M. le président. Le vote est réservé.
Article 22 bis
[Article examiné dans le cadre de la législation en commission]
Le III de l’article 13 de l’ordonnance n° 2015-682 du 18 juin 2015 relative à la simplification des déclarations sociales des employeurs est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, les mots : « dans leur rédaction issue de la présente ordonnance » sont supprimés ;
2° Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° Elles s’appliquent à compter d’une date fixée par décret, le cas échéant en distinguant plusieurs échéances selon les employeurs et la nature des données de la déclaration sociale nominative :
« a) Au plus tard le 1er janvier 2022 pour les employeurs relevant des régimes prévus à l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale suivants :
« – les administrations, services, offices, établissements publics de l’État, les établissements industriels de l’État et l’Imprimerie Nationale, pour les fonctionnaires, les magistrats et les ouvriers de l’État ;
« – les régions, les départements et communes ;
« – les établissements publics départementaux et communaux n’ayant pas le caractère industriel ou commercial ;
« b) Au plus tard le 1er janvier 2020 pour les employeurs relevant des régimes prévus au même article L. 711-1 autres que ceux mentionnés au a du présent 1° ; ».
M. le président. Le vote est réservé.
Article 23
I. – À titre expérimental, le demandeur d’une carte nationale d’identité, d’un passeport, d’un permis de conduire ou d’un certificat d’immatriculation est, à sa demande, dispensé de la production de pièces justificatives relatives à son domicile.
Pour bénéficier de cette dispense, le demandeur déclare son domicile et produit à l’administration en charge de l’instruction de sa demande une information permettant son identification auprès d’un fournisseur d’un bien ou d’un service attaché à son domicile. Un arrêté fixe la liste de ces fournisseurs.
Le fournisseur mentionné au deuxième alinéa du présent I est tenu de répondre aux sollicitations de l’administration en lui communiquant les données à caractère personnel lui permettant de vérifier le domicile déclaré par le demandeur.
L’administration assure la confidentialité et la protection de ces informations.
II. – Cette expérimentation est menée dans les départements de l’Aube, du Nord, des Yvelines et du Val-d’Oise pour une durée de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi. Elle fait l’objet d’une évaluation dont les résultats sont transmis au Parlement.
III. – (Supprimé)
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, sur l’article.
M. Claude Kern. Je voudrais revenir sur le problème de la gestion de la délivrance des cartes grises que nous avons connu à la fin de l’année dernière.
Depuis le transfert des services rendus par les services déconcentrés de l’État dans la délivrance des cartes grises à l’Agence nationale des titres sécurisés, au début du mois de novembre de l’année dernière, le système d’immatriculation des véhicules semble être géré de manière calamiteuse.
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. C’est vrai !
M. Jackie Pierre. Tout à fait !
M. Claude Kern. Le bug de fin d’année a été dantesque, puisque le stock de certificats d’immatriculation en attente s’est trouvé à un niveau intolérable : les garages ont été bloqués, les concessionnaires étaient aux abois et les clients ont dû attendre avant de pouvoir rouler avec leur voiture nouvellement acquise, certains ont même annulé leur achat.
Une petite partie du réseau a effectivement été débloquée, mais on ne peut pas vraiment parler de victoire puisqu’il ne s’agit que du serveur consacré aux professionnels – les garages, les concessionnaires, les stations de lavage – habilités par la préfecture à faire les demandes de cartes grises pour les particuliers. En attendant, c’est toujours la même galère pour les particuliers.
Le guichet de la préfecture dédié à l’immatriculation des véhicules étant définitivement fermé, les particuliers n’ont d’autre choix, pour obtenir leur carte grise, que de faire appel au service d’entreprises privées du secteur automobile, le service informatique de celles-ci étant, lui, en état de marche. Pour ces particuliers, cela a tout de même un coût supplémentaire important.
Face au site défaillant ants.gouv.fr, certainement à cause d’un lancement trop précipité, on ne peut rien faire. Quelles garanties le Gouvernement peut-il apporter en ce domaine ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Jackie Pierre. Aucune !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je répondrai très brièvement, car nous avons eu des échanges sur ce sujet à de nombreuses reprises, notamment à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances et des deux projets de loi de finances rectificative au Sénat et à l’Assemblée nationale.
Le nombre d’équivalents temps plein mis à disposition de l’agence que vous citez, monsieur le sénateur, a presque doublé au cours des derniers mois. Les systèmes informatiques que vous décrivez comme défaillants ont été reconfigurés de manière que le retard, qui est réel, avec 800 000 cartes grises à une époque qui est heureusement révolue, puisse être résorbé. Ce travail se poursuit. Nous avions indiqué à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances rectificative que, d’ici à la fin du premier semestre de 2018, l’intégralité du stock de retard pourrait être absorbée de façon à pouvoir offrir à nos concitoyens un service de meilleure qualité.
Personne ne nie les difficultés rencontrées par la plateforme que vous avez citée et par le système mis en place. L’objectif que nous poursuivons est de mettre les moyens nécessaires pour apporter une réponse à ce problème : des moyens budgétaires, des moyens humains et la reconfiguration du système informatique, en gageant que l’efficacité sera enfin au rendez-vous.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. J’irai dans le même sens que Claude Kern.
Pour avoir auditionné les services de l’État dans le département de Meurthe-et-Moselle, sous l’autorité du préfet, voilà trois semaines, afin d’alimenter le débat, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, je confirme le propos de mon collègue, et je veux même vous alerter sur deux points, monsieur le secrétaire d’État.
Le premier concerne le retard, le ralentissement du traitement des demandes et donc l’insatisfaction des usagers.
Le second point a trait à la fraude.
Les services de l’État ont appelé mon attention sur la question des fraudes supplémentaires liées aux pièces qui leur parviennent désormais de manière dématérialisée. Auparavant, avec le contact humain, par l’appréciation sensorielle, tactile, les services de la préfecture pouvaient détecter les fraudes à hauteur de 80 %, m’ont-ils confié.
Dans le cadre d’une société de confiance, on a beaucoup évoqué la question de la fraude – et nous y reviendrons encore ultérieurement – ; l’État doit être garant de la démarche de qualité. Soyons attentifs à ce sujet, un sujet important qui touche à la vie quotidienne.
De la même manière, Mme la rapporteur m’a expliqué qu’il est arrivé que des concessionnaires aient dû prendre à leur charge des locations, puisque leurs clients ne disposaient pas de leur véhicule. Quid de l’efficacité et de la célérité des services dits de l’État ?
MM. Claude Kern et Jackie Pierre. Tout à fait !
M. le président. L’amendement n° 185 rectifié, présenté par Mmes N. Delattre et Costes, MM. Requier et Arnell, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde, MM. Menonville, Vall, Artano, A. Bertrand, Collin et Corbisez, Mme Guillotin et MM. Labbé et Léonhardt, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Mme Nathalie Delattre. L’article 23 prévoit une expérimentation visant à simplifier les démarches pour la délivrance des cartes nationales d’identité, des passeports, des permis de conduire et des certificats d’immatriculation des véhicules dans quatre départements : le Nord, les Yvelines, l’Aube et le Val-d’Oise.
La simplification envisagée n’est pas d’une évidence flagrante. Quel sera son véritable impact sur les communes ? On pense à l’usager, mais quelle plus-value les communes peuvent-elles attendre d’une telle mesure ?
Le groupe du RDSE considère que cette disposition créera des difficultés d’autant que, vous l’imaginez bien, le fait de se passer d’un justificatif de domicile pour la délivrance de titres, comme une carte d’identité, permettant de circuler sur le territoire, d’y entrer ou d’en sortir nous paraît compliqué et dangereux. Sans compter que l’expérimentation sera menée dans un département frontalier comme le Nord !
Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de l’article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. L’article 23 prévoit le remplacement, à titre expérimental, de la fourniture d’un justificatif de domicile par la transmission d’informations permettant l’identification du demandeur auprès d’un fournisseur de prestations attachées à son domicile.
L’expérimentation proposée n’a pas d’impact sur la gestion de la délivrance des titres par les communes. Il s’agit seulement d’une simplification très mineure pour les usagers.
Si l’expérimentation vise à supprimer la fourniture d’un justificatif de domicile lors d’une demande de titre, les services chargés de l’instruction des titres continueront de vérifier le domicile déclaré par l’usager demandeur selon la procédure définie à l’article 23. Cette nouvelle manière de vérifier le domicile des demandeurs de titres n’empêchera pas toutes les fraudes, comme c’est d’ailleurs le cas aujourd’hui. En revanche, elle rendra inopérante la falsification des factures.
Je souhaite toutefois appeler votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur la contrainte que cette expérimentation fera peser sur les fournisseurs, en particulier les développements informatiques nécessaires à sa mise en place. Même si cette contrainte est limitée, elle suscite une certaine inquiétude. Une consultation approfondie des fournisseurs susceptibles d’être concernés par l’expérimentation préalable à sa mise en œuvre serait la bienvenue.
La commission est défavorable à l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Madame Delattre, vous posez trois questions importantes, qui vont me permettre de préciser la portée et l’intérêt du dispositif de simplification prévu par cet article et, je l’espère, de vous rassurer.
Vous abordez tout d’abord le sujet sous l’angle des éventuelles charges nouvelles qu’auraient à supporter les communes. Pour compléter les propos de Mme la rapporteur, je tiens à préciser que la disposition proposée constitue au contraire une mesure de simplification pour l’administration, puisque le dispositif de vérification automatique de l’adresse du demandeur, par le biais d’une interface avec le service des impôts ou un prestataire de services, devrait alléger le travail d’enregistrement du document réalisé aujourd’hui par les services municipaux pour les demandes de carte nationale d’identité ou de passeport.
Concrètement, l’agent de mairie n’aura plus besoin de scanner et d’enregistrer le justificatif de domicile dans le dispositif de recueil des demandes. Ensuite, ce sera aux seuls services de l’État compétents pour instruire les demandes de titres, c’est-à-dire les CERT, qui dépendent du ministère de l’intérieur, de vérifier l’existence et la régularité de la déclaration du domicile. Le dispositif sera plus simple pour l’usager, ainsi que pour les services municipaux, qui n’auront ainsi plus à manipuler de papier.
Par ailleurs, ce nouveau dispositif sera davantage sécurisé. Sur ce point, je souhaite également vous rassurer : l’usager devra toujours justifier de son domicile. Il le fera sous une forme différente et dans le but d’améliorer la lutte contre la fraude documentaire, puisqu’un certain nombre des documents au format papier qui sont à fournir font l’objet de falsifications, et ce dans des proportions relativement importantes. En dématérialisant la procédure, on élimine ce risque de falsification.
Enfin, le projet de loi prévoit explicitement que l’usager aura à fournir une information permettant son identification auprès d’un fournisseur d’un bien ou d’un service attaché à son domicile : cela peut être un numéro d’abonné ou un numéro de contrat, ce qui écarte des justificatifs qui ne permettaient pas d’apprécier ce lien jusqu’alors.
Au bénéfice de ces explications, je demande le retrait de l’amendement. À défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Madame Delattre, l’amendement n° 185 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nathalie Delattre. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.
Mme Dominique Vérien. On a décidé de retirer aux mairies, notamment à celles des communes rurales, la possibilité de délivrer des titres d’identité comme les cartes nationales d’identité. C’était pourtant le meilleur moyen de lutter contre la fraude : les services municipaux en zone rurale connaissent bien les habitants et savent si les demandeurs de titres habitent ou non dans la commune. En éloignant l’administration des citoyens, on se trouve obligé d’inventer de nouveaux dispositifs pour vérifier leur identité. C’est pourquoi je voterai cet amendement. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. Daniel Laurent. Bravo !
M. le président. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par Mme Procaccia, MM. Revet et Cuypers, Mme Lamure, MM. Détraigne, Bonne et Rapin, Mme Lopez, MM. B. Fournier, Savin et Pointereau, Mme Deromedi, MM. Genest et Darnaud, Mme Garriaud-Maylam, MM. Paccaud, Le Gleut et Dufaut, Mme Duranton, MM. Dallier, Bazin, Babary, Pierre et Lefèvre, Mmes Bories et Deroche et MM. Moga, Reichardt, Perrin et Gremillet, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le fournisseur est tenu de délivrer une attestation provisoire et doit assurer la vérification auprès du précédent titulaire du contrat avant l’établissement de toute pièce définitive de justificatif de domicile.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Nous avons évoqué à plusieurs reprises le sujet de la fraude, les documents dématérialisés, le problème des justificatifs de domicile et la question de l’interface avec les prestataires.
Monsieur le secrétaire d’État, je ne sais pas si vous avez déjà décroché votre téléphone pour tenter d’obtenir un justificatif auprès d’un prestataire, comme je l’ai moi-même fait récemment, mais je peux vous dire que c’est très simple ! J’ai téléphoné à un conseiller du service clients d’EDF depuis mon bureau pour l’informer que j’étais la nouvelle locataire d’un appartement et lui demander quelles étaient les démarches à suivre. Celui-ci m’a répondu qu’il n’y avait rien à faire pour obtenir mon contrat si ce n’est de lui communiquer le numéro du compteur électrique.
Or c’est ce type de justificatif de domicile dont se servent aujourd’hui les usagers pour obtenir leurs titres d’identité – je ne parle pas des régions où l’expérimentation sera menée –, leurs permis de conduire et tout un tas de prestations. Des squatteurs utilisent même ces documents où figure leur nom pour justifier l’occupation d’un logement.
Par cet amendement, nous proposons de sécuriser vraiment la procédure que vous souhaitez mettre en place, sans pour autant compliquer les démarches de la plupart des abonnés, qui sont de bonne foi ; nous demandons simplement que le prestataire effectue un minimum de vérifications.
Cela fait des années que nous évoquons cette question au Sénat en raison des nombreuses usurpations d’identité que l’on ne parvient pas à démontrer. On se bat actuellement pour que les quittances d’électricité ou de gaz qui servent de justificatifs de domicile soient sécurisées.
En 2014, EDF avait répondu à une question que j’avais posée au Gouvernement qu’il y aurait un code sur chaque facture à l’avenir, code qui sécuriserait l’attestation de contrat valant justificatif de domicile. Je demande aujourd’hui que les opérateurs procèdent à la vérification de la réalité du domicile et de l’installation de l’usager et qu’ils ne se contentent plus d’un simple appel téléphonique.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous invite, ainsi que vos services, à faire le test : vous verrez combien il est facile de prouver que vous habitez un appartement que vous n’habitez pas dans les faits. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Cet amendement a pour objet de contraindre les fournisseurs de biens et de services attachés au domicile à établir une attestation provisoire de domicile et à vérifier le changement de titulaire auprès du précédent titulaire du contrat à la même adresse.
Si je comprends bien l’objectif de sécurisation des justificatifs de domicile que vous défendez avec cet amendement, ma chère collègue, il ne me paraît pas pour autant envisageable de demander à des entreprises privées d’effectuer un tel travail de vérification, qui est du ressort des services instructeurs des demandes de titres.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement, d’autant plus que je ne suis pas tout à fait convaincu que celui-ci présente un lien direct avec le texte que nous examinons. (Murmures ironiques sur diverses travées.) En effet, l’article 23 porte sur la justification du domicile dans le cadre de l’instruction d’une demande de titre. Or vous faites plutôt référence, madame la sénatrice, aux obligations qui devraient incomber au fournisseur de services quand il conclut un contrat avec un particulier. Il nous semble que le lien entre votre amendement et le texte est un peu lointain.
Vous avez cependant raison quand vous dites que la vérification de l’adresse est importante. Le dispositif 2D-Doc, qui est un code-barres sécurisé visant à authentifier des documents utilisés par exemple par EDF, Bouygues Telecom ou encore Engie, mis en place par le Gouvernement il y a quelques années, a permis de limiter le risque de falsification des justificatifs.
Selon nous, le projet de loi se situe néanmoins à un autre niveau en prévoyant que l’usager délivre à l’administration une information qui favorise son identification auprès d’un fournisseur. Par conséquent, je le répète, le Gouvernement est défavorable à votre amendement, à moins que vous ne le retiriez.
M. le président. Madame Procaccia, l’amendement n° 13 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Vous vous doutez bien que je ne vais pas retirer mon amendement, d’autant que Mme la rapporteur vient d’indiquer que ce sont les services instructeurs des demandes de titres qui vérifieront les informations.
M. Pierre-Yves Collombat. Ils sont à plus de 500 kilomètres des individus qu’ils contrôlent !
Mme Catherine Procaccia. Or ces services se fondent justement sur des justificatifs de domicile qui ne sont absolument pas vérifiés. Dès lors qu’ils ne font pas l’objet d’une vérification, c’est toute la chaîne qui est affectée. Avec de tels mécanismes de simplification, on fait reposer la responsabilité des contrôles sur l’entreprise.
M. Laurent Duplomb. Elle a raison !
Mme Catherine Procaccia. Mais, dans les faits, aucune vérification n’est effectuée ! Je n’ai pas contacté tous les fournisseurs, mais j’ai pu l’observer à plusieurs reprises en téléphonant ou à l’occasion de déménagements : il suffit de donner son nom et un numéro de compteur – ce n’est pas très compliqué – pour obtenir une attestation de contrat dans les deux jours. Il suffit ensuite de régler sa première facture pour justifier d’un nouveau domicile. Ainsi, c’est toute la chaîne, y compris celle de l’usurpation d’identité, qui est concernée.
Le précédent gouvernement ne m’avait pas entendue ; j’espérais que celui-ci se pencherait davantage sur la question de la protection des individus, car c’est bien de cela qu’il s’agit ici !
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. J’apporte mon soutien à cet amendement, parce qu’il est de bon sens : on ne peut plus accepter que des procédures soient engagées à cause de documents qui permettent d’usurper l’identité d’autres usagers, comme un permis de conduire ou tout autre justificatif mentionnant une adresse en réalité fictive.
On impose des contraintes aux entreprises dans bien d’autres domaines. Pas plus tard que lundi dernier, je me trouvais dans une tranchée creusée par des employés de ma commune pour remplacer les canalisations des réseaux d’eau et d’assainissement. À cette occasion, une colonne de gaz a été endommagée, mais, heureusement, un système de clapet a permis d’éviter tout accident. Malgré tout, cela a déclenché un véritable branle-bas de combat : pour une colonne de gaz qui fait un centimètre et demi de diamètre, on a fait déplacer les pompiers et les services de Gaz de France ! On nous a également interdit de poursuivre le chantier, alors que la coupure de gaz ne concernait qu’une seule habitation ! On a dû retirer la pelle qui était là, et l’entreprise qui s’occupait du chantier n’a pas pu travailler pendant plus de vingt-quatre heures. C’est finalement une autre société agréée qui s’est substituée à l’entreprise en charge de la fourniture de gaz aujourd’hui et s’est occupée de réparer la colonne.
Dans certains secteurs, on est capable de créer tout un tas de contraintes pour les entreprises, mais, quand c’est simple et de bon sens, comme dans le cas qui nous occupe, on ne veut rien faire !
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. On a justifié la réorganisation des services chargés de l’instruction des demandes de titres par la nécessaire amélioration de la lutte contre les usurpations d’identité, qui constituent un véritable fléau. Sauf qu’en éloignant les services des usagers, en supprimant l’intervention des communes qui connaissent leurs habitants, on a fait en sorte que l’instruction se fasse désormais sur le fondement des documents fournis.
Notre collègue a raison : si les documents communiqués sont faux, le résultat est connu d’avance. Alors, je sais bien qu’il ne faut pas inquiéter EDF, mais bon ! Quand un usager fait une demande de pièce d’identité et qu’il fournit comme justificatif une attestation d’abonnement au service des eaux de sa commune, on la lui refuse ! Un justificatif d’EDF, en revanche, c’est sacré !
Nous sommes en plein délire, mes chers collègues ! En tout cas, il ne s’agit pas d’un faux problème.
Mme Catherine Procaccia. Merci !
M. Pierre-Yves Collombat. Nous allons voter cet amendement, parce qu’il y a beaucoup trop d’usurpations d’identité aujourd’hui. C’est d’ailleurs l’une des raisons officielles invoquées par le Gouvernement pour justifier la suppression des justificatifs de domicile, même si tout le monde sait que cette disposition vise aussi à réduire les effectifs des préfectures…
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Pascale Gruny, rapporteur. J’entends bien ce que vous dites. Simplement, on ne peut pas contraindre le fournisseur à effectuer ce contrôle. Ce n’est pas possible !
Mme Catherine Procaccia. Bien sûr que si !
Mme Pascale Gruny, rapporteur. L’adoption de cet amendement ne changera rien du tout. Il faut éviter d’aborder le sujet dans le cadre de ce projet de loi. Demandons plutôt à M. le secrétaire d’État de s’engager à trouver une solution. Sincèrement, il est parfaitement inutile d’introduire une telle mesure dans un texte que l’on critique justement parce qu’il contiendrait tout et n’importe et quoi !
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. C’est un appel à la raison !
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Mes chers collègues, je vous propose plutôt de suivre l’avis de la commission. (M. le président de la commission spéciale et Mme Patricia Schillinger applaudissent.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 23, modifié.
(L’article 23 est adopté.)
Article 23 bis
I. – À titre expérimental, pour les Français établis hors de France, une attestation de résidence, délivrée par un poste diplomatique ou consulaire, datée de moins de trois mois et dont les modalités de délivrance sont fixées par décret, se substitue à toute demande de justificatif de domicile ou de résidence pour les demandes de duplicata d’un permis de conduire français et pour les demandes de certificat d’immatriculation d’un véhicule détenu en France.
II. – Cette expérimentation est menée dans l’ensemble du réseau consulaire français pour une durée de dix-huit mois à compter de la publication des décrets prévus aux I et III du présent article. L’expérimentation fait l’objet d’une évaluation dont les résultats sont transmis au Parlement.
III. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
M. le président. La parole est à Mme Jacky Deromedi, sur l’article.
Mme Jacky Deromedi. Le 10 avril 2015, lors de l’examen de la loi Macron, j’ai présenté un amendement relatif au permis de conduire des Français de l’étranger. Cet amendement a été adopté à l’unanimité par la Haute Assemblée, avec avis favorable de la commission spéciale, avis émis à l’époque par notre collègue Dominique Estrosi Sassone.
Mon amendement s’inspirait d’une résolution adoptée en mars 2015 par l’Assemblée des Français de l’étranger sur le rapport de notre collègue Ronan Le Gleut, alors conseiller à l’AFE. Cette résolution préconisait de permettre aux postes consulaires de délivrer des duplicatas de permis de conduire en cas de vol ou de perte des relevés d’informations restreints, ainsi que des permis de conduire internationaux. Elle demandait une simplification de la procédure de rétablissement des droits à conduire pour les Français qui ont été titulaires d’un permis de conduire français et qui reviennent en France.
L’AFE demandait également que les échanges réciproques de permis de conduire soient favorisés, notamment dans les États ou provinces de pays fédéraux, et que l’échange du permis moto soit étendu quand l’échange du permis voiture existe déjà. Enfin, elle demandait qu’un fascicule d’information et une rubrique du site internet du ministère des affaires étrangères abordent tous les cas de figure et soient régulièrement mis à jour.
M. Emmanuel Macron, alors ministre de l’économie, m’avait répondu ici même qu’il était favorable à cet amendement, mais qu’il préférait régler la situation par décret. Il s’était alors engagé à publier le décret avant le mois de juillet. Il s’était aussi engagé à faire réaliser des études sur la compatibilité de plusieurs mesures qui figuraient dans mon amendement avec le droit européen. Il m’avait assuré que, si cette compatibilité était reconnue, il corrigerait le projet de décret alors en cours d’examen par ses services. Je suis intervenue à plusieurs reprises auprès de lui pour obtenir la parution du décret, lequel a finalement été publié, mais ne couvre pas toutes les situations.
L’article 23 bis adopté par l’Assemblée nationale, opportunément amendé par notre commission spéciale, démontre que toutes les demandes de nos compatriotes n’ont pas encore été satisfaites. Cet article contribue à faire un pas de plus ; je ne peux que l’approuver, puisque j’ai moi-même réclamé ces mesures avec mes collègues sénateurs des Français de l’étranger, dont Richard Yung, qui a soutenu mon amendement à l’époque.
J’ai toutefois un regret à propos de l’article 23 bis. Il s’agit d’une mesure expérimentale, alors que nos compatriotes expatriés attendent une mesure définitive depuis des décennies. L’expérimentation doit durer dix-huit mois ; elle aurait même pu durer moins longtemps si notre commission n’en avait pas précisé le point de départ. J’espère que le gouvernement en fonction dans dix-huit mois aura la sagesse de pérenniser cet article et même d’aller plus loin. Je salue néanmoins cette nouvelle avancée pour laquelle je voterai. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)