M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Les mentions sur la qualité du travail doctoral ont disparu. Depuis cette suppression, la seule possibilité offerte à un employeur pour connaître la qualité de la thèse est de lire le rapport de soutenance, qui peut préciser que le jury a adressé ses félicitations au candidat ; en général, ces rapports ne sont pas joints au dossier de recrutement.
Finalement, une telle homogénéisation nuit à la valorisation des doctorants en termes d’insertion professionnelle, sur les plans à la fois national et international.
Pour l’ensemble de ces raisons, je suis favorable à cet amendement, sous réserve d’introduire un délai non pas de six mois, mais d’un an pour la remise du rapport.
M. le président. Monsieur Decool, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par Mme la ministre ?
M. Jean-Pierre Decool. Tout à fait, monsieur le président !
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 80 rectifié bis, présenté par MM. H. Leroy et Frassa, Mmes Lherbier, Demas et Deromedi, M. Meurant, Mme Loisier, MM. Calvet et Houpert, Mme Belrhiti, MM. Paccaud, Bonne, Longeot, Lefèvre, Daubresse et Regnard, Mmes Paoli-Gagin et Bonfanti-Dossat, MM. Menonville, Babary, Bascher, Bouloux, Joyandet, Pellevat, P. Martin, B. Fournier, Bouchet, Savary, Wattebled, Belin et Decool, Mme Thomas et M. Tabarot, et ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le rétablissement des mentions pour les thèses de doctorat.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Par principe, dans la mesure où il s’agit d’une demande de rapport, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 80 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 4 bis
(Supprimé)
Article 5
I. – L’article L. 1242-3 du code du travail est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Lorsque l’employeur confie au salarié, dans les conditions fixées à l’article L. 431-5 du même code, des activités de recherche en vue de la réalisation d’un objet défini et qu’il s’engage à fournir au salarié une expérience professionnelle complémentaire au diplôme de doctorat prévu à l’article L. 612-7 du code de l’éducation. »
II. – Le chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la recherche est complété par un article L. 412-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 412-4. – Les établissements publics d’enseignement supérieur, les établissements publics à caractère scientifique et technologique et les autres établissements publics à caractère administratif dont les statuts prévoient une mission de recherche peuvent recruter des chercheurs, titulaires du diplôme de doctorat tel que prévu à l’article L. 612-7 du code de l’éducation, par un contrat de droit public dénommé “contrat post-doctoral”.
« Le contrat post-doctoral a pour objet l’exercice par le chercheur d’une activité de recherche dans le cadre d’un projet retenu au titre d’un appel à projets international ou national ou défini par l’établissement. L’activité proposée doit fournir au chercheur une expérience professionnelle complémentaire au doctorat lui permettant d’approfondir sa pratique de la recherche, de faciliter sa transition professionnelle vers des postes permanents en recherche publique ou privée et de prendre, le cas échéant, des responsabilités scientifiques au sein de l’établissement.
« Le contrat post-doctoral doit être conclu au plus tard trois ans après l’obtention du diplôme de doctorat, pour une durée minimale d’un an et maximale de trois ans. Le contrat est renouvelable une fois dans la limite totale de quatre ans. Le contrat peut être prolongé dans la limite de la durée des congés pour maternité ou adoption et des congés de paternité et d’accueil de l’enfant, de maladie et d’accident du travail. Il précise les engagements de l’établissement concernant l’accompagnement du bénéficiaire du contrat, notamment en matière de formation professionnelle et de périodes d’insertion professionnelle en France comme à l’étranger.
« Les modalités de recrutement, les conditions de l’exercice des fonctions et les mesures d’accompagnement des bénéficiaires de ces contrats sont fixées par décret en Conseil d’État. »
III. – Le chapitre Ier du titre III du livre IV du code de la recherche est complété par un article L. 431-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 431-5. – I. – Par dérogation à l’article L. 1221-2 du code du travail, un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu dans :
« 1° Les entreprises ayant une activité de recherche et bénéficiant d’un agrément au titre du crédit impôt recherche ;
« 2° Les établissements publics de recherche à caractère industriel et commercial ;
« 3° Les fondations reconnues d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche publique au sens de l’article L. 112-1 du présent code ;
« 4° Les établissements relevant de l’article L. 732-1 du code de l’éducation, dans le cadre de leurs activités de recherche, pour recruter un chercheur, titulaire du diplôme de doctorat prévu à l’article L. 612-7 du même code, en vue de la réalisation d’un objet défini.
« Le contrat doit être conclu au plus tard trois ans après la date d’obtention du diplôme de doctorat par le salarié.
« Un décret fixe la liste des établissements et fondations concernés.
« II. – Le contrat prévu au I est conclu pour réaliser des activités de recherche dans le cadre d’un projet retenu au titre d’un appel à projets international ou national ou défini par l’établissement.
« L’activité de recherche proposée doit fournir au salarié une expérience professionnelle complémentaire au doctorat.
« Les mesures d’accompagnement du salarié, notamment en matière de formation aux emplois et de périodes d’insertion professionnelle en France comme à l’étranger, sont fixées par décret en Conseil d’État.
« III. – La durée du contrat ne peut être inférieure à un an. La durée totale du contrat ne peut excéder quatre ans, compte tenu, le cas échéant, du ou des renouvellements intervenus dans les conditions prévues au IV. Le contrat peut être prolongé dans la limite de la durée des congés pour maternité ou adoption et des congés de paternité et d’accueil de l’enfant, de maladie et d’accident du travail.
« IV. – Le contrat prévu au I peut ne pas comporter de terme précis. Il est alors conclu pour une durée minimale et a pour terme la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu.
« Lorsque le contrat de travail prévu au même I comporte un terme fixé dès sa conclusion en référence à une durée de contrat ou une date de fin de contrat, il est renouvelable deux fois pour une durée maximale d’un an chacune. La durée du, ou, le cas échéant, des deux renouvellements, ajoutée à celle du contrat initial, ne peut excéder la durée maximale fixée au III.
« Les conditions de renouvellement sont stipulées dans le contrat ou font l’objet d’un avenant soumis au salarié avant le terme initialement prévu.
« V. – Outre les mentions figurant à l’article L. 1242-12 du code du travail, le contrat de travail prévu au I du présent article comporte également :
« 1° La mention “contrat à objet défini de recherche” ;
« 2° Une clause descriptive du projet et la mention de sa durée prévisible ;
« 3° La définition des tâches pour lesquelles le contrat est conclu ;
« 4° L’événement ou le résultat objectif déterminant la fin de la relation contractuelle, lorsque le contrat n’a pas de terme précis ;
« 5° Le délai de prévenance de l’arrivée au terme du contrat et, le cas échéant, de la proposition de poursuite de la relation de travail en contrat à durée indéterminée ;
« 6° Les mesures d’accompagnement, notamment en matière de formation aux emplois et de périodes d’insertion professionnelle en France comme à l’étranger.
« VI. – Par dérogation au 1° de l’article L. 1243-10 du code du travail, les dispositions relatives à l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8 du même code sont applicables lorsque le contrat prévu au I du présent article arrive à l’échéance du terme et que les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée.
« VII. – Outre les cas mentionnés à l’article L. 1248-2 du code du travail, est puni d’une amende :
« 1° De 3 750 €, le fait de méconnaître les dispositions du III du présent article relatives à la durée du contrat de travail à durée déterminée. La récidive est punie d’une amende de 7 500 € et d’un emprisonnement de six mois ;
« 2° De 3 750 €, le fait de renouveler le contrat de travail à durée déterminée en méconnaissance du IV du présent article. La récidive est punie d’une amende de 7 500 € et d’un emprisonnement de six mois. »
M. le président. L’amendement n° 83 rectifié, présenté par MM. H. Leroy et Frassa, Mmes Lherbier, Demas et Deromedi, M. Meurant, Mme Loisier, MM. Calvet et Houpert, Mme Belrhiti, MM. Paccaud, Bonne, Longeot, Lefèvre, Daubresse et Regnard, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Menonville, Babary, Joyandet, Guerriau, Pellevat, P. Martin, B. Fournier, Bouchet, Savary, Wattebled, Belin et Decool, Mme Thomas et M. Tabarot, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après les mots :
l’éducation,
insérer les mots :
et qualifiés par le Conseil national des universités,
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Le CNU, le Conseil national des universités, n’ayant pas vocation à qualifier les contractuels, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 84 rectifié, présenté par MM. H. Leroy et Frassa, Mmes Lherbier, Demas et Deromedi, M. Meurant, Mme Loisier, MM. Calvet et Houpert, Mme Belrhiti, MM. Paccaud, Bonne, Lefèvre, Daubresse et Regnard, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Menonville, Babary, Joyandet, Guerriau, Pellevat, P. Martin, B. Fournier, Bouchet, Savary, Wattebled, Belin et Decool, Mme Thomas et M. Tabarot, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après les mots :
du même code,
insérer les mots :
et qualifiés par le Conseil national des universités,
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 42 rectifié, présenté par Mmes S. Robert et Monier, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe, M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Devinaz, Gillé, P. Joly et Merillou, Mme Préville, MM. Redon-Sarrazy, Sueur, Kerrouche, Pla, Michau et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18
Après le mot :
emplois
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, de périodes d’insertion professionnelle et de poursuite de carrière en France comme à l’étranger, sont fixées par décret en Conseil d’État.
II. – Alinéa 29
Après le mot :
emplois
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, de périodes d’insertion professionnelle et de poursuite de carrière en France comme à l’étranger.
La parole est à Mme Sylvie Robert.
Mme Sylvie Robert. Le nombre de chercheurs qualifiés et titulaires d’expérience postdoctorale et le nombre d’ouvertures de postes par les établissements de recherche ou les universités ne concordent pas, le premier de ces deux chiffres étant très nettement supérieur au second.
Ainsi, le nombre d’années nécessaires avant qu’un jeune chercheur n’obtienne sa titularisation ne cesse de s’allonger. Dans le secteur privé, les embauches de jeunes chercheurs se réduisent également à peau de chagrin.
À défaut de pouvoir porter obligation aux établissements proposant des contrats postdoctoraux d’embaucher à l’achèvement de ceux-ci leurs titulaires, il conviendrait de s’assurer qu’un suivi de leur parcours est réellement organisé.
L’expérience postdoc est donc conçue pour servir de tremplin aux jeunes chercheurs entre leur période d’études et de doctorat et celle de leur entrée dans la vie professionnelle. Les établissements d’accueil devraient pouvoir jouer un véritable rôle de conseil et d’accompagnement dans la poursuite du cursus du jeune chercheur.
Le contrat postdoctoral doit ainsi constituer plus qu’un simple contrat suivant l’obtention du doctorat. Il doit être un instrument de professionnalisation des jeunes chercheurs.
Il revient donc au pouvoir réglementaire de préciser comment les établissements pourront, de façon contractuelle, prévoir non seulement des périodes d’insertion professionnelle, mais, plus concrètement, la poursuite de la carrière, en France ou à l’étranger, du jeune chercheur ayant effectué son postdoc auprès d’eux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Une telle précision étant la bienvenue, la commission est favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Un décret en Conseil d’État prévoira les mesures d’accompagnement du salarié, notamment celles qui sont relatives aux périodes d’insertion professionnelle en France comme à l’étranger. La poursuite de carrière et l’insertion professionnelle sont deux notions recouvrant le même objet, à savoir l’accompagnement du chercheur vers un emploi pérenne.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il se verrait contraint d’émettre un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 225, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 19, dernière phrase
Supprimer cette phrase.
II. – Après l’alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par exception, lorsque le contrat de travail a été suspendu pour une durée d’au moins trois mois consécutifs pour un motif tenant à la maternité, à la maladie ou à un accident du travail, un avenant peut être conclu pour renouveler le contrat de travail pour une durée égale à la durée de la suspension, dans la limite de neuf mois. Dans ce cas, la durée de la prolongation et le nombre de renouvellements sont ajoutés aux limites maximales fixées au IV ainsi qu’à l’alinéa précédent.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cet amendement étant similaire à l’amendement n° 223, je le considère comme défendu, monsieur le président. Il vise à reprendre les termes du droit du travail pour ce qui concerne les congés de maternité, de maladie ou liés à un accident du travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Par cohérence, la commission s’en tient à l’avis défavorable qu’elle a émis sur l’amendement n° 223.
En effet, dans l’objet de ces amendements, il n’était pas tout à fait clair que les termes introduits étaient cohérents avec ceux du code du travail.
M. le président. L’amendement n° 226, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Compléter cet alinéa par les mots :
avec le même employeur ou un autre employeur public ou privé, ou par un recrutement dans un corps de la fonction publique
La parole est à Mme la ministre.
Mme Frédérique Vidal, ministre. Cet amendement de précision vise à mieux cibler les situations où une « prime de précarité » doit être versée à la fin du contrat postdoctoral de droit privé créé par l’article 5.
Cette indemnité est due lorsque le contrat postdoctoral arrive à son terme et que l’intéressé ne poursuit pas son activité sur un emploi permanent, soit en contrat à durée indéterminée soit en intégrant un corps de la fonction publique, que ce soit avec le même employeur ou avec un autre employeur public ou privé.
Cette précision permet de souligner l’objectif qui doit être recherché dans le cadre du contrat postdoctoral : l’accompagnement du postdoctorant vise à lui permettre de trouver à l’issue du contrat un emploi permanent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Article additionnel après l’article 5
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 85 rectifié, présenté par MM. H. Leroy et Frassa, Mmes Lherbier, Demas et Deromedi, M. Meurant, Mme Loisier, MM. Calvet et Houpert, Mme Belrhiti, MM. Paccaud, Longeot, Bonne, Lefèvre et Daubresse, Mme Billon, M. Regnard, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Menonville, Babary, Joyandet, Guerriau, Pellevat, P. Martin, B. Fournier, Bouchet, Savary, Wattebled, Belin et Decool, Mme Thomas, M. Tabarot et Mme N. Delattre, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 111-7-1 du code de la recherche est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout candidat à la direction d’un établissement public de recherche est titulaire d’un doctorat. »
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 111 rectifié, présenté par MM. Ouzoulias et Bacchi, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 412-1 du code de la recherche est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Seuls les titulaires du diplôme national de doctorat peuvent diriger un établissement de recherche et d’enseignement supérieur. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Au travers de cet amendement, il s’agit de rendre obligatoire la détention d’un doctorat pour diriger un établissement de recherche et d’enseignement supérieur. Cela paraît une évidence ; pourtant, tel n’est pas le cas !
J’aurais aimé apporter également une précision concernant les recteurs, qui n’ont désormais plus l’obligation d’avoir un doctorat. Malheureusement, ce point relevant du domaine réglementaire, je n’ai pas pu compléter mon amendement.
Je vous le rappelle, mes chers collègues, dans le protocole signé entre les syndicats et le ministère, une disposition donne aux recteurs la possibilité d’intervenir sur les repyramidage et l’affectation des postes sur les chaires juniors.
Autrement dit, on donnerait aux recteurs, dans les universités, un pouvoir de censure sur les recrutements des universitaires, alors qu’eux-mêmes n’auraient pas le doctorat. Certes, quitte à détruire tous les éléments fondateurs du code de la fonction publique, pourquoi ne pas continuer sur cette lancée ? Je trouve ça, malgré tout, un peu surprenant…
M. le président. L’amendement n° 127 rectifié, présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, M. Regnard, Mme Deromedi, M. Calvet, Mme Joseph, MM. Bascher, Brisson, Savin, Bonne et de Legge, Mme Di Folco, M. Pointereau, Mme Lavarde et MM. Segouin, Grosperrin, Gremillet et Chevrollier, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 111-7-1 du code de la recherche est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Tout candidat à la direction d’un établissement public de recherche est titulaire d’un doctorat. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2023.
La parole est à M. Stéphane Piednoir.
M. Stéphane Piednoir. Dans la continuité de ce que vient de dire mon collègue Ouzoulias, il s’agit d’assurer la crédibilité des établissements publics de recherche sur la scène internationale ; à ce titre, il paraît légitime que tout candidat à la présidence d’un établissement public de recherche soit obligatoirement titulaire du grade de docteur. Je me réjouis, d’ailleurs, que cet amendement fasse l’objet d’un large consensus sur les diverses travées de notre hémicycle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Laure Darcos, rapporteure. Je comprends parfaitement l’idée des auteurs de ces amendements, d’autant plus que ce sujet a été longuement évoqué durant les auditions que nous avons menées.
Cependant, je voudrais faire deux remarques. Tout d’abord, je constate que les titulaires de ces postes sont, dans leur écrasante majorité, titulaires du doctorat, à une seule exception près, peut-être, qui ne semble pas, au demeurant, avoir démérité.
Par ailleurs, ces nominations relèvent pour la plupart de l’article 13 de la Constitution, qui ne limite en rien la faculté du Président de la République à désigner qui il le souhaite, pas plus, d’ailleurs, qu’il ne contraint les parlementaires que nous sommes à avaliser ce choix – nous l’avons vu.
Dès lors, je ne peux qu’émettre des réserves sur la constitutionnalité de cet amendement, et des doutes sur son intérêt. Son adoption pourrait, dans les quelques cas où cet obstacle s’avérerait opérationnel, priver la recherche d’autres types de talents. Je crois plus utile – nous y travaillons – d’imaginer une manière de renforcer la place du doctorat dans la haute fonction publique.
Avis défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Frédérique Vidal, ministre. Avis défavorable également sur ces trois amendements.
Je pense en effet que les rares dirigeants d’organismes publics de recherche qui ne sont pas docteurs ont remarquablement exercé leurs responsabilités. Il s’agit de personnalités du monde scientifique et technologique, comme l’impose le statut desdits organismes.
J’ajoute, ce qui rassurera peut-être M. Ouzoulias, que les recteurs interviennent lors du dialogue de gestion, en tant que représentants de l’État, dans le travail sur la répartition des chaires et des promotions. Il ne s’agit absolument pas pour eux de recruter qui que ce soit. C’est d’ailleurs une preuve supplémentaire qu’il y aura bien des chaires de professeur junior partout où les établissements voudront se saisir de ce statut.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la ministre, il y a un problème de fond avec les docteurs et la haute fonction publique. Nous sommes le pays du monde où le pourcentage de docteurs est le plus faible dans la haute fonction publique. Il y a là un problème éminent, qu’a mis en lumière M. Frédéric Thiriez dans un rapport qui a été enterré immédiatement après publication – dès qu’on touche aux corps de la haute fonction publique, on fait face à un mur.
Pour revaloriser le doctorat et pour envoyer un signal fort aux étudiants en leur indiquant qu’il pourrait y avoir de nouveaux débouchés destinés aux docteurs, nous avons besoin aujourd’hui de prendre des mesures contraignantes permettant l’accroissement du nombre de docteurs dans la haute fonction publique. C’est absolument indispensable.
Par ailleurs, cela ferait beaucoup de bien à la haute fonction publique, comme cela fait beaucoup de bien au Sénat que des titulaires du doctorat deviennent, de temps à autre, sénateurs. (Sourires.)
M. le président. On n’est jamais mieux servi que par soi-même… (Nouveaux sourires.)
La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. Même à une heure du matin, la tradition bonapartiste continue de régner sur le Sénat. On observe nettement un frottement, ici, entre, d’une part, la tradition des grands corps de l’État, et, d’autre part, le plus haut niveau académique, celui du doctorat.
Je suis assez sensible, de ce point de vue, aux propos de Pierre Ouzoulias comme à l’amendement de Stéphane Piednoir. Il s’agira bel et bien pour notre pays, un jour, de donner aux docteurs et au doctorat la place qu’ils méritent, parce qu’il s’agit du plus haut niveau académique. Ce n’est pas tout à fait, certes, la tradition française : celle-ci privilégie plutôt une tutelle, celle que Bonaparte avait su mettre sur l’université, s’affranchissant d’ailleurs, en la matière, des traditions antérieures et des autres modèles européens.
Je pense en tout cas que ce débat est important. Pierre Ouzoulias, tout à l’heure, râlait au sujet d’un amendement voté à une heure tardive ; mais, après tout, c’est ainsi que la République fut votée, par amendement. Et j’étais en parfait accord avec le sous-amendement de Stéphane Piednoir.
Ici, en revanche, il y a vraiment débat : il y va de la place des docteurs dans notre société et dans notre État. Et, madame la rapporteure, je suis désolé de devoir vous abandonner un peu pendant quelques minutes…
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir, pour explication de vote.
M. Stéphane Piednoir. Il ne s’agit nullement de remettre en cause la légitimité, l’efficacité ou la crédibilité des actuels directeurs d’établissements de recherche. Il s’agit de soutenir une disposition destinée aux futurs candidats, ce qui laisse le temps de mettre les choses en place et ne remet nullement en cause, je le répète, la situation de ceux qui occupent ces postes de direction aujourd’hui – précision utile, me semble-t-il.