M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous partageons bien évidemment votre préoccupation, monsieur Jomier, mais nous ne sommes pas sûrs que la voie de la taxation soit la plus logique. (Mme Catherine Conconne applaudit.) Comme vous l’avez remarqué, il est difficile de définir la liste des produits concernés.
Je pense que nous devons travailler à une interdiction pure et simple des bonbons dont le nom évoque l’alcool. Ce phishing des industriels à l’égard de nos jeunes leur laisse penser que l’alcool est sans danger dans des produits de consommation courante. C’est donc un vrai sujet de santé publique.
En revanche, ma réponse sera la même qu’à l’Assemblée nationale : je ne pense pas que la taxation soit la bonne méthode et je vous propose plutôt de travailler à une interdiction pure et simple.
M. René-Paul Savary. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Quand pensez-vous pouvoir interdire ces produits, madame la ministre : aujourd’hui, demain, après-demain ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous avons présenté un plan interministériel « Priorité prévention » en février dernier. Un comité assure le suivi de ce plan et, si nous voyons apparaître de nouveaux sujets de santé publique, rien n’interdit de proposer de nouvelles mesures.
En l’occurrence, il s’agirait de mesures sans impact budgétaire, qui relèveraient du champ réglementaire, et non du PLFSS. Je compte y travailler dans le courant de l’année.
Nous travaillons aussi à un plan de santé concernant les 0-6 ans : nous ne manquerons donc pas de vecteurs pour introduire une mesure de ce type.
Quoi qu’il en soit, il me semble important de montrer la détermination de l’ensemble des élus et du Gouvernement sur ce sujet qui touche notre jeunesse.
En revanche, le problème de la définition des produits se posera pour l’interdiction comme pour la taxation. Si l’on votait aujourd’hui une taxation de ces produits alimentaires à destination de la jeunesse, on ne serait sans doute pas en mesure de l’appliquer. Nous devons travailler sur l’identification des produits que nous souhaitons cibler.
Je vous propose donc d’aller tout simplement vers une interdiction de ce type de produits, mesdames, messieurs les sénateurs, et vous pourrez m’interroger dans quelques mois pour savoir si j’ai avancé sur le sujet.
M. le président. Monsieur Jomier, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par la commission ?
M. Bernard Jomier. Je remercie le rapporteur de sa proposition de précision, que j’accueille volontiers.
Quant à l’interdiction, madame la ministre, elle me semble plutôt relever du niveau législatif que du niveau réglementaire. Il vous faudra donc trouver un véhicule législatif.
M. Bernard Jomier. Si vous nous donnez l’assurance que vous introduirez cette interdiction dans le projet de loi Santé, que vous présenterez en juin prochain au Parlement, j’accepte, en accord avec le rapporteur, de retirer cet amendement.
Sinon, il me semble que son adoption dans le cadre du PLFSS aurait le mérite d’adresser un message clair aux fabricants (Mme Nassimah Dindar opine.), qui cesseront peut-être d’investir dans ce type de marketing.
M. François Pillet. Très bien !
M. Bernard Jomier. Ce qui peut leur faire peur, ce n’est pas tant le montant de la taxe que la volonté forte du législateur de mettre un terme à ces pratiques.
Il serait dommage de se priver de ce message pour une hypothétique interdiction, dont on ne sait pas aujourd’hui quand elle pourra être inscrite à notre calendrier législatif. (Marques d’approbation sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Un projet de loi sera présenté l’an prochain autour de la stratégie de transformation du système de santé, la STSS.
Je ne sais pas si nous serons prêts pour introduire une telle mesure d’interdiction dans ce projet de loi. En revanche, rien n’empêche de déposer une proposition de loi sur ce sujet, dans le cadre d’une niche parlementaire. Je suis prête à soutenir une initiative du Sénat allant dans ce sens.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vos annonces sont intéressantes, madame la ministre, et me semblent de nature à répondre à l’objet de l’amendement de notre collègue Bernard Jomier.
Avec une proposition de loi, l’argument selon lequel l’interdiction pourrait être retardée n’est plus pertinent. Encore faut-il savoir dans quelle niche parlementaire et quand cette proposition pourra être déposée…
Il me semble toutefois que le groupe socialiste et républicain dispose de niches parlementaires (M. Rachid Temal s’exclame.) et que ses membres sont suffisamment nombreux pour pouvoir la présenter dans des délais relativement courts.
Mme Laurence Rossignol. Et l’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mme la ministre ne semble pas pouvoir garantir l’introduction de cette mesure dans le projet de loi Santé qu’elle présentera au printemps prochain. Une proposition de loi pourrait donc être un excellent vecteur (On le conteste sur de nombreuses travées.), ses dispositions pouvant être adoptées le plus vite possible et être ensuite intégrées sans difficulté dans le projet de loi Santé.
M. le président. Monsieur Jomier, qu’en est-il de votre amendement ?
M. Bernard Jomier. Une proposition de loi est un outil complexe. Il faut trouver la niche.
Il me semble plus simple d’adopter l’amendement que j’ai présenté dans le cadre du PLFSS (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Rachid Temal et Mme Victoire Jasmin applaudissent également.),…
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Bernard Jomier. … en attendant que Mme la ministre propose d’inscrire l’interdiction dans la loi.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’un n’empêche pas l’autre : on peut parfaitement voter cet amendement aujourd’hui et déposer par la suite une proposition de loi, ou insérer l’interdiction dans le projet de loi Santé.
M. le président. À la suite de la proposition de modification de M. le rapporteur, acceptée par M. Jomier, je suis donc saisi d’un amendement n° 460 rectifié ter, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche, Magner et Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le chapitre Ier du titre III de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« Chapitre Ier …
« Produits alimentaires à référence alcoolique
« Art. 520 B. – Pour l’application des dispositions du présent code, sont dénommés produits alimentaires à référence alcoolique l’ensemble des produits dont la composition n’indique pas de produit mentionné à l’article 401 mais dont l’étiquetage des unités de conditionnement ou l’emballage extérieur comprennent des éléments ou dispositifs qui contribuent à la promotion d’un produit mentionné au même article 401.
« Art. 520 C. – I. – Est instituée, à compter du 1er janvier 2019, une taxe sur les produits alimentaires à référence alcoolique, définis à l’article 520 B.
« II. – Sont redevables de cette taxe les personnes produisant, important ou distribuant en France les produits alimentaires à référence alcoolique définis à l’article 520 B.
« III. – La taxe est assise sur le chiffre d’affaires réalisé sur les produits définis à l’article 520 B.
« IV. – Le taux de la taxe est fixé à 5 % du montant mentionné au III.
« V. – La taxe est déclarée et liquidée sur l’annexe à la déclaration des opérations du mois de mars de l’année au titre de laquelle la taxe est due, déposée en application de l’article 287.
« Elle est acquittée au plus tard lors de cette déclaration.
« VI. – La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.
« Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe.
« VII. – Le produit de la taxe est affecté à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Il est difficile d’appliquer aux zones frontalières les interdictions que l’on prononce en France.
J’étais rapporteur de la loi interdisant le bisphénol A, et je constate les difficultés au niveau européen, les consommateurs ne s’arrêtant pas à la frontière franco-allemande.
Je suis donc plutôt favorable à une taxation dans un premier temps, ou sinon à une interdiction dans toute l’Europe. Une interdiction sur le seul territoire français ne servirait strictement à rien. Nos jeunes traversent la frontière pour aller en boîte de nuit et ils consommeront à l’étranger ces produits dont le nom évoque des boissons alcoolisées.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Très bien !
M. Rachid Temal. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.
Mme Catherine Deroche. Je remercie Bernard Jomier d’avoir maintenu cet amendement.
On nous demande souvent d’attendre le prochain véhicule législatif… Quant aux propositions de loi, elles reçoivent souvent un avis défavorable du Gouvernement, et, parmi celles qui sont adoptées au Sénat, beaucoup ne franchissent jamais le seuil de l’Assemblée nationale. Voilà cinq ans, par exemple, qu’on parle des seuils sociaux.
La taxation n’empêchera pas d’engager le travail de réflexion proposé par Mme la ministre. En adoptant cet amendement, nous enverrons un signal à tous ceux qui, de façon irresponsable, mettent en danger la santé de nos enfants. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Vous avez déclaré être plutôt favorable à une interdiction, madame la ministre. C’est une annonce forte.
Toutefois, une grande confiance n’exclut pas une petite méfiance, comme on le dit dans mon bocage normand…
Si notre collègue avait retiré son amendement, d’autres sénateurs l’auraient sans doute repris.
Catherine Deroche a raison s’agissant des propositions de loi qui ne sont jamais examinées par l’Assemblée nationale.
Si l’on vote la taxation aujourd’hui, elle a peu de chance d’être maintenue lors de la commission mixte paritaire. Mais il est vrai aussi que si les deux chambres l’adoptaient, il serait sans doute très difficile de prononcer une interdiction l’an prochain.
Il me semble toutefois que l’adoption de cet amendement constituerait un signal fort, qui rejoindrait votre souhait d’interdire ces produits, madame la ministre.
Nous éprouvons souvent de grandes difficultés pour faire prospérer les textes : ce n’est jamais le bon endroit et le bon moment. Aujourd’hui, c’est, me semble-t-il, le bon endroit et le bon moment pour voter cet amendement. Nous le soutiendrons donc des deux mains !
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Mon propos sera proche de celui de Catherine Deroche, avec laquelle j’ai travaillé sur la question de la fiscalité comportementale. Je soutiens sans réserve l’amendement proposé par Bernard Jomier.
La fiscalité comportementale a plusieurs cibles.
Elle peut s’adresser aux consommateurs : dans ce cas, son effet est souvent ambigu et l’on constate que les catégories sociales les moins aisées sont celles qui sont les premières sanctionnées et les moins sensibles aux arguments présentés.
Elle peut également s’adresser aux industriels, qui pour leur part y sont très attentifs. Nous avons de multiples exemples dans l’histoire récente, où la fiscalité comportementale a amené des industriels à modifier la composition de leurs produits – je pense notamment à des fabricants français de boissons sucrées, qui ont diminué le taux de sucre dans le produit qu’ils mettent en vente.
Cet amendement nous permet de donner dès aujourd’hui un signal très important.
Si une mesure d’interdiction est ultérieurement adoptée, que ce soit sur l’initiative de parlementaires ou du Gouvernement, tant mieux ! Mais ne manquons pas l’occasion d’adresser aux industriels un message très fort, parce que les procédés mis en exergue par Bernard Jomier sont absolument intolérables et inadmissibles en termes de santé publique.
Mme Catherine Deroche. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Compte tenu des débats que nous avons eus précédemment et qui étaient très spécifiques à mon territoire, j’ai obtenu la liberté de vote sur cet amendement. J’ai donc le bonheur de dire à Mme la ministre que je suivrai sa position : elle a raison, taxer n’a jamais changé le cours des choses ! (Sourires sur plusieurs travées.)
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. Je voudrais remercier Bernard Jomier pour cette initiative. C’est une question, certes spécifique, mais très importante, parce qu’elle concerne l’enfance et l’initiation précoce à l’alcool que peuvent entraîner les pratiques qu’il a mentionnées. On l’a vu, la taxation fonctionne, que ce soit pour l’alcool ou pour le tabac. Pourquoi ne marcherait-elle pas sur ce type de produits ? Par conséquent, le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen votera cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Ce matin, la commission des affaires sociales a donné, à l’unanimité, un avis favorable à l’amendement présenté par Bernard Jomier.
Nous étions donc très favorables à la taxation avant d’entendre Mme la ministre proposer l’interdiction de ces produits, ce qui me semble être une meilleure formule encore que la taxation. Cependant, comme l’interdiction ne viendrait que dans un second temps, il nous faut d’abord, en votant immédiatement la taxation proposée par Bernard Jomier, envoyer un signal fort à ceux qui seraient tentés de mettre de tels produits sur le marché.
Ce signal sera d’autant plus fort que, si le Sénat vote aujourd’hui la taxation, l’Assemblée nationale devra se prononcer dans les semaines à venir sur ce sujet et elle devra se positionner soit pour la taxation, soit pour l’interdiction.
Mme Catherine Deroche et Mme Patricia Schillinger. Très bien !
M. le président. Madame la ministre, quel est l’avis du Gouvernement, à la suite de ces débats ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Sagesse. (Marques d’approbation sur plusieurs travées. – Mmes Patricia Schillinger et Nadine Grelet-Certenais applaudissent.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9 bis.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 292 rectifié ter, présenté par Mmes Guidez, C. Fournier et Dindar, MM. Henno, Mizzon et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le b du I de l’article 1613 bis du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les mots : « , définis aux articles 401, 435 et au a du I de l’article 520 A qui ne répondent pas aux définitions prévues aux règlements modifiés n° 1576/89 du Conseil du 29 mai 1989, n° 1601/91 du Conseil du 10 juin 1991 et n° 1493/99 du Conseil du 17 mai 1999, au 5° de l’article 458 du code des impôts, » sont supprimés ;
2° Le mot : « communautaire » est remplacé par les mots : « de l’Union européenne ».
La parole est à Mme Jocelyne Guidez.
Mme Jocelyne Guidez. Les boissons mélangeant alcool fort et boisson non alcoolisée très sucrée, telles que les prémix, Alcopops ou autres Coolers, masquent la dangerosité de l’alcool et leur forte teneur en sucre par un packaging festif, coloré et racoleur, particulièrement à l’égard des jeunes.
Le propriétaire de la marque Rosé Sucette a notamment précisé : « Ces bouteilles, à moins de 3 euros sur linéaire, seront un tremplin permettant aux néophytes d’accéder aux vins plus classiques, notamment pour un public plutôt jeune et féminin ».
À ce titre, les pouvoirs publics se sont intéressés à ce problème de santé publique dès la loi de finances pour 1997, en taxant ces boissons. Les chiffres de l’office français des drogues et des toxicomanies témoignent de l’efficacité de cette désincitation fiscale : en 1997, les ventes tombent à 100 000 litres contre 950 000 en 1996.
Ce dispositif de politique fiscale a été renforcé en 2004 et a entraîné en 2005 une baisse de 40 % des ventes de prémix. C’est ainsi que les trois leaders du marché – Boomerang, Smirnoff Ice et Eristoff Ice – ont vu leurs ventes reculer respectivement de 26,4 %, 34,6 % et 44,9 %.
Mais ces industriels se sont adaptés, en exploitant une faille de la loi de 2004 renforçant ce dispositif. En effet, cette dernière excluait du champ d’application de la taxe les vins aromatisés. Ainsi, des vins-coca ou des cidres aromatisés sont apparus sur le marché, ces derniers étant clairement adressés à la consommation des jeunes en raison notamment de leur marketing et de la politique de prix bas.
C’est pour ces raisons de santé publique que le présent amendement prévoit d’étendre la taxe dite prémix aux boissons aromatisées à base de vin.
M. le président. L’amendement n° 459 rectifié bis, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche, Magner et Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au b du I de l’article 1613 bis du code général des impôts, la référence : « , n° 1601/91 du Conseil du 10 juin 1991 » est supprimée.
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Sans répéter ce que vient de dire Jocelyne Guidez ou ce que ne manquera pas d’indiquer Chantal Deseyne en présentant l’amendement suivant, les produits que nous visons ici relèvent de la même thématique que notre débat précédent : il s’agit uniquement de marketing publicitaire en direction des 12-15 ans.
Comme le propriétaire de la marque Rosé Sucette l’a lui-même indiqué, ce sont les jeunes femmes qui sont particulièrement visées : veut-il s’assurer qu’au moment de la grossesse elles aient pris l’habitude de consommer de l’alcool ? C’est d’un épouvantable cynisme ! D’ailleurs, quand on y pense, il faut vraiment oser pour appeler un produit Rosé Sucette…
Le même procédé avait été tenté avec des alcools forts. C’est la loi qui y a mis le holà par une taxation qui a fait chuter les ventes – elles sont passées de 950 000 litres à 100 000 litres par an. De ce simple fait, les coûts liés à ces produits étaient trop élevés par rapport aux volumes vendus et ils ont disparu.
Nous devons indiquer clairement aux fabricants qu’ils doivent cesser de mettre ce type de produits sur le marché.
Il existe une légère différence entre notre amendement et ceux de Mmes Guidez et Deseyne : le nôtre n’englobe pas les cidres aromatisés. En effet, il me semble qu’il faut cibler les vins aromatisés, qui – j’en profite pour le dire – sont très largement fabriqués à partir de vins importés. Je ne souhaite pas opposer le vin et le cidre ; l’élargissement au cidre risque simplement de rendre l’application de la taxation plus difficile.
Sous cette nuance, la philosophie de nos amendements est exactement la même.
M. le président. L’amendement n° 103 rectifié ter, présenté par Mmes Deseyne, Deromedi et Lavarde, MM. Grosdidier et Mouiller, Mme A.M. Bertrand, MM. Mayet, Cambon et Sol, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. Cuypers, Huré et Rapin, Mmes Thomas, Chain-Larché et Renaud-Garabedian, MM. Mandelli, Husson, Piednoir et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Buffet, Mme Duranton et MM. Segouin et Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article 1613 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un ou plusieurs produits alcooliques, qui ne bénéficient pas d’indications géographiques protégées ou d’attestations de spécificité au sens de la réglementation communautaire, et qui contiennent plus de 35 grammes de sucre ou une édulcoration équivalente par litre exprimée en sucre inverti, font l’objet d’une taxe perçue au profit de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, dès lors que la boisson obtenue présente un titre alcoométrique acquis de plus de 1,2 % vol. et inférieur à 12 % vol. »
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Cet amendement, qui s’inscrit dans le même esprit que les deux précédents, vise à dénoncer les pratiques d’industriels qui cherchent à banaliser la consommation d’alcool par les jeunes. Les noms évocateurs de Rosé Sucette, Rouge Cola ou Bonbon Mojito prêtent à confusion et laissent croire que ces boissons sont anodines, ce qui est parfaitement irresponsable et inacceptable.
Il ne s’agit évidemment pas d’entrer en guerre contre les vins et les apéritifs, ils font partie de la culture française. Des marques comme Vermouth ou Noilly-Prat ne me gênent pas du tout.
Ce qui me gêne, c’est d’inciter les jeunes, en particulier les jeunes femmes, à boire de l’alcool. Nous entendons combattre les pratiques d’industriels peu scrupuleux, qui s’engouffrent dans une niche commerciale et utilisent généralement des vins de piètre qualité, bien souvent importés. Faire la promotion de tels produits n’est pas une bonne publicité pour les viticulteurs français !
Ces boissons s’adressent particulièrement à un public jeune. Or l’incitation à l’alcool est tout à fait inadmissible. Cet amendement constitue d’abord un message de prévention.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Sans revenir sur l’objet de ces amendements, qui ont été parfaitement présentés par leurs auteurs, je crois qu’il faut insister sur l’efficacité de la taxe sur les prémix qui n’est plus à démontrer. Ainsi, ses renforcements successifs ont permis de tirer les ventes à la baisse.
Toutefois, les marques qui se partagent ce marché exploitent dorénavant une faille du dispositif, en utilisant des mélanges à base de vin ou de cidre, et ces amendements entendent la combler.
L’amendement présenté par M. Jomier exclut les cidres, ce qui permet selon lui de rendre le champ d’application de la taxe plus efficace.
Néanmoins, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 292 rectifié ter présenté par Mme Guidez et demande par conséquent le retrait des amendements nos 459 rectifié bis et 103 rectifié ter de M. Jomier et de Mme Deseyne. Les amendements nos 292 rectifié ter et 103 rectifié ter sont très proches, mais il nous semble que la rédaction du premier est légèrement plus précise que celle du second.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je ne peux évidemment qu’être d’accord avec l’objectif de réduire la consommation de prémix par les jeunes et mon avis sera de nature principalement technique.
En ce qui concerne les amendements présentés par Mme Guidez et par Mme Deseyne, ils pourraient aboutir à assujettir d’autres liqueurs de terroir, ou des cidres, ce qui irait au-delà de l’objectif initial de la taxe.
Sur l’amendement de M. Jomier, les paramètres retenus – titrage compris entre 1,2 % et 12 % – laissent ouverte la possibilité pour les industriels de contourner très facilement le dispositif, en montant par exemple à 13 %. Or, on le sait, certains vins ont un fort titrage alcoolique.
Une éventuelle modification du périmètre de cette taxe me semble devoir être précédée d’un travail en profondeur sur tous les paramètres. Comme je l’ai indiqué à l’Assemblée nationale, je suis d’accord pour travailler sur ces dispositifs et les améliorer, de façon que nous touchions un maximum de prémix.
Aujourd’hui, tels qu’ils sont rédigés, ces amendements sont relativement incompatibles avec le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale et leur efficacité n’est pas certaine. C’est pourquoi je suis défavorable à ces amendements en l’état actuel, mais je m’engage devant vous à travailler à une amélioration du dispositif en vigueur en vue du prochain projet de loi de financement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, vous avez parlé du cidre, mais ces amendements concernent bien les boissons aromatisées à base de cidre, pas le cidre lui-même.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9 bis, et les amendements nos 459 rectifié bis et 103 rectifié ter n’ont plus d’objet.
Chapitre II
Des règles de cotisations plus claires et plus justes
Article 10
I. – L’article L. 380-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° A (nouveau) À la première phrase du 2°, après le mot : « retraite », sont insérés les mots : « ou d’invalidité » ;
1° À la première phrase du quatrième alinéa, les mots : « fixée en pourcentage du » sont remplacés par les mots : « assise sur le » et, à la fin, les mots : « , qui dépasse un plafond fixé par décret » sont supprimés ;
2° Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’assiette de la cotisation fait l’objet d’un abattement fixé par décret. Cette assiette, avant application de l’abattement, ne peut excéder un montant fixé par décret. » ;
3° Le cinquième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les personnes mentionnées à l’article L. 611-1 du présent code ainsi que pour les personnes mentionnées à l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, les revenus d’activité pris en compte pour l’application du cinquième alinéa du présent article ne peuvent être inférieurs à la plus faible des assiettes minimales retenues pour le calcul des cotisations sociales de ces personnes dans les conditions prévues aux articles L. 621-1 et L. 633-1, à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 635-1, au dernier alinéa de l’article L. 632-1, à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 642-1 et, le cas échéant, aux articles L. 644-1 et L. 644-2 du présent code ou à l’article L. 731-11 du code rural et de la pêche maritime.
« Le montant de la cotisation est égal au produit de l’assiette et d’un taux dont la valeur, fixée par décret, décroît linéairement à proportion des revenus d’activité et devient nul lorsque ces revenus atteignent le seuil mentionné au 1°. » ;
4° À la fin de l’avant-dernier alinéa, les mots : « du Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « en Conseil d’État ».
II. – Le présent article s’applique aux cotisations dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2019. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 10