M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. J’ai pour habitude de tenir mes engagements. J’avais annoncé une demande de scrutin public. Je fais savoir publiquement que je n’en demanderai finalement pas. Au vu des arguments qui ont été avancés, une majorité doit pouvoir être trouvée dans cet hémicycle pour défendre le fromage fermier véritable et sécuriser juridiquement le texte. Combien de fois nous a-t-on répondu que nos propositions n’étaient pas assez sécurisées ! Eh bien ici, avec la mention « conformément à leurs cahiers des charges », le dispositif est beaucoup plus sécurisé qu’avec la formulation retenue dans le texte, à savoir « en conformité avec les usages traditionnels ». Ces mots ne veulent rien dire, ou disent tout et son contraire.
C’est un débat de fond : si jamais ces amendements ne passaient pas, c’est l’Assemblée nationale qui rattrapera le coup. Soyons à la hauteur, faute de quoi nous serons une nouvelle fois critiqués.
Bref, j’espère un vote favorable, mais je laisse faire la démocratie. Chacun votera en son âme et conscience.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. J’irai dans le sens de Joël Labbé. Effectivement, tout cela sera discuté à l’Assemblée nationale. Il s’agit uniquement de sécuriser l’appellation et d’améliorer le texte. Nos débats prouvent que nous voulons tous aller dans le même sens. Il serait intéressant que le Sénat vote aujourd’hui cette disposition.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 469 rectifié et 539 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.
M. Joël Labbé. C’est le summum ! (Sourires.)
M. Roland Courteau. C’est pour gagner du temps !...
M. le président. Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 177 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 125 |
Contre | 217 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 185.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 434 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 octies.
(L’article 11 octies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11 octies
M. le président. L’amendement n° 322 rectifié, présenté par MM. Bonhomme et Pellevat, Mmes Micouleau et Di Folco, M. A. Marc, Mme Gruny, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, MM. Chasseing et Kern, Mme Kauffmann, MM. Sido, Cigolotti, Paul et Piednoir, Mmes Delmont-Koropoulis, Garriaud-Maylam et Thomas, MM. Bonne et Lefèvre, Mmes Deroche et Chain-Larché et M. Daubresse, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 640-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par les mots : « , pour valoriser l’usage courant d’appellation due à la notoriété publique du produit et de ses qualités reconnues au travers d’une appellation populaire ».
La parole est à M. François Bonhomme.
M. François Bonhomme. La valorisation des produits de qualité et de tradition constitue un élément d’identification et de commercialisation important pour nos territoires ; cela se traduit souvent par une dénomination courante qui peut contribuer fortement à sa notoriété.
Le présent amendement vise compléter l’article L. 640–1 du code rural et de la pêche maritime qui vise à définir les objectifs de la « politique conduite dans le domaine de la qualité et de l’origine des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer » en précisant que la valorisation du nom d’usage et de notoriété d’un produit répond à un de ces objectifs importants.
La valorisation d’un produit implique une origine, une fabrication locale, une qualité contrôlée, un savoir-faire préservé et une notoriété dûment établie. Cet amendement permettra ainsi de reconnaître cette singularité.
Une telle évolution sera de nature à redonner leurs lettres de noblesse à de nombreux produits locaux. Ce sera, par exemple, le cas d’une viennoiserie dont historiquement le nom a puisé son origine dans la région Gasconne et qui fait la fierté de tout le sud de la France, je veux bien évidemment parler de la chocolatine, et non du pain au chocolat.
Monsieur le ministre, qui n’a pas connu l’affront de ne pas être compris par la boulangère parisienne, laquelle ne sait pas ce qu’est une chocolatine, ne peut saisir le sens de mon amendement. Il a pourtant une haute portée symbolique et je suis sûr que mes collègues du sud comprendront mon propos.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement vise à mentionner la chocolatine comme une valorisation d’appellation d’usage courant parmi les objectifs de la politique promouvant la qualité et l’origine des produits alimentaires. Nous sommes bien évidemment tous, mes chers collègues, attachés à nos multiples appellations régionales, mais est-il vraiment nécessaire d’ajouter de telles précisions dans la loi ? Je vous laisse le choix de votre réponse, mais la commission émet un avis plutôt défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. On a trouvé ma réponse à l’Assemblée nationale un peu brutale, mais un tel amendement est-il franchement du domaine de la loi ? Qu’un produit s’appelle chocolatine dans le sud ou pain au chocolat comme c’est le cas chez moi, dans le Cotentin, peu importe !
L’essentiel, c’est que le produit soit bon,…
M. Roger Karoutchi. Ah oui !
M. Stéphane Travert, ministre. … bien vendu, qu’il valorise nos filières – farine, chocolat, etc. –, que les boulangers puissent le produire et que les consommateurs le mangent avec plaisir.
Je ne sais pas si le plaisir relève du niveau de la loi, mais, quoi qu’il en soit, je suis défavorable à cet amendement. Je comprends tout à fait ce que vous souhaitez porter sur les appellations locales, mais je ne pense pas qu’il faille l’inscrire dans la loi.
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 487 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Guérini, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 666-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les exploitants agricoles, y compris les cotisants de solidarité, réalisant sur leur exploitation la mouture d’un volume, inférieur à ce seuil défini par ce même décret, de céréales issues de leur ferme, réalisent une activité agricole au sens de l’article L. 311-1 du présent code. À ce titre, ils ne sont pas considérés comme exploitants de moulin. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à simplifier la vie des agriculteurs qui cultivent leurs céréales et les transforment eux-mêmes en farine.
Les agriculteurs détenteurs d’un moulin, de plus en plus nombreux, qui transforment en farine les céréales de leur exploitation sont actuellement soumis à la même réglementation que les meuniers, ce qui entraîne des obligations spécifiques, notamment des règles sanitaires lourdes davantage adaptées aux productions industrielles.
Ces agriculteurs ne sont pas meuniers, mais bien agriculteurs : ils font œuvre de diversification. Leur activité de mouture est une activité agricole à part entière puisqu’il s’agit d’une transformation de leur propre production. Il est donc absurde et anormal qu’ils soient soumis aux normes et contrôles de la filière meunière.
Ces normes sont en décalage complet avec la réalité de leur activité. Elles ont été élaborées pour des volumes considérables, avec une multiplicité d’opérateurs et une diversité d’origine des matières premières des filières industrielles.
Cet amendement vise donc à clarifier le statut de ces agriculteurs et à alléger les normes auxquelles ils sont soumis, en marquant une distinction claire avec le statut de meunier.
Mes chers collègues, nous avons souvent la réputation d’être très normatifs. Nous le sommes lorsque c’est nécessaire.
M. Michel Raison, rapporteur. Quand cela vous arrange !
M. Joël Labbé. Mais lorsqu’il s’agit, dans un esprit de vertu, de supprimer des normes, nous y sommes favorables. (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
Certaines normes sont injustifiées, comme ici, et compliquent réellement la vie des petits producteurs, que nous sommes censés défendre avec ce texte. C’est le cas de celles qui sont pensées pour des exploitations ou des entreprises de type industriel et qui s’appliquent pourtant également aux petites fermes.
Les paysans meuniers, comme les autres petits producteurs qui sont soumis à des normes inadaptées, vivent dans la peur des contrôles. C’est aussi le cas des petits éleveurs de volaille, soumis à des normes de biosécurité relatives à la prévention de la grippe aviaire qui sont pensées pour les élevages industriels, lesquels sont à l’origine de ce problème sanitaire.
Mon amendement relève du domaine réglementaire, mais je souhaite profiter de sa défense pour rappeler le combat de l’ensemble des petits producteurs afin que leur soient appliquées des normes sanitaires adaptées à la réalité des élevages. Souvent, ces producteurs travaillent sur de « petites fermes » et réussissent à bien en vivre. (M. Laurent Duplomb s’exclame de nouveau.)
M. le président. L’amendement n° 655 rectifié, présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Taillé-Polian, M. M. Bourquin, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Lienemann, M. Lurel, Mme Perol-Dumont, MM. Vaugrenard, Duran et Dagbert, Mme Meunier, M. Antiste, Mmes Conconne, Espagnac et Ghali, MM. Jomier, Kerrouche et Marie et Mme Rossignol, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 666-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les agriculteurs réalisant sur leur exploitation la mouture d’un volume de céréales issues de leur ferme, inférieur au seuil défini par ce même décret, réalisent une activité agricole au sens de l’article L. 311-1. À ce titre, ils ne peuvent être considérés comme exploitants de moulin. »
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement a le même objet que celui qui a été présenté par mon collègue Joël Labbé.
J’ajouterai qu’afin de soustraire ces agriculteurs aux obligations auxquelles est soumise la filière meunerie, l’amendement vise à fonder la distinction entre activité agricole et activité de meunerie sur le seuil défini par le décret n° 2009–319 du 20 mars 2009, soit 350 quintaux de blé tendre par an.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements tendent à exonérer des normes et contrôles applicables aux meuniers les agriculteurs réalisant sur leur exploitation la mouture d’un volume de céréales issues de leur ferme.
Mes chers collègues, dès lors qu’un agriculteur possède et utilise un moulin, il n’y a pas lieu de l’exonérer des règles applicables en la matière, sachant toutefois que l’article L. 666–6 du code rural exonère déjà les moulins à faible capacité de l’obligation de détenir un contingent de meunerie et ne prévoit qu’un simple enregistrement.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Raison, rapporteur. Nous sommes tout à fait d’accord avec M. le ministre pour dire que, dans notre pays, l’alimentation est saine à 100 %. Même si le « zéro défaut » n’existe pas, la France n’en est pas loin.
Si nous voulons pérenniser la transformation à la ferme, que ce soit de la viande, du fromage ou de la farine, nous devons respecter les règles sanitaires. Par ailleurs, comme vient de le rappeler Mme la rapporteur, les agriculteurs concernés ne sont pas traités tout à fait comme les autres, ce qui est normal.
Sur le plan sanitaire, en revanche, et l’on en reparlera à propos des abattoirs mobiles, il ne doit pas y avoir de dérogation. (M. Joël Labbé lève les bras au ciel.) C’est rigoureux, strict et dur à appliquer, mais il ne s’agirait pas qu’aient lieu des accidents sanitaires alimentaires. Il s’en produit parfois, et il faut en limiter le nombre.
Je connais un certain nombre de ces agriculteurs. Ce sont bien des « meuniers », car ainsi se nomment ceux qui broient du blé entre deux meules. Je serais fier, quant à moi, d’être appelé ainsi parce que c’est un métier magnifique.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 487 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 655 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 nonies A
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 540 rectifié bis, présenté par MM. Courteau, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda et Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Bérit-Débat, Mme Cartron, M. J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. - La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la consommation est complétée par un article L. 412-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412-… - I. - La mention du pays d’origine du vin est indiquée en évidence sur l’étiquette dans tous les cas où l’omission de cette mention selon ces modalités serait susceptible d’induire en erreur le consommateur moyen quant au pays d’origine du produit, d’une manière quelconque, y compris en raison de la présentation générale de l’étiquette.
« La mention du pays d’origine est alors indiquée de manière à être visible immédiatement par le consommateur.
« Le fait pour l’omission mentionnée au premier alinéa du présent I d’être susceptible ou non d’induire en erreur le consommateur est notamment apprécié au regard du nom et de l’imagerie utilisés sur le contenant.
« II. - Les conditions d’application du présent article sont précisées par décret, conformément à la procédure établie à l’article 45 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires. »
II. - Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2019.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement vise à rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale.
Nous souhaitons clairement préciser dans la législation que la mention du pays d’origine doit figurer de manière évidente sur les étiquettes des bouteilles de vin. Il s’agit d’éviter les tromperies, d’éviter que ne soient induits en erreur les consommateurs.
Quelle est la situation actuelle ? Les vins espagnols par exemple, pour ne citer qu’eux, sont présentés dans les rayons de manière dissimulée, déguisée ou maquillée, avec pour objectif de rendre méconnaissable ou inapparente leur origine. Nous demandons simplement davantage de transparence et une réelle loyauté. Le consommateur doit pouvoir connaître d’emblée, au premier regard, quelle est l’origine du vin qu’il achète. Or tel n’est pas très souvent le cas.
En commission, j’ai cité le cas de ces bouteilles de vin espagnol qui affichaient ostensiblement sur leurs étiquettes la cité de Carcassonne. N’y a-t-il pas là tromperie ?
Très souvent aussi, l’origine de ces vins est rendue volontairement inapparente. N’y a-t-il pas là duperie ?
La profession qualifie, à juste raison, ces pratiques de concurrence parasitaire, car elles n’ont d’autre but que de détourner au profit des vins étrangers l’image et la renommée des vins français pour mieux en récupérer la valeur économique.
Faut-il laisser les choses perdurer ? On me dit que le droit européen répond au problème que j’expose et que les mesures à prendre relèvent, par ailleurs, du domaine réglementaire. Or, mes chers collègues, si l’une ou l’autre de ces réponses avait une quelconque efficacité pour stopper ces tromperies qui durent et perdurent depuis des années, cela se saurait, et le problème aurait été aujourd’hui définitivement réglé. Or ces duperies et pratiques déloyales perdurent dans l’indifférence de tous, au détriment de nos filières viticoles.
C’est la raison pour laquelle je vous demande d’adopter le présent amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Mon cher collègue, je comprends votre courroux face à des pratiques qui sont trompeuses, voire frauduleuses, mais je vous réitère les explications données en commission : votre amendement est totalement satisfait par le droit européen (M. Roland Courteau est dubitatif.), qui prévoit très explicitement que « les indications obligatoires apparaissent dans le même champ visuel sur le récipient de façon à être lisibles simultanément sans qu’il soit nécessaire de tourner le récipient ». Parmi ces indications figure celle du pays d’origine.
Que prévoir de plus, sinon la sanction des pratiques trompeuses ou frauduleuses ?
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Aujourd’hui, les règles d’étiquetage de l’origine des vins sont précisément encadrées par la réglementation européenne et le code de la consommation, dont l’article L. 121–2, couvre déjà les tromperies sur l’origine.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas encore des efforts à faire,…
M. Roland Courteau. Il y a tout à faire, monsieur le ministre !
M. Stéphane Travert, ministre. … je suis d’accord avec vous sur ce point.
Nous travaillons et avançons, avec la filière elle-même, sur l’étiquetage dématérialisé. Je vous l’ai dit, je soutiendrai au niveau européen une extension de l’étiquetage d’origine, à l’instar de ce qui existe pour le lait et la viande, et cela pourra aussi concerner la viticulture.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. J’ai bien entendu les argumentaires développés par les uns et les autres, avec lesquels je suis d’accord. Mais, en début de semaine, un grand journal local a consacré deux pleines pages (L’orateur brandit un exemplaire desdites pages.) intitulées : « Fruits, légumes, vins, ce made in France pas toujours si français ».
Nous sommes en effet confrontés, dans notre région, à des problématiques liées non pas à la fraude, mais à la tromperie.
On nous a répondu que ces mentions étaient d’ores et déjà obligatoires. Encore faut-il qu’elles soient suffisamment visibles, ce qui n’est pas toujours le cas. Quelques distributeurs et négociants peu honnêtes n’hésitent pas à franciser leurs produits – fruits, légumes ou vins – pour bénéficier de la plus-value attachée aux produits français.
Nous souhaitons des mentions claires et lisibles.
Monsieur le ministre, il me semble que votre collègue chargée de la santé a décidé de revoir le pictogramme « pas d’alcool pendant la grossesse », lequel est présent sur toutes les bouteilles d’alcool,…
M. Jean-Claude Requier. Cela ne sert à rien !
M. Henri Cabanel. … mais est de très petite taille, afin de le grossir et de le rendre plus lisible – nous y reviendrons.
De la même façon, nous souhaitons que la mention du pays d’origine soit vraiment lisible et que l’acte d’achat par le consommateur soit aussi transparent que possible.
Je dis non pas qu’aujourd’hui les règles ne sont pas respectées, mais que certains négociants et distributeurs ont la volonté de rendre ces mentions moins lisibles afin de profiter de la valeur des produits français.
Je l’ai dit à plusieurs reprises, les viticulteurs ou les maraîchers n’ont pas peur de la concurrence. Simplement, ils font des produits d’une certaine qualité et ne veulent pas être copiés par des négociants et des distributeurs peu scrupuleux.
Mes chers collègues, je souhaite donc que vous nous rejoigniez pour voter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.
Mme Nicole Bonnefoy. Notre collègue Gisèle Jourda, qui ne peut pas être présente ce matin, m’a demandé de vous apporter son témoignage.
Elle rappelle que certains vins issus de pays étrangers font l’objet d’un étiquetage susceptible d’induire en erreur le consommateur, ce qui lui laisse en effet penser que ces vins ont été produits en France à partir de récoltes du vignoble français. C’est particulièrement perceptible pour les vins conditionnés en bag in box.
Ces pratiques sont préjudiciables à toute une filière, laquelle est importante puisqu’elle représente 15 % de la production agricole française. La clarification des règles d’étiquetage par l’indication visible de la provenance de ces vins est donc primordiale pour assurer l’information claire et loyale du consommateur sur la provenance des produits et pour soutenir cette filière en mettant fin à cette concurrence déloyale.
Pour ces raisons, nous vous demandons de réintroduire cet article, qui renforce notre législation en prévoyant que la mention du pays d’origine devra figurer de façon évidente sur l’étiquette d’une bouteille de vin, dans tous les cas où l’omission serait susceptible d’induire en erreur le consommateur.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. On nous dit que le droit européen est censé régler ce problème. Or, sur le terrain, il ne règle rien du tout. On nous dit aussi que cette question relève du domaine réglementaire. Dans ce cas, que prévoient ces mesures réglementaires et quelle est leur efficacité ? Celle-ci est nulle !
Les mesures réglementaires, si tant est qu’elles existent, ne règlent rien. Dans ces conditions, et puisque cette tromperie perdure depuis des années sans que cela émeuve personne, permettez que des parlementaires lassés d’attendre en vain que les pouvoirs publics prennent des mesures drastiques, et donc efficaces, décident de s’emparer du problème et de proposer d’inscrire dans la loi les dispositions qui font défaut aujourd’hui.
Voilà ce que nous voulons, mes collègues Henri Cabanel, Franck Montaugé, Angèle Préville, Nicole Bonnefoy, Olivier Jacquin, Jean-Claude Tissot, Gisèle Jourda, Claude Bérit-Débat – je ne les cite pas tous – et moi-même.
J’y insiste, ces pratiques perdurent depuis des années et les pouvoirs publics ne semblent pas s’en émouvoir. Personne ne réagit. Cela suffit ! Nous allons donc demander un scrutin public sur cet amendement afin de mettre chacun devant ses responsabilités.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Je voterai en faveur de cet amendement. En effet, comme je l’ai dit hier à plusieurs reprises, il faut parfois, dans la loi, indiquer les choses et tracer des perspectives.
Je partage l’avis de Mme la rapporteur et de M. le ministre : cet amendement ne servira à rien, car cela relève de l’arrêté, c’est purement administratif. Même si rien ne sera changé au final, il y a des moments où le Parlement doit se saisir de ces sujets. En défendant, hier, plusieurs amendements similaires, je me suis exprimé de la même façon.
Il est vrai que la loi ne doit pas être bavarde et si on met des pictogrammes sur les bouteilles ou les produits dans les cantines, il faudra quand même qu’à un moment il reste suffisamment de place pour savoir de quel vin ou produit il s’agit. Je soutiens toutefois l’amendement de M. Courteau, car il faut bien qu’à un moment donné les défenseurs que nous sommes des terroirs, et, en l’occurrence, des vignes et de nos cépages, disent clairement que l’origine du vin doit être mise en évidence.
Il faut ajouter, pour que le propos soit équilibré, que nous sommes heureux de vendre du vin français à l’étranger. Dans ces pays, je ne sais pas comment il est étiqueté…
Il s’agit d’un amendement d’appel. Nous tous qui nous intéressons à la viticulture devons dire que quelque chose manque.
Nous avons déjà eu ce débat à l’occasion de l’examen de la précédente loi agricole : on ne peut pas dire que les pouvoirs publics se désintéressent de la question. Il se trouve simplement que l’administration française et les contraintes européennes sont compliquées.
Mme la rapporteur a raison de dire que l’amendement est satisfait. En revanche, les sénateurs ne sont pas satisfaits par ce qui leur a été répondu.
Voilà pourquoi, je le répète, je voterai en faveur de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je souscris aux propos et arguments développés par notre collègue Courteau. Je voudrais mettre le doigt sur deux points.
Tout d’abord, les moyens que l’État français consacre, ou entend consacrer, aux contrôles constituent un véritable sujet à caractère budgétaire. Il ne sert à rien d’édicter des règlements ou d’en inventer d’autres si on n’est pas en mesure de les faire respecter.
Ensuite, je demeure persuadé qu’en matière de contentieux pouvant résulter des contrôles effectués par l’État, notamment sur un sujet comme celui-ci, l’agriculture est un peu la variable de négociation et d’ajustement. En effet, lors d’échanges commerciaux extérieurs, l’agriculture et nos producteurs sont parfois quelque peu sacrifiés au profit d’autres secteurs industriels.
Ces arguments supplémentaires justifient, me semble-t-il, que nous votions cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.