M. Christophe-André Frassa. … à l’occasion de l’examen de textes dont le Sénat s’enorgueillit de débattre, comme la proposition de loi relative aux Français établis hors de France, du président Retailleau, et la présente proposition de loi.
M. Christophe-André Frassa. Cela dit, je retiens votre suggestion et je réfléchirai aux moyens de la mettre en œuvre.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3 rectifié bis, modifié.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur l’article.
M. Jean-Yves Leconte. Beaucoup d’orateurs l’ont dit, ce débat procède d’une bonne initiative du groupe Les Républicains ; cela nous permet de faire un peu le point sur la question et vous avez commencé de le faire en évoquant les mesures d’urgence mises en place pour faire face à la situation et pour accompagner les Français de l’étranger frappés par la crise du covid-19.
Je vous ai adressé, monsieur le secrétaire d’État, un courrier sur le sujet, parce que, en matière d’action sociale, il vaut mieux aider les gens qui ont des difficultés quand ils se tiennent encore debout et qu’ils savent que leurs revenus vont baisser, plutôt que d’attendre qu’ils ne soient à terre.
Or les conditions de mise en place de l’action sociale dans le cadre du plan d’aide me semblent particulièrement restrictives et l’aide me paraît extrêmement faible. Pour le propriétaire d’un petit restaurant, une aide de 150 euros par mois au maximum ne suffira pas, surtout si, pour pouvoir la recevoir, il faut en plus ne pas être éligible à une aide locale.
Prenons un exemple. À Madagascar, une famille était éligible au rapatriement sanitaire à cause du confinement ; en raison d’une aide de 25 euros du gouvernement malgache, cette famille n’est plus éligible au dispositif d’aide sociale mis en place dans le cadre de l’aide de 50 millions d’euros. Voilà où nous en sommes avec les conditions actuelles ! Avec de telles conditions, l’enveloppe de 50 millions d’euros ne sera pas dépensée !
Si vous voulez vraiment aider les Français qui font face à des difficultés sociales majeures, vous devez faire sauter cette condition d’inéligibilité aux dispositifs du pays d’accueil. Sans doute, il y a, dans certains pays d’accueil, des dispositifs suffisants, voire meilleurs que les nôtres, mais lorsqu’un dispositif représente 20 euros par mois pour l’ensemble d’une famille, ça ne tient plus !
Second point, nous avons demandé que les entreprises et les Français qui contribuent à la présence internationale de la France puissent bénéficier de certaines dispositions mises en place pour les entreprises en France, des garanties bancaires.
Mme la présidente. Il faut conclure !
M. Jean-Yves Leconte. La moitié des entreprises créées par des Français de l’étranger engendrent plus de quatre emplois en France ; c’est bon pour les Français en difficulté et c’est bon pour notre économie.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. L’intervention du sénateur Leconte mérite réponse.
Je suis sensible à cette argumentation, c’est pourquoi j’ai tenu, à l’occasion de cette séance, à mettre les chiffres sur la table ; cela permet de faire un retour d’expérience de la mise en œuvre de ce plan.
La montée en puissance du plan de 50 millions d’euros se fait de façon très progressive ; on le mesure en rapportant ses 2 700 bénéficiaires à l’ensemble des Français établis hors de France. Nous sommes dans le cadre d’un dispositif validé à l’échelon interministériel et la commission des finances, qui est en contact étroit et régulier avec le 139 rue de Bercy, sait quels types de contraintes peuvent provenir de ce côté-là…
Toutefois, instruit de ce retour d’expérience, je suis, je l’avoue, plutôt favorable à l’idée d’une réflexion prochaine sur un assouplissement de certains critères, afin de prendre en compte plus de situations ; cela me semble aller plutôt dans le bon sens. Je ne vous dis pas que tous les combats seront gagnés, mais ils doivent tous être menés, et j’ai envie que nous menions celui-ci ensemble.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er
Mme la présidente. L’amendement n° 1, présenté par MM. Leconte et Féraud, Mmes Conway-Mouret, Lepage et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les conseils consulaires sont consultés avant toute décision relative au versement d’une subvention de l’État versée à un organisme local d’entraide et de solidarité ou à un centre médico-social particulièrement en période de crise sanitaire, de catastrophe naturelle ou de crise politique grave. L’avis du conseil consulaire porte sur le montant et l’usage de la subvention.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Je profite de l’occasion qui nous est donnée par le groupe Les Républicains pour demander, au travers de cet amendement, plus de concertation avec les conseils consulaires dans un certain nombre de cas.
Il y a, cela a été évoqué, des conseils consulaires en format « action sociale », qui, dans un cadre précis, peuvent accorder, même hors crise, un certain nombre de prestations aux personnes de plus de 65 ans, aux adultes ou aux enfants handicapés ou encore aux enfants en détresse. Mais il y a aussi des subventions versées à des organismes locaux d’entraide et de solidarité.
Le problème est que ces subventions ne font pas l’objet du même contrôle des conseils consulaires que celui auquel sont assujetties les aides accordées directement auprès des Français. Finalement, les subventions accordées aux organismes locaux d’entraide et de solidarité sont évoquées en conseil consulaire et sont, ensuite, versées, de manière discrétionnaire, par la direction des Français à l’étranger et de l’administration consulaire (DFAE), sans que le conseil permanent pour l’action sociale puisse se prononcer.
C’est la raison pour laquelle nous proposons d’inscrire dans la loi que les conseils consulaires seront consultés avant toute décision relative au versement d’une subvention de l’État versée à un organisme local d’entraide et de solidarité ou à un centre médico-social, particulièrement en période de crise. L’avis du conseil consulaire portera sur le montant et l’usage de la subvention de manière à éviter que ces subventions ne soient versées de manière discrétionnaire par la DFAE, sans avoir obtenu un avis précis et déterminé pour chaque subvention et pour chaque organisme local d’entraide et de solidarité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jérôme Bascher, rapporteur. Tout d’abord, je veux le dire à M. Leconte et au groupe socialiste et républicain : j’ai été très embêté par cet amendement, qui présente, avec le périmètre adopté par la commission des finances concernant l’application de l’article 45 de la Constitution, des « points d’adhérence ». Il a donc fallu toute la bienveillance de la commission des finances et du bureau du Sénat pour que cet amendement puisse être examiné en séance.
Toutefois, soyons républicains : n’hésitons pas à consulter les instances représentatives.
Eu égard au caractère un peu ambigu de cet amendement, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet un avis de sagesse bienveillante, car nous nous inscrivons déjà dans cette philosophie ; l’avis des conseils consulaires est systématiquement recherché concernant les 78 organismes locaux d’entraide et de solidarité (OLES) et nous nous efforçons de le respecter.
Néanmoins, quand un avis est donné pour un montant de, disons, 700 000 euros et qu’il n’y a finalement que 400 000 euros à répartir, il faut ajuster les choses ; c’est là qu’il peut y avoir quelques nuances. Toutefois, sur le principe, cet avis doit être recherché et je n’ai pas de problème à ce que ce soit inscrit dans la loi.
Cet avis a d’ailleurs été recherché pour les subventions complémentaires liées à la crise du covid-19. Je vais donc vous transmettre la liste de l’ensemble des demandes de subventions destinées aux organismes locaux d’entraide et de solidarité, que nous avons transmise à la commission nationale du soutien au tissu associatif des Français de l’étranger (Stafe). J’en ai les tableaux sous les yeux et je les ferai parvenir à tous les parlementaires représentant les Français de l’étranger. Vous aurez ainsi toutes les informations à ce sujet.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour explication de vote.
M. Ronan Le Gleut. L’objet de cet amendement est de prévoir une consultation du conseil consulaire pour tout versement d’une subvention de l’État à un organisme local d’entraide et de solidarité ou à un centre médico-social.
Il s’agit, selon moi, d’une très bonne disposition, qu’il faut soutenir ; cela correspond tout à fait à la vocation de ces élus au suffrage universel direct que sont les conseillers consulaires.
Je suis tout à fait favorable à cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.
Article 2
Les conséquences financières résultant pour l’État de l’article 1er sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié quater, présenté par MM. Guerriau, Frassa, Laufoaulu, del Picchia, Decool, Bignon, Chasseing, A. Marc, Capus, Lagourgue et Menonville, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les conséquences financières résultant pour l’État de l’article 1er sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus à l’article 1609 quatervicies A.
La parole est à M. Joël Guerriau.
M. Joël Guerriau. Cet amendement, que j’ai déposé avec Christophe-André Frassa, vise à ouvrir des pistes pour le financement de ce fonds d’urgence destiné aux Français de l’étranger victimes de catastrophes naturelles ou d’événements politiques majeurs.
Il s’agirait de financer ce fonds par une augmentation de la taxe sur les nuisances sonores aériennes, en lieu et place du gage habituel. En effet, plutôt que le gage classique consistant en une augmentation des droits et taxes sur les alcools et tabacs, nous avons recherché quelques idées, plus liées à l’international.
Les différentes taxes sur l’aviation sont de vraies pistes, sans jeu de mots. Nous avons donc été écologistes avant le résultat des élections municipales ; nous pensons qu’une augmentation de la taxe sur les nuisances sonores aériennes serait opportune, d’autant plus qu’elle repose sur tous les gros avions, quelle que soit leur nationalité. L’intérêt d’une telle mesure réside dans le fait que l’État disposerait immédiatement d’un fonds pour intervenir, dans les plus brefs délais, en faveur des Français de l’étranger en temps de crise. L’affectation de crédits, par le Parlement, constitue nécessairement une étape de la réponse étatique, mais elle est moins immédiate.
Initialement, nous souhaitions prévoir l’augmentation de 10 % du tarif des passeports, mais cette proposition n’était malheureusement pas recevable au regard de l’article 40 de la Constitution. Nous nous sommes donc limités à la hausse de la taxe sur les nuisances sonores aériennes.
Tel est l’objet de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jérôme Bascher, rapporteur. Je ne voudrais pas que l’on me croie coupable de laxisme budgétaire ; je ne suis pas connu pour cela et je n’ai pas l’intention de changer.
Le laxisme budgétaire consisterait à inscrire, dans ce fonds d’urgence, des dépenses par trop importantes. J’ai proposé des modalités, comme l’inscription de la réserve de précaution, qui est faite pour cela, et l’abondement progressif, d’année en année, de ce fonds, selon une trajectoire budgétaire dont nous discuterons dans environ deux semaines, dans le cadre du débat d’orientation des finances publiques.
Il y a, à ce stade, peu de crédits donc peu de gages nécessaires. Monsieur Guerriau, vous proposez un gage qui semble logique, en affectant une taxe qui concerne les Français de l’étranger à la création de ce fonds d’urgence, dans une forme de solidarité. Je reste toutefois perplexe, parce que ce gage est hypothétique ; surtout, il constitue un mauvais signal pour nos aéroports et nos compagnies aériennes, qui, chacun peut le reconnaître, ne se portent pas bien.
La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat, mais c’est un avis de sagesse à tout le moins dubitative, voire défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État. Je rejoindrai le rapporteur dans son avis de « sagesse dubitative ».
On traite ici d’une taxe qui n’est pas du tout soumise, pour l’instant, à un tel fonctionnement. Celle-ci est affectée à la lutte contre les nuisances sonores et il faudrait toucher au mécanisme de la taxe pour rendre le dispositif opérationnel. Il existe des mécanismes traditionnels de gage, qui paraissent plus opérants.
Mme la présidente. La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour explication de vote.
M. Christophe-André Frassa. Vous l’aurez compris, mon collègue Joël Guerriau et moi-même avons essayé de trouver un gage qui ne soit pas l’éternel, pour ne pas dire le sempiternel, gage reposant sur les taxes additionnelles sur les produits d’alcool et de tabac.
M. Christophe-André Frassa. En effet, merci de le souligner, c’est un amateur qui vous le dit ; un amateur de tabac, de cigares, je tiens à le préciser pour le compte rendu, pour ne pas être sujet, dans les générations futures, à certains sous-entendus… (Nouveaux sourires.)
Évidemment, il aurait été plus logique de penser à une taxe sur les passeports ; c’était notre idée première, mais nous avons dû passer sous les fourches caudines de l’article 40 de la Constitution. Le passeport touche tant les Français qui vivent à l’étranger que les Français qui partent en voyage et qui figurent – vous en conviendrez – parmi les premiers candidats quand il s’agit de faire rentrer en France près de 300 000 Français bloqués à l’étranger en cas de catastrophe sanitaire, ce qui coûte aussi de l’argent. Cela aurait peut-être été la solution la plus satisfaisante, mais nous n’avons pas pu le faire.
Il y a une autre solution, monsieur le secrétaire d’État : lever le gage, tout simplement. Cela vous appartient ; cela appartient au Gouvernement. Sinon, celui-ci peut déposer un amendement pour introduire cette taxe sur les passeports, qui semble plus logique.
Ce que mon collègue Joël Guerriau et moi-même avons souhaité, c’est avoir ce débat avec vous, monsieur le secrétaire d’État, et avec la commission, afin de cheminer vers une solution plus pérenne. Pour ma part, je ne suis pas un jusqu’au-boutiste de la taxe sur les nuisances sonores aériennes, mais c’était la solution la plus commode et, Joël Guerriau l’a souligné, c’était une piste.
Cela dit, si elle ne recueille pas l’assentiment de la commission, le vôtre ni celui de nos collègues, je laisse le soin à Joël Guerriau d’en tirer les conséquences.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Cela fait des dizaines d’années que les parlementaires gagent leurs velléités de dépenses en faisant payer les fumeurs. Tout le monde le comprend, d’ailleurs ; on sait très bien que ce n’est pas pour les faire payer, c’est une manière d’équilibrer les recettes.
Ce gage est donc un peu dérangeant.
M. Jean-Yves Leconte. Si l’on change le gage, de manière exceptionnelle, cela sera le signe que nous souhaitons financer le fonds ainsi.
M. Jean-Yves Leconte. Par conséquent, je ne suis pas sûr que ce soit franchement utile, surtout dans la période que nous vivons, puisque l’industrie aéronautique ne se porte pas bien. Je ne suis pas sûr que ce soit le moment de remplacer les cigares par les réacteurs, cher Christophe-André Frassa…
On pourrait évidemment réfléchir à d’autres recettes spécifiques pour financer le fonds. Nous avons essayé de le faire ; c’est difficile, d’autant que l’affectation de taxes plutôt que le recours au budget global de l’État n’est pas nécessairement la meilleure solution.
Il me paraît donc préférable d’en rester au gage classique, et d’adresser un message en ce sens au Gouvernement. L’objectif n’est pas de mettre particulièrement à contribution les fumeurs. Simplement, la Constitution est ainsi faite : quiconque a des velléités de dépenses doit prévoir un gage. Or il s’agit systématiquement d’un gage sur le tabac.
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. Je suis assez perplexe. J’ignore ce qu’est un avis de « sagesse dubitative » et quelle peut en être la traduction au moment d’un vote.
Je souscris aux propos de mon collègue Jean-Yves Leconte : en France, le transport aérien est déjà soumis à de nombreuses taxes, bien plus que dans d’autres pays ; je ne crois pas que ce soit le moment d’en créer de nouvelles.
Le gage sur le tabac revêt une dimension morale : chacun peut décider de fumer ou non. Mieux vaut, me semble-t-il, en rester là.
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je suis également opposée à une telle taxe sur le transport aérien, qui ne me paraît absolument pas opportune.
Je ne me prononcerai pas sur le gage sur le tabac, cette tarte à la crème que l’on nous sort sur quasiment chaque proposition de loi.
Dans mes propositions de loi de 2008 et 2016, j’avais suggéré, outre la taxe sur les passeports – d’autres l’ont fait ensuite –, un gage relatif aux successions en déshérence, qui représentent des montants considérables. À mon sens, cela pourrait constituer une bonne source de financement pour un tel fonds.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Alors que nous essayons de faire repartir le transport aérien régional – je pense aux petites lignes, par exemple au départ des aéroports de Brive-la-Gaillarde ou d’Aurillac – et que les compagnies veulent se retirer, il ne me paraît pas judicieux d’instituer une telle taxe.
Ma collègue Josiane Costes vous dirait que le trajet entre Aurillac et Paris en train prend sept heures, contre une heure dix minutes en avion ; avouez que c’est tout même plus commode !
Pourquoi pas, en effet, une taxe sur les passeports ?
Si tous les gages sur le tabac qui sont proposés étaient adoptés, le paquet de cigarettes serait à 100 euros ou 200 euros ; bien entendu, ce ne sont que des simulations ! (Sourires.)
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.
M. Joël Guerriau. Vous savez dans quelle direction je vais me diriger…
J’ai entendu les arguments des uns et des autres. Je pense que ce débat devait avoir lieu. Je ne suis pas d’accord avec tout ce qui a été dit.
Premièrement, notre proposition vise à élargir le spectre, afin de ne pas en rester à un financement strictement national. En l’occurrence, cela concernerait aussi l’étranger. Entre parenthèses, cher Christophe-André Frassa, dès lors que les cigares viennent de l’étranger, il n’est pas illogique de recourir à la taxation du transport aérien !
Deuxièmement, il y a, je le crois, un peu d’exagération. Soyons sérieux ! Le montant que nous proposons ne va pas empêcher les compagnies aériennes de poursuivre leur activité. C’est un montant ridicule au regard du trafic aérien auquel nous sommes habitués au quotidien !
M. Jean-Pierre Grand. Il est presque nul aujourd’hui !
M. Joël Guerriau. Ne faisons pas comme si toutes les compagnies allaient s’effondrer demain matin !
Troisièmement, comment peut-on dire que la question n’est pas d’actualité ? Regardez le message que les électeurs ont envoyé sur l’écologie lors des municipales !
Envisager une taxation aérienne qui ne soit pas strictement nationale s’agissant d’un sujet qui concerne l’international ne me paraît donc ni choquant ni en décalage avec l’actualité du moment !
Je pense que c’est une mesure écologique et qu’il n’y avait pas forcément lieu de la balayer d’un revers de main, à plus forte raison au regard de ce qui vient de se passer dans les urnes.
Cela étant, même si nous avons souhaité ouvrir un tel débat, nous allons retirer notre amendement, afin de pouvoir aboutir à un vote unanime sur cette excellente proposition de loi déposée par notre collègue Ronan Le Gleut. (Mme Jacky Deromedi applaudit.)
M. Jérôme Bascher, rapporteur. Je remercie M. Guerriau d’avoir suscité ce débat. Le sujet du gage est une ritournelle. En tant que rapporteur sur ce texte, je ne me voyais pas entrer dans une discussion qui mériterait des modifications législatives organiques, voire constitutionnelles, puisqu’il s’agit de l’aggravation des charges publiques. Nous devons pouvoir débattre de la question ; ce n’est pas la première fois qu’elle est soulevée.
Les membres de l’Assemblée nationale et du Sénat doivent retrouver la plénitude de leur droit d’amendement pour décider des recettes et des dépenses. L’existence des parlements se fonde, je le rappelle, sur la création et le vote de l’impôt.
Je remercie M. Guerriau de son esprit d’unanimité, qui a dominé tous nos débats.
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je remercie Ronan Le Gleut. Ce débat a été utile, et il a permis de préciser certaines évolutions possibles du plan d’urgence en faveur des Français de l’étranger.
Monsieur le secrétaire d’État, puisque nous sommes le 30 juin, pouvez-vous nous apporter quelques éléments sur le rapport relatif à la fiscalité qui doit être présenté au Parlement ?
Nous n’avons pas épuisé les sujets concernant les Français de l’étranger… Merci pour ce moment (Rires sur les travées du groupe SOCR.), mais nous avons encore besoin de précisions sur les intentions du Gouvernement en matière de fiscalité, s’agissant notamment de la retenue à la source. Serait-elle ou non libératoire ? Vous connaissez notre position sur le sujet ; nous souhaiterions connaître celle du Gouvernement.
Mme la présidente. Monsieur Jean-Yves Leconte, ce n’était pas vraiment une explication de vote. (Sourires.)
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Notre groupe soutiendra la présente proposition de loi, qui va visiblement tous nous rassembler aujourd’hui.
J’ai été particulièrement sensible à la conviction de MM. Olivier Cadic, Christophe-André Frassa et Jean-Yves Leconte quant à la nécessaire consultation préalable des premiers concernés sur l’utilisation des fonds d’urgence. En ce moment, nous votons beaucoup de fonds d’urgence face à la crise ; nous allons encore le faire dans le projet de loi de finances rectificative qui s’annonce à la mi-juillet. Puisse l’idée de la consultation des salariés – nous débloquons beaucoup d’argent en faveur des entreprises – bénéficier du même soutien que lorsqu’il s’agit des Français de l’étranger !
J’espère que l’idée de la consultation préalable des premiers intéressés a de l’avenir. Pour notre part, nous continuerons de faire des propositions dans ce sens. Vous aurez des occasions de soutenir ce principe, comme nous soutenons aujourd’hui la présente proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SOCR.)
M. Jérôme Bascher, rapporteur. Bien vu !
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Le Gleut, pour explication de vote.
M. Ronan Le Gleut. C’est avec une certaine émotion que je vois une idée ayant traversé les décennies se concrétiser aujourd’hui. Dans les travaux préparatoires, j’ai eu l’occasion de discuter avec nombre d’anciens parlementaires qui en avaient connu la genèse.
Le général de Gaulle déclarait : « La France ne peut être la France sans la grandeur. » Or cette grandeur, c’est-à-dire le message universel que la France porte à travers le monde, ne peut pas exister sans les Français qui vivent à l’étranger, qu’il s’agisse de notre commerce extérieur, c’est-à-dire de notre capacité à exporter nos produits et notre savoir-faire, de notre langue, l’une des plus grandes du monde, ou de notre diplomatie.
Je pense donc que nous vivons un moment important.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jérôme Bascher, rapporteur. Je tiens à remercier les fonctionnaires de la commission des finances qui ont travaillé à mes côtés, ainsi que vos services, monsieur le secrétaire d’État. Vous nous aviez répondu rapidement. Certes, du temps a passé depuis l’examen du texte en commission.
Je me réjouis de l’intérêt de nos collègues pour le sujet. D’aucuns pourraient croire que les textes relatifs à l’outre-mer n’intéressent que les sénateurs ultramarins et que les textes relatifs aux Français de l’étranger n’intéressent que les sénateurs des Français de l’étranger. Pour ma part, à l’instar de notre collègue Ronan Le Gleut, je me référerai au général de Gaulle, qui, dans une très belle expression, déclarait ne connaître que la communauté nationale !
Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
Mme la présidente. Je constate que la proposition de loi a été adoptée à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)