M. le président. L’amendement n° 231 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Rachid Temal.
M. Rachid Temal. Cet amendement vise à supprimer un cas nouveau dans lequel le caractère suspensif du recours ne s’appliquerait pas : en cas de demande de réexamen jugée irrecevable.
Outre que le recours suspensif doit demeurer le principe pour le demandeur d’asile, le CESEDA prévoit déjà que le recours suspensif ne s’applique pas en cas de demande de réexamen jugée irrecevable présentée en vue de faire échec à une mesure d’éloignement, ce qui devrait rassurer M. Karoutchi.
La coexistence de deux cas similaires, mais aux périmètres distincts, nous paraît soulever une difficulté au regard du principe d’intelligibilité de la loi.
M. le président. L’amendement n° 232 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Rachid Temal.
M. Rachid Temal. Cet amendement vise à supprimer la multiplication des cas dans lesquels le droit au recours suspensif ne s’appliquerait pas : décision de rejet pour une demande examinée en procédure accélérée pour pays d’origine sûr, demande de réexamen ou menace à l’ordre public.
En effet, ces exceptions reviendraient à couvrir un nombre considérable des décisions de l’OFII et donc à faire du caractère suspensif du recours un droit résiduel. La France se placerait ainsi en contradiction avec le droit européen, qui garantit le principe du droit au recours.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Nous avons déjà traité de ces sujets. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 231 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 232 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 233 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 9 et 10
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement a pour objet de supprimer la construction baroque que le Gouvernement a conçue pour essayer d’éviter les condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme à la suite de la suppression des recours suspensifs.
Le demandeur d’asile pourrait former un recours devant le tribunal administratif, parallèlement à son recours devant la Cour nationale du droit d’asile, afin d’obtenir le droit de se maintenir sur le territoire jusqu’à sa convocation par la CNDA. Cette construction baroque doit être dénoncée, d’autant qu’elle va engorger les juridictions.
Bien entendu, nous voterons contre l’article. Toutefois, dès lors qu’il s’agit de la dernière manière de protéger les demandeurs dans une conception où les droits sont difficiles à établir, je retire l’amendement, non sans renouveler ma condamnation de ce dispositif.
M. le président. L’amendement n° 233 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l’article.
M. David Assouline. Cet article, je le répète, est l’un des plus scandaleux du projet de loi.
Il est utile que nous continuions d’échanger sur ces questions, car les analyses de fond exposées par certains orateurs, dont M. Karoutchi, éclairent beaucoup les appréciations portées sur tel ou tel amendement.
Nous construirions la loi parce que certains veulent y échapper. Telle est l’analyse de M. Karoutchi, s’agissant notamment de la notification : un demandeur de mauvaise foi, dit-il, se sachant non éligible à l’asile, n’attendra pas la notification tranquillement chez lui.
Toutefois, pour cette personne, qu’est-ce que le nouveau dispositif changera concrètement ? Parce que le caractère irrégulier de sa situation sur le territoire sera proclamé plus tôt, ce demandeur, qui s’attend à cette décision, ne tentera pas d’y échapper ? En réalité, pour lui, cela ne changera absolument rien !
En revanche, ceux, de bonne foi, qui attendent la notification – c’est là le sujet de notre discussion –, ceux qui, dans le cadre de la procédure normale, pouvaient exercer leurs droits jusqu’au bout seront, eux, en difficulté !
Toute la construction des rabots sur les droits existants opérés par ce projet de loi vise, prétendument, à empêcher un appel d’air, à prévenir les fraudes et les contournements. Mais, toutes les lois, il y a des gens qui veulent les contourner ! Nous avons à faire des lois avec des droits, pour que ceux qui doivent pouvoir exercer leurs droits aient tous les moyens de le faire.
Chaque fois, ce sont eux que l’on atteint, eux qui subiront plus de tracasseries et de difficultés. Les autres, de toute façon, s’émancipent des règles et ont tous les moyens de le faire ; ce ne sont pas, monsieur Karoutchi, les rabots prévus dans le projet de loi qui les en empêcheront.
M. le président. Je mets aux voix l’article 8.
(L’article 8 est adopté.)
Article 8 bis (nouveau)
Après le 2° de l’article L. 5223-3 du code du travail, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis De représentants des collectivités territoriales ; ».
M. le président. L’amendement n° 442 rectifié, présenté par MM. Karam, Mohamed Soilihi et Hassani, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 5223-3 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La composition du conseil d’administration assure une représentation des départements et collectivités d’outre-mer, en tenant compte de leurs flux migratoires. »
La parole est à M. Antoine Karam.
M. Antoine Karam. L’une des missions de l’Office français de l’immigration et de l’intégration est de coordonner et animer le dispositif national d’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés. Il prend ainsi en charge la gestion des entrées dans les centres d’hébergement et participe au dispositif du premier accueil des demandeurs d’asile.
Comme je l’ai fait remarquer hier encore, qu’il s’agisse de l’hébergement ou de l’interprétariat, les conditions d’accueil des demandeurs d’asile en Guyane restent préoccupantes, certainement plus qu’ailleurs.
Si le raccourcissement des délais répond à une situation particulière, il est indispensable de veiller à ce que les droits des demandeurs d’asile soient préservés, et leur accueil dignement assuré.
Dans le cadre de l’article 8 bis, notre rapporteur a souhaité inclure des représentants des collectivités territoriales dans le conseil d’administration de l’OFII, afin de garantir une meilleure concertation avec les territoires. Eu égard aux situations spécifiques en matière d’asile et d’immigration que connaissent certains territoires ultramarins, en particulier la Guyane et Mayotte, les auteurs de cet amendement proposent que la composition de ce conseil d’administration assure une représentation des départements et collectivités d’outre-mer.
Les collectivités territoriales de nos territoires – je le rappelle en permanence – sont en première ligne. C’est pourquoi j’ai toujours souhaité un partage de compétences, dans un domaine qui reste trop souvent encore régalien, alors que la pratique est tout autre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le conseil d’administration de l’OFII est aujourd’hui composé de dix-huit membres : un président nommé par décret, huit représentants de l’État, cinq personnalités qualifiées, deux parlementaires et deux représentants du personnel.
La commission a décidé d’y assurer une représentation des collectivités territoriales. La problématique ultramarine est importante ; elle a été intégrée dans plusieurs textes sur notre initiative. Il est important que les départements et collectivités d’outre-mer soient représentés aussi au sein de l’OFII.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Nous voterons cet amendement, mais il sera important de multiplier la représentation des territoires, de manière à ce que celle d’un territoire ne se fasse pas au détriment de celle d’un autre. J’espère que, dans le cadre de la navette, les dispositions nécessaires seront prises.
M. le président. Je mets aux voix l’article 8 bis, modifié.
(L’article 8 bis est adopté.)
Article 9
I. – Le chapitre IV du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1°A L’article L. 744-1 est ainsi modifié :
a) (nouveau) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « intégration », sont insérés les mots : « , dans un délai de dix jours » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « social », il est inséré le mot : « , juridique » ;
c) (nouveau) Au dernier alinéa, les mots : « bénéficie du droit d’élire » sont remplacés par le mot : « élit » ;
1° L’article L. 744-2 est ainsi modifié :
a) La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « Le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et d’intégration des réfugiés fixe la part des demandeurs d’asile accueillis dans chaque région ainsi que la répartition des lieux d’hébergement qui leur sont destinés. » ;
a bis AA) (nouveau) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « du comité régional de l’habitat et de l’hébergement concerné » sont remplacés par les mots : « d’une commission de concertation composée de représentants des collectivités territoriales, de gestionnaires de lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile et d’associations de défense des droits des demandeurs d’asile » ;
a bis A) La deuxième phrase du même deuxième alinéa est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Il fixe les orientations en matière de répartition des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile et réfugiés sur le territoire de la région, présente le dispositif régional prévu pour l’enregistrement des demandes d’asile ainsi que le suivi et l’accompagnement des demandeurs d’asile et définit les actions en faveur de l’intégration des réfugiés. Il définit également les actions mises en œuvre pour assurer l’éloignement des déboutés du droit d’asile et l’exécution des mesures de transfert prévues à l’article L. 742-3. » ;
a bis) (Supprimé)
b) Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Lorsque la part des demandeurs d’asile résidant dans une région excède la part fixée pour cette région par le schéma national d’accueil des demandeurs d’asile et les capacités d’accueil de cette région, le demandeur d’asile peut être orienté vers une autre région dans laquelle un hébergement lui est proposé, où il est tenu de résider le temps de l’examen de sa demande d’asile.
« L’Office français de l’immigration et de l’intégration détermine la région de résidence en fonction de la part des demandeurs d’asile accueillis dans chaque région en application du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile. Au regard de l’évaluation prévue à l’article L. 744-6, il tient compte de la situation personnelle et familiale du demandeur, de son état de vulnérabilité, de ses besoins et de l’existence de structures permettant leur prise en charge.
« Sauf en cas de motif impérieux ou de convocation par les autorités ou les tribunaux, le demandeur qui souhaite quitter temporairement sa région de résidence sollicite une autorisation auprès de l’office, qui rend sa décision dans les meilleurs délais, en tenant compte de la situation personnelle et familiale du demandeur.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent II. » ;
1° bis Après l’avant-dernier alinéa de l’article L. 744-3, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les normes minimales en matière d’accompagnement social et administratif dans ces lieux d’hébergement sont définies par décret en Conseil d’État.
« L’État conclut avec les gestionnaires des lieux d’hébergement pour demandeurs d’asile une convention visant à assurer, sur une base pluriannuelle, l’harmonisation progressive des conditions de prise en charge dans ces structures. » ;
2° L’article L. 744-5 est ainsi modifié :
a) À la seconde phrase du premier alinéa, les mots : « à l’expiration du délai de recours contre la décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ou à la date de la notification de la décision de la Cour nationale du droit d’asile » sont remplacés par les mots : « au terme du mois au cours duquel le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français dans les conditions prévues aux articles L. 743-1 et L. 743-2 a pris fin » ;
b) (nouveau) Le troisième alinéa est ainsi modifié :
– les mots : « et les personnes ayant fait l’objet d’une décision de rejet définitive » sont supprimés ;
– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Sauf décision motivée de l’autorité administrative, les personnes ayant fait l’objet d’une décision de rejet définitive de leur demande d’asile ne peuvent pas s’y maintenir. » ;
3° Après le cinquième alinéa de l’article L. 744-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le service intégré d’accueil et d’orientation mentionné à l’article L. 345-2 du code de l’action sociale et des familles communique mensuellement à l’Office français de l’immigration et de l’intégration la liste des personnes hébergées en application de l’article L. 345-2-2 du même code ayant présenté une demande d’asile ainsi que la liste des personnes ayant obtenu la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire. » ;
4° L’article L. 744-7 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le bénéfice des conditions matérielles d’accueil prévues à l’article L. 744-1 est subordonné :
« 1° À l’acceptation par le demandeur de la proposition d’hébergement déterminée en application de l’article L. 744-2. Ces propositions tiennent compte des besoins, de la situation personnelle et familiale de chaque demandeur au regard de l’évaluation prévue à l’article L. 744-6, des capacités d’hébergement disponibles et de la part des demandeurs d’asile accueillis dans chaque région ;
« 2° Au respect de l’ensemble des exigences des autorités chargées de l’asile, afin de faciliter l’instruction des demandes, notamment en se rendant aux entretiens, en se présentant aux autorités et en fournissant les informations utiles. » ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le demandeur est préalablement informé, dans une langue qu’il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend, que le fait de refuser ou de quitter le lieu d’hébergement proposé en application du 1° du présent article ainsi que le non-respect des exigences des autorités chargées de l’asile prévues au 2° entraîne de plein droit le refus ou, le cas échéant, le retrait du bénéfice des conditions matérielles d’accueil. » ;
c) (nouveau) Au dernier alinéa, les mots : « du troisième alinéa » sont supprimés ;
5° L’article L. 744-8 est ainsi modifié :
a) Les deux premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Outre les cas, mentionnés à l’article L. 744-7, dans lesquels il est immédiatement mis fin de plein droit au bénéfice des conditions matérielles d’accueil, le bénéfice de celles-ci est : » ;
b) Au début du troisième alinéa, la mention : « 2° » est remplacée par la mention : « 1° » ;
c) Au même troisième alinéa, la première occurrence du mot : « ou » est remplacée par le signe : « , » et, après le mot : « familiale », sont insérés les mots : « ou a présenté plusieurs demandes d’asile sous des identités différentes, » ;
c bis) Au début du quatrième alinéa, la mention : « 3° » est remplacée par la mention : « 2° » ;
d) Les trois derniers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision de retrait des conditions matérielles d’accueil prise en application du présent article est écrite et motivée. Elle prend en compte la vulnérabilité du demandeur. Elle est prise après que l’intéressé a été mis en mesure de présenter ses observations écrites selon des modalités définies par décret. » ;
6° L’article L. 744-9 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– la première phrase est complétée par les mots : « , dont le versement est ordonné par l’Office français de l’immigration et de l’intégration » ;
– la seconde phrase est supprimée ;
b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Le versement de l’allocation prend fin au terme du mois au cours duquel le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français dans les conditions prévues aux articles L. 743-1 et L. 743-2 a pris fin ou à la date du transfert effectif vers un autre État si sa demande relève de la compétence de cet État. Pour les personnes qui obtiennent la qualité de réfugié prévue à l’article L. 711-1 ou le bénéfice de la protection subsidiaire prévue à l’article L. 712-1, le bénéfice de l’allocation prend fin au terme du mois qui suit celui de la notification de la décision. »
II. – (Non modifié) Le décret prévu à l’article L. 744-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa rédaction résultant du 1° bis du I du présent article, est pris dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.
III (nouveau). – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, des centres d’accueil et d’examen des situations peuvent héberger, pendant une durée maximale d’un mois, des étrangers qui ne disposent pas d’un domicile stable et qui ont explicitement déclaré leur intention de déposer une demande d’asile. Ils leur offrent des prestations d’accueil et d’accompagnement social, juridique et administratif.
Les décisions d’admission et de sortie de ces centres sont prises par l’Office français de l’immigration et de l’intégration, en prenant en compte l’état de vulnérabilité des intéressés ainsi que leur situation personnelle et familiale.
Les places en centre d’accueil et d’examen des situations sont prises en compte dans le décompte des logements locatifs sociaux, au sens du IV de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation.
Cette expérimentation fait l’objet d’un rapport d’évaluation transmis au Parlement, au plus tard six mois avant la fin de l’expérimentation.
IV (nouveau). – Les deuxième et troisième alinéas du I de l’article L. 348-2 du code de l’action sociale et des familles sont supprimés.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l’article.
Mme Cécile Cukierman. La loi française prévoit que « toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence ».
Le même article de loi précise : « Toute personne accueillie dans une structure d’hébergement d’urgence doit pouvoir y bénéficier d’un accompagnement personnalisé et y demeurer, dès lors qu’elle le souhaite, jusqu’à ce qu’une orientation lui soit proposée. Cette orientation est effectuée vers une structure d’hébergement stable ou de soins, ou vers un logement, adaptés à sa situation. »
L’article 9 du présent projet de loi porte excessivement atteinte aux droits fondamentaux des demandeurs d’asile, dans la mesure où il contrevient à ce droit inconditionnel à l’accueil et au maintien en hébergement d’urgence de toutes les personnes au regard du seul critère de détresse.
En effet, cet article vise à légaliser la circulaire du 12 décembre 2017, en prévoyant des modalités d’échange d’informations entre l’Office français de l’immigration et de l’intégration et le service intégré d’accueil et d’orientation s’agissant des demandeurs d’asile et des personnes ayant obtenu une protection. Il s’agit de la mise en place d’un fichier recensant les personnes accueillies dans les centres d’hébergement d’urgence, afin de connaître leur situation administrative – Dublin, fuite, débouté –, pour déterminer si elles ont toujours droit à cet hébergement.
Ce dispositif inquiète, notamment, et à juste titre, les travailleurs sociaux, qui pourraient être sollicités en vue d’établir la liste des demandeurs d’asile et des bénéficiaires d’une protection internationale devant être transmise par le SIAO à l’OFII. Or, comme le Défenseur des droits l’a souligné dans une de ses récentes décisions, les missions d’accompagnement des travailleurs sociaux sont difficilement compatibles avec des missions de sélection ou de contrôle.
De fait, ces dispositions servent la politique du chiffre en matière d’expulsions et organisent la surveillance et le contrôle des migrants dès le début de leur parcours en France, au détriment de l’accueil et des droits fondamentaux des personnes.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, sur l’article.
M. Guillaume Gontard. Plusieurs de nos collègues, dont M. Assouline, ont insisté sur les divers coups de rabot et complications de droits prévus dans le cadre du projet de loi.
L’article 9 aussi va dans ce sens, en s’attaquant aux conditions d’aide matérielle. Outre qu’il légalise votre circulaire, monsieur le ministre d’État, cet article pose de nombreuses difficultés.
En particulier, il renforce le caractère directif du schéma national d’accueil des demandeurs d’asile, puisque le demandeur sera désormais orienté vers une région précise, où il sera tenu de résider. Le contrôle des autorités est intensifié, et de nouvelles hypothèses de retrait ou de suspension des conditions matérielles d’accueil sont prévues : si l’étranger a présenté plusieurs demandes d’asile sous des identités différentes ou s’il a quitté la région désignée par l’OFII sans en informer celui-ci. Le retrait de ces conditions matérielles d’accueil – hébergement ou allocation – est d’effet immédiat.
Le Défenseur des droits estime que la mise en œuvre du schéma national d’hébergement ne peut se réaliser que si elle est faite dans l’intérêt des demandeurs d’asile, sans que l’assignation à résidence aboutisse à un système de prérétention administrative, et qu’elle doit, en tout état de cause, s’accompagner d’une augmentation de l’offre des centres d’accueil pour demandeurs d’asile, les CADA. C’est ce qu’il préconisait déjà lors de la mise en place de ce schéma par la loi de 2015.
Rappelons que, si la directive Accueil autorise les États à prendre de telles mesures, il ne s’agit que d’une possibilité. Son article 7 précise que « les demandeurs peuvent circuler librement sur le territoire de l’État membre d’accueil ».
Par ailleurs, si certaines améliorations ont été apportées au projet de loi, comme la prise en compte de la vulnérabilité du demandeur, le droit des demandeurs qui souhaitent être hébergés dans leur famille ou chez un tiers ne paraît pas expressément garanti.
Or, en excluant du bénéfice des conditions matérielles d’accueil les demandeurs d’asile souhaitant être hébergés dans leur famille ou chez un tiers, le projet de loi va bien au-delà de ce qu’autorise la directive Accueil, qui n’a jamais exclu le principe de l’hébergement chez un particulier.
Pour toutes ces raisons, nous nous inquiétons, comme d’ailleurs l’Observatoire de l’enfermement des étrangers, de la porosité croissante entre l’accueil et la détention. Sous couvert d’un accueil encadré et efficace, cette politique migratoire organise la surveillance des personnes étrangères, des violations massives de leurs droits et, finalement, leur rejet.
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, sur l’article.
Mme Esther Benbassa. L’article 9 traite de la question, primordiale, de l’hébergement.
L’enjeu est ici celui de l’accueil inconditionnel. Les exilés sont des personnes démunies, vulnérables et dans le besoin : ils ont besoin, avant que l’on demande leurs papiers et vérifie leurs droits, d’un toit au-dessus de leur tête, pour ensuite entreprendre sereinement les démarches nécessaires à l’obtention d’un titre de séjour.
Pourtant, les mesures contenues dans l’article 9 ne sont pas satisfaisantes. En effet, cet article rend plus coercitifs et directifs les dispositifs relatifs à l’hébergement prévus par le CESEDA : le demandeur d’asile sera orienté vers une région précise, où il sera obligé de résider. Par ailleurs, rien n’est prévu pour les requérants qui souhaitent être hébergés dans leur famille ou chez un tiers.
Plus grave encore, cette fois sur le plan éthique : par cet article, entrerait dans le champ législatif l’inique circulaire Collomb du 12 décembre 2017. Rappelons que celle-ci prévoyait l’échange d’informations entre l’Office français de l’immigration et de l’intégration et le service intégré d’accueil et d’orientation, afin de permettre la création d’un fichier recensant la situation administrative des exilés hébergés. L’objectif est de déceler ceux qui ne devraient plus bénéficier du droit à l’hébergement.
De manière évidente, cet article contrevient au droit inconditionnel à l’accueil et au maintien en hébergement d’urgence des exilés en détresse !