deuxième occurrence du mot : « mesure », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « est devenue définitive. » ;

6° Au premier alinéa de l’article L. 631-4, les mots : « d’une décision prise à l’égard d’un mineur, la rééducation » sont remplacés par les mots : « de la condamnation prononcée à l’encontre d’un mineur à une peine criminelle ou correctionnelle devenue définitive, le relèvement éducatif » et le mot : « acquise » est remplacé par le mot : « acquis » ;

7° L’article L. 632-3 est complété par les mots : « , sauf décision contraire spécialement motivée de la juridiction de jugement » ;

8° À l’article L. 632-5, les mots : « de treize à dix-huit » sont remplacés par les mots : « d’au moins treize ».

Article 9
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Article 11

Article 10

Le livre VII du code de la justice pénale des mineurs, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée, est ainsi modifié :

1° Au 2° des articles L. 711-3, L. 721-5 et L. 722-3, après la référence : « 63-4-4 », sont insérés les mots : « du même code » ;

2° À l’intitulé du titre II, les mots : « dans les îles de » sont remplacés par le mot : « à » ;

3° Aux articles L. 721-1, L. 722-1 et L. 723-1, les mots : « la rédaction résultant de l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 » sont remplacés par les mots : « leur rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs » ;

4° Au 3° de l’article L. 721-2 et au 1° des articles L. 722-2 et L. 723-2, après la seconde occurrence du mot : « références », sont insérés les mots : « aux dispositions » ;

5° À l’article L. 721-4, après le mot : « module », il est inséré le mot : « de ».

Article 10
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Article 7

Article 11

L’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 précitée est ainsi modifiée :

1° L’article 4 est ainsi modifié :

a) Au second alinéa des 7°, 9° et 10°, après les mots : « code de », il est inséré le mot : « la » ;

a bis) Après la première occurrence du mot : « décision », la fin du second alinéa du 10° est ainsi rédigée : « est devenue définitive. » ;

b) Au second alinéa du a du 11°, après le mot : « justice », il est inséré le mot : « pénale » ;

1° bis Au II et au III de l’article 5, la référence : « L. 413-5 » est remplacée par la référence : « L. 413-15 » ;

1° ter Le même article 5 est complété par un X ainsi rédigé :

« X. – La loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique est ainsi modifiée :

« 1° Au 4° de l’article 11-2, les mots : “à l’article 12-1 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante” sont remplacés par les mots : “au 2° de l’article L. 422-1 du code de la justice pénale des mineurs” ;

« 2° Le 7° de l’article 19-1 est ainsi modifié :

« a) Après le mot : “éducative,” sont insérés les mots : “d’une procédure devant le juge des enfants en matière pénale ou le tribunal pour enfants,” ;

« b) À la fin, les mots : “, d’une instruction ou d’une audience de jugement” sont remplacés par les mots : “ou d’une instruction” ;

« 3° L’article 64-2 est abrogé. » ;

2° À l’article 6, les mots : « s’entendent comme faisant référence » sont remplacés par les mots : « sont remplacées par des références » ;

2° bis Au 1° du VI de l’article 8, la référence : « l’ordonnance n° 2018-1125 du 12 décembre 2018 prise en application de l’article 32 de la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles et portant modification de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés et diverses dispositions concernant la protection des données à caractère personnel » est remplacée par la référence : « la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique » ;

3° Après l’article 8, sont insérés des articles 8-1 et 8-2 ainsi rédigés :

« Art. 8-1. – Le II de l’article 94 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice est abrogé.

« Art. 8-2. – Deux ans après l’entrée en vigueur de la présente ordonnance, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’application du code de la justice pénale des mineurs, précisant notamment les éventuelles avancées et difficultés rencontrées et préconisant, le cas échéant, des mesures complémentaires ou correctives. » ;

4° Le second alinéa de l’article 10 est ainsi rédigé :

« Toutefois, s’appliquent immédiatement les dispositions du code de la justice pénale des mineurs relatives aux mesures éducatives ainsi que, lorsqu’elles sont plus favorables aux mineurs à l’encontre desquels ces poursuites sont engagées, aux mesures de sûreté. »

Mme la présidente. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.

Articles 1er bis A à 6 bis

Mme la présidente. Sur les articles 1er bis A à 6 bis, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Article 7

Article 11
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Article 11 (début)

Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

a bis) Au deuxième alinéa, le mot : « obtenir » est remplacé par les mots : « doit recueillir » ;

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Il s’agit d’un amendement rédactionnel de coordination syntaxique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Le vote est réservé.

Articles 8 à 10

Mme la présidente. Sur les articles 8 à 10, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?…

Le vote est réservé.

Article 11

Article 7
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Article 11 (fin)

Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les références :

, 9° et 10°

par la référence :

et 9°

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Il s’agit d’un amendement rédactionnel de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Agnès Canayer, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté définitivement.)

Article 11 (début)
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10

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 17 février 2021 :

À quinze heures :

Questions d’actualité au Gouvernement.

À seize heures trente et le soir :

Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information relative aux conditions de la vie étudiante en France ;

Désignation des vingt-trois membres de la mission d’information intitulée « La méthanisation dans le mix énergétique : enjeux et impacts » ;

Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification (texte de la commission n° 357 rectifié, 2020-2021).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-deux heures cinquante-cinq.)

Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

ÉTIENNE BOULENGER