compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Marc Gabouty
vice-président
Secrétaires :
M. Yves Daudigny,
M. Joël Guerriau.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Conventions internationales
Adoption en procédure d’examen simplifié de deux projets de loi dans les textes de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de deux projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.
Pour ces deux projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.
Je vais donc les mettre successivement aux voix.
projet de loi autorisant l’adhésion de la france à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale pour son application à saint-barthélemy, à saint-pierre-et-miquelon, dans les îles wallis et futuna, en polynésie française, en nouvelle-calédonie, et dans les terres australes et antarctiques françaises
Article unique
Est autorisée l’adhésion de la France à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale pour son application à Saint-Barthélemy, à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, et dans les Terres australes et antarctiques françaises (ensemble trois protocoles et neuf annexes), signée à Lugano le 30 octobre 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur le projet de loi autorisant l’adhésion de la France à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale pour son application à Saint-Barthélemy, à Saint Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie, et dans les Terres australes et antarctiques françaises (projet n° 97 [2016-2017], texte de la commission n° 499, rapport n° 498).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté.)
projet de loi autorisant la ratification du traité de l’organisation mondiale de la propriété intellectuelle (ompi) sur les interprétations et exécutions audiovisuelles
Article unique
Est autorisée la ratification du traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur les interprétations et exécutions audiovisuelles, signé à Pékin le 26 juin 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur le projet de loi autorisant la ratification du traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) sur les interprétations et exécutions audiovisuelles (projet n° 211 [2014-2015], texte de la commission n° 497, rapport n° 496).
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.
(Le projet de loi est adopté.)
3
Nouveau pacte ferroviaire
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour un nouveau pacte ferroviaire (projet n° 435, texte de la commission n° 495, rapport n° 494).
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen de l’article 1er bis.
Article 1er bis (suite)
L’article L. 2111-25 du code des transports est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Le calcul des redevances d’infrastructure mentionnées au 1° de l’article L. 2111-24 tient notamment compte du coût de l’infrastructure, de la situation du marché des transports et des caractéristiques de l’offre et de la demande, des impératifs de l’utilisation optimale du réseau ferré national, de la nécessité de permettre le maintien ou le développement de dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire et de l’harmonisation des conditions de la concurrence intermodale ; il tient compte, lorsque le marché s’y prête, et sur le segment de marché considéré, de la soutenabilité des redevances et de la valeur économique, pour l’attributaire de la capacité d’infrastructure, de l’utilisation du réseau ferré national et respecte les gains de productivité réalisés par les entreprises ferroviaires. Tant que le coût complet du réseau n’est pas couvert par l’ensemble de ses ressources, SNCF Réseau conserve le bénéfice des gains de productivité qu’il réalise. Les principes et montants des redevances peuvent être fixés de façon pluriannuelle, sur une période ne pouvant excéder cinq ans. » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En vue d’assurer les dessertes ferroviaires pertinentes en matière d’aménagement du territoire, le niveau des redevances ne saurait exclure l’utilisation de l’infrastructure sur certains segments de marché par des opérateurs qui peuvent au moins acquitter le coût directement imputable à l’exploitation du service ferroviaire sur ces segments, plus un taux de rentabilité si le marché s’y prête. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° 136 rectifié bis est présenté par MM. Longeot et Delcros.
L’amendement n° 186 rectifié bis est présenté par MM. Dantec, Corbisez, Gold, Léonhardt et Arnell, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Guérini et Guillaume, Mme Jouve et MM. Labbé, Menonville, Requier et Vall.
L’amendement n° 193 rectifié est présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et Joël Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, MM. Daudigny, Tissot et M. Bourquin, Mmes de la Gontrie et Lienemann, MM. Cabanel, Montaugé, Durain et Kerrouche, Mmes Meunier et Lubin, MM. Courteau, Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les services de transport ferroviaire faisant l’objet d’un contrat de service public, la soutenabilité des redevances est évaluée selon des modalités permettant de prendre en compte les spécificités de tels services, en particulier l’existence d’une contribution financière des autorités organisatrices à leur exploitation, en vue d’assurer, le cas échéant, que les majorations sont définies sur la base de principes efficaces, transparents et non discriminatoires. »
La parole est à M. Jean-François Longeot, pour présenter l’amendement n° 136 rectifié bis.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement vise à compléter le travail accompli par nos collègues députés. En commission, sur l’initiative du rapporteur, a été ajoutée au présent texte une définition de soutenabilité des redevances d’infrastructure pour les activités commerciales, autrement dit le fret et les services librement organisés.
M. le président. La parole est à M. Éric Gold, pour présenter l’amendement n° 186 rectifié bis.
M. Éric Gold. Cet amendement tend à inscrire dans la loi le principe de la prise en compte de la soutenabilité de l’évolution des redevances pour les finances des autorités organisatrices de transport.
Une très forte augmentation de redevances, telle que prévue dans le cadre du contrat de performance, peut par exemple paraître incohérente avec la demande émise par l’État quant à la maîtrise de l’évolution des dépenses de fonctionnement des grandes collectivités. Aussi, cet amendement a pour objet de prévenir toute présomption de soutenabilité des majorations tarifaires pour les services conventionnés.
L’ARAFER, l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, a considéré à plusieurs reprises que la soutenabilité des péages devait faire l’objet d’une appréciation spécifique pour les services conventionnés, dès lors que la capacité du marché à les supporter est biaisée par l’existence d’une subvention publique versée par les autorités organisatrices de transport.
Il est indispensable que le gestionnaire d’infrastructure apporte les justifications adaptées à l’appréciation de la soutenabilité des redevances, sous le contrôle de l’autorité de régulation.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement n° 193 rectifié.
M. Olivier Jacquin. Il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 187 rectifié, présenté par MM. Dantec, Corbisez, Gold, Léonhardt et Arnell, Mmes A.M. Bertrand et M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mmes N. Delattre et Costes, MM. Gabouty, Guérini et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La soutenabilité du marché pour les activités conventionnées fait l’objet d’une évaluation par SNCF Réseau. L’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières émet un avis sur cette évaluation avant la publication de la tarification annuelle. Les modalités de saisine de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières sont fixées par décret en Conseil d’État. Le montant des redevances des activités conventionnées est calculé en prenant en compte la part de l’investissement versé par les autorités organisatrices de transport ferroviaire pour la maintenance et le développement du réseau ferroviaire. »
La parole est à M. Éric Gold.
M. Éric Gold. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Les amendements nos 136 rectifié bis, 186 rectifié bis et 193 rectifié visent à prévenir toute présomption de soutenabilité des majorations tarifaires pour les services conventionnés. Il s’agit là de dispositions importantes.
À plusieurs reprises, l’ARAFER a effectivement considéré que la soutenabilité des péages devait faire l’objet d’une appréciation spécifique pour les services conventionnés, dès lors que la faculté du marché à les supporter est biaisée par l’existence d’une subvention versée par les autorités organisatrices. Elle a également plusieurs fois souligné que le gestionnaire d’infrastructure n’avait pas apporté suffisamment de justifications quant au niveau de ces majorations.
Théoriquement, la définition de segments de marché adaptés aux services conventionnés devrait déjà permettre d’apprécier correctement la soutenabilité des redevances pour ces services. Toutefois, les tarifications proposées par SNCF Réseau au cours des dernières années, ainsi que les évolutions du décret encadrant le système tarifaire ne le garantissent pas.
Avec ces amendements identiques, il s’agit d’énoncer expressément, au niveau législatif, la nécessité de prendre en compte les spécificités des services conventionnés par une appréciation adaptée de la soutenabilité des péages et de la capacité du marché à supporter des majorations par rapport aux coûts directement imputables. La commission a donc émis un avis favorable. En revanche, elle demande le retrait de l’amendement n° 187 rectifié, qui sera satisfait par l’adoption de ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Je comprends la préoccupation exprimée à travers ces amendements. Toutefois, les textes européens posent des principes très clairs pour ce qui concerne la fixation des péages ; ils soulignent, en particulier, que ces péages doivent refléter les coûts de l’infrastructure en tenant compte de deux limites : le coût complet de l’infrastructure et ce que le marché peut supporter.
Certes, il ne faut pas que les péages deviennent un frein au développement du trafic. C’est précisément pourquoi le Gouvernement a décidé de revenir sur la trajectoire de péages prévue dans le contrat conclu entre l’État et SNCF Réseau. Je rappelle que, à l’origine, des hausses tarifaires extrêmement fortes mettaient en péril le développement du fret ferroviaire ou la desserte de tous les territoires par les TGV.
Cela étant, à mes yeux, les dispositions qui figurent d’ores et déjà dans ce projet de loi permettent de répondre aux préoccupations ici exprimées. Je relève à ce propos que, au cours des dernières années, les péages TER ont augmenté près de trois fois moins vite que les dépenses d’entretien et de régénération du réseau correspondant. Gardons à l’esprit qu’il faut préserver un équilibre global entre les ressources et les besoins : il ne faudrait pas non plus que des baisses de péages se traduisent par des baisses équivalentes de dépenses d’entretien.
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 136 rectifié bis, 186 rectifié bis et 193 rectifié.
De même, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 187 rectifié : il s’agirait de demander à SNCF Réseau ou à l’ARAFER de porter une appréciation sur la soutenabilité des trajectoires financières des collectivités territoriales, ce qui ne me semble pas adapté.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je ne vais pas faire durer le suspense : je suivrai M. le rapporteur en retirant l’amendement n° 187 rectifié, même s’il y aurait beaucoup à dire sur le sujet. Je m’en tiendrai, pour cette explication de vote, aux trois amendements identiques.
Madame la ministre, votre réponse ne nous satisfait pas. L’un des grands enjeux de ce projet de loi – nous en avons longuement discuté en commission –, c’est de trouver les moyens de garantir que, demain, les régions n’auront pas à supporter, au titre de leurs compétences ferroviaires, une charge supplémentaire forte.
M. Gérard Cornu, rapporteur. Bien sûr !
M. Ronan Dantec. On l’a déjà dit, mais j’insiste sur ce point, car c’est l’un des cœurs du débat, il n’y a pas d’égalité des régions face au service ferroviaire.
Certaines régions sont riches, elles disposent d’importantes ressources et, finalement, ont assez peu de besoins au titre des lignes secondaires : elles pourront donc s’en sortir. Mais d’autres régions sont moins riches et ont beaucoup plus de besoins en la matière : elles risquent de se trouver en difficulté. Voilà pourquoi nous cherchons une solution pour équilibrer la charge de la ligne et l’investissement de la région, à l’échelle de la ligne ou de la région. Or, à cet égard, votre réponse contient une ambiguïté. Où est la péréquation, où est la garantie ?
Les trois premiers amendements en discussion, que nous soutenons collectivement, vont permettre d’ouvrir le débat. Mais vous devez nous dire où est la garantie que, demain, l’État ne dira pas aux régions : « Puisque c’est vous qui voulez cette ligne-là, c’est vous qui allez payer. » Ce système ne fonctionne pas : il ne garantit pas l’égalité territoriale. Là est le point précis sur lequel il nous faut trouver des solutions.
Hier, nous avons proposé des systèmes de péréquation. Nous avons souligné, pour ce qui concerne SNCF Réseau, que l’on ne pouvait pas raisonner simplement en examinant la réalité des coûts à l’échelle de chaque ligne. Cela ne marchera pas !
Jusqu’à présent, on ne fait que tourner autour du sujet. Pour notre part, nous sommes ouverts à d’autres propositions ; nous en avions beaucoup, mais l’article 40 a limité notre créativité…
Il faut absolument que vous nous disiez où s’exercera la solidarité nationale. L’État doit en avoir conscience, et il doit le reconnaître : ce n’est pas parce qu’il a transféré la compétence que la région est seule face à sa décision, et donc seule face au financement qu’elle implique.
Je le répète, pour le moment, nous tournons encore autour du sujet, et votre réponse m’a laissé un peu dubitatif.
Cela étant, je retire l’amendement n° 187 rectifié, monsieur le président.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Monsieur Dantec, en la matière, il faut revenir au départ de la décentralisation.
À l’époque, les dotations de décentralisation ont été calculées en tenant compte de la situation de chacune des régions. Je me souviens bien, notamment, du cas de la région Limousin : la dotation attribuée tenait compte du fait que, dans cette région, le montant des billets couvrait 10 % des coûts. Cette somme couvrait ainsi 90 % des dépenses.
M. Ronan Dantec. À l’époque !
Mme Élisabeth Borne, ministre. En moyenne, la vente des billets de TER finance 25 % du coût des services. Mais je pourrai vous communiquer l’historique du calcul des dotations de décentralisation, et je vous certifie que, dans le cas précis de la région Limousin, la dotation s’élevait bien à 90 % des dépenses !
M. Ronan Dantec. C’est bien là la question ! Cela ne peut pas être pour solde de tout compte !
Mme Élisabeth Borne, ministre. S’y est ajoutée une dotation de renouvellement du matériel roulant.
Quant aux coûts de modernisation des lignes, ils sont pris en compte dans le cadre des contrats de plan État-région. Évidemment, les calculs dépendent de la situation de chacune des régions.
Ainsi – et c’est la logique –, la décentralisation a été faite en tenant compte des besoins de chacune des régions, et les dotations ont été calculées en conséquence.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. J’abonde dans le sens de M. Dantec : le nouveau mode de calcul des redevances et des péages pose des questions à cette heure.
En la matière, il y a deux sujets : d’une part, le réseau conventionné qui relève des régions et, d’autre part, les lignes d’intérêt national, lesquelles seront mises en open access, ou accès libre. Actuellement, selon SNCF Mobilités, la moitié de ces lignes seraient en équilibre financier. Or, d’après les informations que nous avons obtenues lorsque M. Maurey a auditionné Mme la ministre, seule une de ces lignes sur six trouverait son équilibre avec le nouveau calcul de modulation des péages, d’où l’inquiétude qu’expriment les uns et les autres.
SNCF Réseau affirme – sans connaître parfaitement sa nouvelle trajectoire financière – que, si on baisse les recettes des péages pour équilibrer les lignes déficitaires, sa dette risque de se creuser de nouveau.
Madame la ministre, vous nous répondez, non sans raison, que les besoins de chacune des régions ont été parfaitement compensés, dans le cadre de la décentralisation des transports. Cette dernière a été parfaitement réussie : elle a permis, il y a quelques années, une véritable révolution ferroviaire, que ce soit dans les régions ou en Île-de-France. Le nombre de voyageurs a bondi de 44 %. Les dépenses n’ont plus rien à voir avec ce qu’elles étaient auparavant, et les régions ne sont plus du tout dans la même situation : désormais, elles sont soumises à de fortes contraintes financières.
Enfin, qui va définir les dessertes d’intérêt national ? Il s’agit d’une vraie question. Doit-on laisser SNCF Réseau déterminer seule ces segments, même sous le contrôle de l’ARAFER ? Dans la suite de nos débats, nous défendrons un amendement tendant à répondre à cette question.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le rapporteur, je tiens à vous dire combien j’apprécie la position que vous avez exprimée au sujet de ces amendements. Nous sommes en effet au cœur de la cohésion territoriale. Nous sommes au cœur de l’équilibre territorial, et, l’enjeu, c’est l’égalité des chances de développement.
Madame la ministre, il s’agit là d’une ambition que nous avons en partage !
Vous avez fait référence au succès de la décentralisation. Sur ce sujet, nous avons tout de même un peu d’expérience… Oui, les régions ont investi dans du matériel. Mais, le cœur de la question, le cœur de ces amendements, à propos desquels M. le rapporteur a pris une position très claire, ce sont les conditions dans lesquelles le matériel acheté par les régions circule.
Vous le savez très bien, à ce titre, l’égalité des chances n’est pas assurée aujourd’hui. On se retrouve avec du matériel financé par les régions et qui n’est pas exploité correctement, parce que les petites lignes n’ont pas fait l’objet des investissements nécessaires. Le matériel roulant ne peut donc pas être utilisé dans des conditions optimales.
Enfin, madame la ministre, ne répétons pas l’erreur du numérique ; ne répétons pas cette erreur terrible ! Là où une activité économique significative alimente les transports de voyageurs et le fret, l’équilibre pourra être assuré. Mais qu’en sera-t-il des territoires plus fragiles ? Le monde attire le monde. Le vide attire le vide. Voilà pourquoi, comme l’a dit M. le rapporteur, il faut une solidarité.
En adoptant ces amendements identiques, on évitera de commettre l’erreur du numérique et l’on garantira la lisibilité du dispositif. En la matière, quelle que soit l’issue des négociations, les régions ne pourront pas tout payer. Elles risquent de subir des inégalités en matière d’accessibilité, ce qui est inconcevable !
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Chers collègues, j’ai écouté attentivement la présentation de ces différents amendements : nous sommes là au cœur de l’article 1er bis.
À ce titre, je remercie M. le rapporteur et ses collègues de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable d’avoir clairement rappelé, dans leur rapport, les dispositions du droit en vigueur. Il faut bien reconnaître la complexité du système que constituent les différentes redevances.
J’ajoute qu’un chiffre doit nous interpeller : au titre de l’année 2017, le total de ces redevances s’élève à un peu plus de 5,8 milliards d’euros. Ce montant est payé par les différentes entreprises ferroviaires. Le rapport le rappelle également, SNCF Mobilités acquitte 60 % du total des sommes perçues, en la matière, par SNCF Réseau. C’est là un autre élément de complexité.
L’évolution de ces différentes redevances inspire des craintes, pour ce qui concerne certaines dessertes de TGV, auxquelles les collectivités territoriales ont participé financièrement. Nous en avons déjà beaucoup parlé hier soir, et Fabienne Keller a largement évoqué le cas du TGV Est, sur lequel je tiens à insister modestement.
Madame la ministre, pour les départements de l’Est, dont nous sommes élus – je citerai, avec mes collègues des Vosges, les dessertes vosgiennes –, j’appelle votre attention sur les gares de Charleville-Mézières et de Sedan. Certes, pour desservir ces villes, les TGV doivent circuler sur des voies normales ; mais ces dessertes permettent malgré tout de limiter les correspondances et les ruptures de charge, et, je le répète, les collectivités territoriales se sont fortement engagées à ce titre. Là non plus, ce n’est pas simple.
S’ajoute à cela le problème des redevances, la distinction des services conventionnés ou non conventionnés et la question du fret.
Sur tous ces sujets, les auteurs de ces amendements posent de bonnes questions, et je me rallierai à l’avis émis par M. le rapporteur.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 136 rectifié bis, 186 rectifié bis et 193 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 157 rectifié quinquies, présenté par Mmes Lienemann et Meunier, M. Tourenne, Mme Préville, MM. M. Bourquin, Duran et Todeschini, Mmes G. Jourda et Monier et M. Tissot, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Remplacer les mots :
respecte les
par le mot :
des
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Avec cet amendement, il s’agit d’éviter une hiérarchisation des critères pris en compte dans le calcul de la redevance des lignes.
Plus précisément, ce projet de loi détaille toute une série de critères sur la base desquels la redevance doit être fixée. On tient compte de ces critères, puis on précise qu’il faut respecter les gains de productivité. Autrement dit, on isole les gains de productivité, en disant qu’ils ne seront pas traités de la même manière que les autres critères pour la fixation de la redevance. Cette méthode est assez risquée, et elle n’est pas forcément juste, pour plusieurs raisons.
Je relève notamment que les gains de productivité ne viendront pas seulement de l’entreprise acquittant le péage : dans certains cas, ils pourront découler des investissements déployés ou d’interconnexions améliorées avec d’autres réseaux. On ne peut donc pas réserver ces gains de productivité à l’entreprise.
Le Gouvernement espère sans doute que ces gains de productivité permettront de baisser les tarifs. Mais, pour le moment, ce n’est pas franchement ce qu’on constate : rien ne garantit que c’est ce qui va prévaloir.
Il ne s’agit pas de dire qu’il ne faut pas tenir compte de ces gains de productivité ; simplement, ces derniers doivent être considérés au même titre que les autres critères, comme la viabilité de la ligne. Il faut aussi garantir un équilibre entre le taux des péages pour l’entretien global et la structuration générale du réseau.
Voilà pourquoi cet amendement vise à remettre le critère des gains de productivité à égalité avec les autres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Cornu, rapporteur. Cet amendement vise tout simplement à modifier l’importance donnée aux gains de productivité des entreprises ferroviaires pour le calcul des redevances d’infrastructure. Il ne s’agirait plus de « respecter » ces gains de productivité, mais simplement d’en tenir compte.
Il ne nous paraît pas judicieux de modifier ces dispositions dans un sens accroissant potentiellement le niveau global des péages : la préoccupation actuelle est précisément de stabiliser leur montant et de mieux les répartir, en faveur de l’aménagement du territoire.
Voilà pourquoi la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?