M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il s’agirait d’encadrer les exportations vers des pays tiers hors de l’Union européenne par l’obligation de conclure des accords de partenariat avec les pays de destination et de disposer d’un certificat à l’export, afin de s’assurer de la protection de ces animaux dans ces pays de destination.
Là encore, si elle n’est pas négociée dans le cadre d’accords commerciaux multilatéraux, une telle obligation serait particulièrement discriminante pour les seules exportations françaises et, par ailleurs, peu contrôlable.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Les autorités françaises ne peuvent pas imposer aux pays tiers les actions qu’ils doivent mener dans ce domaine, mais elles s’appuient sur plusieurs leviers d’action aux niveaux international et européen.
Des dispositifs de communication ont été développés avec des pays tiers, comme Israël, pour échanger sur l’état général des animaux lors du déchargement dans le pays importateur. La France développe de nombreuses coopérations avec les pays tiers pour partager ses expériences dans les domaines de la sécurité sanitaire, de la santé et de la protection animales.
Au niveau européen, les autorités françaises veillent à ce que le bien-être animal soit bien couvert dans le cadre des négociations menées par la Commission. S’agissant des accords de libre-échange entre l’Union et les pays tiers, et dans chaque négociation, il s’agit de mettre en place une coopération internationale se matérialisant par des échanges d’informations et d’expertises, qui permettent de promouvoir et de développer des standards tant internationaux qu’européens. Un tel objectif a été rappelé dans le plan d’action de l’accord économique et commercial global avec le Canada.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 599 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 409 rectifié ter, présenté par Mmes Rossignol, Conway-Mouret, Lienemann et Jasmin, MM. Vallini et Devinaz, Mmes G. Jourda et Préville et M. Jomier, n’est pas soutenu, non plus que l’amendement n° 408 rectifié ter, présenté par Mmes Rossignol, Jasmin et Lienemann, M. Vallini, Mme Conway-Mouret, M. Devinaz, Mmes Préville et G. Jourda et M. Jomier.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 598 rectifié, présenté par Mme Rossignol, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – S’agissant de l’exploitation des couvoirs industriels aux fins de produire des poules pondeuses, les opérations de sexage des femelles s’effectuent de façon prénatale par la mise en œuvre des techniques de spectrométrie. Le recours à tout dispositif mécanique destiné à entraîner la mort de poussins mâles par broyage est interdit.
« Les établissements exploités sur le modèle d’un sexage après éclosion et équipés d’un dispositif mécanique de mise à mort avant l’entrée en vigueur du présent article bénéficient d’une dérogation les autorisant à les utiliser jusqu’au 31 décembre 2021. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement, déposé, comme les précédents, par Mme Rossignol, vise à interdire le recours à tout dispositif mécanique destiné à entraîner la mort de poussins mâles par broyage. Les couvoirs industriels produisent 90 millions de poussins chaque année aux fins de sélectionner des poules de races pondeuses. À l’éclosion, 50 millions d’entre eux s’avèrent être des poussins mâles et sont donc broyés vivants.
Si un arrêté du 12 décembre 1997 autorise l’utilisation de ces dispositifs mécaniques de broyage, il est temps d’affirmer que faire naître des animaux pour les tuer à leur naissance n’est ni éthiquement acceptable ni économiquement rentable.
M. le président. L’amendement n° 398 rectifié quater, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Conway-Mouret, Lienemann et Monier, MM. Devinaz et Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et MM. Manable et Jomier, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 214 rectifié, présenté par Mmes Benbassa et Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 214-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2020, le gazage et le broyage des poussins mâles et des canetons femelles sont interdits. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. L’amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements restant en discussion ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces deux amendements visent à interdire le broyage des poussins mâles dans les élevages de poules pondeuses d’ici à 2022, pour l’amendement n° 598 rectifié, et des poussins mâles et des canetons femelles d’ici à 2020, pour l’amendement n° 214 rectifié.
Nous sommes tous particulièrement mal à l’aise face à ces pratiques, mais il n’existe pas, à ce jour, de méthodes alternatives qui soient parfaitement validées et industrialisables à court terme. Nous sommes néanmoins vigilants sur ce sujet, que nous avons pu évoquer, à l’occasion des auditions, avec les industriels porteurs de nouveaux projets. Les travaux de recherche progressent, d’ailleurs financés par l’État. Lors des débats à l’Assemblée nationale, M. le ministre a ainsi rappelé que la France finançait à hauteur de 4,3 millions d’euros un projet de recherche sur le sexage des embryons, malheureusement non encore abouti à ce stade.
Dès que nous disposerons de cette solution alternative, il nous faudra interdire sans délai le broyage d’animaux vivants, dont chacun convient de la brutalité. D’ici là, je suis contrainte d’émettre un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. S’il y a un principe sur lequel nous pouvons être d’accord, c’est qu’il faut trouver une solution de remplacement suffisamment pertinente, qu’aucun pays n’a encore trouvée à ce stade.
En Allemagne, a été développée une technique, la spectrométrie, qui suppose de faire un trou dans chaque œuf. Nous avons conclu une convention avec une société française, à hauteur de 4,3 millions d’euros et dont le terme a été fixé à 2024, pour parfaire cette technique. Parce que nous avons besoin de temps pour y travailler, parce que la recherche et l’innovation, portées par les instituts techniques, n’ont pas suffisamment avancé, il convient de ne pas inscrire dès à présent de telles dispositions dans la loi.
Mme la rapporteur l’a dit, il est compréhensible que ces pratiques mettent mal à l’aise un grand nombre de personnes. Mais il convient de raisonner sur le temps long, pour trouver des processus pertinents. Un prototype a été mis au point. La phase de développement industriel va suivre et passera par le suivi des plans de filière. Il revient en effet à chaque filière concernée de travailler sur ces questions.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 213 rectifié est présenté par Mmes Benbassa et Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 407 rectifié ter est présenté par Mmes Rossignol, Lienemann, Jasmin, Conway-Mouret et Monier, MM. Vallini, Devinaz et Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et MM. Manable et Jomier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 214-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2020, la caudectomie des porcelets est interdite. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 213 rectifié.
M. Pierre Ouzoulias. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 407 rectifié ter n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Appelons les choses par leur nom, nous parlons ici de la caudectomie des porcelets. La coupe systématique des queues est déjà interdite par la réglementation communautaire : la section partielle de la queue peut être réalisée, non sur une base de routine, « mais uniquement lorsqu’il existe des preuves que des blessures causées aux mamelles des truies ou aux oreilles ou aux queues d’autres porcs ont eu lieu » et après que d’autres mesures ont été mises en œuvre.
Il est nécessaire de préserver cette possibilité en cas de besoin et de responsabiliser les professionnels sur le cadre strict de la réglementation. J’ai souhaité, dans le droit-fil de la stratégie en faveur du bien-être animal, que puissent être identifiées les causes de stress dans les élevages, le cannibalisme étant souvent une conséquence du stress. Par ailleurs, j’attends que cette question soit traitée à l’occasion des expérimentations, que je compte mener avec la filière, sur l’utilisation d’analgésiques et d’anesthésiques pour gérer la douleur.
C’est pourquoi je suis défavorable à une telle interdiction et, donc, à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Sans vouloir prolonger le débat, je rappellerai que couper systématiquement la queue des cochons est le résultat des élevages « concentrationnaires », il n’y a pas d’autres mots. On a évoqué le broyage de 50 millions de poussins mâles par an. Tout cela est inadmissible : ce n’est pas humain ! Je comprends ce qui a été dit, et, moi non plus, je n’ai pas de solution toute faite. Mais il faut nous donner des perspectives pour sortir de l’impasse actuelle, ce qui implique d’en finir avec l’hyperconcentration. Là encore, la relocalisation de l’élevage et de l’alimentation constituerait déjà une bonne partie de la réponse.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 212 rectifié est présenté par Mmes Benbassa et Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 400 rectifié quater est présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Monier, Jasmin, Conway-Mouret et Lienemann, MM. Devinaz et Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et MM. Jomier et Manable.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 214-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2020, la castration à vif des porcelets est interdite. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 212 rectifié.
M. Pierre Ouzoulias. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 400 rectifié quater n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement porte sur la pratique de la castration à vif des porcelets. Pour les mêmes motifs que sur les amendements précédents, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Il existe aujourd’hui plusieurs méthodes alternatives à la castration à vif des porcelets. En l’absence de castration, il est possible de mettre en place un dispositif de sélection à l’abattoir par une personne chargée de détecter et de retirer les carcasses malodorantes. Une telle mesure présente tout de même quelques limites, car un employé de l’abattoir passera son temps à renifler les carcasses de porcs : là aussi, appelons les choses par leur nom !
Sinon, on peut envisager la castration par immunothérapie, donc par injection. Cela n’est pas sans poser problème, ne serait-ce qu’au consommateur, lequel n’est pas forcément disposé à acheter de la viande de porc provenant d’un animal à qui l’on a fait une injection particulière en vue de sa castration.
Enfin, il existe la castration avec des analgésiques par un acte vétérinaire. C’est la voie que certains pays ont choisie, faisant intervenir les vétérinaires dans les élevages. Le dispositif représente un coût économique pour les éleveurs et une charge importante pour les vétérinaires. Il faudrait donc pouvoir l’évaluer.
Je souhaite poursuivre le travail dans ce domaine. Nous avons convenu, avec la filière porcine, parce que c’est inscrit dans tous les plans de filière et que nous collaborons très régulièrement sur le fond des sujets, que chacune de ces méthodes puisse faire l’objet d’une expérimentation et être testée en vue, éventuellement, de faire évoluer la réglementation en la matière.
J’ai également saisi le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, le CGAAER, sur la gestion de la douleur et l’utilisation des anesthésiques et des analgésiques dans les élevages. Son retour est attendu pour novembre 2018. Dans l’attente de ces expérimentations et du rapport, je suis défavorable à cet amendement, qu’il serait prématuré d’adopter compte tenu de ce que je viens d’expliquer.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Vouloir sélectionner les carcasses à l’abattoir en éliminant celles qui dégagent une odeur désagréable ne permettant pas leur commercialisation est un procédé tout de même assez choquant. Comment justifier d’avoir produit autant de viande pour finalement la détruire ? Cela me paraît très peu défendable.
En ce qui concerne la castration, je vous ai écouté avec intérêt, monsieur le ministre. Des solutions sont à l’étude. Il faut faire des progrès, mais en respectant l’économie des élevages, et c’est là qu’est la difficulté. On peut raisonnablement espérer que le travail commun engagé entre la filière et l’administration aboutisse à quelques solutions.
Monsieur Labbé, je comprends que la caudectomie des porcelets puisse choquer, mais, je le dis franchement, elle est très loin d’être la pratique la plus répréhensible et la plus choquante parmi tout le panel des interventions existantes en matière d’élevage. S’il ne restait que ce problème, on pourrait malheureusement s’en contenter, surtout, cela a été rappelé, que cette technique n’est autorisée que quand aucune autre n’est applicable.
M. le président. L’amendement n° 314 rectifié bis, présenté par M. Longeot, Mme Vullien, MM. Détraigne, Henno, Janssens, Moga et Louault, Mme Dindar, M. Mizzon, Mme Billon, MM. Vanlerenberghe et Prince, Mme Gatel et MM. Bockel, L. Hervé, Capo-Canellas, Canevet et Cigolotti, n’est pas soutenu.
Article 13 bis A
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-11 ainsi rétabli :
« Art. L. 214-11. – La mise en production de tout nouveau bâtiment d’élevage de poules pondeuses élevées en cages est interdite à compter de l’entrée en vigueur de la loi n° … du … pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 395 rectifié ter est présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Lienemann, Conway-Mouret, Meunier et Monier, M. Devinaz, Mmes Préville et G. Jourda et M. Jomier.
L’amendement n° 439 rectifié nonies est présenté par Mmes Boulay-Espéronnier, Delmont-Koropoulis et Bruguière, M. Pellevat, Mme Deromedi, M. Rapin, Mmes Garriaud-Maylam, Lassarade et Renaud-Garabedian, MM. Bansard et Daubresse, Mmes Goy-Chavent et Lanfranchi Dorgal et MM. Sido et Laménie.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – L’usage de système en cage est interdit pour tout établissement d’élevage de poules pondeuses.
« Les établissements qui ont mis en place un système d’élevage en cage avant l’entrée en vigueur de la loi n° … du … pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous sont autorisés à utiliser ces systèmes d’élevage jusqu’au 31 décembre 2021 pour la commercialisation d’œufs coquilles et jusqu’au 31 décembre 2024 pour tout autre mode de commercialisation.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article sur la base de la définition des systèmes alternatifs à la cage aménagée contenue dans la directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses. »
L’amendement n° 395 rectifié ter n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour présenter l’amendement n° 439 rectifié nonies.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. L’utilisation de systèmes d’élevage en cage pour les poules pondeuses est aujourd’hui perçue de façon négative, affaiblissant la confiance des consommateurs dans les filières d’élevage françaises. Et pour cause, dans certains élevages, les poules sont détenues dans des conditions incompatibles avec les impératifs biologiques de leur espèce, contrevenant ainsi aux dispositions de l’article L. 214-1 du code rural et de la pêche maritime. Les consommateurs sont non seulement moins confiants, mais aussi plus inquiets.
Cet amendement vise donc à traduire dans la législation française le remplacement, à l’échéance de 2022, conformément à une promesse du président Macron, de l’élevage en batterie des poules pondeuses au profit des élevages alternatifs. Évidemment, un échéancier progressif est prévu, de sorte que, en 2025, tous les œufs coquilles soient issus d’élevages alternatifs. Un accompagnement financier devra être mis en place, afin de soutenir les producteurs dans cette évolution de leurs systèmes d’élevage.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui souhaite s’appuyer davantage sur les engagements de la filière de développer des modes d’élevage alternatifs et de parvenir à 50 % d’œufs coquilles issus de ces derniers à l’horizon de 2022. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Madame la sénatrice, l’engagement du Président de la République, qu’il a pris pendant la campagne, est de faire en sorte que 50 % des œufs coquilles vendus aux consommateurs soient issus de modes d’élevage alternatifs à la cage, c’est-à-dire issus d’élevages en plein air ou au sol.
Pour cela, nous travaillons avec la filière, laquelle, dans le cadre de son plan de filière qu’elle nous a présenté au mois de décembre dernier, a l’ambition de parvenir à ce que plus de la moitié des œufs soient produits suivant un système alternatif à la cage à l’horizon de 2022. Cela permettra notamment que la totalité des œufs coquilles vendus aux consommateurs soient issus de volailles élevées dans le cadre desdits systèmes de production alternatifs à la cage. À cet effet, l’article 13 bis A prévoit que tout nouveau bâtiment d’élevage devra être destiné à ces modes d’élevage alternatifs. À partir du moment où la présente loi sera promulguée, il sera interdit de construire un bâtiment d’élevage de poules pondeuses élevées en cage. Celles-ci devront être élevées soit en plein air, soit au sol.
Souvenez-vous, en 2012, la réglementation européenne avait évolué, à la suite d’une demande très forte de faire agrandir les cages, justement au regard de cette question du bien-être animal. L’ensemble des exploitants ayant ainsi rénové leurs poulaillers ont consenti des investissements très lourds, de plusieurs millions d’euros, lesquels doivent pouvoir être rentabilisés dans le temps.
Pour cette raison, nous avons décidé, non pas d’interdire purement et simplement l’élevage en cage, mais de le faire évoluer au fur et à mesure de la construction de nouveaux poulaillers. Les éleveurs qui ont investi en 2012 dans l’agrandissement de leurs cages auront à faire des investissements supplémentaires dans quelques années. Tout cela va venir très vite, l’évolution dans ce domaine induisant une rotation des systèmes d’élevage relativement rapide. À ce moment-là, nous pourrons considérer, in fine, que l’élevage en cage aura pratiquement disparu. Dans 80 % des cas, les travaux de rénovation des bâtiments engagés en 2012 ne sont pas encore payés ; or les éleveurs ont naturellement besoin de gagner leur vie.
Heureusement, la filière œuf française fonctionne très bien, garantissant une production d’œufs français totalement autonome et de qualité. Cela nous donne quelques marges de manœuvre pour accompagner les investissements de la filière. Nous avons trouvé un accord avec cette dernière sur l’engagement à tenir ; elle partage notre objectif. Nous attendons que la loi soit promulguée pour mettre la procédure en œuvre. Sur ce sujet, nous avançons, et dans le bon sens.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement.
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour explication de vote.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 439 rectifié nonies est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 203 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 512 rectifié bis est présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, A. Bertrand et Castelli, Mme Costes, MM. Corbisez et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville et Vall.
L’amendement n° 632 est présenté par Mme Schillinger, MM. de Belenet, Théophile et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 744 est présenté par le Gouvernement.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
nouveau bâtiment
par les mots :
bâtiment nouveau ou réaménagé
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 203 rectifié.
M. Pierre Ouzoulias. J’observe des métamorphoses extrêmement rapides dans le comportement des consommateurs. Là où je fais mes courses – j’ai bien en tête le rayonnage des œufs –, les seuls œufs achetés sont ceux qui sont marqués du code 0 ou du code 1, point final. Les consommateurs n’achètent plus les autres parce que, quand ils consomment un œuf, ils ont en tête la malheureuse poule dans sa cage, ce qui les bloque.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Tant mieux !
M. Pierre Ouzoulias. Est-ce positif ou stupide ? Je ne sais pas, mais c’est la réalité. On peut continuer à défendre certaines pratiques, mais les consommateurs ont fait leur choix et, sincèrement, je pense que celui-ci est définitif.
De temps en temps, il y a donc des combats d’arrière-garde qui ne méritent pas d’être menés ; il faut adapter les méthodes et écouter un peu les consommateurs parce que de toute façon, in fine, ce sont eux qui décideront.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 512 rectifié bis.
M. Joël Labbé. Je veux préciser que cet amendement vise à revenir à la rédaction des députés ; dans le texte qui nous est parvenu de l’Assemblée nationale, il n’y avait pas que des choses qui n’allaient pas. C’est le cas, selon moi, de cette disposition, qui mentionne les bâtiments nouveaux et les bâtiments réaménagés.
On parle bien là de réaménagements ; un éleveur dont le bâtiment doit être rénové est obligé de s’inscrire dans le nouveau système. Cette mesure est d’ailleurs destinée à leur éviter d’investir dans des domaines qui les mèneraient dans une impasse.
Cet amendement est mesuré, équilibré, très défendable – de toute façon, les députés y reviendront –, donc je souhaite qu’il soit adopté.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 632.
M. Dominique Théophile. Cet amendement a été défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 744.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements sont contraires à la position de la commission, qui a réintroduit dans le texte la possibilité de réaménagements ; il n’y a pas lieu d’interdire tout réaménagement d’un bâtiment existant. En effet, les filières se sont engagées à basculer dans des modes alternatifs d’élevage, elles ont bien entendu les demandes sociétales et elles sont prêtes à y répondre.
En outre, une telle interdiction pourrait s’avérer contre-productive, y compris pour le bien-être animal, car on peut tout à fait imaginer qu’un producteur soit amené à faire des aménagements accessoires, mais bénéfiques aux animaux.
En pratique, le recentrage de l’interdiction sur les bâtiments nouveaux n’affaiblit nullement la portée de la disposition, dès lors que, au vu des perspectives de marché, aucun producteur ne trouverait aujourd’hui un intérêt économique à réaménager son bâtiment dans l’objectif, non pas de répondre à une difficulté ponctuelle ou d’améliorer le bien-être des animaux, mais d’augmenter sa production d’œufs en cage ou de démarrer une nouvelle production.
Il s’agit donc d’accompagner ces éleveurs, qui, vous l’avez dit, monsieur le ministre, ont été amenés à faire beaucoup d’investissements ces dernières années, et qui ont répondu chaque fois aux sollicitations sociétales. Il faut, j’y insiste, les accompagner dans cette phase de transition.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.