M. le président. La parole est à M. Yves Bouloux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Yves Bouloux. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est avec satisfaction que je m’exprime aujourd’hui devant vous.
Cette satisfaction, c’est d’abord celle d’un élu local : maire de Montmorillon et président de communauté de communes pendant dix ans, j’ai pu constater à quel point la pénétration des nouvelles technologies de l’information et de la communication est un travail de longue haleine. Dans mon département de la Vienne, les deux pôles urbains, Poitiers et Châtellerault, développent la fibre, mais pour le reste du territoire, le très haut débit est encore un espoir trop lointain. C’est pourquoi cette satisfaction, c’est aussi celle du jeune parlementaire – tout est relatif (Sourires.) – à qui il est donné l’occasion de venir en aide aux collectivités territoriales. En effet, cette proposition de loi présente une vertu cardinale que chacun peut reconnaître : son aptitude à protéger les élus et les collectivités territoriales.
Pour ceux qui en douteraient encore, toute la logique du texte, ou au moins son postulat de départ, c’est la nécessité de favoriser « le déploiement d’une seule boucle locale optique mutualisée, ou BLOM, dans les zones moins denses ». Dit plus simplement, il s’agit de protéger les réseaux publics installés en zone rurale d’une concurrence privée à laquelle ils ne survivraient pas. Je ne m’attarderai pas sur la nécessité de cette protection, mais je crois utile de rappeler quelques principes, la répétition étant la meilleure pédagogie.
Les réseaux d’initiative publique ne se sont pas faits en un jour. Nous devons leur existence à la loi du 21 mai 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, qui donna enfin aux collectivités territoriales une compétence en matière d’aménagement numérique.
Toutefois, pour créer un réseau, il ne faut pas simplement en avoir le droit. Il faut constater une insuffisance d’initiatives privées par l’intermédiaire d’un appel d’offres déclaré infructueux, il faut garantir l’utilisation partagée des infrastructures, il faut respecter le principe d’égalité et de libre concurrence, tout cela dans des conditions objectives, transparentes, non discriminatoires et proportionnées. Il faut bien sûr respecter l’ensemble des droits et obligations régissant l’activité d’opérateur de télécommunications, notamment la séparation avec l’entité chargée de l’octroi des droits de passage. Enfin, il faut remplir toutes les obligations relatives au régime de subvention.
Parmi toutes ces règles, il faut rappeler que la création d’un réseau public est subordonnée à l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales : « L’insuffisance d’initiatives privées est constatée par un appel public à manifestation d’intentions déclaré infructueux ayant visé à satisfaire les besoins […] des utilisateurs… » Autrement dit, les réseaux d’initiative publique doivent leur existence à l’inexistence de l’offre privée. Pour cette raison, et je pourrais dire pour cette unique raison, il est essentiel que nous protégions les collectivités et toutes les formes juridiques sui generis qui ont souhaité investir. Ce sont ces investissements qui assurent l’égalité entre nos concitoyens.
Pour être complet, j’ajoute que cette proposition de loi ne protège pas uniquement les investissements des collectivités territoriales, elle protège également les investissements de l’État, puisque celui-ci a aussi mis la main à la poche. Il faut rappeler que, sur les 6,5 milliards d’euros de subventions publiques destinées aux réseaux d’initiative publique, 3,3 milliards d’euros proviennent de subventions de l’État, selon les chiffres de 2017. Il serait donc étonnant que l’État donne d’une main des financements et que, de l’autre, il ne crée pas les conditions législatives pour les sécuriser.
Il est donc impératif que le législateur se saisisse de la question et donne enfin à l’ARCEP les moyens de réguler l’offre en infrastructures dans les zones les plus fragiles. Nous ne pouvons pas abandonner des territoires, des collectivités et des élus qui se battent depuis des années pour résorber la fracture numérique au moment critique où nous apprenons que certains opérateurs veulent concurrencer les RIP là où il y a le plus de prises raccordables.
Je profite de cette intervention pour faire amende honorable auprès de l’auteur de la proposition de loi, Patrick Chaize, et de la rapporteur, Marta de Cidrac : le temps dont je dispose ne me permet pas d’évoquer l’ensemble des dispositions de cette riche proposition de loi ni même les nombreux ajouts de notre rapporteur en commission – beaucoup, d’ailleurs, a déjà été dit –, mais je sais que notre assemblée aujourd’hui réunie ne doute ni de leur compétence ni de leur volontarisme. Devant le retard désolant de notre pays, au seizième rang en Europe pour l’accès au numérique, cette initiative contribuera assurément à redorer le blason de la France, pour le développement de tous les territoires au service de l’ensemble de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à insister sur un premier point : l’urgence est là, et l’impatience, nous la partageons. Depuis ma nomination à ce poste voilà huit mois, je peux vous dire que, sur le haut de la pile des nombreux dossiers que nous avons à traiter avec Jacques Mézard, le numérique est certainement celui qui a la plus grande priorité. Toutes celles et tous ceux avec lesquels nous travaillons au quotidien peuvent en témoigner.
Au-delà de cette détermination, comme l’a dit M. le sénateur Fouché, une approche vraiment différente a été opérée dans la gestion du dossier du numérique. Je ne citerai qu’un exemple : l’accord du mois de janvier que nous avons scellé avec les opérateurs part pour la première fois du principe selon lequel les enchères en matière de téléphonie auront un enjeu non pas budgétaire, mais lié à l’aménagement du territoire. C’est une modification majeure dans la gestion de ce dossier.
Cela fait des années que les accords s’enchaînent sans qu’on réfléchisse au moyen de rendre les engagements des différents opérateurs contraignants. Ces nouvelles obligations seront transcrites dans les autorisations d’utilisation de fréquences des opérateurs. J’y insiste, car c’est l’une des preuves, parmi bien d’autres, qui montrent que nous essayons d’agir différemment pour aller plus vite.
Comment fait-on pour aller plus vite ? Nous n’avons pas de baguette magique, mais nous disposons de trois moyens d’action.
Le premier, c’est l’augmentation des investissements, qu’il s’agisse de l’argent public de l’État et des collectivités ou de l’argent des investisseurs privés. On évoquait tout à l’heure un certain nombre de déclarations tonitruantes émanant d’opérateurs. Il faut les canaliser, les encadrer, mais il faut aussi se féliciter de la volonté de ces opérateurs d’injecter de l’argent dans le déploiement du numérique.
Le deuxième moyen, c’est la transparence. Monsieur le président de la commission, je viendrais avec plaisir, je m’y engage, tous les six mois ou au rythme que vous déciderez, vous tenir informés de l’ensemble de ces engagements. Ces engagements seront également rendus publics via les observatoires que j’évoquais précédemment.
La transparence est essentielle. Il n’est pas possible de dire que 98,8 % de la population est bien couverte en téléphonie mobile, alors que, lorsque vous les rencontrez, nos concitoyens se plaignent d’une mauvaise réception.
Enfin, le troisième moyen, essentiel à mes yeux – c’est tout l’enjeu de la proposition de loi –, c’est de faire en sorte que les engagements soient contraignants et non pas de simples promesses qu’on ferait la main sur le cœur. Il existe trois cas de figure différents.
Le premier, ce sont les réseaux d’initiative publique. Les RIP présentent l’avantage d’être des engagements contractuels. Si un opérateur ne donne pas satisfaction, il encourt des pénalités.
Le deuxième cas de figure est celui des zones urbaines très denses, c’est-à-dire des grandes villes. Là, il n’est pas nécessaire de prévoir des engagements contraignants, car c’est tellement rentable que tout le monde se jette dessus.
Enfin, la zone AMII, que nombre d’entre vous ont mentionnée, pose un vrai problème. Jusqu’à présent, il y avait des desiderata, des engagements, mais sans force contraignante. Depuis plusieurs mois, nous discutons avec les opérateurs pour que les engagements, y compris passés, puissent être contraignants, en utilisant l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques. Comme je l’ai déjà indiqué, nous sommes dans la phase finale des discussions. Les propositions des opérateurs sont envoyées en ce moment à l’ARCEP, qui prendra une position dans une quinzaine de jours, et seront ensuite rendues totalement publiques. Il est essentiel d’envisager les cas les uns après les autres pour voir comment tous ces engagements peuvent être contraignants.
Encore une fois, pour aller plus vite, il n’y a que trois possibilités : l’investissement, le choc de transparence, et, enfin, des engagements contraignants, car c’en est fini de la bonne foi ; il faut vraiment que chacun assume ses responsabilités jusqu’au bout.
M. le président. La discussion générale est close.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je vous rappelle que je dois suspendre la séance dans cinquante minutes. Si nous n’avons pas achevé l’examen de ce texte d’ici à dix-sept heures, nous devrons reprendre nos travaux à vingt et une heures.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi tendant à sécuriser et à encourager les investissements dans les réseaux de communications électroniques à très haut débit
TITRE Ier
SÉCURISATION DES INVESTISSEMENTS RÉALISÉS OU PROJETÉS DANS LES RÉSEAUX DE COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES
Article 1er
Le I de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Le d est complété par les mots : « et les modalités de prise en compte de l’existence ou de l’établissement projeté de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final » ;
2° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sont considérés comme projetés au sens du d du présent I les établissements de lignes figurant sur la liste arrêtée par le ministre chargé des communications électroniques en application de l’article L. 33-13. »
M. le président. La parole est à M. Alain Duran, sur l’article.
M. Alain Duran. Je profite de la discussion de ce texte pour rappeler que le cadre du déploiement des réseaux en fibre optique, qui a été posé dans notre pays voilà sept ans, a laissé aux opérateurs, cela a été dit, le choix d’investir dans les zones correspondant à leurs critères de rentabilité, les fameuses zones AMII. De fait, on n’a pas considéré la couverture numérique comme une véritable mission de service public à remplir par les opérateurs. La couverture du reste des territoires, c’est-à-dire des zones peu rentables, car moins denses – vous aurez reconnu les zones rurales –, a été laissée à l’initiative publique via les réseaux d’initiative publique, les RIP.
Ce choix politique continue de porter préjudice à une part très importante de nos territoires et des citoyens qui y habitent. Malgré tout, les collectivités hors zones AMII l’assument, à travers des investissements très importants pour apporter la couverture du réseau de fibre optique à domicile à tous leurs administrés.
Dans mon département, l’Ariège, que vous avez visité il y a quelques jours, monsieur le secrétaire d’État, le coût du chantier de déploiement du réseau de très haut débit pour ce projet de RIP est estimé à 120 millions d’euros. Le département, à lui seul, s’apprête à rembourser 1 million d’euros par an pendant vingt-trois ans.
Pourtant, aucune mesure contraignante ne permet aujourd’hui d’éviter le déploiement d’un réseau concurrent à un RIP. Si la sécurité des investissements publics venait à être remise en cause par l’ouverture d’investissements privés dans des zones préalablement laissées au RIP, cela constituerait une double peine.
Je tiens dès lors à profiter de cette prise de parole pour saluer l’esprit de cette proposition de loi portée par notre collègue Patrick Chaize : permettre le maintien d’un équilibre entre tous les acteurs du secteur, mieux contrôler le déploiement sur nos territoires et permettre la réalisation des réseaux dont nos administrés ont tant besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. L’amendement n° 15, présenté par Mme de Cidrac, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer la référence :
L. 33-13
par la référence :
L. 33-14
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Marta de Cidrac, rapporteur. Il s’agit simplement d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 6, présenté par M. Schmitz, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et ceux figurant dans les plans de déploiement décrits dans les conventions conclues entre un opérateur et une ou plusieurs collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales, pour autant que ces conventions prévoient le prononcé de sanctions en cas de non-respect de ses engagements par ledit opérateur
La parole est à M. Alain Schmitz.
M. Alain Schmitz. Cet amendement tend à compléter le dispositif proposé au 1° de l’article 1er, dont l’objet est de limiter la superposition inorganisée de réseaux de fibre optique.
Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 4 de l’article 1er de la proposition de loi ne vise, par renvoi à l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques, que les engagements de déploiement souscrits par les opérateurs auprès du ministre chargé des communications électroniques après avis de l’ARCEP. Se trouvent de facto exclus les déploiements auxquels, dans des cadres juridiques divers, des opérateurs se sont engagés directement auprès de collectivités territoriales, alors même que ces engagements sont assortis de sanctions en cas de non-respect.
Il apparaît nécessaire d’inclure ces engagements, et ce pour trois raisons.
La première est de ne pas défavoriser les opérateurs qui ont fait l’effort de s’engager localement, là où leurs concurrents avaient jusqu’alors délaissé des zones par nature peu denses et donc peu rentables ; mécaniquement, ne pas tenir compte de ces engagements placerait les opérateurs ayant pris des engagements au titre de l’article L. 33-13 du code des postes et communications électroniques dans une situation injustement et, selon nous, illégalement protectrice au regard du droit de la concurrence, puisque la loi organiserait ainsi un marché asymétriquement régulé.
La deuxième raison est d’assurer une prise en compte des actions menées par les collectivités territoriales au titre de leurs compétences en matière d’aménagement numérique des territoires, ce que traduisent ces conventions locales d’engagement de déploiement.
Enfin, la troisième raison est de rendre ces conventions locales opposables au titre du 1° de l’article 1er de la proposition de loi, ce qui évitera la redondance de réseaux sur les zones considérées et incitera par là même les opérateurs à adresser des zones dépourvues de tout engagement de déploiement, favorisant ainsi une couverture plus rapide de l’ensemble de notre territoire national.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteur. Cet amendement vise à mentionner à l’article 1er les conventions conclues entre collectivités territoriales et opérateurs pour les déploiements du réseau en fibre optique.
En réalité, l’article 1er se borne à renvoyer à la liste créée par l’article 2 et qui a vocation à être un document intégrateur. L’amendement de coordination que nous venons d’adopter permet d’éviter tout malentendu à ce titre, en faisant référence au nouvel article L. 33-14 du code des postes et des communications électroniques, et non à l’article L. 33-13. Le présent amendement n’est donc pas nécessaire.
La question du périmètre de la liste sera, quant à elle, examinée lorsque nous en viendrons à l’article 2, qui fait l’objet de plusieurs propositions d’amendements, notamment de la part de notre collègue Alain Schmitz. Nous suggérons donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour une raison différente de celle de la commission : cet amendement va dépendre des articles 20 à 22 du code européen, qui est en cours d’élaboration.
En outre, j’y insiste, à la fin des fins, l’acteur décisionnaire reste le donneur d’ordre, à savoir la collectivité. Si notre action vise à faire en sorte que tout se passe bien, n’oublions pas de toujours remettre la collectivité au centre du dispositif.
M. le président. Monsieur Schmitz, l’amendement n° 6 est-il maintenu ?
M. Alain Schmitz. Compte tenu de ce que vient de dire M. le secrétaire d’État et de ce qu’a proposé Mme la rapporteur, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 6 est retiré.
Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par Mmes Dindar et Malet et MM. Dennemont et Lagourgue, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La continuité numérique territoriale est un principe de service public destiné à assurer une qualité et un coût des communications électroniques dans les départements d’outre-mer au moins équivalent à ceux proposés dans la moyenne des départements métropolitains. Ce principe est assuré par la compensation des handicaps dus aux surcoûts liés à l’éloignement ou à l’étroitesse des marchés, ainsi que par toute mesure législative ou réglementaire visant à assurer des conditions loyales de concurrence. Il est motivé par le respect du principe d’égalité entre tous les citoyens français, mais également par l’objectif de développement économique par les services liés aux technologies de l’information et de la communication.
La parole est à Mme Viviane Malet.
Mme Viviane Malet. Cet amendement, initialement déposé par la sénatrice de La Réunion, Nassimah Dindar, retenue cet après-midi par un rendez-vous à l’extérieur, est de bon sens, puisqu’il prévoit d’imposer par tous les moyens le principe de la continuité numérique entre la France métropolitaine et les départements d’outre-mer, non seulement pour des questions d’égalité de traitement, mais également pour des impératifs de développement économique.
La continuité numérique territoriale est un principe de service public destiné à assurer une qualité et un coût des communications électroniques dans les départements d’outre-mer au moins équivalents à ceux qui sont proposés dans la moyenne des départements métropolitains. Or, dans les départements d’outre-mer, le rapport qualité-prix de l’internet est inférieur à celui de la France métropolitaine. Pourtant, il n’existe techniquement aucune raison à cet état de fait.
À titre d’exemple, une rapide recherche sur des offres en fibre du plus grand opérateur français, Orange, nous montre une différence de 30 % en moyenne : les trois principales offres mensuelles en métropole s’élèvent à 42 euros, 48 euros et 56 euros, alors que les trois principales offres à La Réunion sont, par mois, de 55 euros, 65 euros et 75 euros. Pourquoi, monsieur le secrétaire d’État, une telle disparité entre la métropole et La Réunion ? Je compte sur votre sens de l’équité pour remédier à cet état de fait.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marta de Cidrac, rapporteur. Cet amendement définit un principe général de continuité numérique territoriale en faveur des outre-mer, pour assurer une qualité et un coût des communications électroniques dans les départements d’outre-mer au moins équivalents à ceux qui sont proposés dans la moyenne des départements métropolitains.
Bien sûr, nous partageons les préoccupations et les objectifs de notre collègue. Toutefois, la formulation très générale de l’amendement nous paraît peu opérationnelle et crée de réelles incertitudes sur sa portée exacte. Compte tenu de sa formulation, nous l’avons lu davantage comme un amendement d’appel. À ce titre, nous en suggérons le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le Gouvernement a le même avis que la commission.
J’en profite pour vous dire que la mobilisation du Gouvernement, à travers le plan France très haut débit, en faveur des outre-mer est très forte. Plus de 150 millions d’euros ont été engagés ou sont sur le point de l’être – 40 millions d’euros sont en cours de finalisation avec la Guyane. En outre, beaucoup d’autres actions sont entreprises, qui ne sont pas d’ordre financier.
Je reviens de Saint-Martin – j’ai atterri il y a quelques heures –, où j’ai travaillé à la remise en état des réseaux numériques et de téléphonie mobile. Sur l’île, il y a par exemple la problématique des nouvelles fréquences pour les boucles locales radio que l’ARCEP vient d’octroyer. Comme vous le voyez, la mobilisation du Gouvernement est totale.
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Pour soutenir cet amendement, j’aimerais apporter un témoignage très bref.
Lorsque M. le secrétaire d’État affirme la mobilisation du Gouvernement, je veux bien le croire. Reste que la Guadeloupe – c’est vrai aussi pour Saint-Martin, La Réunion et Saint-Barthélemy – a dû investir à l’époque 30 millions d’euros, avec très peu d’aides de l’État et de l’Europe, pour être reliée à Porto Rico, à Miami et à l’Europe. Elle a ensuite dû faire la même chose pour être reliée au plateau des Guyanes, en Amérique latine. Une branching unit a permis de réaliser la liaison entre Saint-Martin et Porto Rico, qui a coûté 1 million d’euros à la collectivité.
Aujourd’hui, il n’y a pas d’égalité numérique dans les outre-mer. Je prendrai un seul exemple : après la liaison maritime, la couverture terrestre en fibre optique coûte maintenant 183 millions d’euros en deux tranches. Or l’État n’a donné que 19 millions, tout comme l’Europe. Il faut trouver le reste !
Il faut véritablement répondre, peut-être par une autre rédaction, à cette demande de continuité numérique, qui correspond à un besoin de services publics. (M. Marc Daunis et Mme Nelly Tocqueville applaudissent.)
M. le président. Madame Malet, l’amendement n° 3 rectifié est-il maintenu ?
Mme Viviane Malet. Nous proposerons une prochaine fois cet amendement, modifié, mais pour l’heure nous le retirons.
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié est retiré.
Article 2
La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre II du code des postes et des communications électroniques est complétée par un article L. 33-14 ainsi rédigé :
« Art. L. 33-14. – Le ministre chargé des communications électroniques arrête, au vu d’un recensement des engagements pris par les opérateurs sur la base de consultations formelles établi par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, la liste des opérateurs ainsi que des collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales autorités organisatrices du service public local des communications électroniques mentionné à l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales qui, sur le territoire de chaque établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, ont en charge l’établissement de lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, au point de mutualisation et en aval du point de mutualisation, permettant de desservir les utilisateurs finals.
« Les zones très denses identifiées par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en application de l’article L. 38-4-3 du présent code ne sont pas prises en compte dans la liste mentionnée au premier alinéa du présent article.
« La liste mentionnée au même premier alinéa précise le calendrier prévisionnel du déploiement des lignes dont l’établissement n’est pas achevé sur la base des engagements souscrits par les opérateurs auprès du ministre chargé des communications électroniques en application de l’article L. 33-13 du présent code et des schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique prévus à l’article L. 1425-2 du code général des collectivités territoriales ou, à défaut et le cas échéant, des projets déposés dans le cadre du plan “France très haut débit”.
« Le projet de liste mentionnée au premier alinéa du présent article est soumis pour avis à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. L’avis de l’autorité est rendu public et la liste ne peut être arrêtée par le ministre chargé des communications électroniques avant l’expiration d’un délai d’un mois à compter de cette publication.
« L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes contrôle le respect du calendrier de déploiement fixé par la liste mentionnée au même premier alinéa ainsi que de la répartition entre opérateurs et collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales qui en découle. Elle peut être saisie et sanctionne les manquements constatés dans les conditions prévues à l’article L. 36-11. Le fait, pour un opérateur, de procéder à un déploiement sur le territoire d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont a la charge une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales en application de la liste mentionnée au premier alinéa du présent article, sans l’accord de cette collectivité ou de ce groupement, est assimilé à un manquement au sens du présent article. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 12 rectifié bis est présenté par M. Lafon, Mme Dindar, MM. Kern, Luche, Détraigne et Laugier, Mmes Billon et Vullien, MM. Bonnecarrère, Cigolotti et Médevielle, Mmes Gatel et Létard et M. Canevet.
L’amendement n° 13 est présenté par M. Lalande.
L’amendement n° 14 est présenté par Mme Procaccia.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Après le mot :
denses
insérer les mots :
hors les poches de basse densité,
La parole est à M. Laurent Lafon, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié bis.