Mme Laurence Rossignol. Il s’agit ici de créer une nouvelle circonstance aggravante.
Nous proposons, lorsqu’est constatée une infraction relevant du champ de nos préoccupations qui est le nôtre depuis hier, que le fait d’avoir enregistré sciemment et par quelque support que ce soit, les images relatives à la commission de cette infraction – en résumé, il y a une personne qui commet l’infraction et l’autre qui la filme – soit une circonstance aggravante pour les auteurs de cette infraction.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. En fait, il aurait été préférable de viser chaque infraction individuellement et d’en faire une circonstance aggravante, comme lorsque les faits sont commis sur un conjoint.
Surtout, c’est une circonstance aggravante sans circonstance aggravante. En effet, vous omettez de préciser le quantum supplémentaire de peines encourues…
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d’État. En tous points, mon avis est le même que celui de Mme la rapporteur.
M. le président. Madame Rossignol, l’amendement n° 36 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Laurence Rossignol. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 8 rectifié septies, présenté par Mmes de Cidrac, Bonfanti-Dossat et Boulay-Espéronnier, M. Brisson, Mmes L. Darcos, Deseyne, Garriaud-Maylam et Primas, MM. Bazin, Chaize et Charon, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi, Eustache-Brinio, Gruny, Keller et Lassarade et MM. Laugier, Meurant, Milon, Raison, Paccaud, Panunzi, Pellevat et Perrin, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article 222-9 du code pénal, après le mot : « mutilation », sont insérés les mots : « , une mutilation sexuelle féminine ».
La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Si le nombre de femmes adultes mutilées vivant en France est imprécis, l’INED l’Institut national d’études démographiques, estimait en 2004 qu’il s’établissait entre 42 000 et 61 000 personnes.
Les mutilations génitales féminines, dont l’excision est la forme la plus connue, portent gravement atteinte à l’intégrité physique et psychosexuelle des femmes, des adolescentes et des fillettes qui en sont victimes. Elles constituent une violation fondamentale de leurs droits, tels qu’ils sont énoncés dans de nombreuses conventions internationales, notamment dans la Convention relative aux droits de l’enfant et dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.
Cet amendement vise à préciser de manière explicite dans le code pénal que les mutilations sexuelles féminines, commises en France ou à l’étranger, par des résidents sur le territoire national, seront punies de dix ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d’amende, et jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle lorsque la mutilation est commise sur un mineur de quinze ans.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Ma chère collègue, votre préoccupation nous touche toutes particulièrement. Reste que cet amendement est satisfait par le droit en vigueur : l’excision est déjà punie par l’article 222-9 du code pénal, qui sanctionne toute violence ayant entraîné la mutilation permanente – c’est bien de cela qu’il s’agit. Il n’est nul besoin de citer des exemples.
L’ajout de cette précision visant à inclure notamment les mutilations sexuelles féminines ne paraît pas utile. Il pourrait même être contre-productif, ouvrant une longue liste d’exemples qui ne serait jamais exhaustive. Par conséquent, si je comprends parfaitement l’objet de votre amendement, celui-ci présente plus d’inconvénients que d’avantages.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 8 rectifié septies est retiré.
L’amendement n° 99 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, M. Arnell, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec et Gabouty, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 5° de l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles, après les mots : « à l’égard des mineurs », sont insérés les mots : « et de lutte contre la pédophilie ».
La parole est à Mme Josiane Costes.
Mme Josiane Costes. Il s’agit d’un amendement de précision, qui vise à nommer explicitement la prévention et la lutte contre la pédophilie.
Les auteurs de cet amendement ont voulu nommer explicitement dans la loi ce danger pesant sur les enfants, afin de pouvoir y apporter une réponse encore plus forte et adaptée. Considérant par ailleurs le très fort tabou qui plane sur les actes de pédophilie, ils veulent contribuer à le briser, en particulier auprès des professionnels qui interviennent dans les services des conseils départementaux en charge de l’aide sociale à l’enfance.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir la lutte contre « la pédophilie » dans les missions de l’aide sociale à l’enfance, l’ASE. Cet objectif est satisfait, puisque, en protégeant les mineurs, les conseils départementaux luttent déjà contre ce qu’il convient d’appeler la pédocriminalité.
Mme Michelle Meunier. Oui, il faut rectifier l’amendement !
Mme Marie Mercier, rapporteur. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d’État. J’abonde dans le sens de Mme la rapporteur : il est important de parler de pédocriminalité, non de pédophilie, pour souligner l’intolérance de toute la société à ces faits.
À ce propos, je souhaite faire un point sémantique qui me tient à cœur. La lutte contre les violences sexistes et sexuelles est aussi un combat culturel, donc un combat sémantique. À deux reprises hier, au cours des débats, il a été dit qu’une victime de violences sexuelles avouait avoir été violée. Je ne suis pas intervenue sur le moment, mais j’insiste : il est préférable de ne pas parler d’aveu. Ce sont les coupables qui avouent, pas les victimes.
Parler d’aveu peut contribuer, même involontairement, à ce que l’on appelle le victim blaming, c’est-à-dire à faire croire aux victimes qu’elles sont coupables de quelque chose, qu’elles ont quelque chose à se reprocher.
Sur cet amendement, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Costes, pour explication de vote.
Mme Josiane Costes. Monsieur le président, je souhaite en fait rectifier cet amendement, pour que le mot de « pédophilie » soit remplacé par celui de « pédocriminalité ».
Mme Marie Mercier, rapporteur. Il vaudrait mieux parler de violences sexuelles, en fait !
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 99 rectifié ter, présenté par Mme Laborde, M. Arnell, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec et Gabouty, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville et Requier, et ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 5° de l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles, après les mots : « à l’égard des mineurs », sont insérés les mots : « et de lutte contre la pédocriminalité ».
Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Je rappelle que l’ASE a pour mission la lutte contre les violences sexuelles. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Mme Esther Benbassa. Et la pédocriminalité ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Quand j’ai donné l’avis de la commission sur cet amendement, j’ai corrigé le mot pédophilie et j’ai parlé de pédocriminalité. Mais, je le répète, les missions de l’ASE portent sur les violences sexuelles.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
Mme Esther Benbassa. Ah !
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 6 rectifié bis est présenté par Mmes Blondin, Lepage, Monier, Rossignol et Jasmin, M. Courteau et Mmes Cartron et M. Filleul.
L’amendement n° 7 rectifié sexies est présenté par Mmes de Cidrac, Bonfanti-Dossat et Boulay-Espéronnier, M. Brisson, Mmes L. Darcos, Deseyne, Garriaud-Maylam et Primas, MM. Bazin, Chaize et Charon, Mmes Deroche, Delmont-Koropoulis, Deromedi, Eustache-Brinio, Gruny, Keller et Lassarade et MM. Laugier, Meurant, Milon, Paccaud, Panunzi, Pellevat, Raison et Perrin.
L’amendement n° 81 rectifié bis est présenté par Mmes Billon et Vullien, MM. Henno, Bockel, Janssens, Longeot et Delahaye, Mme de la Provôté, M. Canevet, Mme Goy-Chavent, M. Cazabonne, Mmes Dindar et Guidez, MM. Louault, Delcros, Moga et Médevielle, Mmes Tetuanui, Létard, Joissains et Vérien et M. Cadic.
L’amendement n° 93 rectifié est présenté par Mmes Laborde et M. Carrère, MM. Collin, Corbisez, Dantec et Gabouty, Mme Jouve et MM. Léonhardt, Menonville et Requier.
L’amendement n° 108 rectifié bis est présenté par Mmes Cohen et Benbassa, M. Collombat, Mme Assassi, M. Bocquet, Mmes Brulin et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud, M. Savoldelli et Mme Apourceau-Poly.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 5° de l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° Veiller au repérage et à l’orientation des mineures victimes ou menacées de mutilations sexuelles féminines ; »
La parole est à Mme Maryvonne Blondin, pour présenter l’amendement n° 6 rectifié bis.
Mme Maryvonne Blondin. Cet amendement vise à compléter l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles et à renforcer la formation des professionnels au repérage, à l’orientation et à l’accompagnement des victimes mineures menacées de mutilations sexuelles féminines ; nous en avons beaucoup parlé tout à l’heure.
Cet amendement est la conséquence des auditions nombreuses et de quatre recommandations du rapport d’information que j’ai rendu avec ma collègue Marta de Cidrac au nom de la délégation aux droits des femmes, intitulé Mutilation sexuelles féminines, une menace toujours présente, une mobilisation à renforcer. Je vous invite à le lire, mes chers collègues.
Je rappelle ces chiffres, qui font froid dans le dos : une victime est excisée toutes les quinze secondes dans le monde, qu’il s’agisse d’un bébé, d’une fillette ou d’une femme, et ce dans les trente pays répartis sur trois continents qui pratiquent cette atrocité. Cela représente environ 200 millions de femmes, dont 44 millions de moins de quinze ans.
Mes chers collègues, la France n’est pas épargnée. Nous avons entendu tout à l’heure les chiffres qui ont été donnés : jusqu’à 60 000 victimes en France, même si notre pays a été le premier à pénaliser cette torture dans les années quatre-vingt.
Aujourd’hui, ce sont les adolescentes qui risquent d’être excisées lors de voyages dans les pays d’origine de leur famille, en particulier durant les vacances scolaires.
Il est donc d’autant plus nécessaire, pour lutter contre ces violences et les prévenir, de renforcer la vigilance par une formation spécifique de tous les professionnels en contact avec ces jeunes filles, en premier lieu les services de la protection de l’enfance et de l’ASE. Ceux-ci doivent être en mesure de réagir, dès lors que le pays d’origine de leurs familles est l’un des trente pays qui pratiquent ces mutilations, en demandant un examen médical approfondi.
Cette violence sexuelle a bien toute sa place dans ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié sexies.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Je ne saurais mieux défendre cet amendement identique. Maryvonne Blondin a, avec Marta de Cidrac, qui a dû partir avant de pouvoir défendre cet amendement, rendu un rapport d’information sur les mutilations sexuelles féminines, dont nous vous recommandons la lecture, mes chers collègues, tellement il est intéressant et fourni.
M. le président. La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 81 rectifié bis.
Mme Annick Billon. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 93 rectifié.
Mme Maryse Carrère. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 108 rectifié bis.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement a été proposé par l’ensemble de mes collègues de la délégation aux droits des femmes.
Dans le cadre de travaux sur les excisions, qui, comme cela a été souligné, s’inscrivent dans le droit fil des violences sexuelles, j’ai eu l’occasion de rencontrer, voilà quelques mois, le docteur Mukwege, ce médecin qui, en République démocratique du Congo, « répare » les jeunes femmes et les femmes victimes de mutilations. Son témoignage et les témoignages auxquels la délégation a eu accès sont particulièrement poignants.
L’adoption de cet amendement est donc importante, car elle permettrait de préciser et d’étendre les missions de l’ASE, avec pour objectif le repérage et l’orientation des filles mineures victimes de mutilations sexuelles ou menacées de l’être.
J’ai tenu à prendre la parole, au lieu de considérer que cet amendement était défendu, pour exprimer mon étonnement. En effet, j’ai déposé au nom de mon groupe un amendement similaire tendant à introduire les mêmes dispositions sur le mariage forcé, lequel touche de nombreuses jeunes filles, y compris en France. Cet amendement a été retoqué pour irrecevabilité, alors que celui-là a été accepté. Cela me surprend, car c’est la même logique qui prévaut !
Évidemment, je suis ravie qu’il soit accepté, mais il doit y avoir une erreur. Pourquoi retoquer une disposition qui concerne les mariages forcés et l’accepter lorsqu’elle a trait aux mutilations sexuelles ? (Mme Marie-Pierre de la Gontrie s’exclame.) Le mariage forcé est un viol !
Une erreur est toujours possible, mais c’est dommageable. En tout cas, cela me donne l’occasion de faire allusion au mariage forcé qui est bien un viol.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Madame Cohen, votre amendement a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, en raison de la charge, même minime, qu’entraîne pour les collectivités départementales le fait d’élargir les missions de l’aide sociale à l’enfance.
Puisque nous ajoutons des charges, il serait d’ailleurs normal que nous puissions consulter, sans que ce soit une condition du vote, l’Assemblée des départements de France. Il serait correct, surtout à une époque où le Sénat insiste beaucoup sur le respect dû aux collectivités, de prévoir a minima une concertation. Ce sont les présidents de conseil départemental qui gèrent l’aide sociale à l’enfance : quand on fait évoluer les missions de l’ASE, il est normal d’y penser.
Ce n’est donc pas la commission des lois qui a opposé à votre amendement l’irrecevabilité. J’ignore par quel miracle celle-ci n’a pas été opposée pour le même motif financier à ces amendements identiques, mais cela nous vaut la satisfaction de pouvoir les accueillir favorablement, parce qu’ils vont dans le bon sens.
Mme Annick Billon. Très bien !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Toutefois, je ne saurais préjuger l’avis que donnera Mme la rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Je souhaite féliciter et remercier mes collègues Maryvonne Blondin et Marta de Cidrac. Je mesure la souffrance qu’entraîne un tel travail : on ne sort pas indemne d’une telle enquête et on ne peut s’empêcher de se sentir touchées.
Je les remercie également de cet amendement, qui vise à confier à l’ASE la mission de repérer les filles mineures victimes de mutilations sexuelles féminines ou menacées de l’être. Cela paraît en effet utile.
Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur ces amendements identiques.
Mme Annick Billon. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d’État. Sur le fond, je partage les observations extrêmement intéressantes qui ont été formulées. Sur la forme, je comprends les réserves exprimées par le président de la commission des lois.
C’est pourquoi, sur ces amendements identiques, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. En tant qu’ancien président de conseil départemental, je précise que les départements n’ont pas attendu que cette mission figure expressément dans la loi pour se préoccuper, au titre de leurs devoirs en matière d’aide sociale, de la prévention des mutilations féminines et des mariages forcés.
À ma grande honte, je ne prends d’ailleurs conscience qu’aujourd’hui que cette mission n’entrait pas déjà dans le cadre légal.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 rectifié bis, 7 rectifié sexies, 81 rectifié bis, 93 rectifié et 108 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.
L’amendement n° 100 rectifié bis, présenté par Mme Laborde, M. Arnell, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec, Gabouty et Guérini, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville et Requier, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 8° de l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi modifié :
« …° Élaborer des lignes directrices pour la prévention et la répression des actes pédophiles à destination des établissements et institutions publics ou privés recevant des mineurs, sans préjudice des compétences de l’autorité judiciaire. »
La parole est à Mme Maryse Carrère.
Mme Maryse Carrère. Il s’agit, là encore, de briser le tabou des actes de pédophilie et d’y apporter une réponse explicite, en précisant les missions des services de l’aide à l’enfance dans le code de l’action sociale et des familles.
Plus largement, madame la secrétaire d’État, nous souhaitons vous alerter sur l’urgente nécessité de constituer une structure interministérielle qui sensibilise l’ensemble de nos institutions, afin de mener une politique conjointe coordonnée de prévention et de lutte contre la pédophilie auprès des prescripteurs institutionnels, des services régaliens de l’État et de toute autre organisation en lien avec les enfants.
Les abus sexuels commis par des personnes ayant un lien d’autorité sur les mineurs traumatisent les victimes, causant des dommages psychologiques à long terme, pouvant les conduire à se mettre en danger par des conduites addictives, dépressives, voire les pousser au suicide. Cette souffrance est accentuée par le déni de justice qui résulte du fait que, le plus souvent, la loi du silence des institutions et employeurs protège, de fait, l’agresseur au détriment de la victime.
Ces barrières institutionnelles s’ajoutent aux réticences des victimes à voir les faits rendus publics et limitent à la fois les poursuites pénales et les procédures civiles en dommages et intérêts.
Beaucoup reste à faire pour contribuer à la libération de la parole des victimes et faire valoir leurs droits.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Cet amendement prévoit que l’aide sociale à l’enfance élabore des lignes directrices pour la prévention et la répression des actes de pédocriminalité. Ces lignes directrices relèvent plutôt du Gouvernement, de la Direction générale à la cohésion sociale, et non du service social à l’enfance de chaque département.
Cette réponse technique conduit la commission à émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 100 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 62 rectifié, présenté par Mmes de la Gontrie, Lepage, Rossignol, Blondin et Cartron, M. Courteau, Mmes M. Filleul, Jasmin, Monier, Conway-Mouret, Meunier et Lubin, MM. J. Bigot, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur, Sutour, Temal et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 6° de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, après le mot : « raison », sont insérés les mots : « de leur sexe, de leur genre, de leur orientation sexuelle, ».
La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie.
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Je serai brève, car j’ai bien compris que tout monde avait des problèmes de train.
M. Gérard Longuet. Ce sont plutôt des problèmes d’absence de train ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Pierre de la Gontrie. J’ai la chance d’être parisienne. Je ne suis donc pas concernée…
Il s’agit d’ajouter dans la liste des associations qui, en vertu de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, peuvent faire l’objet de décisions de dissolution les associations qui, tout en appelant à la haine, à la discrimination et autres, diffusent un message de haine à l’égard des femmes.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 80 rectifié bis est présenté par Mmes Billon et Vullien, MM. Henno, Laugier, Bockel, Janssens, Longeot et Delahaye, Mme de la Provôté, M. Canevet, Mme Goy-Chavent, M. Cazabonne, Mmes Dindar et Guidez, MM. Louault, Delcros, Moga, Médevielle et Maurey, Mmes Tetuanui, Létard, Joissains, Garriaud-Maylam, Vérien, Boulay-Espéronnier et L. Darcos, M. Brisson, Mme Jasmin, M. Cadic et Mme Bonfanti-Dossat.
L’amendement n° 89 rectifié est présenté par Mme Laborde, M. Arnell, Mme M. Carrère, MM. Collin, Corbisez et Dantec, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt et Menonville.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 6° de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, après le mot : « raison », sont insérés les mots : « de leur sexe, ».
La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 80 rectifié bis.
M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, pour présenter l’amendement n° 89 rectifié.
Mme Maryse Carrère. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie Mercier, rapporteur. Je comprends l’intention des auteurs de ces amendements. Néanmoins, il semble un peu disproportionné de dissoudre des associations qui propagent des idées ou des théories tendant à justifier la discrimination entre les sexes.
En effet, nombre de religions ont parfois des théories pouvant inciter à la discrimination en raison du sexe d’une personne. Faudrait-il pour autant interdire ou dissoudre de tels groupements ou associations ? Cela me semble une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression, notamment des opinions religieuses.
Je rappelle que les propos, et non pas les théories, qui appellent explicitement à la discrimination en raison du sexe de la personne ou d’un groupe de personnes sont déjà pénalement répréhensibles par l’article 24 de la loi de 1881.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marlène Schiappa, secrétaire d’État. Comme l’a précisé Mme la rapporteur, cette disposition est déjà prévue dans la loi.
Néanmoins, à titre personnel, je trouve cette disposition cohérente : elle permet de rendre le droit existant plus limpide et plus clair. Son adoption facilitera le pouvoir de dissolution des associations incitant à la discrimination, à la haine ou à la violence, en raison du sexe et du genre. À titre personnel, loin de trouver cette mesure disproportionnée, je juge souhaitable de dissoudre de telles associations, et ces amendements me semblent très pertinents.
Le Gouvernement émet par conséquent un avis favorable sur l’amendement n° 62 rectifié et défavorable sur les amendements identiques nos 80 rectifiés bis et 89 rectifié, dont la rédaction se limite au sexe et exclut, par exemple, les associations qui inciteraient à la haine homophobe.
Mme Laurence Cohen. Très bien !
Mme Annick Billon. Bravo !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 62 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 201 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 329 |
Pour l’adoption | 164 |
Contre | 165 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques nos 80 rectifié bis et 89 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)