M. Jeanny Lorgeoux. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, ce matin, nous devons nous prononcer sur la ratification de l’accord-cadre de partenariat et de coopération entre l’Union européenne et la République socialiste du Viêt Nam.
Cet accord, signé en juin 2012, cherche à élargir les domaines de coopération entre l’Union européenne et le Viêt Nam, afin de dépasser la simple dimension économique qui prévalait jusque-là. Il comprend 8 chapitres, soit 65 articles qui définissent les principes fondamentaux des relations bilatérales et le cadre d’une coopération globale qui va du développement à la défense de la sécurité internationale, en passant par les échanges économiques ou la coopération judiciaire.
Les autorités vietnamiennes accordent beaucoup d’importance à cet accord, comme a pu me le dire M. Duong Chi Dung, sous-ministre des affaires étrangères de la République socialiste du Viêt Nam, le 15 octobre dernier, lors de sa visite au Sénat.
Cet accord est aussi une chance pour la France. Les liens tissés par l’histoire, ainsi que le degré élevé de notre coopération, font de la France un partenaire privilégié du Viêt Nam. Le rythme des visites à haut niveau témoigne de la vigueur de nos relations. Ainsi, il y a à peine quelques jours, M. Nguyen Tan Dung, Premier ministre de la République socialiste du Viet Nam, était reçu par le président du Sénat à l’occasion d’un entretien auquel j’ai pu être associée.
La France et le Viêt Nam fournissent de nombreux et bons exemples de coopérations, dans des secteurs très divers, tels que l’économie, la culture, l’enseignement, l’industrie, la lutte contre le réchauffement climatique. Le groupe d’amitié que j’ai l’honneur de présider, à la suite du président Poncelet, se veut le garant de la poursuite et de l’intensification de ces coopérations.
Dès septembre 2013, la France et le Viêt Nam ont signé une déclaration commune sur le partenariat stratégique, afin de renforcer la relation entre nos deux pays dans toutes ses composantes. En effet, pour vivante et dense qu’elle soit, notre relation bilatérale est appelée à évoluer à la faveur des transformations rapides que connaît actuellement le Viêt Nam, notamment dans le champ de l’économie, pour passer d’une logique d’aide au développement à une logique de partenariat renforcé.
En tant que présidente du groupe d’amitié France-Viêt Nam au Sénat, je me réjouis de cette ratification. Je souhaite que le Sénat l’approuve à l’unanimité, afin de témoigner à nos amis vietnamiens notre soutien infaillible et notre volonté de faire vivre la singularité des relations franco-vietnamiennes au sein de l’Union européenne.
Avant de conclure, je salue la présence dans les tribunes de M. le ministre-conseiller Nguyen Manh Thang, en compagnie de notre ancienne collègue Hélène Luc.
Vous l’aurez compris mes chers collègues, notre groupe votera en faveur de cet accord. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les accords-cadres avec le Viêt Nam et les Philippines que nous sommes invités à ratifier ce matin sont à resituer dans le mouvement de développement d’une relation globale entre l’Union européenne et les États membres fondateurs de l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est, mouvement qui a été engagé il y a plus de dix ans.
L’Union européenne ne veut pas se contenter d’être uniquement considérée comme un acteur économique ; elle souhaite, tout comme notre pays, jouer également un rôle politique et de sécurité dans cette région du monde.
C’est la raison pour laquelle ce type d’accords de partenariat et de coopération se présente sous la forme d’accords-cadres, juridiquement peu contraignants, qui reposent essentiellement sur des déclarations d’intention. Ce cadre de coopération global couvre les questions aussi bien économiques que sociales et politiques, de justice et de sécurité, de migration, d’économie et de développement. Il comprend en outre les clauses politiques de l’Union européenne, avec leurs critères sur les droits de l’homme, la Cour pénale internationale, les armes de destruction massive, les armes légères et de petits calibres, ou bien encore la lutte contre le terrorisme.
Je relèverai tout d’abord que des négociations menées à partir de novembre 2007 avec le Viêt Nam ont abouti à la signature de cet accord en juin 2012.
Cet accord-cadre, très général à ce stade, prend en compte les intérêts bien compris de chacun, en ce sens qu’il traduit la volonté de l’Union européenne et de la France de renforcer la relation bilatérale dans les domaines du commerce, de l’économie, de la politique et du développement. À cet égard, nous savons combien l’influence économique de l’Union européenne et de la France dans cette région du monde est faible par rapport à celle d’autres pays comme l’Australie et la Nouvelle-Zélande, qui jouent un rôle important à côté des États-Unis.
C’est pourquoi, avec ce type d’accord, nous devrions mieux faire fructifier le capital de sympathie dont nous disposons encore au Viêt Nam et mieux utiliser la dimension culturelle que porte l’Organisation internationale de la francophonie.
Cet accord répond également à la volonté du Viêt Nam, qui mène une politique de développement des partenariats pour contrebalancer l’influence économique et politique croissante, notamment, de la Chine en Asie du Sud-Est.
Je voudrais par ailleurs souligner, pour m’en féliciter, que notre pays sait aussi soigner ses relations bilatérales avec ce pays ami, puisque nous avons signé, en 2013, une déclaration de partenariat stratégique qui vise à renforcer nos liens, que ceux-ci soient politiques, militaires, économiques, culturels ou éducatifs.
Les enjeux économiques de ces accords de partenariat et de coopération avec l’Asie du Sud-Est, plus précisément avec le Viêt Nam, sont aussi très importants. Je ne rappellerai pas le volume et la qualité de nos échanges avec ce pays ; ils sont fort bien décrits dans l’excellent rapport de notre collègue Hélène Conway-Mouret. Toutefois, il faut bien prendre la mesure de cet accord, et voir au-delà, car son objectif est bien de concrétiser par la suite nos liens de coopération par des accords sectoriels.
Il faut également relever que les principes qu’il établit dans le domaine du commerce et de l’investissement ont servi de base aux négociations d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Viêt Nam. Celui-ci fera l’objet d’un autre débat, et nous devrons être vigilants aux risques de déséquilibres qu’il peut provoquer dans certains secteurs économiques, dont ceux de nos départements d’outre-mer.
Finalement, au nom de notre longue et parfois douloureuse histoire commune, je me félicite tout particulièrement de l’accord avec le Viêt Nam qu’il nous est proposé de ratifier aujourd’hui, bien que tardivement.
De nombreux indicateurs nous montrent que les choses sont en bonne voie. Je pense à une récente rencontre entre les autorités françaises, le président du Sénat et le Premier ministre du Viêt Nam, au cours de laquelle le principe d’un forum avec les PME a été acté, ou bien encore aux trois visites de notre ministre des affaires étrangères dans ce pays. Néanmoins, s’il m’est permis une suggestion, une visite du Président de la République au Viêt Nam, comme cela a été fait aux Philippines, pourrait parachever ces gestes forts.
Tout cela est donc très prometteur pour le développement économique et social de ces pays. Puisque ce texte est porteur d’avenir pour le Viêt Nam, comme pour les Philippines et les pays membres de l’Union européenne, le groupe CRC votera le projet de loi de ratification de ces accords-cadres. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jeanny Lorgeoux.
M. Jeanny Lorgeoux. Madame la présidente, je voterai naturellement en faveur de cette convention qui, à tous égards, est excellente.
Néanmoins, permettez-moi d’émettre un léger bémol et d’inviter le Gouvernement à exhorter, de manière tenace, les négociateurs bruxellois pour que les sucres roux soient exclus de la négociation de la convention d’application.
Il ne s’agit pas de causer un déplaisir à nos amis vietnamiens, mais la situation est la suivante : les conditions climatiques du Viêt Nam et l’ardeur de nos amis vietnamiens font que, très rapidement, cette production, même limitée à un quota de 20 000 tonnes, peut fleurir et prospérer. Or les négociateurs bruxellois oublient parfois que la Réunion, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane sont aussi la France. Dans ces départements d’outre-mer, les sucres roux sont vitaux pour l’économie et l’emploi.
Il est encore temps de voir ce segment de négociation, qui n’est en rien attentatoire à une convention-cadre par ailleurs excellente à tous égards.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Annick Girardin, secrétaire d'État. Permettez-moi, madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, de saluer à mon tour la délégation vietnamienne qui est présente dans ces tribunes aujourd’hui. Je serai à sa disposition dans quelques minutes.
Je souhaite répondre à tous ceux qui, aujourd’hui, ont le souci des répercussions de ces accords de libre-échange sur l’ensemble des outre-mer. Vous avez raison, mesdames, messieurs les sénateurs, les outre-mer, c’est aussi la France. Vous comprendrez d'ailleurs combien j’y suis attachée, étant moi-même originaire de l’outre-mer, plus précisément de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Je puis vous assurer que le Gouvernement est extrêmement vigilant, dans toutes les négociations commerciales, à ce que la sensibilité des régions ultrapériphériques soit toujours prise en compte. Nous parlions précédemment de la question des accords avec le Pérou et la Colombie. Dans ce cadre, nous avons été extrêmement attentifs à ce que l’on appelle la « sensibilité de la banane ».
Sur cet accord, nous sommes attentifs aux sucres spéciaux de la Réunion, qui constituent une part importante de l’économie de cette île. Là encore, nous avons été vigilants. Outre moi-même, trois membres du Gouvernement sont engagés sur ces questions : le ministre de l’agriculture, M. Le Foll, la ministre des outre-mer, Mme Pau-Langevin, et le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, M. Fekl, qui, à plusieurs reprises, a formulé des propositions sur ces sujets. Il a notamment proposé de séparer les sucres roux des autres sucres, plus largement des sucres spéciaux, en prévoyant des contingents.
C’est un aspect important, que vous avez souligné à juste titre, mesdames, messieurs les sénateurs, mais sachez que le Gouvernement est attentif à ces questions, tout en s’attachant à renforcer les partenariats économiques avec les pays qui sont nos amis.
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Projet de loi autorisant la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part
Article unique
Est autorisée la ratification de l'accord-cadre global de partenariat et de coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la République socialiste du Viêt Nam, d'autre part (ensemble une annexe), signé à Bruxelles le 27 juin 2012, et dont le texte est annexé à la présente loi.
Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
Mme la présidente. Je constate que le projet de loi a été adopté à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)
7
Nomination de membres de deux commissions mixtes paritaires
Mme la présidente. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les personnes malades en fin de vie.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été publiée conformément à l’article 12 du règlement.
Je n’ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Alain Milon, Gérard Dériot, François Pillet, Jean-Pierre Godefroy et Georges Labazée, Mmes Françoise Gatel et Annie David ;
Suppléants : M. Michel Amiel, Mmes Chantal Deseyne, Catherine Génisson, Brigitte Micouleau, Patricia Morhet-Richaud, Stéphanie Riocreux et M. Gérard Roche.
Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant.
La liste des candidats établie par la commission des affaires sociales a été publiée conformément à l’article 12 du règlement.
Je n’ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : M. Alain Milon, Mme Michelle Meunier, MM. Jean-Noël Cardoux, François Pillet, Mmes Claire-Lise Campion, Élisabeth Doineau et Laurence Cohen ;
Suppléants : M. Olivier Cigolotti, Mmes Corinne Féret, Corinne Imbert, Hermeline Malherbe, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Jean-Louis Tourenne.
8
Réutilisation des informations du secteur public
Adoption des conclusions d’une commission mixte paritaire
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public (texte de la commission n° 189, rapport n° 188).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Hugues Portelli, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission mixte paritaire est parvenue assez rapidement à un accord sur les conclusions restant en discussion de ce projet de loi. La commission des lois du Sénat a noué en amont des contacts réguliers avec le rapporteur de l’Assemblée nationale pour balayer les différents points sur lesquels des désaccords subsistaient entre les deux assemblées.
Le Sénat et l’Assemblée nationale étaient d’accord sur l’essentiel, mais divergeaient sur l’interprétation d’une disposition figurant à l’article 1er du texte et relative à la possibilité pour les établissements d’enseignement et de recherche de déroger aux règles en matière de réutilisation des informations publiques.
Le Sénat estimait en effet qu’il existait un risque pour les chercheurs de voir leurs travaux préparatoires, ainsi que les données qu’ils élaborent à cet effet, réutilisés et rendus publics, alors même que leurs recherches n’étaient pas achevées. C’est la raison pour laquelle il lui semblait préférable de maintenir en l’état l’article 11 de la loi portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, dite « loi CADA ».
Dans le même registre, le Sénat considérait que les établissements publics de recherche risquaient de voir leurs droits de propriété industrielle mis en cause. C’est la raison pour laquelle la Haute Assemblée préférait maintenir le texte initial.
Toutefois, après un certain nombre d’échanges avec le rapporteur de l’Assemblée nationale sur ce texte, il appert que ce danger ne serait pas aussi évident. Néanmoins, malgré l’adoption de l’article 1er dans la rédaction de l'Assemblée nationale – c’est le point d’accord qui a été trouvé –, il faudra rappeler que la suppression du régime de réutilisation dérogatoire ne met nullement en cause les deux principes que je viens de mentionner.
Pour le reste, nous sommes parvenus à une rédaction commune, qui reprend tantôt le texte de l’Assemblée nationale, tantôt celui du Sénat.
Madame la secrétaire d’État, j’insiste sur le fait que la commission mixte paritaire s’est mis d’accord sur le cas des collectivités d’outre-mer, notamment Wallis-et-Futuna. Il est bon de ne pas porter atteinte outre mesure à leurs statuts respectifs.
Sur certains points, un statu quo a été trouvé. Néanmoins, il nous faudra revenir rapidement sur ces questions, puisque le projet de loi pour une République numérique sera prochainement inscrit à l’ordre du jour des travaux du Sénat, après avoir été examiné par l’Assemblée nationale. Nous aurons alors l’occasion de proposer des avancées sur le principe de la gratuité.
À chaque jour suffit sa peine. L’essentiel aujourd'hui, c’est de transposer une directive européenne, qui devrait être en vigueur depuis plus de six mois. Rattrapons notre retard. Nous aurons toujours le temps d’aller de l’avant, voire de prendre de l’avance, une fois que nous aurons respecté nos obligations vis-à-vis de nos partenaires de l’Union européenne. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – Mme Corinne Bouchoux applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, votre rapporteur a dit l’essentiel. Il s’agit en effet de transposer la directive européenne PSI – public sector information – du 26 juin 2013. Les débats parlementaires attestent la volonté toujours réaffirmée du Gouvernement, aidé en cela par la commission des lois du Sénat, de ne pas surtransposer les directives européennes.
Monsieur le rapporteur, je tiens à vous remercier du travail que vous avez accompli sur ce texte. Vous avez toujours manifesté le souci de faire preuve de rigueur et d’aller au fond des choses, mais aussi la volonté de mener l’exercice à son terme en aboutissant à un accord avec l'Assemblée nationale, ce que je tiens à souligner.
Je remercie également Jean-Pierre Sueur d’avoir éclairé les débats de ses analyses.
M. Jean-Claude Requier. Il est toujours éclairant ! (Sourires.)
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Son apport a été important et ses contributions nous ont permis d’avancer.
Monsieur le rapporteur, vous l’avez souligné, la commission mixte paritaire a été conclusive : chaque assemblée a fait un pas vers l’autre. Sur la question des établissements de recherche et d’enseignement supérieur, au terme de la navette parlementaire et de la commission mixte paritaire, nous sommes parvenus au compromis que vous avez mentionné.
Je retiens de votre propos que le Sénat était ressorti rassuré des échanges en commission mixte paritaire sur la situation des établissements publics d’enseignement supérieur. Pour autant, vous souhaitez qu’il soit rappelé qu’ils ne sont pas en cause et que la vigilance du Gouvernement devra rester forte à l’avenir, notamment en ce qui concerne les futurs travaux de recherche. Il me semble avoir déjà apporté des garanties sur ce point lors des débats au Sénat. Je vous confirme que c’est bien l’interprétation du Gouvernement et que vous pouvez compter sur sa vigilance.
Sur le respect du statut des collectivités d’outre-mer, monsieur le rapporteur, j’ai également entendu votre appel.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens aussi à saluer les contributions de chacun d’entre vous lors des débats. La question des redevances a été évoquée, ainsi qu’à l’Assemblée nationale. Vous vous souvenez que le Gouvernement avait souhaité aller plus loin que la transposition de la directive européenne en posant le principe de gratuité, les redevances étant l’exception.
Sur les redevances, un débat a été ouvert à l’Assemblée nationale, puis repris au Sénat, mais le Gouvernement n’a pas souhaité leur élargissement. Corinne Bouchoux a demandé, dans les mêmes termes qu’à l’Assemblée nationale, la suppression des redevances, notamment pour les services publics, alors que le Gouvernement a souhaité les protéger à travers les recettes qu’ils perçoivent. Je vous confirme une nouvelle fois que, sur ce point, à la suite du débat à l’Assemblée nationale, un travail s’est engagé pour revoir le modèle économique. Il se poursuit.
M. le rapporteur l’a mentionné : le projet de loi pour une République numérique défendu par Axelle Lemaire a été présenté en conseil des ministres mercredi 9 décembre dernier. Ce texte doit être examiné à l’Assemblée nationale. Lorsqu’il sera en discussion au Sénat, mesdames, messieurs les sénateurs, vous aurez l’occasion de reprendre un certain nombre de points qui ont été évoqués à l’occasion de la transposition de cette directive européenne, mais au-delà du cadre de laquelle vous avez eu la sagesse, comme l’Assemblée nationale, de ne pas aller ; j’en remercie une fois encore la commission des lois du Sénat.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le rapporteur, vous le savez, l’essentiel était de transposer cette directive, de ne pas surtransposer et de réserver les points sur lesquels vous souhaiterez avancer à d’autres débats. De cela, une fois encore, je vous remercie. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, à la fin de l’année 2014, la France s’est classée à la troisième place mondiale pour l’ouverture et la réutilisation des données publiques.
Cela s’explique par différentes initiatives, notamment la mise à disposition des bases LEGI par la Direction de l’information légale et administrative, la DILA, le passage en licence ouverte de certaines données de l’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN, la fourniture de l’ensemble des résultats électoraux en un point unique par le ministère de l’intérieur, ou encore la mise à disposition en 2014 par La Poste de la base nationale officielle des codes postaux à des fins de géolocalisation.
La stratégie française d’ouverture des données publiques fait vivre le droit de regard du citoyen sur ses représentants et sur l’action de l’administration, conformément à l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration. »
L’administration s’ouvre à la transparence, à rebours du credo administratif ancien du secret, qui était à l’origine de tensions renouvelées entre l’administration et son administré. Il faut rappeler que le dogme du secret pouvait gêner la bonne compréhension des décisions prises par l’administration dans l’exercice des prérogatives de puissance publique. Il pouvait même parfois sembler faciliter l’arbitraire.
Nous saluons par conséquent l’accord trouvé par la commission mixte paritaire sur le présent texte, qui prolonge et approfondit le mouvement de modernisation nécessaire et inéluctable de l’administration, commencé dans les années soixante-dix. Que de chemin parcouru depuis la reconnaissance d’un droit d’accès aux documents administratifs avec l’adoption de la loi du 17 juillet 1978, du principe de motivation des actes administratifs avec la loi du 11 juillet 1979, sans parler de la création de la Commission d’accès aux documents administratifs, de celle de la mission Etalab et du portail www.data.gouv.fr en 2011 !
Plus récemment encore, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », a renforcé les exigences de transparence des données des collectivités territoriales : ces dernières, lorsqu’elles comptent plus de 3 500 habitants, ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, doivent rendre accessibles en ligne les informations publiques.
L’Europe a accompagné ce mouvement. Le texte que nous examinons aujourd’hui transpose la directive du 26 juin 2013, qui a pour objet de faciliter la réutilisation des informations du secteur public en harmonisant les politiques des États membres et en supprimant les obstacles tarifaires et administratifs.
L’accès aux données publiques doit être le plus large possible. Le texte renforce cette exigence en consacrant le principe de gratuité de la réutilisation des informations publiques, sous certaines réserves, ainsi qu’en soumettant au droit commun la réutilisation des informations publiques des établissements et institutions d’enseignement et de recherche, ainsi que des établissements culturels, y compris universitaires, musées et archives.
Le renforcement de l’open data ne va bien évidemment pas sans restrictions légitimes. Il doit d’abord respecter la protection des données personnelles. Nous avons déposé un amendement en ce sens, visant à prévenir toute revente sans consentement préalable des données personnelles détenues par la préfecture et dont la protection relève de l’ordre public. Il a été considéré comme un cavalier législatif.
Le risque est pourtant grand de porter atteinte à la vie privée de milliers de citoyens, qui peuvent être la cible d’opérations commerciales parfois très agressives. L’information est le nerf du commerce, donc celui de la guerre ! Il est à craindre que d’autres données personnelles conservées par l’État puissent demain faire l’objet d’un commerce.
Ce principe de gratuité et d’ouverture de l’information au secteur public doit par ailleurs être concilié avec la compensation des coûts marginaux de reproduction, de mise à disposition et de diffusion des données pour l’administration, qui peut faire l’usage de redevances de réutilisation. Sont également admises des dérogations pour les organismes du secteur public qui ont besoin de recettes pour couvrir une part substantielle des coûts liés à leur mission de service public ou des coûts de collecte, production, reproduction ou diffusion des documents, tout en permettant un retour sur investissement raisonnable.
À ce titre, d’utiles garde-fous sont prévus par le texte : la licence joue un rôle pédagogique non négligeable, conforté par le projet de loi, de même que les accords d’exclusivité, dont la durée peut atteindre dix ans.
Toutefois, la discussion n’a pas permis d’établir une règle claire pour le montant des redevances, par un plafond général pour le montant total de l’ensemble des redevances pouvant être perçues auprès de tous les réutilisateurs et un plafond particulier pour le montant maximum pouvant être perçu annuellement auprès de chaque réutilisateur.
Si des administrations jalouses de leurs prérogatives fixent des montants de redevances rédhibitoires, alors nous n’aurons que peu avancé dans ce domaine. Nous espérons donc que l’examen futur du projet de loi pour une République numérique, qui a déjà été évoqué ici, nous permettra d’approfondir et même d’innover s’agissant des pistes de croissance portées par cette nouvelle technologie, qui transcende l’ensemble de notre société. Outre les enjeux démocratiques de l’open data, la facilitation de la réutilisation de données publiques doit permettre de créer à l’avenir des activités et services nouveaux.
Par le présent projet de loi, nous améliorons sensiblement les relations entre le public et l’administration, qui seront d’ailleurs régies, dès le 1er janvier 2016, par un code spécifique, et nous créons de la croissance.
Dans ces conditions, le groupe du RDSE apportera son soutien unanime à ce texte attendu. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste et de l'UDI-UC.)