M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mon cher collègue, avec cet amendement, vous insistez sur un sujet de préoccupation majeur, et sur un problème qui va s’amplifier au cours des années à venir avec le départ à la retraite de nombreux praticiens de santé.
Ces difficultés existent déjà dans les zones rurales. Désormais, elles gagnent certaines zones urbaines. Je m’adresse à vous, monsieur le secrétaire d’État, en votre qualité d’ancien président de l’association des petites villes de France.
La désertification médicale devient donc de plus en plus importante, et il est vrai que le zonage en vigueur n’est pas toujours pertinent, entre les zones à surveiller, les zones blanches, les zones rouges : on n’atteint pas toujours l’effet escompté pour la construction des maisons médicales.
À mon sens, les dispositions de cet amendement sont pertinentes. Leurs auteurs considèrent, à juste titre, qu’il vaut mieux prévenir que guérir : si l’on attend que l’offre de soins devienne gravement insuffisante pour construire des maisons de santé dans un territoire, il sera trop tard pour agir. Il faut construire de telles structures lorsqu’il est encore possible d’intervenir.
Toutefois, compte tenu du faible temps dont la commission a disposé pour examiner les amendements, nous n’avons pu mesurer l’impact budgétaire d’une telle mesure. C’est la raison pour laquelle je souhaite entendre le Gouvernement sur ce point.
À cette réserve près, la commission voit cet amendement d’un bon œil. Je le répète, aujourd’hui, la situation est déjà préoccupante ; demain, elle risque fort de devenir catastrophique !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Monsieur de Legge, le plan de lutte contre les déserts médicaux a été présenté tout récemment, et la plupart des associations d’élus locaux ont salué les efforts accomplis à ce titre.
Vous souhaitez élargir le bénéfice du FCTVA aux territoires considérés comme étant à surveiller. Mais cette proposition soulève deux difficultés. Premièrement, le zonage en question n’est pas nécessairement le plus stabilisé. Deuxièmement, il s’agirait, pour l’État, d’une dépense qui dépendrait du niveau d’investissement des collectivités : l’évaluation de cette charge est donc particulièrement difficile.
Cela étant, à l’heure actuelle, le FCTVA est ouvert aux collectivités territoriales qui investissent dans des maisons de santé, si elles figurent dans les zones classées en désertification médicale, parmi les territoires ruraux de développement prioritaires ou dans les zones de revitalisation rurale.
Si la connaissance que j’ai de la carte des risques de désertification médicale est encore actuelle, les ZRR et les zones considérées comme des territoires ruraux de développement prioritaires couvrent largement les zones susceptibles d’être classées au nombre des territoires à surveiller.
Le dispositif actuel nous paraît donc suffisamment efficace ; en tout cas, compte tenu de sa solidité, nous ne pouvons pas soutenir votre proposition, dont – je le répète –, l’impact financier pose des difficultés d’évaluation.
Voilà pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur de Legge, l’amendement n° I-398 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique de Legge. Je regrette, monsieur le secrétaire d’État, de devoir maintenir cet amendement, mais vous m’avez convaincu qu’il fallait le faire. Vous avez commencé par me dire que c’était un très bon amendement, puisqu’il se situait dans le prolongement du plan de lutte contre les déserts médicaux mis en place par le Gouvernement. Vous avez aussitôt ajouté que, dans le cadre de ce plan, vous étiez tout à fait favorable à la demande des associations d’élus d’avancer dans le sens de ce que je propose ici, c’est-à-dire vers l’éligibilité au Fonds de compensation pour la TVA.
Compte tenu de cette explication, je suis convaincu que vous trouvez cet amendement excellent ! Toutefois, il vous arrive parfois de changer d’avis et de ne pas exprimer le fond de votre pensée ; je vais donc le faire à votre place et affirmer que c’est un très bon amendement. Je suis sûr que, s’il avait été présenté à l’Assemblée nationale il y a quinze jours, vous l’auriez voté ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Nous allons soutenir cet amendement des deux mains. Nous avons déjà rencontré beaucoup de difficultés à nous faire entendre sur les questions de démographie médicale durant la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Dans les départements qui anticipent, les difficultés sont très nombreuses, cet amendement va donc dans le bon sens. Au pire, il fera double emploi avec ce qui existe déjà. Ce n’est pas très grave : en l’espèce, mieux vaut prévenir que guérir, et, dans l’hypothèse où une zone ne serait pas couverte, son adoption y remédierait. Nous allons donc le voter.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° I-331 est présenté par MM. Guené et Raynal.
L’amendement n° I-558 rectifié bis est présenté par MM. Retailleau, Allizard, Babary, Bansard, Bas et Bazin, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, M. Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet, J.M. Boyer et Brisson, Mme Bruguière, MM. Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cardoux et Carle, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon et Chatillon, Mme Chauvin, MM. Chevrollier, Cornu, Courtial, Cuypers, Dallier et Danesi, Mme L. Darcos, MM. Darnaud et Daubresse, Mme de Cidrac, MM. de Legge, de Montgolfier, de Nicolaÿ et del Picchia, Mme Delmont-Koropoulis, M. Dériot, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, M. Dufaut, Mme Dumas, M. Duplomb, Mme Duranton, M. Émorine, Mmes Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, MM. Forissier, B. Fournier, Frassa et Frogier, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles et Ginesta, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet, Grosdidier et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Houpert, Hugonet, Huré et Husson, Mmes Imbert et M. Jourda, M. Joyandet, Mme Keller, MM. Kennel et Laménie, Mmes Lamure, Lanfranchi Dorgal et Lassarade, MM. Laufoaulu, D. Laurent, Le Gleut, Lefèvre, Leleux, Leroux et H. Leroy, Mme Lherbier, M. Longuet, Mme Lopez, M. Magras, Mme Malet, MM. Mandelli et Mayet, Mme M. Mercier, M. Meurant, Mme Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nachbar, Nougein, Paccaud, Panunzi, Paul, Pellevat, Perrin, Piednoir, Pierre, Pillet, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, M. Priou, Mmes Procaccia, Puissat et Raimond-Pavero, MM. Raison, Rapin et Reichardt, Mme Renaud-Garabedian, MM. Revet, Saury, Savary, Savin, Schmitz, Sido et Sol, Mmes Thomas et Troendlé et MM. Vaspart, Vial et Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est institué, à compter de 2018, un prélèvement sur les recettes de l’État destiné à soutenir les communes vulnérables. Son montant s’élève à 36 millions d’euros.
II. – Le montant prévu au I est réparti chaque année entre les communes bénéficiaires, l’année de répartition, d’une attribution au titre de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale prévue à l’article L. 2334-15 du code général des collectivités territoriales ou de la dotation de solidarité rurale prévue à l’article L. 2334-20 du même code, en proportion des attributions perçues au titre de ces dotations cette même année.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Claude Raynal, pour présenter l’amendement n° I-331.
M. Claude Raynal. Cet amendement est présenté par les rapporteurs spéciaux de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », M. Charles Guené et moi-même. Dans notre rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2018, nous avons relevé que les crédits de la dotation d’action parlementaire, dite « réserve parlementaire », destinés aux collectivités territoriales en 2017 n’ont pas été entièrement redéployés.
Ces crédits s’élevaient à 86 millions d’euros en 2017, dont 45 millions d’euros provenant de la dotation des sénateurs et 41 millions d’euros de celle des députés.
Sur le total de 86 millions d’euros, 50 millions ont été reconduits pour abonder la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR.
Nous n’entendons pas recréer la dotation d’action parlementaire, puisqu’elle a été supprimée par le Gouvernement en raison de ses modalités d’attribution. En revanche, son utilité pour soutenir les territoires n’a pas été contestée.
C’est pourquoi le présent amendement tend seulement à rétablir les 36 millions d’euros manquants en proposant de les cibler sur les territoires particulièrement vulnérables, ceux qui sont éligibles à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, la DSU, ou à la dotation de solidarité rurale, la DSR.
Son adoption conduirait à majorer de 1 % les crédits de chacune de ces dotations.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l’amendement n° I-558 rectifié bis.
M. Philippe Dallier. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ces deux amendements sont bienvenus ; le Gouvernement devrait y être favorable, dans la mesure où l’Assemblée nationale a voté un amendement tendant à abonder les crédits de la mission « Sports, jeunesse et vie associative » pour compenser la suppression de la dotation d’action parlementaire relative aux associations.
Le Sénat portait, très majoritairement, une appréciation nuancée sur cette dotation et en concentrait largement le bénéfice – presque exclusivement pour certaines travées – sur les collectivités, en particulier sur les plus petites d’entre elles. Ces crédits constituaient ainsi un soutien indispensable à l’investissement des petites communes. Il utilisait peu, en revanche, la possibilité d’affecter une partie de cette dotation aux associations.
L’Assemblée nationale a donc rétabli des crédits en faveur de la vie associative ; en votant ces amendements, nous agirons symétriquement en abondant les crédits destinés au soutien de l’investissement public local, particulièrement dans les petites communes.
Ces deux amendements visent donc simplement à rétablir les 36 millions d’euros de crédits manquants, autrefois octroyés à travers la dotation d’action parlementaire, en les destinant aux communes qui en ont le plus besoin, celles qui sont éligibles à la DSU ou à la DSR.
Si nous ne les adoptions pas, il y aurait un trou dans le dispositif et nous prendrions un risque quant à l’investissement local. Le débat sur la dotation d’action parlementaire appartient au passé, mais le risque existe que des communes, souvent les plus petites, rencontrent des difficultés pour financer leurs projets. En rétablissant ces 36 millions d’euros, nous corrigeons donc une injustice.
Dans la mesure où le Gouvernement a laissé adopter le pendant de cet amendement concernant les associations, il devrait voir cette proposition d’un bon œil.
Mes chers collègues, je vous demande donc de soutenir ces deux amendements, sur lesquels la commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. J’ai le pressentiment que ces amendements vont être adoptés, quel que soit l’avis que je m’apprête à formuler !
M. Philippe Dallier. C’est bien possible !
M. Dominique de Legge. Quelle perspicacité !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je le pense, en effet.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Partons du principe que l’arbitrage du Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Tout d’abord, pour la première année depuis cinq ans, la dotation globale de fonctionnement, la DGF, est stable. C’est une avancée. J’assume mes responsabilités dans le fait qu’elle a baissé durant les quatre années précédentes, puisque j’étais alors membre de la majorité présidentielle qui a voté ces dispositions.
Ensuite, la DSU et la DSR progressent effectivement de 180 millions d’euros. Je l’ai dit auparavant, c’est une progression notable, mais moins forte que celle des années précédentes, parce qu’une progression aussi importante aurait emporté des conséquences sur les variables d’ajustement que nous avons évoquées précédemment.
Enfin, en écho aux propos du rapporteur général, je précise que l’Assemblée nationale a voté un amendement permettant d’affecter 25 millions d’euros à la vie associative, non pas en compensation de la réserve parlementaire, dont vous avez rappelé à juste titre qu’elle avait été supprimée par la loi organique, mais pour continuer à aider les associations. Nous avions également adopté un autre amendement afin d’ajouter à la DETR 50 millions d’euros qui étaient affectés à des contrats de modernisation et donc soumis à des conditions d’économies en dépenses de fonctionnement, considérant qu’ainsi, l’aide à l’investissement serait plus directe.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable, même si j’ai bien compris dans quel sens votera votre assemblée.
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.
Mme Christine Lavarde. Je m’abstiendrai sur ces amendements, parce que, si l’on ne peut être opposé à l’augmentation de l’enveloppe visant à réallouer aux territoires ce que prévoyait l’ancien système, les modalités de reversement ne sont plus les mêmes.
D’une part, à l’Assemblée nationale, les fonds destinés à la DSIL, la dotation de soutien à l’investissement public local, ont été transférés vers la DETR, ce qui crée une première rupture d’égalité, puisqu’un certain nombre de communes ne sont pas éligibles à cette dernière dotation, alors qu’elles l’étaient à la DSIL ; s’agissant, d’autre part, des modalités de répartition de l’enveloppe supplémentaire proposée ici, la DSU et la DSR ne sont pas non plus accessibles à l’ensemble des territoires.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. C’est vrai !
Mme Christine Lavarde. L’ancien système garantissait l’égalité entre chaque parlementaire de la République, qui pouvait allouer des fonds à son territoire, quels qu’en fussent la structure et le nombre d’habitants. J’entends bien les critiques émises quant à une mauvaise utilisation des fonds par les associations, mais entre le monde rural et le monde urbain, celles-ci ne sont pas de même nature et n’ont ni le même type de fonctionnement ni la même organisation.
Les nouvelles modalités d’attribution ne sont donc pas du tout équivalentes aux anciennes et créent une inégalité entre différentes zones de la République.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je voterai naturellement ces deux amendements. Nous avons en mémoire le combat que le Sénat a mené cet été, jusqu’au 4 août, sur l’initiative, notamment, du président de la commission des lois, Philippe Bas, et de plusieurs d’entre nous. Il régnait ici une quasi-unanimité en faveur du maintien de la dotation d’action parlementaire.
Nous défendons naturellement la transparence de la vie publique, mais, d’un autre côté, ces crédits avaient le mérite d’aider les petites communes. Ils étaient un facteur d’équité, la dotation étant égale d’un sénateur ou d’un député à l’autre.
Ces 130 000 ou 140 000 euros nous permettaient de satisfaire des demandes qui n’étaient pas honorées par les financements classiques tels que la DETR, la DSIL ou les aides éventuelles des régions et des départements. Il s’agissait véritablement d’une aide à l’investissement des petites communes, car nous parvenions à financer des projets qui ne bénéficiaient pas d’autres apports. Nous donnions parfois entre 1 000 et 10 000 euros, de manière tout à fait transparente. On ne peut donc que regretter cette décision.
Monsieur le secrétaire d’État, vous évoquez le maintien du montant de la DGF, mais cela concerne le fonctionnement, alors que la dotation d’action parlementaire finançait l’investissement, et ainsi donnait de l’activité au secteur du bâtiment et des travaux publics, même pour des projets modestes.
C’est pourquoi je soutiendrai avec conviction ces amendements. (Mme Colette Mélot applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Dans le droit fil des points de vue déjà exprimés, je suis attaché, comme Christine Lavarde, au respect de l’équité entre les territoires. Hier, la réserve parlementaire était du même montant, quel que soit le territoire représenté, elle profitait donc majoritairement aux territoires ruraux, ce qui me paraissait compréhensible.
Comme Marc Laménie, monsieur le secrétaire d’État, je m’étonne que vous mélangiez les choux, les navets et les carottes. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.) Comment peut-on confondre le fonctionnement et l’investissement ? Honnêtement, pour vos débuts dans vos nouvelles fonctions – je vous adresse à ce propos mes félicitations toutes républicaines –, il est surprenant que vous vous prêtiez à ce type de mélange !
J’ai entendu les annonces du Gouvernement quand il a utilisé aveuglément le rabot : « ne vous inquiétez pas, on maintiendra l’enveloppe ! » Or 86 millions moins 36 millions égale 50 millions. Inutile de participer à « Le compte est bon ! » pour constater que le Gouvernement a tout faux ! (Sourires.)
Vous avez baissé de 42 % l’enveloppe qui était consacrée hier aux collectivités et aux associations, je vous propose donc de l’augmenter de 72 %, ce qui la ramènera à 86 millions d’euros. Au moins, vous pourrez dire que vous avez pesé d’un poids significatif dans le soutien aux collectivités !
Pour finir, j’ai parlé d’équité, je vous invite à voir dans ces amendements, soutenus unanimement, me semble-t-il, dans ces travées, à la fois un signal de bonne volonté et la confirmation de notre souhait de voir le Gouvernement respecter la parole donnée.
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. Au nom de la collectivité de la Polynésie française, je soutiens totalement ces amendements, de mes deux bras levés !
Je ne me suis jamais prononcée sur ce sujet ô combien polémique et qui a fait couler beaucoup d’encre, mais aujourd’hui, puisqu’il revient dans nos travées, je me permets de le faire comme sénatrice.
Je ne sais dans quelle région de France ou de Navarre a été inventée cette belle argutie, mais pour les quarante-huit communes de Polynésie française, ces fonds étaient une aide à l’investissement, car c’est bien de cela que l’on parle.
Quand vous allez au fin fond des îles Tuamotu, par exemple à Mururoa où les bombes ont explosé – je ne vais pas refaire l’histoire aujourd’hui – et où l’on impose à nos enfants, tous les matins, de chanter la Marseillaise et de hisser le drapeau bleu-blanc-rouge, et que vous apportez 15 000 euros ou 20 000 euros à ces petites communes polynésiennes auxquelles on a imposé le code général des collectivités territoriales, je peux vous dire que vous êtes accueilli à bras ouverts !
Lors du dernier congrès des maires de France, j’ai dit aux deux cents élus polynésiens qui avaient fait le déplacement à Paris : « Ne vous inquiétez pas, même s’il faut arracher des oreilles à certains de mes collègues, nous nous battrons pour rétablir cette dotation ! » (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Bravo !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. J’ai bien compris que répéter trop fortement l’avis défavorable du Gouvernement m’exposerait à des risques pour mon intégrité physique ! (Sourires.)
Je vais essayer de rassurer le sénateur Jean-François Husson sur la question des investissements. Je ne confonds pas les dotations de fonctionnement et d’investissement ; d’ailleurs, la DETR est maintenue à un niveau équivalent à celui de l’année dernière et, pour ce qui concerne la DSIL, si les autorisations d’engagement sont légèrement inférieures, les crédits de paiement sont légèrement supérieurs.
S’agissant des crédits dits de « réserve parlementaire », ils sont partiellement compensés, à hauteur de 25 et 50 millions d’euros. Mme la sénatrice Christine Lavarde l’a dit, les conditions d’utilisation de la DETR et de la DSIL sont différentes, il est légitime de le rappeler, même si cet amendement a été adopté très largement à l’Assemblée nationale.
En revanche, je souhaite souligner qu’une partie assez importante des crédits de réserve parlementaire était également utilisée pour des subventions de fonctionnement, notamment en direction du milieu associatif. Ranger l’intégralité de ces crédits dans l’aide à l’investissement n’est pas tout à fait juste, même si je sais que le Sénat avait la particularité de les concentrer sur les collectivités.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-331 et I-558 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 16.
L’amendement n° I-436, présenté par MM. Dallier, Bonhomme, Buffet et del Picchia, Mmes Delmont-Koropoulis et Deroche, M. B. Fournier, Mmes Gruny et Imbert, MM. Karoutchi, D. Laurent et Leleux, Mme Micouleau, MM. Milon, Paul et Pemezec, Mme Primas, MM. Rapin et Bazin, Mmes de Cidrac, Di Folco et Duranton, MM. Gremillet et Mouiller, Mmes Deromedi et Garriaud-Maylam et MM. Kennel et Longuet, est ainsi libellé :
Après l’article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est institué, à compter de 2018, un prélèvement sur les recettes de l’État destiné à compenser la perte de recettes supportée par les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, les départements et la métropole de Lyon du fait de la minoration des compensations des exonérations en matière de logement social.
II. – Il est calculé, pour chaque commune, pour chaque établissement public de coopération intercommunale, pour chaque département et pour la métropole de Lyon, la différence entre :
1° Les pertes de recettes subies en 2016, telles que définies :
- aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 2335-3 du code général des collectivités territoriales ;
- au premier alinéa de l’article L. 3334-17 du même code ;
- aux premier, deuxième et troisième alinéas de l’article L. 5214-23-2 dudit code ;
- aux premier, deuxième et troisième alinéas de l’article L. 5215-35 du même code ;
- aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 5216-8-1 du même code ;
- au II de l’article 21 de la loi de finances pour 1992 n° 91-1322 du 30 décembre 1991 ;
- au A du II de l’article 49 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 ;
2° Les compensations perçues en 2016 au titre des articles L. 2335-3, L. 3334-17, L. 5214-23-2, L. 5215-35, L. 5216-8-1 précités, au II de l’article 21 de la loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991 précitée et au A du II de l’article 49 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 précitée.
III. – Le montant du prélèvement prévu au I est égal à la somme des montants calculés en application du II. Le montant perçu par chaque commune, chaque établissement public de coopération intercommunale, chaque département et par la métropole de Lyon est égal au montant calculé en application du I.
IV. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Mes chers collègues, j’ai l’honneur, le plaisir et l’avantage de vous présenter, pour la quatrième année consécutive, mon marronnier budgétaire. (Sourires.) Je rappelle que les trois fois précédentes, le Sénat l’avait adopté à l’unanimité.
M. Roger Karoutchi. C’est une garantie de réussite !
M. Philippe Dallier. Monsieur le secrétaire d’État, il s’agit à nouveau des variables d’ajustement, de l’enveloppe normée et de la dotation de compensation de la taxe foncière.
La loi accorde aux bailleurs sociaux des exonérations de taxe foncière sur des durées très longues – quinze, vingt ou vingt-cinq ans – afin de les aider à construire. Qui paie la note ? Les communes et les EPCI, parce que la dotation de compensation du foncier bâti est incluse dans les variables d’ajustement de l’enveloppe normée. C’est absolument inique !
Cette dotation de compensation n’a strictement rien à voir ni avec le problème de l’enveloppe normée ni avec les dotations de l’État et pénalise les communes qui construisent du logement social, alors même qu’on leur demande de le faire.
Mes chers collègues, vous aviez précédemment adopté cet amendement à l’unanimité après avoir entendu ces arguments. Cette année, il est plus justifié encore – si j’ose dire ! – parce que nous savons maintenant que la taxe d’habitation va disparaître et qu’il ne restera plus aux communes que la taxe foncière, dont une partie serait donc amputée parce que celles-ci jouent le jeu de la construction de logement social ! Cela n’a aucun sens.
Voilà pourquoi, une nouvelle fois cette année, je vous demande d’adopter cet amendement, en espérant qu’un gouvernement acceptera, un jour, de regarder ce sujet de près.
Monsieur le secrétaire d’État, j’attends votre réponse avec impatience !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Vous l’avez tous deviné ! L’année dernière, le vote avait été unanime.
Il est vrai que l’on pourrait débattre indéfiniment de la question de la compensation en relation avec le logement social, mais j’espère que la réponse du Gouvernement sera un peu plus sérieuse cette année.
L’avis de la commission est favorable.