M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, sur l’article.
Mme Éliane Assassi. Je remplace cette fois-ci Mme Prunaud !
Notre groupe soutiendra la disposition prévue à cet article, en émettant une réserve, toutefois, sur son application et sa coordination avec une mesure adoptée dans le cadre de la loi relative à la programmation militaire, la LPM. Peut-être pourrez-vous nous éclairer, monsieur le secrétaire d’État ?
Lors de l’examen de la LPM, notre objectif était double : éviter les ruptures de carrière en maintenant l’engagement et en permettant une conservation des droits d’avancement, et poursuivre l’objectif de développement de la réserve. Nuance importante, ce droit à l’avancement se calcule au prorata des jours d’activité au sein de la réserve, soit en moyenne 35 jours par an et par réserviste.
Dans quel cadre s’intègre donc la mesure de l’article 33 bis ? Vient-elle en supplément ou en substitution de ce que nous avions voté dans le cadre de la LPM ?
Dans le second cas, la mesure resterait une avancée majeure pour les militaires, mais pourrait poser un problème pour la réserve. En effet, quel serait l’intérêt pour un militaire de poursuivre son engagement au sein de la réserve opérationnelle, si cela conduit à réduire ses droits en matière d’avancement de carrière ?
Notre groupe a émis des réticences sur l’utilisation actuelle importante de la réserve, qui est venue compenser les manques d’effectifs.
C’est notamment le cas au sein du service de santé des armées. Le dévouement de ses personnels est énorme et leur travail, d’excellence, est reconnu par nous tous. Mais la situation reste très tendue, le service est en sous-effectif chronique, malgré l’apport des réservistes.
C’est pourquoi il me semble que, si nos craintes étaient confirmées, la navette parlementaire devrait permettre d’effectuer une coordination législative.
M. le président. L’amendement n° 414, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 2 et 3
Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :
1° Le troisième alinéa de l’article L. 4138-14 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « liées à l’enfant ; », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « il conserve l’intégralité de ses droits à avancement, dans la limite d’une durée de cinq ans pour l’ensemble de sa carrière. » ;
b) La deuxième phrase est ainsi rédigée : « Cette période est assimilée à des services effectifs dans le corps. » ;
2° Après le troisième alinéa de l’article L. 4138-16, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cas où le militaire bénéficie d’un congé pour convenances personnelles pour élever un enfant, il conserve l’intégralité de ses droits à avancement, dans la limite d’une durée de cinq ans pour l’ensemble de sa carrière. Cette période est assimilée à des services effectifs dans le corps. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;
II. – Alinéa 5
1° Supprimer les mots :
parental au titre de l’article L. 4138-14 ou d’un congé
2° Après la référence :
L. 4138-16
insérer les mots :
ou d’un congé parental au titre de l’article L. 4138-14
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. J’espère que la présentation de l’amendement n° 414 apportera des réponses à Mme Assassi.
Avec cet amendement, il s’agit de reprendre les dispositions prévues pour les fonctionnaires afin de pouvoir les appliquer aux personnels militaires.
Ainsi, le congé parental ouvre droit à la prise en compte au titre de l’avancement et des services effectifs dans la limite de cinq ans au cours de la carrière.
Le congé pour convenances personnelles, qui correspond à la disponibilité pour les fonctionnaires, ouvre droit à la prise en compte au titre de l’avancement et des services effectifs, toujours dans la limite de cinq ans au cours de la carrière.
Le congé parental et le congé pour convenances personnelles, en cas de combinaison successive de ces deux dispositifs, sont pris en compte au titre de l’avancement et des services effectifs dans la limite de cinq ans.
Par ailleurs, s’agissant du congé pour convenances personnelles pour élever un enfant, dans le cadre du congé similaire de la fonction publique, l’âge de cet enfant sera fixé par décret en Conseil d’État.
La rédaction retenue par la commission ne correspond pas à un tel dispositif. En outre, elle supprime les conditions de réintégration du militaire et le quatrième alinéa de l’article L. 4138-16 du code de la défense, qui concerne un congé pour convenances personnelles spécifique aux militaires, car jumelé avec un engagement à servir dans la réserve opérationnelle. Cet alinéa prévoit, à ce titre, les modalités de prise en compte de certaines durées de service dans la réserve opérationnelle.
Ce congé pour convenances personnelles assorti d’un engagement à servir dans la réserve opérationnelle, spécifiquement créée par la LPM de juillet 2018 pour répondre aux besoins des armées dans le cadre du maintien des compétences rares ou concurrentielles, est un dispositif différent du congé ordinaire pour convenances personnelles pour élever un enfant.
En effet, dans cette position de non-activité, le militaire recouvre ses droits à l’avancement au prorata du nombre de jours d’activité accomplis sous contrat d’engagement à servir dans la réserve. Ses conditions d’application ont été déterminées par décret en Conseil d’État.
Nous visons à permettre l’extension aux militaires des dispositions adoptées par la commission des lois, en lien avec la LPM que vous avez votée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. L’avis est favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 33 bis, modifié.
(L’article 33 bis est adopté.)
Chapitre Ier bis
Organisation des concours
(Division et intitulé nouveaux)
Article 33 ter
I. – L’avant-dernier alinéa de l’article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Les concours peuvent être organisés :
« a) Au niveau national en vue de pourvoir des emplois offerts sur l’ensemble du territoire national ;
« b) Au niveau national en vue de pourvoir des emplois offerts au titre d’une ou de plusieurs circonscriptions administratives déterminées, dans des conditions et selon des critères définis par décret en Conseil d’État ;
« c) Au niveau déconcentré.
« Dans les cas prévus aux a et b du présent article, la compétence des ministres en matière d’organisation des concours et, le cas échéant, de nomination subséquente peut être déléguée, par arrêté conjoint du ministre intéressé et du ministre chargé de la fonction publique, après consultation des comités sociaux d’administration, au représentant de l’État dans la région, dans le département, dans les collectivités mentionnées à l’article 72 de la Constitution ou en Nouvelle-Calédonie, pour le recrutement des personnels placés sous son autorité. »
II (nouveau). – Le premier alinéa de l’article 1er de la loi n° 66-496 du 11 juillet 1966 relative à la création de corps de fonctionnaires de l’État pour l’administration de la Polynésie française est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils peuvent appartenir, dans l’ordre hiérarchique décroissant, aux catégories A, B ou C. »
M. le président. L’amendement n° 397, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. La commission des lois a voté la création d’un corps de fonctionnaires de l’État pour l’administration de la Polynésie française. Or l’article 1er de la loi du 11 juillet 1966 relative à la création de corps de fonctionnaires de l’État pour l’administration de la Polynésie française, les CEAPF, donne compétence au pouvoir réglementaire pour créer les corps ressortant de ce cadre juridique particulier, y compris ceux relevant de la catégorie A.
Il nous semble donc qu’il n’y a pas lieu de maintenir cette disposition législative, puisqu’elle relève du domaine réglementaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement du Gouvernement revient sur un apport de la commission des lois concernant les corps de fonctionnaires de l’État pour l’administration de la Polynésie française.
Catherine Di Folco et moi-même avons eu, à distance, une audition très intéressante des syndicats de fonctionnaires de la Polynésie, sur l’initiative de notre collègue Lana Tetuanui.
On dénombre aujourd’hui 3 000 personnels relevant des CEAPF, qui travaillent pour le compte de l’État ou sont mis à la disposition de la collectivité de Polynésie.
Sauf dans l’éducation nationale, les corps de CEAPF « s’arrêtent » à la catégorie B. Les intéressés doivent donc venir en métropole passer des concours et demander, quelques années plus tard, leur mutation pour revenir en Polynésie.
La commission a donc posé ce sujet sur la table et propose de mieux reconnaître le rôle des CEAPF. Nous tenons à cette disposition d’équité par rapport à leurs collègues de métropole. L’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. Je m’opposerai à cet amendement du Gouvernement et demanderai au Sénat d’en faire de même à l’unanimité. Pourquoi ? Parce qu’il met en place une véritable inégalité de traitement. Où est le droit à la différenciation dont j’entends parler à longueur de temps ici, à Paris ? La loi qui a créé les CEAPF spécialement pour la Polynésie française date, monsieur le secrétaire d’État, de 1966 ! Nous sommes en 2019, et cinquante-trois ans ont passé…
Cette revendication, qui a également été portée par mes prédécesseurs, n’a jamais été entendue et n’a pas reçu de réponse favorable de Paris. Lors de la création des CEAPF, seules ont été prévues les catégories B et C. L’ajout de la catégorie A constitue l’apport qui a été fait par les rapporteurs et mes collègues de la commission des lois. En France, quand vous avez créé la fonction publique territoriale, toutes les catégories ont été incluses, contrairement à ce qui s’est passé pour la Polynésie française, pour laquelle la catégorie A a été oubliée.
Monsieur le secrétaire d’État, que se passe-t-il ? Je serai très gentille cet après-midi, je ne dirai pas que nous vivons cela depuis cinquante-trois ans comme une sorte de « colonisation ».
M. Pierre Ouzoulias. Bien sûr !
Mme Lana Tetuanui. Pourquoi nos enfants polynésiens, qui sont prêts, qui ont fait l’effort de passer les concours nationaux et sont venus ici, à Paris, pour se préparer à repartir occuper chez nous des postes de catégorie A ne peuvent-ils malheureusement pas le faire ?
Je vous invite, monsieur le secrétaire d’État, à venir si vous en avez le temps cet été. (Sourires.) Je vous accueillerai à bras ouverts en Polynésie, et nous irons faire un tour dans toutes les administrations d’État.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue !
Mme Lana Tetuanui. Il est tout de même hallucinant que nos enfants qui reviennent avec un bagage solide, qui ont passé des années ici en France pour consolider leur formation, soient confrontés à cette inégalité.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Lana Tetuanui. Je souhaite l’unanimité du Sénat cet après-midi pour rejeter cet amendement. Merci pour la Polynésie française ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Guy-Dominique Kennel applaudit également.)
M. Pierre Ouzoulias. Il faut retirer l’amendement, monsieur le secrétaire d’État, sinon vous ne pourrez pas aller en Polynésie ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’invitation est tentante, et l’argument peut porter !
Je maintiens l’amendement pour une seule raison. Je ne nie pas, madame la sénatrice, qu’il y ait une nécessité ; je dis que cela relève du domaine réglementaire et qu’il faut y travailler.
Au risque de susciter quelques quolibets, je suis tout à fait partant pour répondre à votre invitation et aller à la rencontre des fonctionnaires, non pas pour la beauté du territoire – c’est aussi une bonne raison ! –, mais pour mesurer le problème et continuer à travailler de vive voix avec vous sur ce sujet-là.
M. le président. Je mets aux voix l’article 33 ter.
(L’article 33 ter est adopté.)
Articles additionnels après l’article 33 ter
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 194 rectifié ter est présenté par MM. Marie, Durain, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 257 rectifié bis est présenté par Mmes Assassi, Benbassa et Apourceau-Poly, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, M. P. Laurent, Mme Lienemann, M. Ouzoulias, Mme Prunaud et M. Savoldelli.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 33 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 2° de l’article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État est ainsi modifié :
1° Après la première phase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ces concours sont également ouverts aux collaborateurs de député et de sénateur ainsi qu’aux collaborateurs de groupe parlementaire. » ;
2° Au deuxième alinéa, après le mot : « intergouvernementales », sont insérés les mots : « ainsi que les services accomplis auprès des députés, des sénateurs et des groupes parlementaires ».
II. – Le premier alinéa du 2° de l’article 36 de loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ces concours sont également ouverts aux collaborateurs de député et de sénateur ainsi qu’aux collaborateurs de groupe parlementaire. » ;
2° À la dernière phrase, après le mot : « intergouvernementales », sont insérés les mots : « ainsi que les services accomplis auprès des députés, des sénateurs et des groupes parlementaires ».
III. – Le premier alinéa du 2° de l’article 29 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ces concours sont également ouverts aux collaborateurs de député et de sénateur ainsi qu’aux collaborateurs de groupe parlementaire. » ;
2° À la dernière phrase, après le mot : « intergouvernementales », sont insérés les mots : « ainsi que les services accomplis auprès des députés, des sénateurs et des groupes parlementaires ».
La parole est à M. Didier Marie, pour présenter l’amendement n° 194 rectifié ter.
M. Didier Marie. Cet amendement vise, dans une logique de validation des acquis de l’expérience, à faire prendre en compte l’ancienneté des collaborateurs parlementaires dans les conditions d’accès aux concours internes de la fonction publique territoriale. Il avait d’ores et déjà été adopté par notre assemblée lors de l’examen du projet de loi pour la confiance dans la vie politique. Comme il n’avait pas prospéré, nous souhaitons qu’il soit repris pour aller à son terme.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 257 rectifié bis.
M. Pierre Ouzoulias. Notre amendement obéit exactement à la même logique. Nous considérons aujourd’hui qu’il est essentiel de permettre à nos collaborateurs, qui ont des tâches difficiles ici et des carrières parfois compliquées, de poursuivre leur carrière à l’extérieur, notamment dans un cadre de la fonction publique nationale et territoriale.
Ce serait une juste récompense pour leur travail et leur investissement, au service de l’intérêt général.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Di Folco, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Ces deux amendements visent à ouvrir les concours internes des trois versants de la fonction publique aux collaborateurs parlementaires et aux collaborateurs de groupe.
Cette disposition n’a pas été retenue par la commission mixte paritaire sur le projet de loi pour la confiance dans la vie politique.
Aujourd’hui, les collaborateurs peuvent se présenter aux concours externes et aux troisièmes concours. Ils sont, en effet, sous contrat de droit privé, et non de droit public.
Leur ouvrir, en outre, les concours internes pourrait soulever une difficulté sur le plan constitutionnel : ils seraient les seuls à pouvoir se présenter à trois catégories de concours.
La situation serait également déséquilibrée par rapport aux apprentis, aux candidats issus du milieu associatif et même aux élus locaux, qui peuvent seulement se présenter au troisième concours.
Je rappelle d’ailleurs que les chances de réussite au troisième concours sont élevées : il y a, certes, moins de places offertes, mais également beaucoup moins de candidats.
Enfin, l’Association pour la gestion des assistants de sénateurs, l’AGAS, propose déjà des formations de préparation au concours de l’ÉNA.
Compte tenu de tous ces arguments, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Pour avoir été moi-même collaborateur parlementaire pendant quelques années, j’éprouve une sensibilité réelle à ce sujet, et j’ai eu l’occasion, voilà plusieurs années – trop à mon goût –, de défendre ce principe.
Cela dit, au-delà des questions d’équité par rapport aux agents publics et aux autres candidats, le Gouvernement se trouve confronté à une difficulté : la possibilité de se présenter à un concours interne est aujourd’hui subordonnée à la condition d’avoir réalisé un service effectif sous contrat de droit public. C’est d’ailleurs ce qui a amené nos prédécesseurs, s’agissant d’un problème de droit et non d’un problème politique, à ne pas pouvoir valoriser les années d’apprentissage dans l’accès au concours interne, le contrat d’apprentissage relevant du droit privé.
Les collaborateurs parlementaires étant assujettis au droit privé, une telle extension ouvrirait l’accès au concours interne à des contractuels de droit privé ; cela aurait pour conséquence une ouverture très large de ce concours, y compris à des personnes titulaires d’autres types de contrat de droit privé.
Nous devons donc trouver d’autres solutions, et il y a justement la troisième voie du concours. Je l’ai indiqué à plusieurs reprises, l’organisation des concours relevant de la voie réglementaire, j’ai ouvert une concertation spécifique portant sur des concours adaptés. Ce qui a été dit sur l’apprentissage pourrait donc être étendu à d’autres bénéficiaires afin de valoriser l’expérience, que je crois importante – je le sais pour l’avoir vécu ici –, des collaborateurs parlementaires.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.
Mme Laurence Rossignol. L’adoption de cet amendement conduirait à ouvrir l’accès aux concours internes de la fonction publique à certains contractuels de droit privé, mais tous les contractuels de droit privé ne pourraient pas y prétendre. Effectivement, cela conduit à modifier la loi, mais nous sommes ici pour cela, pour faire évoluer la législation. Cela ne me paraît donc pas constituer un obstacle important, puisque le texte prévoirait expressément que seuls les collaborateurs parlementaires sont concernés.
En outre, si le Gouvernement mène à son terme sa réforme tendant à la réduction drastique du nombre de parlementaires, celle-ci aura – cela n’aura échappé à personne – des conséquences non seulement sur l’exercice de la vie démocratique, mais aussi d’un point de vue social, notamment pour les collaborateurs parlementaires. Je vous propose donc de faire de cette disposition une mesure d’accompagnement de la réforme institutionnelle que prévoit le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Madame la rapporteur, vous avez bien résumé la difficulté de la situation ; les collaborateurs sont aujourd’hui soumis à un contrat de droit privé. Mais pensez-vous sincèrement que l’activité politique qu’ils accomplissent pour nous est d’ordre privé ?
Je veux rappeler la position que notre commission des lois a exprimée lors de la discussion de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique. Notre rapporteur soulignait que les collaborateurs étaient bien liés à leur employeur – nous – par un contrat de droit privé, mais qu’il était « difficilement contestable que nos collaborateurs concourent au service public de la législation et du contrôle de l’action du Gouvernement ».
Il y a là une forme d’incongruité, dont nous nous satisfaisons depuis trop longtemps, et ce que nous proposons au travers de cet amendement serait une juste compensation d’un statut qui est, certes, privé sur le papier, mais qui, en réalité, concourt largement au « service public de la législation ».
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Il paraît assez paradoxal, tandis que ce texte ouvre tous azimuts la fonction publique au contrat, de ne pas permettre aux collaborateurs parlementaires, qui exercent une mission de service public à nos côtés, pour améliorer le travail législatif, d’avoir la possibilité d’intégrer la fonction publique territoriale.
Cet amendement vise donc à reconnaître les acquis professionnels et à ouvrir une voie spécifique à ce type d’emploi, en faveur d’une intégration dans la fonction publique territoriale. Cela nous semble raisonnable.
À défaut, il faudrait remettre sur le métier la question du statut des collaborateurs parlementaires, une revendication ancienne des organisations syndicales et des associations de collaborateurs, qui n’a toujours pas trouvé de solution.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.
M. Jérôme Bascher. J’ai souvenir que, au cours d’une nuit de la semaine dernière, nous avons adopté un amendement visant à renforcer le principe de neutralité des fonctionnaires, au sein du statut de la fonction publique. Quel paradoxe, par conséquent, d’affirmer que nos collaborateurs devraient être politiquement neutres ! J’ai l’impression d’un léger hiatus…
Je le comprends, vous n’avez pas voté cet amendement la semaine dernière, mes chers collègues.
Mme Éliane Assassi. C’est donc cohérent !
M. Jérôme Bascher. Oui, il y a de votre part une cohérence, dont je vous fais crédit, à soutenir ces amendements identiques.
Toutefois, comprenez que, également dans un souci de cohérence, nous soyons évidemment contre ce principe. (Mme Éliane Assassi proteste.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Je veux rappeler deux choses.
D’abord, les collaborateurs peuvent déjà passer le concours externe et le troisième concours.
Mme Laurence Rossignol. Comme tout le monde, ni plus ni moins que les autres !
Mme Catherine Di Folco, rapporteur. Mais oui ! Ils sont, en effet, comme tout le monde. Donc, pourquoi s’acharner à leur permettre de passer un autre type de concours, qui, du reste, n’est pas plus facile que les deux autres ? Je l’ai expliqué, il y a souvent une probabilité plus grande de réussir un concours par la troisième voie que par la voie interne ; il faut donc bien réfléchir à tout cela… En outre, des fonctionnaires préfèrent passer le concours externe plutôt que le concours interne, parce que la probabilité de réussite y est supérieure.
Ensuite, il ne faut pas confondre le contrat et les missions. Le contrat est de droit privé, même si les missions sont attachées à un service public, ce dont je conviens. Ne mélangeons pas tout…
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Monsieur Marie, vous allez trouver que ce que je dis est une banalité.
Comme vous le savez, j’ai eu la chance d’être collaborateur parlementaire, au Sénat, de 2002 à 2007 – cela remonte déjà à quelques années –, avant d’être élu député ; cela m’a d’ailleurs certainement permis d’être meilleur député…
M. Loïc Hervé, rapporteur. Joli début de carrière !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Or, depuis que j’ai fréquenté ces murs, cette question se pose, et peut-être la réponse réside-t-elle dans l’instauration d’un véritable statut du collaborateur et dans le fait de réinterroger la nature juridique du contrat qui lie les collaborateurs parlementaires aux parlementaires et, à travers ces derniers, à l’institution.
D’autre part, je le dis sans agressivité, monsieur Bascher, je ne peux pas adhérer à votre argumentation. Nous pouvons revendiquer la neutralité et la loyauté des fonctionnaires, mais nous n’exigeons d’aucun candidat à quelque concours de la fonction publique que ce soit qu’il n’ait pas de convictions.
Mme Éliane Assassi. Absolument !
M. Jérôme Bascher. Je parlais de l’expression des convictions !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Les candidats à un concours peuvent avoir des convictions et les avoir exprimées, mais, dès lors qu’ils ont réussi le concours, qu’il soit interne ou externe, on attend d’eux neutralité et loyauté dans l’exercice de leurs fonctions. Par conséquent, ce qui s’est passé avant le concours appartient à chaque candidat, et votre argument visant à justifier le refus d’ouverture du concours interne aux collaborateurs parlementaires ne me semble pas valide.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 194 rectifié ter et 257 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)