M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 157, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 17, seconde phrase
Remplacer la référence :
L. 231-1
par la référence :
L. 232-1
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Même chose : correction d’une erreur de référence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 939, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 17, seconde phrase
Remplacer les mots :
les prestataires définis au 3° de l’article L. 7232-6 du code du travail
par les mots :
les organismes, entreprises ou associations mentionnées aux a et b du 2 du I
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 12, modifié.
(L’article 12 est adopté.)
Article 13
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 133-4-2 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa du III est ainsi modifié :
– les mots : « dans les cas mentionnés au second alinéa du I de l’article L. 243-7-7 » sont remplacés par les mots : « lorsque les faits concernent un mineur soumis à l’obligation scolaire ou une personne vulnérable ou dépendante mentionnés respectivement aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 8224-2 du code du travail » ;
– après la seconde occurrence du mot : « activité », sont insérés les mots : « ou des salariés régulièrement déclarés » ;
b) Il est ajouté un V ainsi rédigé :
« V. – Le III est applicable au donneur d’ordre. » ;
2° L’article L. 133-4-5 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du deuxième alinéa, les mots : « aux deuxième et troisième alinéas de » sont remplacés par le mot : « à » ;
b) Le même deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu’il est fait application du III du même article L. 133-4-2, pour le calcul de la proportion des réductions et exonérations annulées prévu au second alinéa du même III, les rémunérations des salariés du donneur d’ordre sont substituées à celles des salariés de la personne contrôlée. » ;
3° La seconde phrase du I de l’article L. 133-5-5 est supprimée ;
4° Au III de l’article L. 243-6-2, les mots : « À compter du 1er janvier 2019 » et les mots : « d’allégements et de réductions » sont supprimés.
II. – La seconde phrase du II de l’article 23 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est complétée par les mots : « sur demande expresse du cotisant et sur présentation de justificatifs probants ».
III. – Le 1° du I s’applique à toute annulation de réductions ou d’exonérations de cotisations de sécurité sociale ou de contributions n’ayant pas donné lieu à une décision de justice ayant un caractère irrévocable sur demande expresse du cotisant et sur présentation de justificatifs probants.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, sur l’article.
Mme Michelle Gréaume. L’article 13 poursuit la logique entamée l’année dernière de gradation des sanctions en fonction de la gravité du manquement constaté.
Actuellement, les sanctions applicables en matière de travail dissimulé sont les mêmes pour tous les employeurs, indépendamment de la taille de l’entreprise ou de la gravité des infractions constatées. Elles se traduisent par une annulation des exonérations de cotisations sociales.
La tendance est à l’affaiblissement des sanctions en cas de travail illégal, notamment.
Le fait de dissimuler le travail de plusieurs personnes ou de commettre une infraction de travail dissimulé en bande organisée ne constituera plus une circonstance aggravante. En outre, la sanction pourra être modulée.
Alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 prévoit de renforcer, dans son article 14, la lutte contre la fraude patronale et la fraude au détachement, cette disposition nuit à la lutte contre le travail dissimulé, lequel coûterait entre 6,8 milliards et 8,4 milliards d’euros, selon l’Acoss.
Selon nous, seule une revalorisation du métier d’inspecteur de la sécurité sociale, une hausse des moyens, ainsi que le maintien des sanctions actuelles pourront véritablement modifier les comportements des entreprises.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 599, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 10
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
…° Le III de l’article L. 133-4-2 est abrogé ;
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 a introduit la possibilité d’annuler partiellement des exonérations consenties à une entreprise en fonction de la gravité de la fraude commise par cette dernière.
Alors que votre gouvernement a lancé une chasse implacable contre les fraudeurs aux prestations sociales, les sanctions appliquées aux entreprises en cas de fraude à la sécurité sociale se verraient amoindries. Pour nous, il y a véritablement deux poids, deux mesures !
En cas de fraude, il faut tout simplement procéder à l’annulation des exonérations. Or l’article 13 prévoit non seulement que les exonérations de cotisations ne seront pas annulées, mais en plus que les sanctions financières prononcées à l’encontre des employeurs en cas de travail dissimulé seront modulées.
Actuellement, les sanctions applicables en matière de travail dissimulé, qui sont les mêmes pour tous les employeurs, indépendamment de la taille de l’entreprise ou de la gravité des infractions constatées, se traduisent par une annulation des exonérations de cotisations sociales. Demain, les sanctions seront adaptées à chaque entreprise, ce qui remet en cause, selon nous, le principe d’égalité, y compris devant les charges publiques.
M. le président. L’amendement n° 869 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Grelet-Certenais, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Artigalas, MM. Leconte, Montaugé, Sueur, Antiste et Bérit-Débat, Mmes Blondin, Bonnefoy et Conconne, MM. Courteau, Duran, Fichet et Gillé, Mmes Harribey et G. Jourda, M. Lalande, Mmes Lepage, Monier, Perol-Dumont, Préville et Taillé-Polian, MM. Temal, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Avec cet amendement, de même inspiration que le précédent, nous insistons sur le risque de banalisation du travail dissimulé que risque d’entraîner l’article 13. Nous proposons donc de supprimer certaines dispositions de cet article, car il convient d’infliger les mêmes sanctions à toutes les entreprises ayant commis un même manquement à la loi, qu’elles bénéficient d’exonérations de cotisations ou non.
L’objet de cet amendement est de rappeler que ce sont ces sanctions qui dissuadent les entreprises d’avoir recours au travail dissimulé.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission défend une position cohérente avec celle qu’elle avait prise l’année dernière et avec sa recommandation d’adopter l’article 13.
Les termes « travail dissimulé » peuvent recouvrir une large palette de situations, dont certaines sont ambiguës, notamment en matière de prestations de services. Toutes ne présentent pas le même caractère de gravité. Il n’est donc pas illogique de pouvoir moduler la sanction.
Pour ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement souhaite clairement permettre une modulation des annulations d’exonérations en fonction de la gravité de la fraude. Pour autant, il n’est pas question de donner un blanc-seing à quiconque ou de blanchir qui que ce soit. Nous proposons simplement que les sanctions prononcées soient proportionnelles à la faute ou à l’erreur commise.
J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je vous l’avoue, j’ai un peu de mal à comprendre l’argument de M. le secrétaire d’État. Vous menez une guerre sans merci à la fraude aux prestations sociales, qui a un coût. Ainsi, le coût de la fraude au RSA s’élève à 800 millions d’euros. Sachez toutefois que le non-recours au RSA, par méconnaissance du dispositif, représente une économie de 5,7 milliards d’euros. Quant à la fraude sur l’impôt sur les sociétés, elle représente, elle, 27 milliards d’euros. Donc, la fraude au RSA vous coûte 800 millions d’euros et la fraude à l’impôt sur les sociétés vous fait perdre 27 milliards d’euros !
La fraude sur les arrêts maladie – elle existe, personne ne le nie – coûte 149 millions d’euros. La fraude aux cotisations sociales, notamment du fait de la non-déclaration des salariés – c’est du travail dissimulé –, représente 14 milliards d’euros.
Je vous avoue avoir un peu de mal à comprendre que vous meniez une guerre sans merci contre ceux qui fraudent l’assurance maladie, le coût de cette fraude s’élevant à 149 millions d’euros, mais que vous donniez, vous le dites, un blanc-seing aux sociétés qui pratiquent la fraude aux cotisations sociales, laquelle coûte 14 milliards d’euros. Je le répète : il y a deux poids et deux mesures ! Vous pouvez retourner la question dans tous les sens, il y a un problème.
Je le dis aux membres de la majorité sénatoriale, si on fait la chasse à toutes les fraudes afin de préserver l’équilibre du budget de la sécurité sociale et de remplir les caisses, pourquoi ne pas commencer par s’attaquer aux plus grosses ? L’exonération et la modulation que vous proposez ne nous paraissent pas un bon signe, d’autant que, ce faisant, vous n’encouragez pas les entreprises qui fraudent à se mettre en règle ! (Mme Laurence Cohen applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je suis d’accord avec M. Gay sur un point et je m’oppose totalement à lui sur un autre.
Je le rejoins sur sa comparaison entre l’ampleur de telle ou telle fraude, sociale ou fiscale.
M. Fabien Gay. Ce sont les chiffres !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je précise qu’il y a un débat sur les chiffres, les évaluations étant divergentes. Par définition, si nous connaissions précisément la fraude, elle cesserait d’exister puisque nous la combattrions.
Je le souligne, et j’en conviens bien volontiers, la fraude fiscale est très certainement plus importante que la fraude sociale.
M. Fabien Gay. Merci de le reconnaître !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Ce n’est pas parce que l’une est plus importante que l’autre qu’il ne faut pas combattre les deux.
Je suis, en revanche, en désaccord avec vous lorsque vous dites qu’on donne un blanc-seing à la fraude fiscale des entreprises.
Ce gouvernement a fait adopter la loi du 23 octobre 2018 qui renforce les moyens de lutte contre la fraude. Pour vous donner une seule illustration, l’année 2019 sera une année record en matière de recouvrement des fraudes fiscales. Nous avons recouvré, au 30 septembre, près de 6 milliards d’euros. Ce montant sera supérieur en fin d’année.
Je le précise, ces chiffres correspondent bien aux recouvrements et non aux notifications des fraudes qui étaient jusqu’alors rendues publiques. Or il existe un écart entre la notification et le recouvrement. Ce qui nous intéresse, c’est ce qui rentre dans les caisses et ce qui est repris aux fraudeurs. Cette année, je le répète, nous allons battre le record des recouvrements.
M. le président. Je mets aux voix l’article 13.
(L’article 13 est adopté.)
Article 14
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La section 2 du chapitre 4 ter du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :
a) Les trois derniers alinéas de l’article L. 114-10 sont supprimés ;
b) L’article L. 114-10-1 devient l’article L. 114-10-1-1 ;
c) Il est rétabli un article L. 114-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 114-10-1. – Les agents chargés du contrôle mentionnés aux articles L. 114-10 et L. 243-7 du présent code ou à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime peuvent mener leurs vérifications et enquêtes pour le compte de plusieurs organismes appartenant éventuellement à différentes branches et différents régimes de la sécurité sociale.
« Les procès-verbaux transmis à un autre organisme de protection sociale font foi à son égard jusqu’à preuve du contraire. Le directeur de cet organisme en tire, le cas échéant, les conséquences, selon les procédures applicables à cet organisme concernant l’attribution des prestations et le recouvrement des cotisations et contributions dont il a la charge. » ;
2° Le I de l’article L. 133-1 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « l’inspecteur du recouvrement ou » et les mots : « mentionné à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime » sont supprimés ;
b) À la dernière phrase du second alinéa, les mots : « l’inspecteur ou par » et, à la fin, les mots : « mentionné à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime » sont supprimés ;
3° À la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 243-7, le mot : « inspecteurs » est remplacé par les mots : « agents chargés du contrôle » ;
4° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 243-7-6, les mots : « l’employeur » sont remplacés par les mots : « le cotisant » ;
5° À l’article L. 243-11, le mot : « employeurs » est remplacé par le mot : « cotisants » ;
6° Au deuxième alinéa de l’article L. 243-15, après le mot : « échéant, », sont insérés les mots : « qu’elle a obtenu la garantie financière prévue à l’article L. 1251-49 du code de du travail ou » ;
7° La première phrase du premier alinéa de l’article L. 862-5 est ainsi rédigée : « Sous réserve des dispositions du présent chapitre, la taxe mentionnée à l’article L. 862-4 est recouvrée et contrôlée selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général. »
II. – Au premier alinéa de l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « sociale », sont insérés les mots : « ainsi que selon les dispositions de la sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre IV du livre II du même code ».
III. – À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 1251-47 du code du travail, après la première occurrence du mot : « travail », sont insérés les mots : « ou par l’agent de contrôle de l’organisme de recouvrement mentionné aux articles L. 213-1 ou L. 752-1 du code de la sécurité sociale ou à l’article L. 723-3 du code rural et de la pêche maritime ».
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.
Mme Laurence Cohen. Nous sommes favorables au renforcement de la lutte contre la fraude sociale qui, en plus de desservir les intérêts des travailleurs, gangrène le budget de la sécurité sociale. À cet égard, les arguments de notre collègue Fabien Gay devraient faire réfléchir chacune et chacun d’entre nous. Nous nous sommes déjà largement expliqués sur ce sujet.
La lutte contre la fraude passe aussi par l’arrêt des suppressions de postes d’inspecteurs du travail, par le recrutement massif d’agents et par l’harmonisation vers le haut des droits sociaux à l’échelon européen. Or le Gouvernement actuel fait tout l’inverse.
Ainsi, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a annoncé que l’objectif était de diminuer les effectifs de l’inspection du travail de 2,5 % chaque année jusqu’en 2022, sachant que 2 000 départs à la retraite sont prévus d’ici cette date parmi les 9 000 agents et agentes du ministère, contre 1 000 recrutements seulement. Cela se traduira par la suppression de 15 % des sections.
Comment les agents de contrôle pourraient-ils remplir convenablement leurs missions quand l’objectif est de réduire toujours plus les effectifs ?
S’agissant de la politique de la France en matière de travail détaché, le Président de la République s’est félicité de l’accord signé entre les ministres européens du travail, alors que celui-ci ne règle en rien le problème du dumping social.
Pour finir, je note une grande contradiction dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale – et il n’y en a, hélas ! pas qu’une. Ainsi, vous affichez la volonté de lutter contre la fraude aux cotisations sociales, qui plombe le budget de la sécurité sociale de 130 millions d’euros, tout en poursuivant votre politique d’exonération des cotisations.
Depuis hier, nous ne cessons de rappeler, lors de nos interventions, le coût des niches sociales, qui, selon la Cour des comptes, s’élève à 90 milliards d’euros ! Vous pouvez essayer de minimiser ce montant, il n’en reste pas moins que ces dizaines de milliards d’euros devraient constituer la principale cible du Gouvernement pour accroître les ressources de la sécurité sociale.
Je profite des vingt-quatre secondes qu’il me reste pour vous informer, mes chers collègues que, en ce moment même, le président Macron s’exprime sur l’hôpital. On est en train de discuter du projet de loi de financement de la sécurité sociale, de notre politique de santé, alors que l’on ne connaît pas encore la teneur de ses propos ni les décisions qui seront prises, puisqu’on ne le saura qu’après coup. C’est formidable ! La représentation parlementaire est vraiment respectée ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SOCR et Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 13 rectifié ter, présenté par Mmes N. Goulet et Billon, MM. Bockel, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cazabonne, Cigolotti, Delahaye, Delcros et Détraigne, Mmes Dindar et Doineau, M. D. Dubois, Mmes Férat, C. Fournier, Gatel et Guidez, MM. Henno, L. Hervé et Janssens, Mme Joissains, MM. Kern, Lafon, Laugier, Laurey et Le Nay, Mmes Létard et Loisier, MM. Longeot, Louault, Luche, Marseille, P. Martin, Maurey, Médevielle, Mizzon et Moga, Mmes Morin-Desailly et Perrot, MM. Poadja et Prince et Mmes de la Provôté, Saint-Pé, Sollogoub, Tetuanui, Vérien, Vermeillet et Vullien, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après l’article L. 114-10-2, il est inséré un article L. 114-10-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 114-10-2-…. – Les allocations et prestations de toute nature servies par les organismes mentionnés à l’article L. 114-10-1-1 doivent l’être sur des comptes ouverts dans des établissements établis en France ou dans l’espace économique européen. » ;
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement résulte directement des travaux de la mission que le Gouvernement a confiée à ma collègue députée Carole Grandjean et moi-même. Il vise à interdire le versement de prestations sur des comptes ouverts dans des établissements établis hors de France ou de l’Union européenne.
Il ne vous aura pas échappé, monsieur le secrétaire d’État, que l’on a quelques difficultés à vérifier que les bénéficiaires d’un certain nombre de prestations sont toujours en vie.
On y a réfléchi et on a pensé que les organismes de sécurité sociale pourraient mettre en œuvre un dispositif semblable à celui que la loi Eckert a prévu pour les banques : on demanderait une preuve de vie aux bénéficiaires, ce qui est tout de même assez normal, car l’on verse près de 540 milliards d’euros de prestations sociales.
Après avoir auditionné à la fois la Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF) et Tracfin, la solution que nous avons retenue consisterait plutôt à faire transiter l’ensemble des allocations et prestations sur un compte en France. En effet, les banques sont tenues de respecter les obligations fixées par la loi Eckert, dont celle de demander à leurs clients, aux personnes qui ont ouvert un compte chez elles, de fournir des preuves de vie. Par un coup de billard à trois bandes, la vérification de l’existence de ces personnes par la banque servirait également aux organismes versant des prestations sociales.
C’est la raison pour laquelle nous proposons que l’ensemble des prestations soient d’abord versées sur un compte en France. Ensuite, celles-ci pourraient évidemment être transférées sur n’importe quel compte d’une banque située dans un pays étranger où les bénéficiaires résident, ce qui ne porterait absolument pas atteinte à leurs droits. Cette mesure garantirait davantage de transparence et permettrait aux bénéficiaires de prestations d’apporter la preuve de leur existence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame Goulet, la commission estime que les assurés, les retraités notamment, peuvent vivre hors de notre pays et avoir besoin dans leur vie courante de percevoir leurs prestations sur un compte bancaire non français. C’est un fait, c’est du bon sens.
C’est pourquoi la commission sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Nous partageons l’analyse de la commission.
Manifestement, Mme Goulet souhaite que l’on donne suite, non seulement à certaines recommandations de son rapport, mais aussi à des propositions formulées précédemment. Il nous semble cependant que le dispositif de l’amendement est assez brutal puisqu’il interdirait à des retraités français établis hors de France de percevoir leurs pensions sur un compte domicilié à l’étranger et les obligerait à détenir un compte domicilié en France pour ensuite organiser le transfert des fonds.
Cette mesure constitue une forme de punition collective, si vous me permettez cette comparaison. C’est la raison pour laquelle nous vous demandons de retirer votre amendement, madame la sénatrice.
M. le président. Madame Goulet, l’amendement n° 13 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d’État, je vous dis tout de suite que je ne retirerai pas cet amendement. Vous considérez qu’il est brutal, moi c’est le fait qu’il existe 5 millions de cartes Vitale en trop dans le système qui me paraît brutal.
Je maintiens donc mon amendement et demande au Sénat de le voter.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Pardonnez-moi, monsieur le président, mais mon intervention n’a pas de lien direct avec l’amendement dont nous débattons.
M. le président. Ce n’est pas bien, ma chère collègue ! (Sourires.)
Mme Laurence Cohen. En effet, monsieur le président, et je vous prie par avance de bien vouloir m’en excuser !
Cela étant, ma prise de parole a tout de même du sens. Face à la très forte mobilisation que connaît le pays au sujet de l’hôpital et de la santé en général, le Président de la République est en train de s’exprimer. Je pense que ce serait une bonne chose de suspendre la séance quelques instants pour nous permettre de prendre connaissance des mesures qui seront annoncées et qui auront un impact sur nos travaux. (Brouhaha.)
Mon groupe et moi-même demandons donc une suspension de séance pour connaître la substantifique moelle des dispositions qui vont être annoncées.
Mme Michelle Gréaume. Bien sûr !
M. le président. Mes chers collègues, je souhaite que l’on achève l’examen de cet amendement avant d’ouvrir un nouveau débat.
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote sur l’amendement 13 rectifié ter.
M. Jean-Louis Tourenne. Je suis un peu circonspect face à la proposition de Mme Goulet.
Je ne doute pas que la fraude sociale existe. Simplement, il est difficile d’en évaluer l’ampleur. Certes, je sais bien que vous avez réalisé une étude sur le sujet, mais elle a été quelque peu contestée par un certain nombre d’organismes, dont la fiabilité n’est pas à remettre en cause.
Vous avez peut-être raison de vouloir mettre en place un certain nombre de garde-fous, mais à la condition que ceux-ci soient justifiés par un nombre important de fraudeurs. Il ne faudrait pas pénaliser l’ensemble des retraités, dans le monde entier, simplement pour régler quelques cas. Ce serait utiliser un marteau-pilon pour écraser une mouche !
Il faut rester prudent : il serait préférable de prévoir des mécanismes un peu moins lourds et de réaliser une étude d’impact sur ce dispositif avant de nous prononcer, dans la mesure où celui-ci peut avoir d’importantes conséquences. Il serait dommage de pénaliser nos concitoyens, simplement parce qu’ils sont soupçonnés.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Personnellement, je voterai l’amendement de Nathalie Goulet.
Je suis un peu surprise par les propos de M. Tourenne. Il faudrait savoir combien de gens sont hors la loi avant de faire une loi. Dans ce cas, pourquoi ne pas laisser commettre quelques meurtres et voir ensuite si c’est vraiment grave et si l’on doit mettre les gens en prison ou pas ? J’exagère un peu, mes chers collègues, vous l’aurez compris.
La solution proposée n’est certes peut-être pas optimale, mais elle ne paraît pas poser de problème dramatique à l’heure des banques numériques. Elle permettrait, si elle était adoptée, d’exercer un véritable contrôle et de pérenniser les prestations de ceux qui y ont vraiment droit.
L’amendement est imparfait et mérite d’être retravaillé, mais au moins il envoie un signal et constitue un rappel à la règle.