M. le président. Monsieur Gontard, l’amendement n° 106 est-il maintenu ?
M. Guillaume Gontard. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 355 rectifié, présenté par MM. Joël Bigot, Kanner et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mmes Préville et Tocqueville, M. Duran, Mme S. Robert, MM. Antiste et Temal, Mme Harribey, MM. Montaugé, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la durée de vie des appareils numériques, l’obsolescence logicielle et ses impacts et les options pour allonger la durée de vie des équipements concernés.
La parole est à M. Joël Bigot.
M. Joël Bigot. Cet amendement vise à demander la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement sur l’obsolescence logicielle et à insister sur la nécessité de réfléchir à des mesures propres à allonger la durée de vie des produits.
L’obsolescence logicielle est une forme insidieuse d’obsolescence programmée. Nous la rencontrons particulièrement dans notre quotidien avec nos smartphones, sur lesquels nous recevons régulièrement des demandes de mise à jour du logiciel d’exploitation. Une certaine marque à la pomme s’en est fait la spécialité… (Sourires.) Au fur et à mesure de ces mises à jour, notre téléphone devient plus lent, moins adapté aux nouvelles possibilités techniques offertes et, à terme, obsolète. Les industriels incitent ainsi les consommateurs à se procurer des téléphones plus modernes pour pouvoir profiter de la palette entière des fonctionnalités proposées.
Si nous devons laisser aux industriels la possibilité d’améliorer leurs produits et d’offrir des améliorations en temps réel aux consommateurs, il faut cependant réfléchir à un encadrement strict de toute forme d’obsolescence logicielle qui rendrait les appareils inutilisables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. La commission n’est pas opposée à l’idée de creuser ce sujet, mais elle doute fortement de la pertinence d’une initiative nationale en la matière, s’agissant tant des capacités d’expertise que des actions qui en découleraient. À notre sens, ce problème doit plutôt être traité au niveau européen, raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. Je partage tout à fait votre constat, monsieur le sénateur.
Le droit actuel offre un arsenal de dispositions pour lutter contre l’obsolescence programmée. Au reste, plusieurs instructions judiciaires sont en cours sur des affaires d’obsolescence logicielle. Les actions déjà mises en œuvre sur cette question essentielle sont très loin d’être suffisantes, mais la feuille de route sur l’économie circulaire et le présent projet de loi déboucheront sur l’adoption de nouvelles mesures. L’heure n’est pas à la rédaction d’un énième rapport. Il s’agit véritablement de se concentrer sur l’action.
En conclusion, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Je déplore que Mme la secrétaire d’État nous fasse une telle réponse. Le problème est réel : quelle que soit la marque de notre smartphone, nous y sommes tous confrontés. On peut concevoir qu’il faille le traiter à l’échelle européenne, mais il coûte très cher à beaucoup de nos concitoyens. Ce serait une bonne chose de voter cet amendement, qui va dans le bon sens.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. Je soutiens l’amendement qu’a présenté Joël Bigot.
J’ai commis, avec Marie-Christine Blandin, un rapport d’information sur les 100 millions de téléphones portables usagés qui dorment dans nos tiroirs. Effectivement, l’obsolescence programmée de ces appareils est un problème très important, parce qu’ils sont fabriqués avec des matériaux précieux et des terres rares. Or on ne les recycle pratiquement pas, contrairement aux machines à laver, qui finissent rarement au fond d’un tiroir… (Sourires.)
On ne peut pas attendre que le problème soit réglé au niveau européen. Il y a urgence à agir. Au-delà de la lutte contre l’obsolescence programmée, il faut mettre en place une filière de recyclage des téléphones portables et des tablettes usagés. J’espère que cet amendement important sera adopté.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Cet amendement est effectivement très important, et je souscris tout à fait aux propos de M. Bérit-Débat. Je salue, à cette occasion, l’excellent travail de Mme la rapporteure.
Au fond, il faudrait mettre immédiatement en application le dispositif de cet amendement, qui vise en fait à allonger la durée de vie des produits électroniques. Comme M. Labbé aurait pu le souligner, nous avons sous les yeux 348 appareils allumés qui n’entreront en service que le 1er octobre prochain. (L’orateur désigne les consoles de vote électronique récemment installées dans l’hémicycle.) Je propose donc que nous les éteignions jusqu’à cette date pour allonger leur durée de vie… (Sourires et applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. J’appuie les propos très justes qui viennent d’être développés sur l’obsolescence programmée des matériels informatiques, notamment des téléphones. Il s’agit d’un véritable fléau. Ces appareils contiennent effectivement des métaux précieux et des terres rares, que la France doit importer. Nous sommes complètement dépendants de l’étranger à cet égard.
Vous avez très justement dit, monsieur Sido, que nous pourrions d’ores et déjà commencer à agir. Je me permets de souligner que notre amendement n° 172 rectifié, qui viendra en discussion dans quelques instants, comporte des dispositions immédiatement applicables pour lutter contre l’obsolescence programmée.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. À titre personnel, je voterai cet amendement, à la lumière des conclusions du rapport d’information auquel M. Longeot a fait référence voilà quelques instants. La commission a émis un avis défavorable, mais j’y suis personnellement favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. Roger Karoutchi. Et nous ?
M. le président. Monsieur Karoutchi, chaque sénatrice ou sénateur vote en son âme et conscience !
Je mets aux voix l’amendement n° 355 rectifié.
(L’amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
Article 4 bis (nouveau)
L’article L. 312-19 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Elle comporte également une sensibilisation à la réduction des déchets, au réemploi et au recyclage des produits et matériaux, ainsi qu’au geste de tri. » ;
2° Au dernier alinéa, après le mot : « énergétique », sont insérés les mots : «, de réparation ».
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, sur l’article.
Mme Françoise Cartron. Nous avons largement débattu hier de la nécessité de donner aux consommateurs l’information la plus transparente et la plus précise possible pour leur permettre de faire évoluer leurs comportements dans le sens que nous souhaitons.
Il est tout aussi indispensable d’actionner un autre levier en sensibilisant les jeunes publics, au sein des écoles, aux notions de recyclage, de réemploi, de réduction des déchets. Ces actions de sensibilisation et d’éducation sont très attendues non seulement par les jeunes, mais aussi par les enseignants. Avec mon collègue Frédéric Marchand, nous avons reçu des représentants de l’association des professeurs de sciences économiques et sociales, qui nous ont dit leur volonté d’intégrer les enjeux environnementaux dans les modules d’enseignement.
Par ailleurs, comme l’a souligné Mme Primas, si développer la réparabilité est essentiel pour sortir du « tout jetable », il existe une véritable problématique de formation des jeunes aux métiers de la réparation, qui sont non délocalisables. Nous avons visité récemment une grande plateforme de réparation qui va devoir recruter 300 techniciens dans les deux années à venir en raison de la pyramide des âges de son personnel. Or on ne forme pas suffisamment aujourd’hui à ces métiers, tant en apprentissage que dans les lycées professionnels. Nous devons développer cette filière pour offrir une perspective à nos jeunes. Donner une seconde vie aux appareils recouvre des métiers techniques qui peuvent les intéresser.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 171 rectifié est présenté par M. Gontard, Mmes Assassi et Cukierman, M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 298 rectifié bis est présenté par MM. Longeot, Henno, Mizzon, Canevet, Le Nay, Vanlerenberghe, L. Hervé et Cigolotti.
L’amendement n° 303 rectifié bis est présenté par Mmes Préville et Taillé-Polian et MM. Jomier, Lurel, Antiste et Daunis.
L’amendement n° 311 rectifié bis est présenté par MM. Labbé, Dantec et A. Bertrand, Mme M. Carrère, M. Collin, Mme Costes, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Gold, Mme Guillotin et MM. Jeansannetas, Léonhardt, Requier, Roux et Vall.
L’amendement n° 602 est présenté par M. Marchand, Mme Cartron, MM. Dennemont, Patriat, Amiel, Bargeton, Buis et Cazeau, Mme Constant, MM. de Belenet, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Mohamed Soilihi, Patient et Rambaud, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger et MM. Théophile et Yung.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Dans les collèges, elle comporte également une sensibilisation et une initiation aux techniques de réparation, de mécanique et d’entretien des produits.
La parole est à Mme Christine Prunaud, pour présenter l’amendement n° 171 rectifié.
Mme Christine Prunaud. La transformation profonde de nos comportements, de nos habitudes collectives ne saurait connaître de vecteur plus efficace que notre jeunesse, et donc l’éducation.
Nous connaissons l’argument selon lequel on attend trop de l’école, cette dernière ne pouvant transmettre tous les savoirs et toutes les aptitudes. Nous l’entendons, mais nous proposons néanmoins de confier à l’école une mission élémentaire, civique et citoyenne : celle d’initier tous les collégiens à la réparation et à l’entretien des objets mécaniques et électroniques, pour leur montrer qu’il est parfois très facile de réparer soi-même le cordon d’alimentation d’une lampe ou une soudure d’un petit appareil électronique et d’éviter ainsi de devoir acheter un produit neuf.
Les cours de technologie pourraient dispenser un tel enseignement à tous les élèves. Des initiations à l’assemblage électronique sont déjà proposées. Beaucoup de professeurs partagent le souci de sensibiliser les plus jeunes aux enjeux environnementaux.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 298 rectifié bis.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement tend à renforcer les objectifs fixés à l’éducation à l’environnement et au développement durable en prévoyant qu’une initiation à la réparation, à la mécanique et à l’entretien des produits soit dispensée au collège, lors des enseignements de technologie.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 303 rectifié bis.
Mme Angèle Préville. Nous le savons, c’est jeune que l’on apprend facilement, et ce sont les bonnes habitudes acquises dans la jeunesse qui sont les plus durables. C’est jeune que l’on se montre enthousiaste pour les activités manuelles.
Dans le contexte de notre société du jetable, où l’on ne répare quasiment plus, où l’on entretient moins, parce qu’il est moins coûteux et plus simple de racheter, il est important d’agir auprès des jeunes. Tout le monde n’a pas la chance d’avoir un père ou une mère bricoleur. Les jeunes aiment les activités manuelles : elles sont valorisantes, concrètes, et les éloignent des écrans pour un temps. Elles sont vertueuses à plus d’un titre : elles ont un caractère formateur pour nos jeunes, elles permettent de préserver notre environnement en limitant la gabegie et elles s’inscrivent dans l’évolution nécessaire de nos habitudes de consommation vers davantage de sobriété.
Les années d’apprentissage doivent préparer nos jeunes à devenir des citoyens accomplis et responsables.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 311 rectifié bis.
M. Joël Labbé. Cet amendement très largement partagé vise à compléter la rédaction élaborée par la commission, qui prévoit « une sensibilisation à la réduction des déchets, au réemploi et au recyclage des produits et matériaux ainsi qu’au geste de tri ».
Il semble pertinent d’intégrer également dans le dispositif une initiation à la réparation, à la mécanique et à l’entretien des produits au collège, lors des enseignements de technologie. L’éducation à l’environnement et au développement durable constitue une dimension essentielle de la transition écologique. En initiant les collégiens au prolongement de la durée de vie des biens, on favorisera les comportements de consommation responsables pour le futur, d’autant que les jeunes enseignent très souvent les bons gestes à leurs parents. L’adoption de cet amendement permettrait une réelle avancée vers l’instauration d’une culture du durable.
Quelle planète allons-nous laisser à nos enfants et quels enfants allons-nous laisser à notre planète ? J’ai participé vendredi dernier à Vannes à la marche des lycéennes et des lycéens pour le climat. J’ai été très positivement impressionné par leurs réflexions, leurs interpellations. Adopter cet amendement constituerait une première forme de réponse et enverrait un signal extrêmement positif.
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour présenter l’amendement n° 602.
M. Frédéric Marchand. Nous partageons tous le souci de sensibiliser nos jeunes à la réparation des objets au cours de leur parcours scolaire. Les enseignements dispensés devront être sans cesse enrichis et complétés en fonction du développement des technologies, qui évoluent très rapidement. Ces dernières années, de très nombreux nouveaux produits –trottinettes, hoverboards, drones… – ont rencontré le succès auprès des consommateurs. Leur entretien et leur réparation nécessitent des connaissances de plus en plus pointues. Les anciennes générations de réparateurs ne sont pas forcément au fait de toutes les nouvelles techniques, les formations coûtant souvent très cher aux entreprises. On peut imaginer que les jeunes pourront transmettre à leurs aînés les connaissances acquises grâce à une sensibilisation dès le collège, en attirant leur attention sur les bonnes pratiques. Ce serait du gagnant-gagnant pour tout le monde.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteure. Intégrer une sensibilisation aux techniques de réparation, de mécanique et d’entretien des objets dans l’éducation à l’environnement lors des cours de technologie au collège semble opportun. La commission est favorable à ces cinq amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Brune Poirson, secrétaire d’État. Le dispositif de ces amendements me semble trop détaillé et spécifique pour figurer dans la loi. Il vise en effet à prescrire le contenu des programmes d’enseignement. Pour cette raison, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Ce débat me semble quelque peu surréaliste, mais tout est possible en ce bas monde aujourd’hui…
Dans un temps ancien, lorsque j’étais encore sérieux, je fus inspecteur général de l’éducation nationale. J’ai mal évolué depuis ! (Sourires.)
Je n’ai rien contre les amendements de sensibilisation, mais, à un moment donné, il faudra se demander ce que l’on attend au juste de l’enseignement.
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. Roger Karoutchi. On a supprimé le latin et le grec, on a réduit les horaires de certaines matières fondamentales, on se demande s’il faut encore faire de la philosophie en terminale, et, parallèlement, on confie à l’école le soin de répondre à toutes sortes de problèmes de société : elle doit enseigner le secourisme, l’égalité, les valeurs de la République… À force d’ajouts incessants, les enseignants sont amenés à demander à l’inspection et au ministère de réduire les horaires des matières fondamentales. Qui plus est, les personnes qui assurent ces enseignements ne sont généralement pas issues de l’éducation nationale.
Il en résulte le désordre le plus total. L’école, dont la mission était autrefois d’assurer la transmission des connaissances, est aujourd’hui aussi chargée de remédier aux problèmes sociaux et sociétaux. Est-ce bien son rôle ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
Je vais tout de même voter ces amendements, pour ne pas me trouver encore une fois en désaccord avec la rapporteure, mais il serait bon de mener une réflexion sur l’école. Peut-être M. Blanquer pourrait-il venir nous dire ce qu’il en pense… Si l’école doit de nouveau être sollicitée à l’avenir, je suggère que les groupes visent, au travers de leurs amendements, qui les lycées, qui les collèges, qui l’école primaire, afin de répartir la charge ! (M. Martin Lévrier applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Ces amendements sont follement sympathiques, mais, aux excellents arguments présentés par mon collègue Roger Karoutchi, j’ajouterai encore une raison de s’y opposer, en soulevant le problème de la responsabilité.
Quand vous travaillez sur des courants faibles, vous prenez le risque, si vous n’êtes pas équipé et si vous n’êtes pas compétent, de perdre votre temps. Le temps est une denrée rare, mais, quand on est jeune, on peut encore se permettre de le gaspiller pour se former… Par contre, si vous vous attaquez à des courants forts ou à un dispositif mécanique présentant une cinétique forte – un moteur thermique, par exemple –, vous mettez en jeu votre sécurité.
Fréquentant, par plaisir personnel, les magasins de bricolage depuis mon plus jeune âge, je constate que les appareils électriques sont aujourd’hui conçus pour ne pas être réparés. Il ne s’agit pas pour autant d’obsolescence programmée : simplement, l’expérience prouve que tous nos compatriotes ne sont pas forcément capables de réparer des prises, de brancher des fils dans de bonnes conditions… Quand vous achetez une douille pour une lampe à vis, un système vous interdit de l’ouvrir de nouveau une fois que vous l’avez fermée. Ce n’est pas complètement absurde : c’est une question de responsabilité.
Je voudrais attirer l’attention de nos collègues sur le fait que les bons sentiments ne font pas nécessairement de bonnes lois. La question de la responsabilité se posera pour ceux à qui on apprendra le bricolage, la réparation. Je suis tout à fait d’accord pour que l’on ouvre les yeux des jeunes sur le fait que l’on peut donner aux objets une deuxième vie, mais si l’on confie à l’école le soin de les former à la réparation, on verra des parents se retourner contre l’éducation nationale afin de savoir pourquoi leurs enfants ont fait sauter les plombs, dans le meilleur des cas, ou déclenché un incendie, dans le pire… (Marques d’approbation sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Dominique de Legge. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Entendre M. Karoutchi et M. Longuet qualifier ces amendements de « surréalistes » ou de « sympathiques » me laisse sans voix ! Il va falloir vous y habituer, mes chers collègues, car il y aura de plus en plus d’amendements de ce type à l’avenir… Nous sommes en situation d’urgence. Nos jeunes sont extrêmement demandeurs d’une évolution sur le plan environnemental. L’éducation nationale devra s’adapter !
Lors de la discussion du projet de loi pour une école de la confiance, j’avais proposé que chaque école ait son jardin pédagogique. Lundi dernier, j’ai visité celui de l’école de La Touline, à Arradon, dont je suis le parrain. L’enseignement qui y est dispensé aux jeunes enfants est extraordinaire. C’est dans cette direction que nous devons avancer pour bien préparer nos enfants à préserver notre planète ! (Mme Michèle Vullien applaudit.)
M. Guillaume Gontard. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Ne nous méprenons pas, ces amendements ne visent pas à inscrire l’éveil à la préservation de l’environnement comme une matière scolaire à part entière. Il s’agit d’une sensibilisation, qui peut se faire lors d’ateliers interdisciplinaires. Lors d’une leçon de géographie portant sur les océans, par exemple, on peut tout à fait aborder le problème de leur pollution par les déchets plastiques. Il s’agit non pas de supprimer des heures de cours didactiques, mais de les ouvrir aux réalités de l’environnement.
En ce qui concerne la formation à la réparation, j’ai simplement souligné, pour ma part, le manque de filières au sein de l’enseignement professionnel et de l’apprentissage. Nos lycées professionnels doivent s’ouvrir à ces métiers qui font l’objet d’une plus forte demande que certaines formations aujourd’hui proposées.
M. Roger Karoutchi. Il ne s’agit pas de la même chose !
M. Gérard Longuet. Vous parlez du lycée !
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.
Mme Anne-Catherine Loisier. Le sujet est important : comment ferons-nous rayonner les dispositions de ce projet de loi, pour provoquer une prise de conscience dans toute la société ?
L’enseignement est un vecteur, tout comme les tiers-lieux et les Fablabs, qui peuvent permettre de sensibiliser nos concitoyens à une autre approche de la consommation. Ne nous focalisons pas sur le contenu des programmes scolaires : il s’agit simplement d’envoyer des signaux aux enseignants pour qu’ils s’emparent de ces sujets.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Certains s’émeuvent que les jeunes interviennent fortement dans le débat climatique, avec des arguments insuffisamment étayés. Les former aux problématiques environnementales leur permettra de développer des arguments précis et pointus sur un sujet qui les intéresse au premier chef, puisqu’il s’agit de leur avenir et de celui de la société dans laquelle ils vivront.
La question de l’intégration des grands enjeux de développement durable et d’environnement au sein des programmes de l’éducation nationale est au cœur du débat de société, qui donne lieu à de nombreuses prises de parole, notamment de la part de scientifiques. Il s’agit non pas de rajouter des heures de cours, mais de renforcer l’enseignement de la technologie, alors que l’on peine à revaloriser les métiers techniques et manuels. Mettre ces derniers au cœur des enjeux de demain, c’est aussi les rendre plus attractifs L’adoption de ces amendements enverrait un signal positif pour ces filières.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Avant d’éduquer les collégiens, ne devrait-on pas éduquer l’éducation nationale ? (M. Joël Labbé applaudit.)
M. Roger Karoutchi. Ça, c’est autre chose !
M. Pierre Ouzoulias. L’éducation nationale est l’un des principaux acheteurs publics. Madame la secrétaire d’État, que fait le Gouvernement pour forcer les ministères à prendre en compte, dans leurs appels d’offres et leur réflexion sur l’achat de matériels, le sujet qui nous occupe ? Les ministères sont eux aussi des victimes – consentantes – de l’obsolescence programmée.
M. Roger Karoutchi. Bonne question !
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.
Mme Esther Benbassa. Plutôt que de changer les programmes, pourquoi ne pas instituer des référents écologiques dans les classes ou des clubs dans les établissements, pour permettre aux élèves d’échanger sur ces questions qui les intéressent beaucoup ?
M. Roger Karoutchi. Tout cela existe déjà !
Mme Esther Benbassa. On ne peut pas tout inscrire dans les programmes – féminisme, écologie… Il faut trouver un modus vivendi pour aborder ces questions sans pour autant surcharger les programmes, nos collégiens et lycéens passant déjà plus d’heures en classe que les jeunes Allemands, par exemple.
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote.
M. Frédéric Marchand. Loin d’être le fruit des réflexions de doux rêveurs éminemment sympathiques, ces amendements s’inscrivent dans la réalité actuelle de nos collèges. Dans celui de mon fils, par exemple, à Lille, on parle de machines à laver, de lave-vaisselle durant les cours de technologie. Je rassure M. Longuet : jusqu’à présent, l’électricité fonctionne toujours chez moi !
C’est aussi le rôle de l’école de coller à la réalité. L’apprentissage des fondamentaux est essentiel, mais il faut aussi tenir compte du principe de réalité. Avec Françoise Cartron, nous avons eu l’occasion d’échanger, à Bezons, avec les responsables du service de réparation d’une grande marque que je ne citerai pas : des emplois ne sont pas pourvus, faute de formations dédiées. Il me semble essentiel de sensibiliser les jeunes à cette orientation possible.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 171 rectifié, 298 rectifié bis, 303 rectifié bis, 311 rectifié bis et 602.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 175 rectifié, présenté par M. Gontard, Mmes Assassi et Cukierman, M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. - L’article L. 752-2 du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du premier alinéa, après les mots : « Elles veillent au respect », sont insérés les mots : « de l’environnement et de la préservation des ressources naturelles » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« …° Enseignent à leurs élèves l’éco-ception et leur apprennent à privilégier les matériaux durables, naturels, biosourcés et/ou recyclables et à favoriser au maximum les économies d’énergie. »
La parole est à M. Guillaume Gontard.