M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Nous sommes tous conscients de la situation que viennent de décrire le rapporteur et le président de la commission des lois. Mais il s’agit ici de protéger le secret des affaires, qui a été défini à l’article 1er de ce texte et dans la directive comme relevant profondément de l’entreprise qui le détient. C’est donc à cette dernière qu’il revient de protéger son secret et d’agir en conséquence, sans en passer par une amende pénale.

La protection du secret des affaires est de la responsabilité de son détenteur, non de celle de la puissance publique !

M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Ce que vous dites est parfaitement exact, monsieur le président de la commission des lois. Toutefois, l’article 314-4-1 que vous proposez d’ajouter dans le code pénal ne répondra pas strictement à ces difficultés.

Nos juridictions pénales auront énormément de difficultés à interpréter cet article et à le mettre en œuvre. Cette disposition mériterait d’être travaillée différemment pour répondre aux préoccupations que vous évoquez.

Le fait d’obtenir une information protégée « en contournant sciemment les mesures de protection mises en place par son détenteur légitime, afin d’en retirer un avantage de nature exclusivement économique » donnera lieu à toute une série de débats. Ces termes ne permettent pas de répondre à votre objectif de protection.

Comme nous l’avons souligné en défendant notre amendement de suppression, cette infraction n’est pas nécessaire à la transposition de la directive et n’y a pas forcément sa place. D’autres textes nous permettront de travailler de concert avec des spécialistes de ces questions. Méfions-nous : trop souvent, nous adoptons des mesures pénales qui ne sont pas appliquées, car elles sont trop compliquées à mettre en œuvre sur le terrain.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 38, 55, 65 et 84 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe du RDSE.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 96 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 294
Pour l’adoption 137
Contre 157

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 85 rectifié, présenté par MM. Requier, Gabouty, Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme N. Delattre, M. Gold, Mmes Jouve et Laborde et MM. Menonville et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 5

1° Au début, insérer les mots :

À l’exclusion du droit d’alerte tel que défini par l’article 6 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique,

2° Supprimer les mots :

, afin d’en retirer un avantage de nature exclusivement économique,

La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.

M. Jean-Marc Gabouty. Je retire l’amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 85 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er quater.

(Larticle 1er quater est adopté.)

Article 1er quater (nouveau)
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Article additionnel après l'article 2 - Amendement n° 35 rectifié

Article 2

Le livre IX du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le 1° de l’article L. 930-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L’article L. 151-6 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la protection du secret des affaires ; »

2° Le I de l’article L. 950-1 est ainsi modifié :

a) Le 1° est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les articles L. 151-1 à L. 153-2 sont applicables dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la protection du secret des affaires ; »

b) Le tableau du second alinéa du 4° est ainsi modifié :

– la douzième ligne est ainsi rédigée :

 

«

Article L. 440-1

la loi n° … du … relative à la protection du secret des affaires

» ;

– la dix-septième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

Article L. 441-8

la loi n° … du … relative à la protection du secret des affaires

Article L. 441-9

l’ordonnance n° 2014-487 du 15 mai 2014

».

M. le président. L’amendement n° 89, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. C’est un amendement de coordination avec l’amendement n° 90 rectifié tendant à insérer un article additionnel après l’article 3. Il s’agit de déplacer à la fin de la proposition de loi l’article relatif à son application outre-mer, pour assurer une meilleure lisibilité du texte.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 89.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 2 est supprimé, et l’amendement n° 66 n’a plus d’objet.

L’amendement n° 66, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

Article 2
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Article 3 (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel après l’article 2

M. le président. L’amendement n° 35 rectifié, présenté par Mmes Lienemann, Jasmin et Meunier, M. Mazuir, Mme G. Jourda, M. Tourenne, Mme de la Gontrie, M. Jomier, Mme Préville et M. Cabanel, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 226-10 du code pénal, il est inséré un article 226-10-… ainsi rédigé :

« Art. 226-10-… – L’infraction définie à l’article 226-10 est punie de sept ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende lorsqu’elle vise soit un chercheur ou un enseignant-chercheur pour des propos écrits ou actes tenus ou réalisés dans ses activités d’enseignement ou de recherche, soit un journaliste, une association ou un de ses membres pour des propos ou actes tenus ou réalisés dans ses activités d’intérêt général. »

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. N’ayant pas de doute, compte tenu de nos débats, sur le sort qui sera réservé à cet amendement, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 35 rectifié est retiré.

Article additionnel après l'article 2 - Amendement n° 35 rectifié
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Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 90 rectifié

Article 3

(Non modifié)

I. – À la fin du a du 1° de l’article L. 111-2 du code du cinéma et de l’image animée, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

II. – Au premier alinéa du II de l’article 349 sexies du code des douanes, les mots : « commercial, industriel ou » sont remplacés par les mots : « secret des affaires ou un secret ».

III. – À la fin de la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 233-1 du code de l’énergie, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

IV. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :

1° À la première phrase du second alinéa du IV de l’article L. 120-1, les mots : « , du secret industriel et commercial » sont supprimés ;

2° Au II de l’article L. 412-7, au III de l’article L. 412-8, à la première phrase du premier alinéa et au second alinéa du I, à la première phrase du premier alinéa du II de l’article L. 521-7 et au dernier alinéa de l’article L. 523-1, les mots : « industriel et commercial » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

3° À la fin de la première phrase du I de l’article L. 412-17, les mots : « industriel ou commercial » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

4° À la fin de la première phrase de l’article L. 592-46-1, les mots : « en matière industrielle ou commerciale » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

V. – Au premier alinéa du II de l’article L. 283 D du livre des procédures fiscales, les mots : « commercial, industriel ou » sont remplacés par les mots : « des affaires ou un secret ».

VI. – Au a du 1° du I de l’article L. 213-2 du code du patrimoine, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

VII. – À la fin du dernier alinéa de l’article L. 615-5-1 du code de la propriété intellectuelle, les mots : « de fabrication et de commerce » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

VIII. – La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration est ainsi modifiée :

1° Au 1° de l’article L. 311-6, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

2° À la fin du 1° de l’article L. 311-8, les mots : « industriel et commercial » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

IX. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase de l’article L. 201-3, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

2° Au premier alinéa et à la première phrase du second alinéa de l’article L. 253-2, les mots : « industriel et commercial » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

3° Au premier alinéa du II de l’article L. 612-5, les mots : « commercial, industriel ou » sont remplacés par les mots : « des affaires ou un secret ».

X. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase de l’article L. 1313-2, de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1333-29 et du 7° de l’article L. 5311-2, les mots : « en matière industrielle et commerciale » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

2° Au dernier alinéa de l’article L. 1313-3, les mots : « industriel et commercial » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

3° À la première phrase du II de l’article L. 1413-9, les mots : « industriels ou commerciaux » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

4° À la fin de la première phrase du 1° de l’article L. 1413-12-3, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

5° Au premier alinéa de l’article L. 5324-1, les mots : « présentant un caractère de confidentialité industrielle ou commerciale ou relevant » sont remplacés par les mots : « relevant du secret des affaires ou ».

XI. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À la fin de la deuxième phrase du quatrième alinéa de l’article L. 162-18, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

2° À l’article L. 455-3, les mots : « en matière industrielle et commerciale » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

XII. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1511-4 du code des transports, les mots : « en matière commerciale et industrielle » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

XIII. – Au premier alinéa du I de l’article 44 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, les mots : « en matière industrielle et commerciale » sont remplacés par les mots : « des affaires ».

M. le président. L’amendement n° 64, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Au début

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le code de commerce est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du V de l’article L. 440-1, les mots : « industriel et commercial » sont remplacés par les mots : « des affaires » ;

2° Au troisième alinéa de l’article L. 441-8, les mots : « du secret en matière industrielle et commerciale et » sont supprimés.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement tend à harmoniser les terminologies utilisées dans le code de commerce, afin de faire référence à la notion unique et désormais clairement définie de « secret des affaires », dans un souci de lisibilité et de sécurité juridique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. J’avais moi-même songé à un tel amendement, dont l’adoption permettra de corriger un oubli de l’Assemblée nationale, qui rendait d’ailleurs incompréhensibles les dispositions d’application dans les îles Wallis et Futuna.

La commission émet donc un avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 64.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3, modifié.

(Larticle 3 est adopté.)

Article 3 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la protection du secret des affaires
Intitulé de la proposition de loi

Article additionnel après l’article 3

M. le président. L’amendement n° 90 rectifié, présenté par M. Frassa, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l’article L. 950-1 du code de commerce est ainsi modifié :

 Le 1° est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les articles L. 151-1 à L. 154-1 sont applicables dans leur rédaction résultant de la loi n° … du … relative à la protection du secret des affaires ; »

2° Le tableau constituant le second alinéa du 4° est ainsi modifié :

- la douzième ligne est ainsi rédigée :

« 

Article L. 440-1

la loi n° … du … relative à la protection du secret des affaires

» ;

- la dix-septième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

« 

Article L. 441-8

la loi n° … du … relative à la protection du secret des affaires

Article L. 441-9

l’ordonnance n° 2014-487 du 15 mai 2014

 » ;

- la quarante-sixième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

« 

Article L. 483-1

l’ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017

Articles L. 483-4 à L. 483-11

l’ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017

».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Cet amendement vise à déplacer à la fin de la proposition de loi l’article relatif à son application outre-mer, pour assurer une meilleure lisibilité du texte et la cohérence de la discussion.

En outre, il tend à apporter des précisions et des compléments concernant l’application de l’ensemble de la proposition de loi dans les îles Wallis et Futuna.

La rectification a porté sur les premiers alinéas de l’article, c’est-à-dire sur le livre IX du code de commerce.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 90 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 3.

Article additionnel après l'article 3 - Amendement n° 90 rectifié
Dossier législatif : proposition de loi relative à la protection du secret des affaires
Demande de seconde délibération

Intitulé de la proposition de loi

M. le président. L’amendement n° 36, présenté par MM. Bocquet, Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet intitulé :

Proposition de loi relative à la protection du secret des affaires des entreprises

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Le texte que nous venons d’examiner n’est pas forcément une bonne nouvelle pour le droit français.

Produit d’une directive européenne engagée par le consortium des plus grandes entreprises européennes qui commençaient, voilà quelques années, à trouver préoccupant le mouvement de transparence affectant certains comportements financiers et fiscaux, et d’une proposition de loi portée par l’avocat fondateur d’un cabinet spécialisé dans le droit des affaires, cette proposition de loi apparaît comme l’instrument d’une prétendue attractivité de notre territoire pour toute entreprise transnationale.

En 2013 et en 2016, il fallait parer, si l’on peut dire, les affaires Luxleaks, « Panama Papers » ou Wikileaks… En 2018, il faut faire accepter TAFTA et le CETA et donc adapter notre droit aux méthodes transatlantiques. C’est oublier que la tradition française et européenne est déjà riche, sur le plan juridique, de nombreux garde-fous destinés à protéger les entreprises.

Nous savons lutter contre la contrefaçon, nous savons protéger notre propriété intellectuelle et industrielle, nous savons agir contre la concurrence déloyale et nous disposons de bien des moyens pour sanctionner tous ceux qui se prêteraient à ces actes délictueux et, pour certains, criminels.

Nous avons même un droit du travail qui fait des salariés eux-mêmes les dépositaires d’une partie du capital immatériel, ne serait-ce que par leur savoir-faire. Notre droit ne souffrait donc pas d’un vide juridique béant en la matière, même si certaines des avancées effectuées en ces domaines sont relativement récentes.

Cela dit, les conditions générales de la concurrence supposent effectivement, dans une société libérale avancée comme la nôtre, que la régulation économique ne se fasse qu’à égalité entre les parties, dans la transparence des règles.

Il ne s’agit pas de gagner la coupe des champions en usant et en abusant de moyens financiers supérieurs dont seraient dépourvus les concurrents. Il s’agit de définir un cadre législatif qui laisse, comme il se doit, la place à l’interprétation des règles et à la singularité des procédures.

Notre intitulé est donc marqué par la simplicité et la sobriété.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christophe-André Frassa, rapporteur. Je sais bien que l’on ne prête qu’aux riches, monsieur Gay, même lorsque l’on est membre du groupe communiste (Sourires.), mais vous auriez pu me faire la grâce de penser que le titre de la proposition de loi était de moi, et non de son auteur, qui s’était contenté de reprendre l’intitulé de la directive.

Lors de la discussion générale, j’ai relevé un lapsus, peut-être révélateur, de M. Bocquet, qui a parlé de « secret des enfers » au lieu de « secret des affaires ». (Sourires.) Ce lapsus savoureux aurait peut-être mérité un sous-amendement visant à intituler ce texte : « Proposition de loi relative au secret des enfers ». (Nouveaux sourires.)

Souffrez néanmoins que je maintienne celui que j’ai proposé : la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 36.

(Lamendement nest pas adopté.)

Seconde délibération

Intitulé de la proposition de loi
Dossier législatif : proposition de loi relative à la protection du secret des affaires
Article 1er

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Monsieur le président, nous avions prévu de rester ensemble jusqu’à une heure trente. Je vois qu’il n’est qu’une heure quinze et je m’apprête donc à vous demander de prolonger un peu nos débats ! (Sourires.)

En effet, nous avons adopté tout à l’heure, en début d’après-midi, un amendement n° 8 visant la définition du secret des affaires. Or j’ai pu constater qu’il était incompatible avec la définition que nous avons par ailleurs adoptée du secret des affaires. Nous ne pouvons pas voter maintenant le texte sans avoir corrigé cette erreur.

C’est pourquoi, en application de l’article 43, alinéa 4 de notre règlement, je demande son renvoi à la commission en vue d’une seconde délibération de l’article 1er.

En outre, monsieur le président, je sollicite une suspension de trois minutes pour réunir la commission des lois, ici même, afin d’adopter un amendement corrigeant l’incohérence que je viens de mentionner.

M. le président. La commission des lois demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 1er de la proposition de loi.

Je rappelle que, en application de l’article 43, alinéa 4, du règlement du Sénat, avant le vote sur l’ensemble d’un texte, tout ou partie de celui-ci peut être renvoyé, sur décision du Sénat, à la commission, pour une seconde délibération, à condition que la demande de renvoi ait été formulée ou acceptée par le Gouvernement.

Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de seconde délibération formulée par la commission ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable, monsieur le président.

M. le président. Je consulte le Sénat sur la demande de seconde délibération, présentée par la commission et acceptée par le Gouvernement.

Il n’y a pas d’opposition ?…

La seconde délibération est ordonnée.

Conformément à l’article 43, alinéa 5, du règlement du Sénat, lorsqu’il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui doit présenter un nouveau rapport.

Nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants, afin de permettre à la commission de se réunir.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue le jeudi 19 avril 2018, à une heure vingt, est reprise à une heure vingt-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 6, du règlement : « Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements, et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements. »

Demande de seconde délibération
Dossier législatif : proposition de loi relative à la protection du secret des affaires
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 1er

M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 1er dans cette rédaction :

Le livre Ier du code de commerce est complété par un titre V ainsi rédigé :

« TITRE V

« DE LA PROTECTION DU SECRET DES AFFAIRES

« CHAPITRE IER

« De lobjet et des conditions de la protection

« Section 1

« De linformation protégée

« Art. L. 151-1. – Est protégée au titre du secret des affaires toute information répondant aux trois critères suivants :

« 1° Elle n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ;

« 2° Elle revêt une valeur économique, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;

« 3° Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret.

« Section 2

« De la détention légitime et de lobtention licite du secret des affaires

« Art. L. 151-2 A (nouveau). – Est détenteur légitime du secret des affaires celui qui en a le contrôle de façon licite.

« Art. L. 151-2. – Constituent des modes d’obtention licite du secret des affaires :

« 1° Une découverte ou une création indépendante ;

« 2° L’observation, l’étude, le démontage ou le test d’un produit ou d’un objet qui a été mis à la disposition du public ou qui est de façon licite en possession de la personne qui obtient l’information, sauf stipulation contractuelle interdisant ou limitant l’obtention du secret ;

« 3° (Supprimé)

« Section 3

« De lobtention, de lutilisation et de la divulgation illicites

« Art. L. 151-3. – L’obtention du secret des affaires est illicite lorsqu’elle est réalisée sans le consentement de son détenteur légitime à des fins de concurrence déloyale permettant au bénéficiaire des informations de tirer un profit de manière indue, portant ainsi atteinte aux intérêts de l’entreprise victime, qu’elle résulte :

« 1° D’un accès non autorisé à tout document, objet, matériau, substance ou fichier numérique qui contient le secret ou dont il peut être déduit, ou bien d’une appropriation ou d’une copie non autorisée de ces éléments ;

« 2° De tout autre comportement considéré, compte tenu des circonstances, comme déloyal et contraire aux usages en matière commerciale.

« Art. L. 151-4. – L’utilisation ou la divulgation du secret des affaires est illicite lorsqu’elle est réalisée sans le consentement de son détenteur légitime par une personne qui a obtenu le secret dans les conditions mentionnées à l’article L. 151-3 ou qui agit en violation d’une obligation de ne pas divulguer le secret ou de limiter son utilisation.

« La production, l’offre ou la mise sur le marché, de même que l’importation, l’exportation ou le stockage à ces fins de tout produit résultant de manière significative d’une atteinte au secret des affaires sont également considérés comme une utilisation illicite lorsque la personne qui exerce ces activités savait, ou aurait dû savoir au regard des circonstances, que ce secret était utilisé de façon illicite au sens du premier alinéa du présent article.

« Art. L. 151-5. – L’obtention, l’utilisation ou la divulgation d’un secret des affaires est aussi considérée comme illicite lorsque, au moment de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation du secret des affaires, une personne savait, ou aurait dû savoir au regard des circonstances, que ce secret des affaires avait été obtenu, directement ou indirectement, d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite au sens du premier alinéa de l’article L. 151-4.

« Section 4

« Des exceptions à la protection du secret des affaires

« Art. L. 151-6. – Le secret des affaires n’est pas opposable lorsque l’obtention, l’utilisation ou la divulgation du secret est requise ou autorisée par le droit de l’Union européenne, les traités ou accords internationaux en vigueur ou le droit national, notamment dans l’exercice des pouvoirs d’enquête, de contrôle, d’autorisation ou de sanction des autorités juridictionnelles ou administratives, pour l’usage exclusif de ces autorités dans l’accomplissement de leurs missions.

« Art. L. 151-7 (nouveau). – À l’occasion d’une instance relative à une atteinte au secret des affaires, le secret n’est pas opposable lorsque son obtention, son utilisation ou sa divulgation est intervenue :

« 1° Pour exercer le droit à la liberté d’expression et de communication, y compris le respect de la liberté de la presse, et à la liberté d’information telle qu’établie dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;

« 2° Pour révéler, dans le but de protéger l’intérêt général et de bonne foi, une activité illégale, une faute ou un comportement répréhensible, y compris lors de l’exercice du droit d’alerte tel que défini à l’article 6 de la loi n °2016‑1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique;

« 3° Pour la protection d’un intérêt légitime reconnu par le droit de l’Union européenne ou le droit national.

« Art. L. 151-8 (nouveau). – À l’occasion d’une instance relative à une atteinte au secret des affaires, le secret n’est pas opposable lorsque :

« 1° L’obtention du secret des affaires est intervenue dans le cadre de l’exercice du droit à l’information et à la consultation des salariés ou de leurs représentants ;

« 2° La divulgation du secret des affaires par des salariés à leurs représentants est intervenue dans le cadre de l’exercice légitime par ces derniers de leurs fonctions, pour autant que cette divulgation ait été nécessaire à cet exercice.

« L’information ainsi obtenue ou divulguée demeure protégée au titre du secret des affaires à l’égard des personnes autres que les salariés ou leurs représentants qui en ont eu connaissance.

« CHAPITRE II

« Des actions en prévention, en cessation ou en réparation dune atteinte au secret des affaires

« Art. L. 152-1. – (Non modifié) Toute atteinte au secret des affaires telle que prévue aux articles L. 151-3 à L. 151-5 engage la responsabilité civile de son auteur.

« Art. L. 152-1-1 (nouveau). – Les actions relatives à une atteinte au secret des affaires sont prescrites par cinq ans à compter des faits qui en sont la cause.

« Section 1

« Des mesures pour prévenir et faire cesser une atteinte au secret des affaires

« Art. L. 152-2. – I. – Dans le cadre d’une action relative à la prévention ou la cessation d’une atteinte à un secret des affaires, la juridiction peut, sans préjudice de l’octroi de dommages et intérêts, prescrire, y compris sous astreinte, toute mesure proportionnée de nature à empêcher ou à faire cesser une telle atteinte. Elle peut notamment :

« 1° Interdire la réalisation ou la poursuite des actes d’utilisation ou de divulgation d’un secret des affaires ;

« 2° Interdire les actes de production, d’offre, de mise sur le marché ou d’utilisation des produits résultant de manière significative de l’atteinte au secret des affaires ou l’importation, l’exportation ou le stockage de tels produits à ces fins ;

« 3° Ordonner la destruction totale ou partielle de tout document, objet, matériau, substance ou fichier numérique contenant le secret des affaires concerné ou dont il peut être déduit ou, selon le cas, ordonner leur remise totale ou partielle au demandeur.

« II. – La juridiction peut également ordonner que les produits résultant de manière significative de l’atteinte au secret des affaires soient rappelés des circuits commerciaux, écartés définitivement de ces circuits, modifiés afin de supprimer l’atteinte au secret des affaires, détruits ou, selon le cas, confisqués au profit de la partie lésée.

« III. – Lorsque la juridiction limite la durée des mesures mentionnées aux 1° et 2° du I, la durée fixée doit être suffisante pour éliminer tout avantage commercial ou économique que l’auteur de l’atteinte au secret des affaires aurait pu tirer de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation illicite du secret des affaires.

« IV. – Sauf circonstances particulières et sans préjudice des dommages et intérêts qui pourraient être réclamés, l’ensemble des mesures mentionnées aux I à III sont ordonnées aux frais de l’auteur de l’atteinte.

« Il peut y être mis fin à la demande de l’auteur de l’atteinte lorsque les informations concernées ne peuvent plus être qualifiées de secret des affaires au sens de l’article L. 151-1 pour des raisons qui ne dépendent pas, directement ou indirectement, de lui.

« Art. L. 152-2-1 A (nouveau). – Pour prévenir une atteinte imminente ou faire cesser une atteinte illicite à un secret des affaires, la juridiction peut, sur requête ou en référé, ordonner des mesures provisoires et conservatoires dont les modalités sont déterminées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 152-2-1. – Sans préjudice de l’article L. 152-3, la juridiction peut ordonner, à la demande de l’auteur de l’atteinte, le versement d’une indemnité à la partie lésée au lieu des mesures mentionnées aux I à III de l’article L. 152-2 lorsque sont réunies les conditions suivantes :

« 1° Au moment de l’utilisation ou de la divulgation du secret des affaires, l’auteur de l’atteinte ne savait pas, ni ne pouvait savoir au regard des circonstances, que le secret des affaires avait été obtenu d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite ;

« 2° L’exécution des mesures mentionnées aux I à III de l’article L. 152-2 causerait à cet auteur un dommage disproportionné ;

« 3° Le versement d’une indemnité à la partie lésée paraît raisonnablement satisfaisant.

« Lorsque cette indemnité est ordonnée en lieu et place des mesures prévues aux 1° et 2° du I du même article L. 152-2, elle ne peut être fixée à une somme supérieure au montant des droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser ledit secret des affaires pour la période pendant laquelle l’utilisation du secret des affaires aurait pu être interdite.

« Section 2

« De la réparation dune atteinte au secret des affaires

« Art. L. 152-3. – Pour fixer les dommages et intérêts dus en réparation du préjudice effectivement subi, la juridiction prend en considération distinctement :

« 1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte au secret des affaires, dont le manque à gagner et la perte subie par la partie lésée, y compris la perte de chance ;

« 2° Le préjudice moral causé à la partie lésée ;

« 3° Les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte au secret des affaires, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte.

« La juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui tient notamment compte des droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le secret des affaires en question. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

« Art. L. 152-4. – (Supprimé)

« Section 3

« Des mesures de publicité

« Art. L. 152-5. – (Non modifié)

« Section 4

« Des sanctions en cas de procédure dilatoire ou abusive

(Division et intitulé supprimés)

« Art. L. 152-6. – (Supprimé)

« CHAPITRE III

« Des mesures générales de protection du secret des affaires devant les juridictions civiles ou commerciales

« Art. L. 153-1. – Lorsque, à l’occasion d’une instance civile ou commerciale ayant pour objet une mesure d’instruction sollicitée avant tout procès au fond ou à l’occasion d’une instance au fond, il est fait état ou est demandée la communication ou la production d’une pièce dont il est allégué par une partie ou un tiers ou dont il a été jugé qu’elle est de nature à porter atteinte à un secret des affaires, le juge peut, d’office ou à la demande d’une partie ou d’un tiers, si la protection de ce secret ne peut être assurée autrement et sans préjudice de l’exercice des droits de la défense :

« 1° Prendre connaissance seul de cette pièce avant de décider, s’il y a lieu, de limiter sa communication ou sa production à certains de ses éléments, d’en ordonner la communication ou la production sous une forme de résumé ou d’en restreindre l’accès, pour chacune des parties, au plus à une personne physique et une personne habilitée à l’assister ou la représenter ;

« 2° Décider que les débats auront lieu et que la décision sera prononcée en chambre du conseil ;

« 3° Adapter la motivation de sa décision et les modalités de la publication de celle-ci aux nécessités de la protection du secret des affaires.

« Art. L. 153-2. – Toute personne ayant accès à une pièce ou au contenu d’une pièce considérée par le juge comme étant couverte ou susceptible d’être couverte par le secret des affaires est tenue à une obligation de confidentialité lui interdisant toute utilisation ou divulgation des informations qu’elle contient.

« Dans le cas d’une personne morale, l’obligation prévue au premier alinéa du présent article s’applique ses représentants légaux ou statutaires et aux personnes qui la représentent devant la juridiction.

« Les personnes ayant accès à la pièce ou à son contenu ne sont liées par cette obligation ni dans leurs rapports entre elles ni à l’égard des représentants légaux ou statutaires de la personne morale partie à la procédure.

« Les personnes habilitées à assister ou représenter les parties ne sont pas liées par cette obligation de confidentialité à l’égard de celles-ci, sauf en cas de mesures prises par le juge au titre du 1° de l’article L. 153-1 pour restreindre l’accès d’une ou de plusieurs pièces à certaines personnes.

« L’obligation de confidentialité perdure à l’issue de la procédure. Toutefois, elle prend fin si une juridiction décide, par une décision non susceptible de recours, qu’il n’existe pas de secret des affaires ou si les informations en cause ont entre-temps cessé de constituer un secret des affaires ou sont devenues aisément accessibles.

« CHAPITRE IV

« Conditions dapplication

« Art. L. 154-1. – Les conditions d’application du présent titre sont fixées par décret en Conseil d’État. »