M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaiterais interroger le Gouvernement sur deux points précis.
Premièrement, six mois après sa promulgation, la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, ou loi Énergie-climat, connaît un début d’application extrêmement difficile, avec, à la date du bilan établi par la commission, une dizaine de mesures réglementaires publiées sur environ 70 décrets ou arrêtés prévus, une ordonnance prise sur cinq articles et 15 habilitations, aucun rapport formellement remis au Parlement sur les six attendus du Gouvernement.
Un quart des ordonnances aurait déjà dû être publié, la ministre de la transition écologique et solidaire ayant indiqué devant notre commission faire usage de la prolongation de quatre mois des délais permise par la loi d’urgence sanitaire.
Toutefois, monsieur le ministre, il y a pire que le retard. Pour ce qui concerne la programmation pluriannuelle de l’énergie, certains objectifs sur le biogaz, l’hydrogène ou l’éolien en mer ne sont pas ceux qui avaient été adoptés par le législateur. Cela constitue un dévoiement inacceptable de l’esprit de la loi.
Ce constat est regrettable compte tenu des objectifs énergétiques et climatiques ambitieux visés dans cette loi, et encore davantage aujourd’hui, alors que se termine la Convention citoyenne. Je note au passage que la lenteur dans l’application de la loi contraste avec les délais particulièrement contraints que le Gouvernement nous avait imposés à l’été dernier.
À quelle échéance paraîtront les ordonnances, notamment celles qui sont déjà en retard ? Je comprends évidemment que la crise est passée. Qu’en est-il des principaux décrets prévus ?
Deuxièmement, à l’instar de notre collègue Valérie Létard, je souhaite aborder la gouvernance d’Action logement. Derrière cette question technique, c’est la pérennité de la mission et du groupe paritaire qui est en jeu. Notre pays fait face à une crise économique majeure. Il faut donner les moyens à Action logement de fonctionner normalement. J’ai bien compris qu’une inspection était en cours, mais c’est aussi faire œuvre de résistance face à la volonté du Parlement.
Nous attendons donc que le Gouvernement agisse rapidement pour lever ce blocage.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la présidente de la commission des affaires économiques, j’ai effectivement un souvenir assez précis des conditions de délai de l’été dernier.
Vous m’interrogez sur la loi énergie-climat. En effet, vingt-six mesures sont à prendre pour appliquer ce texte. Au 19 juin 2020, six ont été publiées, soit un taux de 23 %, ce qui est effectivement faible. Comme vous l’avez vous-même souligné, la crise sanitaire explique une partie de ces retards dans la publication des mesures d’application.
La majorité des textes à prendre dans le délai de six mois sont des décrets en Conseil d’État, avec une phase de consultation obligatoire au cours des mois de février et mars, notamment en Commission de régulation de l’énergie ou encore le Conseil supérieur de l’énergie, et la saisine du Conseil d’État au cours des mois de mars et avril, pour une publication au plus tard au mois de mai 2020.
La période de confinement de deux mois a donc conduit à décaler le calendrier. Toutefois, je peux d’ores et déjà vous indiquer que le décret relatif à l’autorité environnementale a été examiné par la section des travaux publics du Conseil d’État le 16 juin 2020 et devrait être publié prochainement et que le décret relatif aux aides pour l’électrification rurale est en cours de transmission au Conseil d’État.
Les travaux se poursuivent par ailleurs. Les textes concernant les garanties d’origine du biogaz représentant six mesures d’application sont en cours de consultation, avec une perspective de saisine du Conseil d’État en juillet. Les mesures sur la fin des tarifs réglementés de vente de gaz et les fournisseurs de dernier recours, qui concernent sept mesures, ont été mis dans le circuit des consultations.
Sur les 16 ordonnances prévues par cette loi, 4 ont été prises, les autres ont vu le terme de leur habitation prorogé de quatre mois par la loi du 23 mars dernier. Six habilitations feront l’objet d’ordonnances qui devraient être examinées en conseil des ministres au mois de juillet prochain. Elles portent sur l’adaptation du droit de l’Union européenne dans le domaine de l’énergie et du climat, sur les procédures du comité de règlement des différends de la Commission de régulation de l’énergie et sur la fermeture des centrales à charbon.
Enfin, comme je l’ai indiqué, le Gouvernement envisage une évolution de la gouvernance d’Action logement pour faire suite à des dysfonctionnements. Dans l’attente d’une telle évolution, l’adoption de nouvelles dispositions réglementaires relatives à la gouvernance du groupe a été effectivement suspendue.
Il est vrai que le délai est long et que la volonté du Gouvernement est désormais d’aller assez vite. Je ne peux pas vous donner une date, mais je relayerai vos préoccupations auprès de Julien Denormandie.
À propos du comité des partenaires du logement social, rien n’interdit à Action logement de réunir les élus et les opérateurs du logement de façon informelle.
Vous avez également abordé la suppression de certaines incompatibilités de fonctions dans les conseils d’administration du groupe Action logement ; les dispositions de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, ou loi ÉLAN, autorisent certaines évolutions des statuts, mais ne les imposent pas.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires étrangères.
M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le bilan est globalement satisfaisant pour la commission des affaires étrangères et de la défense. Cette année, nous avons adopté dix-neuf conventions internationales, et nous avons poursuivi la mise en application des lois des sessions antérieures.
Bien entendu, ce que nous suivons avec le plus d’attention, c’est la mise en œuvre de la loi du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025. Nous pouvons donner acte au Gouvernement que l’ensemble des décrets et ordonnances ont été publiés. À ce jour, le taux d’application est de 92 %, ce qui, deux ans après, peut être considéré comme satisfaisant. Il manque deux arrêtés, mais qui sont d’importance mineure.
Le Gouvernement pourrait améliorer ces statistiques, puisque nous restons bloqués à 83 % d’application. Mais il y a toujours ce fameux décret de la loi de juillet 2010 sur l’allocation au conjoint d’un agent au service étranger qui manque à l’appel ; j’imagine que ce sont plus des questions juridiques et financières qui bloquent ce dispositif. Nous le rappelons chaque année.
Autre élément de satisfaction, on constate un net progrès dans la transmission des rapports, notamment pour tout ce qui relève des opérations extérieures et intérieures. Pour la première fois, cela a été transmis. Nous vous en remercions.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président de la commission des affaires étrangères, je vous remercie de ces mots, qui nous encouragent à faire mieux encore ; sur un bulletin scolaire, vous auriez inscrit : « peut mieux faire » ! (Sourires.) Mais je prends acte de vos encouragements.
M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Nous essayons d’être bienveillants !
M. Marc Fesneau, ministre. Vous m’avez interrogé sur l’allocation au conjoint d’un agent civil de l’État à l’étranger. Certes, il s’agit d’une loi votée en 2010…
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Vous n’êtes pas coupable !
M. François Bonhomme. C’était un autre gouvernement !
M. Marc Fesneau, ministre. Dix ans ont passé. La loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État prévoit, en son article 21, la mise en place d’une « allocation au conjoint versée au conjoint ou au partenaire lié par un pacte civil de solidarité de l’agent civil de l’État en service à l’étranger qui n’exerce pas d’activité professionnelle ou qui exerce une activité professionnelle pour laquelle il perçoit une rémunération brute totale annuelle inférieure ou égale à un montant fixé par voie réglementaire ».
Ce dispositif avait pour vocation de remplacer l’actuel supplément familial versé directement à l’agent expatrié lorsque son conjoint se trouve dans une situation similaire à celle qui est prévue dans le texte de 2010.
La mise en œuvre de cette nouvelle allocation s’est toutefois heurtée à deux principales difficultés ; vous en avez d’ailleurs évoqué au moins une.
D’une part, sur le plan technique, il n’est pas possible d’indemniser sur le titre II une personne pour laquelle il n’existe aucun lien juridique avec l’État.
D’autre part, la direction générale des finances publiques et la direction de la sécurité sociale ont une interprétation différente – c’est le sujet juridique que nous avons devant nous – du régime social appliqué à cette nouvelle allocation. Ce projet reste donc à ce jour suspendu, mais je relayerai là aussi auprès des ministres concernés la nécessité d’avancer plus vite.
Il n’y a aucune raison que la crise remette en cause la trajectoire financière de la loi de programmation militaire ; cela a d’ailleurs été rappelé par la ministre des armées. Comme l’a indiqué Mme Parly, auditionnée par la commission de la défense le 4 juin dernier, nous avons une feuille de route claire : la loi de programmation militaire reste la référence absolue.
L’engagement sans faille du service de santé des armées pendant la crise sanitaire, le poids important de la commande publique militaire dans notre tissu industriel et la nécessité de nous préparer correctement aux crises de tous ordres que nous voyons émerger dans le monde et qui pourraient encore survenir sont autant d’éléments qui nous conduisent à rester fidèles à nos engagements pris collectivement pour nos armées en 2018.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture.
Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au cours de la session écoulée, cinq textes ont été promulgués dans le secteur de compétence de notre commission.
Seule la loi pour une école de la confiance nécessitait un nombre important de mesures réglementaires. Au 31 mars 2020, le taux d’application était acceptable, de l’ordre de 60 %. Nous avons eu l’occasion d’échanger par écrit sur le calendrier des contenus des mesures restant à prendre avec le Secrétaire général du Gouvernement, ainsi qu’avec Jean-Michel Blanquer. Je n’y reviendrai donc pas.
Sur les quatre autres textes, je constate que la mise en œuvre des deux lois d’initiative parlementaire se révèle particulièrement difficile. La loi du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l’information n’a à ce jour démontré ni son efficacité ni sa pertinence. Le Sénat s’était d’ailleurs fermement opposé à son adoption, tout comme à celle plus récemment, de l’article 1er de la loi Avia contre la haine en ligne, justement censuré jeudi dernier par le Conseil constitutionnel.
La loi relative à la rémunération des journalistes et éditeurs sur les plateformes en ligne au titre des droits voisins se trouve, quant à elle, privée de son applicabilité par le refus des plateformes de se conformer à la loi. On ne peut que le déplorer.
Ces textes montrent les limites de l’action législative nationale face au secteur de l’internet. Pour en sortir, nous suggérons de s’appuyer enfin sur les travaux sénatoriaux et les propositions de résolution européenne pour demander officiellement la réouverture de la directive e-commerce, consacrant aujourd’hui – hélas ! – l’irresponsabilité des plateformes.
La loi du 29 juillet 2019 pour la restauration et la conservation de la cathédrale Notre-Dame de Paris est désormais applicable dans son intégralité. Je souhaiterais néanmoins savoir à quelle date le rapport annuel faisant état du montant des fonds recueillis pour cette reconstruction, de leur provenance, de leur affectation et de leur consommation sera transmis au Parlement. Quel est le calendrier retenu pour la parution des ordonnances permettant de déroger au droit commun dans le cadre des travaux de restauration ? Le délai d’habilitation prévue par la loi expire en effet le 29 juillet 2020.
Enfin, l’application complète de la loi du 1er août 2019 relative à la création de l’Agence nationale du sport, l’ANS, et à diverses dispositions relatives à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 dépend, quant à elle, de trois mesures d’application, relatives au délégué territorial de l’ANS, à la conférence régionale du sport et à la conférence des financeurs du sport.
Mme la ministre des sports nous avait assuré une parution à l’été 2020. Nous y sommes. Où en est la publication de ces dispositions ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la présidente de la commission de la culture, je ne reviens pas sur les deux textes que vous avez évoqués en indiquant que le périmètre européen serait sans doute un périmètre plus approprié pour rendre l’applicabilité des lois plus conforme.
L’article 6 de la loi du 29 juillet 2019 dispose que le rapport dressant un bilan des fonds obtenus pour la reconstruction de Notre-Dame doit être remis par le Gouvernement au Parlement avant le 30 septembre 2020. Ce délai sera respecté. De plus, l’article 8 de cette même loi prévoit que l’établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale publie chaque année un rapport ayant le même objet. Ce rapport sera publié avant la fin de l’année 2020.
Le délai d’habilitation des ordonnances que vous avez évoquées a été prolongé de quatre mois par la loi du 23 mars, ce qui porte la date du terme de l’habilitation au 29 novembre 2020. Un projet d’ordonnance a été examiné lors d’une réunion interministérielle le 10 mars dernier.
L’opportunité de déroger aux dispositions applicables dans certains domaines, aux travaux de restauration de la cathédrale et d’aménagement de son environnement immédiat est toujours en discussion, afin de bien identifier les dispositions effectivement applicables au chantier auxquelles les dérogations seront réellement nécessaires.
Une deuxième réunion interministérielle en date du 15 juin a permis d’envisager le calendrier suivant : la rédaction du texte pour début juillet 2020, la concertation avec la mairie de Paris courant juillet, la saisine du Conseil d’État fin août 2020, enfin la présentation en conseil des ministres à la mi-octobre de la même année.
Le premier décret d’application manquant de la loi relative à la création de l’Agence nationale du sport, qui est relatif aux conférences régionales du sport et aux conférences des financeurs du sport, a été transmis au Conseil d’État le 22 juin 2020. Le second, qui concerne le délégué territorial de l’Agence nationale du sport, devrait également être transmis au Conseil d’État au cours de cette semaine. Une publication de ces deux textes pourrait ainsi intervenir avant la fin du mois de juillet 2020.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mes questions portent sur l’application de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire.
Nous avions consenti à examiner ce texte dans l’urgence et à maintenir des habilitations à légiférer par ordonnance sur des sujets majeurs, à condition que les choix retenus par le Gouvernement soient ensuite discutés. Or aucune des quatre ordonnances prises sur le fondement de cette loi n’a été ratifiée par le Parlement, et l’examen des projets de loi de ratification n’a toujours pas été inscrit à l’ordre du jour de notre assemblée. Le contenu de ces ordonnances aurait pourtant largement mérité un débat sur le fond, d’autant que certaines des dispositions de celles-ci nous semblent contraires à la volonté du législateur.
Ainsi notamment, nous pouvons dire que nous avons été mis devant le fait accompli pour ce qui concerne l’ordonnance relative à la gouvernance de la SNCF, la nouvelle gouvernance étant entrée en vigueur le 1er janvier 2020. L’engagement selon lequel les parlementaires seraient présents au sein du conseil d’administration de SNCF Réseau n’a pas été tenu. Par ailleurs, un certain nombre de réserves importantes ont été formulées par le régulateur sur cette ordonnance.
À cela s’ajoutent des incertitudes, puisque le cadre juridique de l’ouverture à la concurrence n’est toujours pas finalisé. Ce manque de visibilité pour les nouveaux entrants, les salariés et les régions est de nature à nuire à l’ouverture à la concurrence.
Et le Gouvernement n’a toujours pas pris l’ordonnance visant à tirer les conséquences de l’absence de conclusion d’accord collectif.
À la suite de l’échec des négociations relatives à l’accord sur les classifications et les rémunérations en février dernier, le secrétaire d’État Jean-Baptiste Djebbari nous avait indiqué que l’État tiendrait parole et prendrait l’ordonnance prévue. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, dans quels délais vous envisagez de prendre cette ordonnance ?
Par ailleurs, certaines dispositions du décret du 26 décembre 2018 relatif au transfert des salariés ont été annulées par le Conseil d’État au mois de mars dernier, sans qu’aucun décret rectificatif ait été pris depuis. Pourquoi ce délai ? Quand ce décret sera-t-il publié ?
Enfin, qu’en est-il de la publication du décret relatif aux modalités de transfert de certaines petites lignes aux régions ? Même si ce transfert est prévu par la loi d’orientation des mobilités, et non par le nouveau pacte ferroviaire, il est essentiel dans le cadre de l’ouverture à la concurrence.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président Maurey, s’agissant des quatre ordonnances prises sur le fondement de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire, il n’est à ce stade pas prévu d’inscrire à l’ordre du jour du Parlement l’examen des projets de loi de ratification.
Pour ce qui est des décrets manquants de cette loi, le premier porte sur la composition et les moyens de fonctionnement d’une instance commune. Il était subordonné à la signature d’un accord relatif aux conditions d’exercice social entre les entreprises issues du groupe public ferroviaire, ce qui a été fait par l’employeur et l’ensemble des organisations syndicales représentatives à la fin de l’année 2019. Le projet de décret a été finalisé et doit maintenant être examiné par le Conseil d’État.
Le deuxième décret concerne la portabilité de la garantie d’affiliation au régime général de retraite de la SNCF en cas de changement d’employeur. Le projet de décret reste en attente des orientations en matière de réforme globale des retraites.
Il est à noter que le décret relatif aux modalités d’attribution directe des contrats de service public de transport ferroviaire de voyageurs a été publié le 17 juin dernier.
Pour les autres textes ferroviaires prévus par la loi d’orientation des mobilités et manquants à ce stade, je signale tout d’abord que le délai d’adoption de l’ordonnance relative à la négociation collective au sein de la branche ferroviaire, prévue à l’article 167 de la loi d’orientation des mobilités, est décalé de quatre mois en vertu de la loi du 23 mars dernier, ce qui le fait courir jusqu’au 23 janvier 2021.
À la suite de l’échec de la négociation collective sur les classifications et rémunérations, le Gouvernement a décidé qu’il pourrait utiliser cette ordonnance afin d’établir un cadre commun en la matière pour les salariés de la branche ferroviaire. Des analyses juridiques sont en cours, afin de déterminer la manière optimale d’intervenir via l’ordonnance, et le calendrier de publication n’est pas encore arrêté.
Le décret dit « de petites lignes », prévu à l’article 172 de la loi d’orientation des mobilités, est en cours de rédaction. Une saisine du Conseil d’État est envisagée aux environs du mois d’octobre prochain, ce qui conduirait à une publication du texte en fin d’année.
M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission des finances.
M. Éric Bocquet, vice-président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour la session écoulée, la commission des finances constate un taux d’application des lois en progrès, mais elle regrette l’allongement des délais de publication.
Moins du tiers des textes réglementaires ont été publiés dans les six mois. La raison de ce retard réside notamment dans les délais de réponse aux demandes introduites auprès de la Commission européenne en matière d’aides d’État. Pas moins de sept mesures d’application de la loi de finances initiale pour 2019 sont ainsi en attente.
Monsieur le ministre, le Gouvernement pourrait-il à l’avenir présenter dans son rapport d’application des lois un état des lieux précis des demandes introduites auprès de la Commission européenne concernant des aides d’État ?
Cela dit, le président de la commission des finances avait largement évoqué l’an passé les retards dans l’application de la loi relative à la lutte contre la fraude. Les textes réglementaires sont désormais pris, mais nous en surveillerons très précisément la mise en œuvre concrète.
Il reste cependant les articles 14 et 15, qui octroient aux agents des douanes et de l’administration des impôts un droit de communication des données de connexion pour les enquêtes portant sur les délits douaniers et fiscaux les plus graves. Une question préjudicielle posée par l’Estonie est pendante devant la Cour de justice de l’Union européenne. Compte tenu de l’importance d’accorder des moyens supplémentaires à la lutte contre la fraude, pouvez-vous nous confirmer que les décrets sont prêts à être publiés dès que la décision de la Cour sera connue, c’est-à-dire à l’été, nous dit-on ? Et nous y sommes !
Autre sujet plus ponctuel : l’article 134 de la loi de finances pour 2012 relatif au régime de licence de vente du tabac dans les départements d’outre-mer. L’entrée en vigueur de cette disposition a été repoussée au gré des lois de finances jusqu’au 30 juin 2019, sans pour autant que la mesure entre en application. Qu’en est-il aujourd’hui ? Ne faut-il pas reconnaître que ce dispositif n’est pas applicable ? Comptez-vous au contraire le mettre en œuvre rapidement ?
Enfin, le Sénat a adopté le 21 avril dernier un taux réduit de TVA pour les tenues de protection, sujet cher à notre rapporteur général. Lors de son audition devant la commission des finances, le 11 juin, le ministre Bruno Le Maire répondait en ces termes : « Le taux réduit de TVA, qui a été voulu par le Président de la République, doit être mis en œuvre rapidement. Un arrêté est en cours de signature. » Pourquoi cet arrêté n’est-il toujours pas pris ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. J’ai saisi mes collègues de Bercy, afin d’étudier la faisabilité d’un état des lieux précis des demandes introduites auprès de la Commission européenne en matière d’aides d’État dans le rapport d’application des lois de finances. Je ne manquerai pas de vous tenir informés dans les meilleurs délais, mesdames, messieurs les sénateurs, de la réponse qui sera formulée.
S’agissant de l’application des articles 14 et 15 de la loi relative à la lutte contre la fraude, les projets de textes ont été retirés de l’examen du Conseil d’État le 28 mars 2019 à la suite d’une question préjudicielle estonienne en cours d’instruction à la Cour de justice de l’Union européenne. L’audience de plaidoiries s’est tenue le 15 octobre 2019. Les conclusions de l’avocat général ont été présentées le 21 janvier 2020. On peut donc raisonnablement envisager qu’un arrêt soit rendu d’ici à l’été, comme vous l’avez vous-même souligné, monsieur le sénateur. Le Gouvernement est prêt et le ministère s’engage à prendre les mesures d’application une fois cet arrêt rendu.
S’agissant de l’application de l’article 134 de la loi de finances pour 2012, je rappelle que la mise en place d’un dispositif d’encadrement de la vente au détail du tabac manufacturé dans les départements et régions d’outre-mer par l’attribution de licences de vente a été plusieurs fois reportée. L’avis très défavorable émis par les assemblées délibérantes de ces collectivités, qui estiment ne pas pouvoir mettre en œuvre cette réforme, en est la principale raison. Cette opposition s’explique par la difficulté à disposer des moyens humains et financiers nécessaires à l’attribution des licences et par la crainte d’une forte incidence sur le tissu économique, notamment pour les petits commerces, qui occupent outre-mer une place importante dans le réseau de distribution du tabac manufacturé.
Si l’objectif de santé publique est indiscutable, ces réserves nécessitent de poursuivre une réflexion partagée avec les collectivités concernées sur les moyens engagés pour lutter contre le tabagisme. Ces territoires ne doivent naturellement pas figurer en retrait de la lutte contre le tabagisme. À ce stade, la réflexion s’oriente vers un assouplissement des modalités d’application de la mesure prévue, en lien avec ces collectivités.
S’agissant enfin de l’arrêté relatif au taux réduit de TVA pour les tenues de protection – j’ai été sollicité, à raison et à plusieurs reprises, par le rapporteur général sur ce sujet –, je vous indique qu’il est à la signature des ministres – je m’en suis moi-même enquis ce week-end – et qu’il paraîtra donc cette semaine. (Marques de satisfaction.)
Mme Sophie Primas. C’est une bonne nouvelle !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le ministre, on constate cette année un relâchement – les années passées avaient été bien meilleures.
Nous avons examiné plus de 40 % des textes soumis au Sénat, hors conventions internationales, mais seule la moitié des mesures d’application ont été prises en l’espace d’un an.
J’ai bien compris que l’on discute de méthodologie – vous confirmez ainsi les propos tenus par le secrétaire général du Gouvernement le 12 mai dernier. Je vous le signale néanmoins, nous avions obtenu les résultats positifs des années précédentes avec la même méthodologie. Et il me semble normal que nous examinions les arrêtés ministériels dont dépend l’application des lois, comme l’a indiqué Valérie Létard.
Je souligne aussi que deux mesures d’application de la loi relative à la fonction publique qui tardaient à être prises plus de neuf mois après la promulgation de ce texte l’ont été dans les jours qui ont précédé l’audition du secrétaire général du Gouvernement. Lorsque le moment du contrôle parlementaire approche, des consignes sont-elles données aux administrations pour hâter la sortie des décrets ?