M. le président. L’amendement n° 38, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
1° Première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
ainsi qu’au titre des droits à avancement d’échelon et de grade
2° Compléter cet alinéa une phrase ainsi rédigée :
Par dérogation au premier alinéa du présent I, la durée des services du militaire de carrière bénéficiant d’un avancement de grade pendant la période de son maintien au service, est fixée par la limite d’âge du grade auquel il est promu.
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Le militaire recruté au titre du II du présent article peut bénéficier, sur demande agréée, des dispositifs, de la formation et de l’accompagnement vers l’emploi prévus à l’article L. 4139-5 du code de la défense, aux conditions prévues dans cet article. À cette fin, il est tenu compte des services effectifs rendus avant radiation des cadres et depuis le recrutement au titre du II du présent article.
La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. L’amendement vise à rétablir le droit à avancement des militaires admis à prolonger leur service. La disposition sera incitative à l’égard des militaires utiles aux armées qui seraient statutairement éligibles à l’avancement au cours de cette prolongation.
Il s’agit de tenir compte de l’effet d’une promotion intervenue au cours de la prolongation de service au-delà de la limite d’âge sur la durée de service du militaire de carrière promu à un grade auquel serait attachée une nouvelle limite d’âge et de garantir un droit à la reconversion aux militaires de carrière réintégrés dans leur statut de militaire de carrière.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cet amendement complète heureusement le travail de la commission : avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er quindecies, modifié.
(L’article 1er quindecies est adopté.)
Article 1er sexdecies (nouveau)
I. – Pendant l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 et pendant six mois à compter de son terme, il est mis fin, sur demande agréée, au congé de reconversion ou au congé complémentaire de reconversion des militaires nécessaires aux forces armées. Le cas échéant, ces militaires sont placés en position d’activité.
Les 2° et 3° du III de l’article L. 4139-5 du code de la défense ne s’appliquent pas aux militaires dont il a été mis fin au congé de reconversion ou au congé complémentaire de reconversion dans les conditions prévues à l’alinéa précédent.
II. – Les militaires placés en congé de reconversion ou en congé complémentaire de reconversion dans les conditions prévues à l’article L. 4139-5 du code de la défense dont la formation ou la période de reconversion est interrompue en raison de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, peuvent, par dérogation au III de l’article L. 4139-5 du code de la défense, être maintenus en service pour le temps nécessaire à l’achèvement des actions de formation prévues pendant leur congé de reconversion ou complémentaire de reconversion. Leur radiation des cadres ou des contrôles intervient à l’issue de cette période.
III. – Les militaires mentionnés au II du présent article qui atteignent, pendant la période de l’état d’urgence sanitaire, la limite d’âge ou de durée de service prévue à l’article L. 4139-16 du code de la défense peuvent bénéficier, à la seule fin d’achever leur formation ou leur période de reconversion, d’un report de la limite d’âge ou de durée de service.
Les dates auxquelles sont atteintes la limite d’âge ou la limite de durée de service et la date de radiation des cadres ou des contrôles d’activité de ces militaires sont reportées au jour de l’achèvement des actions de formations qui ont été interrompues par l’état d’urgence sanitaire.
IV. – La situation statutaire des militaires mentionnés aux II et III du présent article dont la durée des services ou dont la date de radiation des cadres ou des contrôles est reportée, est maintenue jusqu’à l’achèvement de leur période de formation professionnelle ou d’accompagnement vers l’emploi.
M. le président. L’amendement n° 39, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1, première phrase, et alinéa 3
Après le mot :
covid-19
insérer les mots :
et prorogé par l’article 1er de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ses dispositions
II. – Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le militaire dont le congé de reconversion ou complémentaire de reconversion a été interrompu dans les conditions prévues au présent I peut à nouveau bénéficier, sur demande agréée, des dispositifs, de la formation et de l’accompagnement vers l’emploi prévus à l’article L. 4139-5 du code de la défense, aux conditions prévues dans cet article.
III. – Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
La prolongation de service prévue au présent III est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension.
La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. Cet amendement a pour objet d’ajouter à la version rédigée par la commission deux éléments : l’intégration dans les services, ouvrant droit à pension, du temps de prolongation de service qui permet aux militaires d’achever les formations de reconversion suspendues par l’épidémie de Covid-19 et la garantie du maintien de l’intégralité du droit à la reconversion au militaire qui a accepté de cesser sa reconversion ou de la différer pour rester en service.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. La commission l’aurait fait elle-même si elle ne s’était pas vue opposer une irrecevabilité financière. Si le Gouvernement le fait, cela ne pose aucune difficulté : avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er sexdecies, modifié.
(L’article 1er sexdecies est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er sexdecies
M. le président. L’amendement n° 120 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 1er sexdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Par exception à l’article 4 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté, les missions relevant de la réserve civique peuvent être proposées, jusqu’à six mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire, par toute personne morale chargée d’une mission de service public pour collaborer à l’organisation particulière de ce service durant cette période. Le présent article est applicable à compter du 1er avril 2020.
La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. La réserve civique permet l’engagement bénévole et occasionnel de citoyens étrangers résidant régulièrement sur le territoire français. Ses membres s’engagent dans des projets qui peuvent concerner différents domaines d’action : la solidarité, le vivre ensemble, l’éducation, l’insertion, la santé, le sport, l’environnement, la mémoire et la citoyenneté, la coopération internationale.
Actuellement, ces missions sont bénévoles et ne peuvent concerner que des activités d’intérêt général au sein d’organismes publics.
Compte tenu des circonstances exceptionnelles que nous connaissons, le Gouvernement souhaite que les missions relevant de la réserve civique puissent être exceptionnellement et temporairement proposées jusqu’à six mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire pour toute personne morale chargée d’une mission de service public. Elles pourraient être exceptionnellement élargies à des actions, notamment, de régulation de flux et de distribution de masques.
M. le président. Le sous-amendement n° 265, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Amendement n° 120 rectifié, alinéa 3
1° Première phrase
Remplacer les mots :
six mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire
par les mots :
la fin de l’état d’urgence sanitaire déclaré en application de l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19
2° Dernière phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le Gouvernement souhaite que les personnes qui servent dans cette réserve civique puissent intervenir auprès des personnes morales qui exercent une mission de service public. La commission n’y est pas opposée, à trois conditions.
Tout d’abord, il doit bien s’agir de missions de service public, et non pas de missions à caractère commercial ou concurrentiel – La Poste avait été évoquée –, pour lesquelles il serait anormal que la réserve civique intervienne.
Ensuite, cette possibilité doit être strictement limitée au temps que va durer l’état d’urgence sanitaire.
Enfin, l’application de cette mesure ne peut être rétroactive.
Le sous-amendement vise à intégrer ces deux derniers éléments dans l’amendement, le premier ayant déjà été retenu par le Gouvernement. Nous souhaitons que l’application de cette dérogation soit limitée à la seule période d’état d’urgence, sans aller au-delà, car cela ne se justifie pas, et qu’elle ne soit pas rétroactive au 1er avril, car nous n’en voyons pas la nécessité.
La commission est donc favorable à l’amendement du Gouvernement, sous réserve de l’adoption de son sous-amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ce sous-amendement ?
M. Marc Fesneau, ministre. Nous en souhaitons le retrait, faute de quoi l’avis sera défavorable.
L’adoption de l’amendement du Gouvernement permettrait de faire appel à la réserve civique pour faire face à la crise sanitaire. Il permettrait aussi de recourir à ce dispositif pour l’organisation du déconfinement, qui va prendre beaucoup plus de temps que l’état d’urgence sanitaire stricto sensu. Nous souhaitons donc que les missions relevant de la réserve civique puissent être exceptionnellement et temporairement proposées jusqu’à six mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire.
Par ailleurs, la rétroactivité s’applique à ce dispositif, comme à la plupart des mesures qui ont déjà été prises.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er sexdecies.
Article 1er septdecies (nouveau)
À l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421-2 du code du travail, la date : « 12 mars 2020 » est remplacée par la date : « 1er mars 2020 ».
M. le président. L’amendement n° 121 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 1er de l’ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. 1er. – Les demandeurs d’emploi qui épuisent leur droit à l’une des allocations mentionnées aux articles L. 5422-1, L. 5423-1, L. 5424-1 et L. 5424-21 du code du travail à compter du 1er mars 2020 bénéficient à titre exceptionnel d’une prolongation fixée par arrêté du ministre chargé de l’emploi et au plus tard jusqu’au 31 mai 2020 de la durée pendant laquelle l’allocation leur est versée.
« La prolongation mentionnée au premier alinéa s’applique jusqu’à une date précisée par arrêté du ministre chargé de l’emploi et au plus tard jusqu’au 31 août 2021 pour les artistes et techniciens intermittents du spectacle mentionnés à l’article L. 5424-22 du même code.
« La prolongation mentionnée au premier alinéa s’applique jusqu’à une date précisée par arrêté du ministre chargé de l’emploi et au plus tard jusqu’au 31 juillet 2020 pour les demandeurs d’emploi résidant à Mayotte.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. le ministre.
M. Marc Fesneau, ministre. Cet amendement reprend, en le complétant, le dispositif de l’ordonnance du 25 mars 2020 visant à prolonger l’indemnisation des demandeurs d’emploi qui arrivent à l’épuisement de leurs droits au cours de la période de crise sanitaire.
Cet amendement inscrit en dur dans la loi des dispositions de cette ordonnance en procédant à plusieurs adaptations. Il a pour objet de différencier cette prolongation des droits en fonction du régime d’indemnisation dont relève le demandeur d’emploi et, ainsi, de tenir compte des difficultés spécifiquement éprouvées dans la période par les artistes et techniciens intermittents du spectacle pour reprendre une activité professionnelle.
Pour ces intermittents du spectacle, l’amendement permettra, s’il est adopté, de garantir un maintien de l’indemnisation jusqu’au 31 août 2021, conformément aux engagements pris par le Président de la République. L’amendement reprend en outre la mesure de sécurisation juridique adoptée en commission tendant à sécuriser le maintien de l’indemnisation des demandeurs d’emploi dont les droits sont arrivés à échéance depuis le 1er mars – on fait ici de la rétroactivité… –, et non depuis le 12 mars.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires sociales ?
M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis. Cet amendement avait reçu à l’origine un avis défavorable de la commission des affaires sociales, parce que sa rédaction était vraiment trop large. Nous avons eu par la suite des discussions qui ont permis de mieux cibler le dispositif, en reconduisant les droits des demandeurs d’emploi jusqu’à mai 2020 – notre logique est de rester dans le cadre de la crise –, et non pas jusqu’à mai 2021.
Pour autant, des engagements ont été pris par le Président de la République vis-à-vis des intermittents du spectacle pour prolonger leurs droits au-delà de la fin de l’année 2020, et il revient à la loi de prendre des mesures de différenciation selon les professions.
Le Gouvernement a rectifié son amendement, comme nous l’avions demandé. Cette nouvelle version permet de prendre en compte les préoccupations des intermittents du spectacle, ainsi que les particularités de Mayotte, où la période de confinement est un peu plus longue.
Je le répète, pour que les choses soient claires, la commission avait donné un avis défavorable au départ sur un amendement différent. Maintenant, à titre personnel, je trouve intéressant d’adhérer aux rectifications proposées, qui vont vraiment dans le bon sens, me semble-t-il.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour explication de vote.
M. Jean-Raymond Hugonet. Ne voyez pas dans mon intervention une quelconque revendication corporatiste.
M. René-Paul Savary, rapporteur pour avis. Quoique… (Sourires.)
M. Jean-Raymond Hugonet. Quand on parle santé ou bioéthique, les médecins, nombreux sur toutes nos travées, s’expriment ; dès que l’on parle éducation, les professeurs, les enseignants, nombreux également, s’expriment ; lorsque l’on parle de justice, les avocats et autres magistrats illustres de cet hémicycle s’expriment. Permettez donc au saltimbanque que je suis de témoigner, pour une fois, de la pertinence d’un amendement gouvernemental.
M. André Gattolin. En musique !
M. Jean-Raymond Hugonet. J’aurais juste préféré que, lorsque cette ordonnance a été prise, avec cette date ridicule du 12 mars, on manifeste un peu plus d’estime pour les intermittents du spectacle. Si le Gouvernement avait pris la peine de connaître leur travail, il aurait intelligemment retenu le 1er mars comme référence et l’année blanche. Cela aura au moins permis à M. le Président de la République de s’exprimer pour honorer les intermittents du spectacle. Je suis heureux qu’à notre tour, cette nuit, à une heure où je suis plus souvent dans un studio d’enregistrement que dans cet hémicycle, on les remette à la place qu’ils méritent dans ce pays. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. Je resterai dans la lignée de ce que vient de dire mon collègue Hugonet, avec qui je siège à la commission de la culture.
On voit mieux les choses avec deux yeux. Je pense que la commission des affaires sociales a eu besoin de l’éclairage de notre commission sur les intermittents. Nous connaissons leurs particularités ; nous savons combien ces emplois sont essentiels à nos territoires, à l’activité des festivals.
Il faut savoir aussi que les termes longs n’ont pas été retenus par hasard. Les projets culturels – théâtraux, cinématographiques, audiovisuels – courent non pas sur quelques mois, mais sur un ou deux ans. Dès lors, la date du 31 août 2021 n’est pas irréaliste. Nous soutenons donc pleinement l’amendement du Gouvernement au sein de la commission de la culture.
Par ailleurs, nous le savons, les mesures de soutien aux personnes sont les plus efficaces. Quand on envisage un soutien aux structures, ce sont toujours les plus grosses qui en profitent. Il y a de la déperdition, et les petites structures accèdent moins bien aux aides publiques.
De surcroît, cette mesure de soutien aux intermittents est neutre budgétairement. Dans le cadre de cette crise, nous avons déjà engagé presque 24 milliards d’euros pour le soutien aux salariés, et c’est une bonne chose. En prolongeant les droits des intermittents à travers l’année blanche, nous aurons exactement le même solde de dépenses, j’en fais le pari, dans les comptes de l’Unedic. Nous ne sommes pas en train d’augmenter les dépenses publiques ; nous sommes en train de garantir des droits pour une population qui est parmi les plus touchées par la crise du Covid-19, ce qui risque de durer encore quelques mois.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. Je ne veux pas prolonger inutilement les débats à une heure aussi tardive, mais je souhaite profiter un peu de ce consensus au sein de notre hémicycle.
Je ne vais pas entrer dans le détail de cet amendement, que nous soutiendrons. Je dis « nous », car je m’exprime au nom de la commission de la culture. Catherine Morin- Desailly est bien triste de ne pas être parmi nous ce soir. Je suis sûre qu’elle est devant sa télé. Grâce au virtuel, les membres de la commission de la culture ont pu se réunir aujourd’hui, se parler et se dire que c’était un amendement qu’il fallait soutenir.
Cette année blanche est importante pour les intermittents du spectacle. Le spectacle vivant a été l’un des premiers secteurs frappés par les mesures prises pour lutter contre la propagation du Covid-19, et il figurera sans doute parmi les derniers qui seront autorisés à reprendre une activité pleine et entière. Je tiens vraiment à remercier M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales d’avoir su négocier cet accord. (M. Loïc Hervé applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. À mon tour, je veux dire que, contrairement à un certain nombre d’autres amendements du Gouvernement, celui-ci est excellent. Je tiens à le dire, monsieur le ministre, parce qu’il concrétise un engagement qui a été pris par le Président de la République.
Vous le savez, tous les intermittents, les acteurs de la culture sont extraordinairement inquiets. Comme il n’y a plus de représentations, de manifestations, de festivals depuis trois mois, et pour encore un certain temps, ils n’ont plus de revenus. Ils voient véritablement l’avenir en noir.
Cette année blanche pour les intermittents du spectacle répond à une demande. Le groupe socialiste et républicain soutient cette mesure. Notre collègue Sylvie Robert a même téléphoné et écrit de nombreuses fois pour nous dire de tout faire pour que cet amendement soit voté, car il est vital pour tous les acteurs de la culture.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Je veux saluer le travail commun qui a été fait. Comme l’a dit M. le rapporteur pour avis, le Gouvernement a su amender son texte pour l’améliorer, dans un esprit constructif. Je pense que le secteur culturel, les intermittents du spectacle et les habitants de Mayotte seront reconnaissants de ce travail de coconstruction qui fait honneur à la Nation.
M. Jean-Pierre Sueur. Merci, madame la ministre !
M. le président. Je constate que l’amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
En conséquence, l’article 1er septdecies est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l’article 1er septdecies
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 208 rectifié bis, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3131-14 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les licenciements sont interdits durant l’état d’urgence sanitaire et jusqu’à la fin des mesures d’accompagnement des entreprises. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Nous proposons d’interdire les licenciements dans la période actuelle. Lors des questions d’actualité au Gouvernement la semaine dernière, vous nous aviez répondu, madame la ministre, que ce n’était pas le bon système et que c’était même peut-être impossible. Nous pensons le contraire : c’est un système qui peut fonctionner, qui va fonctionner, si nous l’accompagnons d’un schéma plus global.
Nous avons déjà mis 415 milliards d’euros sur la table en prêts garantis par l’État, en chômage partiel – je rappelle qu’il ne s’agit pas d’une nationalisation des salaires, comme je l’entends trop souvent, ou d’une chance, mais d’un droit activé par les cotisations sociales – ou dans le fonds de solidarité pour les petites et moyennes entreprises.
Nous proposons de pérenniser ce fonds jusqu’au 31 décembre pour un certain nombre de filières, par exemple l’hôtellerie et la restauration. Une date vient d’être annoncée pour ce secteur, mais, vous le savez, plus d’un tiers de ces commerçants pourraient ne pas rouvrir et plus de la moitié pourrait licencier, Il y a peut-être 300 000 à 400 000 emplois en jeu, rien que dans ce secteur d’activité, lesquels s’ajoutent aux 800 000 chômeurs supplémentaires que l’on vient d’annoncer aujourd’hui.
Nous proposons également de prolonger le chômage partiel, parce que, si on le coupe trop vite, comme vous l’aviez envisagé au départ, alors que, pendant trois mois, nous avons aidé nos entreprises, nous allons avoir des licenciements massifs.
Nous proposons donc d’interdire les licenciements et d’accompagner cette interdiction de l’ensemble de ces dispositifs.
Ensuite, il y aura un plan de relance économique. Nous avons déjà eu ce débat ici hier ou avant-hier, mais il faut le poursuivre. Il y a de vraies questions autour des prêts garantis par l’État. Nous pensons, par exemple, qu’il serait préférable, plutôt que de les comptabiliser en dette, de les transformer en capitaux propres et en investissements pour les petites entreprises. Sinon, elles vont se retrouver face à un mur de la dette l’an prochain et elles devront licencier.
En revanche, pour les très grandes entreprises, vous le savez, nous sommes pour des prises de participation et des nationalisations ; pour les moyennes entreprises, nous serions plutôt favorables à des prêts participatifs.
Vous le voyez, nous avons un plan de relance global, mais il nous a paru opportun, pour éviter le massacre social et la saignée qui est déjà en cours, d’interdire les licenciements.
M. le président. L’amendement n° 209 rectifié bis, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Cohen, Gréaume, Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3131-14 du code de la santé publique est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Pendant la crise sanitaire, les licenciements sont interdits pour :
« 1° Les entreprises qui versent des dividendes à ses actionnaires durant la même période ;
« 2° Les entreprises dont des filiales ou établissements sont établis dans des États et territoires non coopératifs. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. C’est un amendement de repli. Nous portons depuis longtemps l’interdiction des licenciements boursiers pour les entreprises qui versent des dividendes.
Récemment, le ministre de l’économie a appelé à la modération s’agissant des versements de dividendes. Force est de constater qu’il a été peu, voire pas du tout suivi. Total, grande entreprise française qui n’a fait ni chômage partiel ni PGE, vient d’annoncer qu’elle mettait 7 milliards d’euros sur la table pour l’année 2019. Dassault Systèmes a annoncé 186 millions d’euros de dividendes voilà deux jours, alors que beaucoup de ses filiales ont eu recours au chômage partiel. Vous aviez dit que cela serait impossible, et pourtant…
Je pourrais multiplier les exemples : Vivendi, le groupe Korian, qui gère des Ehpad. Alors qu’il y aurait beaucoup à dire sur leur gestion, les dirigeants de ce groupe avaient annoncé le versement de 58 millions d’euros de dividendes à ses actionnaires. Devant le tollé, ils ont été obligés de rebrousser chemin.
L’annonce la plus insupportable pour nous est venue de l’assemblée générale d’Air France hier. Alors que le groupe a bénéficié de 7 milliards d’euros d’aides – 4 milliards d’euros de PGE et 3 milliards d’euros d’avances d’actionnaires –, le PDG, qui a déjà une rémunération fixe de 900 000 euros annuels, vient de se voir accorder un revenu, qu’on appelle revenu flexible ou part variable, de 765 000 euros pour avoir atteint 70 % de ses objectifs. Dans le même temps, ce groupe s’apprête, avec le soutien du Gouvernement, à mettre en place un plan de restructuration et de licenciements massifs, y compris dans la filiale Hop !
C’est quand même insupportable, et pas seulement pour nous. Pensez donc aux salariés ou aux simples citoyens ! C’est d’autant plus incompréhensible que les Pays-Bas ont voté contre cette part variable lors de l’assemblée générale d’Air France-KLM, tandis que les représentants de la France, nommés par le Gouvernement, ont voté pour.
Quand nous soulevons la question de la critérisation et du conditionnement des aides publiques, notamment au regard de l’emploi et des questions environnementales, vous n’en voulez pas, mais, avec cette annonce, l’indécence a été poussée à son paroxysme.