M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Il est vrai que, pour des personnes atteintes de pathologies lourdes, notamment toutes celles qui touchent au cancer, il est très important de pouvoir continuer à faire partie intégrante de la société, en particulier en accomplissant un travail, gage d’appartenance à la communauté active de nos concitoyens.
Pour autant, et je suis complètement d’accord avec les arguments développés à la fois par notre rapporteur et Mme la ministre, je trouve pour le moins – je vais le dire de façon peut-être un peu radicale – choquant que cette proposition d’insertion dans la société pour des personnes malades et psychologiquement vulnérables soit subordonnée à la suppression des indemnités journalières. C’est la raison pour laquelle notre groupe ne votera pas cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. On parle des salariés et de la pression que pourraient exercer sur eux les employeurs, mais n’oublions pas les travailleurs indépendants, les auto-entrepreneurs, les conjoints d’artisans, de commerçants. Pour avoir entendu des témoignages et pour bien connaître l’hospitalisation à domicile, je sais que certains d’entre eux sont obligés de continuer à suivre leurs dossiers quand ils sont à l’hôpital. À mon sens, il y a lieu d’être pragmatique et de leur permettre de poursuivre leur activité professionnelle.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, corapporteur.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, corapporteur. Les anciens présidents de conseil général ou maires le savent en tant qu’employeurs, certains salariés en arrêt de travail – quel que soit le type de maladie – demandent à pouvoir travailler chez eux. Il est vrai qu’il y a quelques années, lorsque le télétravail n’était pas aussi développé, la poursuite de l’activité professionnelle était nettement plus compliquée que de nos jours. Or, comme le dit la chanson, le travail, comme le sport, contribue à la bonne santé.
L’amendement de notre collègue Imbert est extrêmement intéressant : certains salariés – ce n’est évidemment pas possible dans tous les métiers – pourraient continuer de rendre service à leur entreprise et aussi à eux-mêmes. Nous sommes d’ailleurs confrontés, comme je l’ai été encore récemment, à des demandes de salariés qui le souhaitent.
Toutefois, un certain nombre de difficultés ne sont pas abordées ou ne trouvent pas de réponse satisfaisante dans l’amendement tel qu’il est présenté. Je pense aux indemnités journalières, à la responsabilité du médecin, aux cas d’hospitalisation à domicile, aux problèmes relatifs au code de la sécurité sociale, etc. En attendant d’approfondir la réflexion, peut-être dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, il serait préférable que l’amendement soit retiré.
M. le président. La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour explication de vote.
Mme Hermeline Malherbe. Je ne suis pas certaine qu’il faille légiférer sur le sujet. Il existe déjà des dispositifs permettant à des salariés en arrêt maladie de longue durée qui le souhaitent de travailler sous des formes adaptées, notamment à temps partiel. Il est vrai que la poursuite d’une activité professionnelle est importante psychologiquement pour certains patients. Peut-être serait-il souhaitable d’aller plus loin pour l’avenir, mais la solution proposée aujourd’hui n’est pas satisfaisante à mes yeux.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je suis d’accord avec notre rapporteur et le président Alain Milon pour dire que cet amendement n’est pas totalement abouti. En outre, même si son dispositif vise le code de la sécurité sociale, il touche aussi à l’organisation du travail. Or, en la matière, une négociation avec les partenaires sociaux s’impose avant que Parlement ne légifère. La conférence sociale aura lieu dans quelques semaines. Attendons d’ouvrir le débat dans ce cadre plus large plutôt que de prendre une décision à l’occasion de l’examen d’un projet de loi de santé.
Sur le fond, nous ne sommes pas favorables à cet amendement. Comme le disait Mme Génisson, il est assez choquant que les salariés ou même les travailleurs indépendants soit obligés de renoncer à leurs indemnités journalières. La sagesse, qui empreint la Haute Assemblée, voudrait que cet amendement soit retiré.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Sur le fond, nous sommes tous d’accord pour dire qu’il est important qu’un patient puisse continuer son activité professionnelle. C’était d’ailleurs l’un des axes du plan cancer 3. Sur le plan technique, c’est toutefois un peu plus compliqué.
La formule retenue par l’amendement « elle renonce au bénéfice des indemnités journalières » n’est peut-être pas excellente, mais je veux dire à Mmes Génisson et David que, dans le système actuel, lorsqu’on perçoit un salaire, on ne touche pas d’indemnité.
Mme Catherine Génisson. Cela mérite qu’on y travaille !
M. le président. Madame Imbert, l'amendement n° 554 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Corinne Imbert. Malgré l’estime et le respect que j’ai pour le président Milon, je ne vais pas être sage.
Nous discutons d’un projet de loi de modernisation de notre système de santé. Alors, soyons modernes : donnons ce nouveau droit aux malades !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 554 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 43 B
(Non modifié)
I. – L’article L. 1114-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Le troisième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« II. – Les représentants des usagers dans les instances mentionnées au I suivent une formation de base délivrée par les associations de représentants d’usagers agréées au titre du même I.
« Cette formation est conforme à un cahier des charges. Le cahier des charges ainsi que la liste des associations délivrant la formation sont arrêtés par le ministre chargé de la santé.
« Cette formation donne droit à une indemnité versée au représentant d’usagers par l’association assurant la formation. Un décret détermine les modalités selon lesquelles une subvention publique est allouée à cet effet à l’association. Un arrêté du ministre chargé de la santé fixe le montant de cette indemnité. »
II. – Le 2° du I entre en vigueur au 1er janvier 2016.
III. – La condition de formation n’est pas opposable aux représentants des usagers nommés avant le 1er juillet 2016. – (Adopté.)
Article 43
I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du cinquième alinéa de l’article L. 1142-22, les mots : « des représentants d’usagers » sont remplacés par les mots : « des représentants d’associations d’usagers du système de santé agréées au titre de l’article L. 1114-1 » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 1222-5, les mots : « des associations de patients et de donneurs » sont remplacés par les mots : « de représentants d’associations d’usagers du système de santé agréées au titre de l’article L. 1114-1 et d’associations de donneurs de sang » ;
2° bis Au 2° de l’article L. 1313-4, les mots : « agréées ayant une activité dans le domaine de la qualité de la santé et de la prise en charge des malades » sont remplacés par les mots : « d’usagers du système de santé agréées au titre de l’article L. 1114-1 » ;
3° Au deuxième alinéa de l’article L. 1413-8, après le mot : « institut », sont insérés les mots : « , des représentants d’associations d’usagers du système de santé agréées au titre de l’article L. 1114-1 » ;
4° Au deuxième alinéa de l’article L. 1417-6, les mots : « des représentants d’usagers » sont remplacés par les mots : « des représentants d’associations d’usagers du système de santé agréées au titre de l’article L. 1114-1 » ;
5° Au second alinéa de l’article L. 1418-3, après les mots : « missions de l’agence », sont insérés les mots : « , de représentants d’associations d’usagers du système de santé agréées au titre de l’article L. 1114-1 » ;
6° Le deuxième alinéa de l’article L. 3135-2 est complété par les mots : « , ainsi que d’au moins un représentant d’associations d’usagers du système de santé agréées au titre de l’article L. 1114-1 » ;
7° Au 5° de l’article L. 5322-1, après le mot : « associations », sont insérés les mots : « d’usagers du système de santé » ;
8° Le 1° de l’article L. 6113-10-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Son conseil d’administration comprend au moins un représentant des associations d’usagers du système de santé agréées en application de l’article L. 1114-1 ; ».
II. – Le I entre en vigueur :
1° À l’expiration du mandat en cours des représentants des usagers à la date de publication de la présente loi, pour chacun des établissements mentionnés aux 1°, 2°, 2° bis, 4° et 7° du même I ;
2° À la date de publication des textes d’application nécessaires à la mise en œuvre de ces dispositions, et au plus tard un an après la promulgation de la présente loi, pour chacun des établissements et groupements mentionnés aux 3°, 5°, 6° et 8° dudit I.
M. le président. L'amendement n° 98 rectifié, présenté par MM. Commeinhes et Houel, Mme Mélot et MM. Charon et Calvet, n'est pas soutenu.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 897 rectifié est présenté par MM. Amiel et Guérini et Mme Malherbe.
L'amendement n° 1009 est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'alinéa 11
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le quatrième alinéa du I de l'article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « , ainsi que deux représentants des associations agréées en application de l'article L. 1114-1 du code de santé publique et deux représentants d'associations de lutte contre les inégalités de santé ».
La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour présenter l'amendement n° 897 rectifié.
Mme Hermeline Malherbe. L’article 43 prévoit que les représentants d’associations d’usagers du système de santé agréées siègent au sein du conseil d’administration de plusieurs agences sanitaires. Il s’agit de renforcer la démocratie sanitaire dans la gouvernance du système de santé. C’est une très bonne chose !
Notre amendement vise à élargir la participation des représentants des usagers et des organisations luttant contre les inégalités de santé au Comité économique des produits de santé, le CEPS, chargé de fixer les prix des médicaments et les tarifs des dispositifs médicaux à usage individuel pris en charge par l’assurance maladie de façon obligatoire. Cela se fait déjà au sein des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, ainsi qu’à différents niveaux dans le système de santé.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour présenter l'amendement n° 1009.
Mme Aline Archimbaud. La négociation sur le prix du nouveau traitement contre l’hépatite C a agi comme un révélateur des dysfonctionnements dans le processus de fixation des prix des médicaments. De nombreuses associations se sont en effet inquiétées de l’accès équitable à ce traitement, craignant que, à défaut, cela n’entraîne une perte d’espérance de vie, la survenue de complications et d’incapacités liées à la maladie ou encore le recours à des traitements moins coûteux mais moins efficaces. Cela est d’autant plus regrettable que l’arrivée de nouveaux traitements, beaucoup plus efficaces et dont les effets secondaires sont nettement moindres, laisse entrevoir la possibilité d’éradiquer cette épidémie.
En outre, les prix demandés par les laboratoires font souvent peser un risque important sur les dépenses d’assurance maladie. La faiblesse de la démocratie sanitaire dans le processus de négociation des firmes pharmaceutiques avec le CEPS et dans la fixation du prix des médicaments est donc d’autant plus regrettable.
L’article 43 du projet de loi de santé tendant précisément à renforcer et à systématiser la démocratie sanitaire dans la gouvernance du système de santé, le présent amendement vise à inclure des représentants d’usagers au sein du CEPS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. L’article 43 quinquies du projet de loi prévoit que les associations d’usagers du système de santé et les associations de lutte contre les inégalités de santé pourront adhérer à un accord-cadre avec le CEPS, qui leur permettra de bénéficier d’une information très complète sur ses activités. Il n’a donc pas semblé opportun à la commission de prévoir en outre la présence de deux représentants d’associations d’usagers du système de santé et de deux représentants d’associations de lutte contre les inégalités de santé au sein du CEPS lui-même.
La commission demande donc le retrait de ces deux amendements identiques. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Ce débat a eu lieu avant même la présentation du texte au Parlement, lorsque nous avons rencontré les représentants des associations de patients, dont le Collectif interassociatif sur la santé.
L’article 43 quinquies prévoit un accord-cadre entre le CEPS et les représentants des usagers. Il représente une avancée considérable en matière d’information des usagers, les associations de patients en ont convenu.
Le Gouvernement ayant déjà répondu aux préoccupations qui motivent ces deux amendements identiques, je sollicite leur retrait.
M. le président. Madame Malherbe, l'amendement n° 897 rectifié est-il maintenu ?
Mme Hermeline Malherbe. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 897 rectifié est retiré.
Madame Archimbaud, l'amendement n° 1009 est-il maintenu ?
Mme Aline Archimbaud. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 1009 est retiré.
Je mets aux voix l'article 43.
(L'article 43 est adopté.)
Article 43 bis
(Non modifié)
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article L. 1114-1 est supprimé ;
2° La première phrase du quatrième alinéa du I de l’article L. 1451-1 est complétée par les mots : « , y compris en ce qui concerne les rémunérations reçues par le déclarant d’entreprises, d’établissements ou d’organismes mentionnés au troisième alinéa ainsi que les participations financières qu’il y détient » ;
3° À l’article L. 1451-3, après le mot : « publique », sont insérés les mots : « , notamment en ce qui concerne les rémunérations reçues et les participations financières détenues au titre des liens d’intérêts directs déclarés, » ;
4° Au chapitre III du titre V du livre IV de la première partie, sont insérées une section 1 intitulée : « Produits de santé à usage humain » et comprenant l’article L. 1453-1 et une section 2 intitulée : « Médicaments vétérinaires » et comprenant l’article L. 5141-13-2, qui devient l’article L. 1453-2 ;
5° L’article L. 1453-1 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– au premier alinéa, après le mot : « publiques », sont insérés les mots : « , sur un site internet public unique, » ;
– au début du 6°, sont ajoutés les mots : « Les académies, » ;
– au 7°, le mot : « entreprises » est remplacé par les mots : « personnes morales » et les deux occurrences des mots : « les éditeurs » sont supprimées ;
– au 9°, après le mot : « initiale », sont insérés les mots : « ou continue » ;
– il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Cette obligation ne s’applique pas aux conventions régies par les articles L. 441-3 et L. 441-7 du code de commerce et qui ont pour objet l’achat de biens ou de services par les personnes physiques ou morales mentionnées aux 1° à 9° du présent I auprès des entreprises mentionnées au premier alinéa. » ;
b) Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Les entreprises produisant ou commercialisant des produits mentionnés au II de l’article L. 5311-1 ou assurant des prestations associées à ces produits sont tenues de rendre publiques, au-delà d’un seuil fixé par décret, sur le site mentionné au I, les rémunérations versées à des personnes physiques ou morales dans le cadre des conventions mentionnées au même I. » ;
c) Au II, après le mot : « espèces », sont insérés les mots : « autres que les rémunérations mentionnées au I bis » ;
d) Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – Les informations publiées sur le site internet public unique mentionné au I du présent article sont réutilisables, à titre gratuit, dans le respect de la finalité de transparence des liens d’intérêts et dans les conditions prévues aux articles 10 à 13 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal et, lorsque cette réutilisation donne lieu à un traitement de données, dans les conditions prévues par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment à ses articles 7, 38 et 40. » ;
e) La première phrase du III est ainsi modifiée :
– après le mot : « État », sont insérés les mots : « , pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, » ;
– après le mot : « publiques », sont insérés les mots : « sur le site internet public unique » ;
– après le mot : « objet », il est inséré le mot : « précis » ;
6° L’article L. 1453-2, tel qu’il résulte du 4° du présent article, est ainsi modifié :
a) Au début du 5° du I, sont ajoutés les mots : « Les académies, » ;
b) Le même I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’obligation mentionnée au premier alinéa du présent I ne s’applique pas aux conventions régies par les articles L. 441-3 et L. 441-7 du code de commerce et qui ont pour objet l’achat de biens ou de services par les personnes physiques ou morales mentionnées aux 1° à 8° du présent I auprès des entreprises mentionnées au premier alinéa. » ;
c) Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Les entreprises produisant ou commercialisant des médicaments vétérinaires ou assurant des prestations associées à ces produits sont tenues de rendre publiques, au-delà d’un seuil fixé par décret, les rémunérations versées à des personnes physiques ou morales dans le cadre des conventions mentionnées au I. » ;
d) Au III, après le mot : « espèces », sont insérés les mots : « autres que les rémunérations mentionnées au I bis » ;
7° Après la dernière occurrence du mot : « à », la fin de l’article L. 1454-3 est ainsi rédigée : « 9° du I du même article, les rémunérations mentionnées au I bis dudit article, ainsi que les avantages mentionnés au II du même article qu’elles leur procurent. » ;
8° L’article L. 5442-13 est abrogé ;
9° Après l’article L. 1454-3, il est inséré un article L. 1454-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1454-3-1. – Est puni de 45 000 € d’amende le fait pour les entreprises produisant ou commercialisant des médicaments vétérinaires ou assurant des prestations associées à ces produits de ne pas rendre publics les conventions mentionnées au I de l’article L. 1453-2 conclues avec les personnes physiques et morales mentionnées au même I, les rémunérations mentionnées au I bis du même article, ainsi que les avantages mentionnés au III dudit article qu’elles leur procurent. »
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, sur l'article.
M. Claude Malhuret. Madame la ministre, mes paroles vont sans doute sonner plus agréablement à vos oreilles que celles que j’ai prononcées hier.
Plusieurs articles de ce titre IV comportent de réelles avancées en matière de transparence, il convient de le dire. Mais, avant de les évoquer, je voudrais répondre aux propos de notre collègue Barbier hier après-midi. Je n’ai pu le faire sur-le-champ, parce que mon temps de parole était épuisé, mais il n’est pas question de laisser ses propos sans réponse.
Gilbert Barbier me reproche, pas moins, d’injurier les chercheurs français et d’insulter la recherche médicale française. Je vais donc préciser ma pensée, directement en lien avec le débat sur l’article 43 bis.
J’ai le plus grand respect pour la recherche française et pour les chercheurs français. Les vrais : ceux qui ne roulent en général pas sur l’or, travaillent sans faire de bruit dans leur laboratoire et font avancer la science. Ce n’est pas eux que j’ai pris à partie, et je regrette que notre collègue ait suggéré que je les aurais confondus avec les quelques chefs de service dont j’ai parlé : ceux qui signent quinze, vingt ou trente contrats par an avec l’industrie pharmaceutique.
Quand on sait qu’un essai clinique dure au minimum de six mois à un an, il n’est pas difficile de comprendre que ceux-là apposent leur signature sur des essais dont ils n’ont pas vu le commencement de l’ombre d’un patient. Ce sont eux que j’ai qualifiés de baudets à contrats et à conflits d’intérêts. Je maintiens très sereinement mes propos.
Ce sont les mêmes qui trustent les places dans les commissions, agences et hautes autorités, avec leur titre d’experts. À cet égard, je tiens à démonter l’argument souvent entendu, ici comme ailleurs, et que Gilbert Barbier a repris hier, un argument qui me met en colère : on ne pourrait se passer de ces experts, car c’est précisément parce qu’ils travaillent avec l’industrie pharmaceutique qu’ils seraient compétents en matière de médicaments.
À la vérité, deux mondes existent qui n’ont rien à voir l’un avec l’autre : celui de la recherche fondamentale, qui découvre les molécules, et celui des essais cliniques, qui se borne à recevoir les produits des laboratoires et à les tester sur des patients. Ce travail-là, n’importe quel chef de service de n’importe quel hôpital peut le réaliser, et l’on fait injure à tous ces médecins en soutenant que des experts sans conflit d’intérêts seraient des experts sans intérêt.
C’est, bien entendu, le contraire qui est vrai : 90 % des chefs de service refusent de cosigner des essais qu’ils n’ont pas conduits ; ils signent seulement ceux qu’ils peuvent matériellement conduire, c’est-à-dire un ou deux par an, parfois aucun. Naturellement, ils sont dix fois moins cités dans la littérature que ceux qui en signent, de façon anormale, trente par an. Voilà comment l’industrie fabrique des « experts » !
Il est dramatique que les commissions, aveuglées par ce tour de passe-passe, recrutent en priorité ces prétendus experts, dont la notoriété est le fruit de conflits d’intérêts. Aussi bien, contrairement à ce qu’on répète, il n’y aurait aucune difficulté à trouver des experts qui n’ont pas de conflit d’intérêts : il suffirait de s’adresser aux centaines de chefs de service hospitalo-universitaire qui n’en ont pas, ou peu, et qui sont évidemment tout aussi experts que ceux qui en sont bardés.
Si toutes les agences et commissions faisaient le contraire de ce qu’elles font aujourd’hui et ne recrutaient plus aucun expert qui signe plus de deux contrats par an avec l’industrie, la santé publique française et le déficit de la sécurité sociale s’en porteraient beaucoup mieux !
Je remercie Gilbert Barbier de m’avoir donné l’occasion de préciser ma pensée.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Je tiens à exposer au Sénat, dès avant que M. Malhuret ne présente son premier amendement, la logique d’ensemble des dispositions figurant aux articles 43 bis et 43 ter du projet de loi.
La transparence, j’en ai fait l’un des engagements de l’action que je mène et l’un des fils conducteurs de plusieurs textes adoptés depuis trois ans. Au demeurant, je remercie M. Malhuret d’avoir reconnu que, parmi les dispositions dont nous allons débattre dans quelques instants, certaines représentent des avancées tout à fait importantes dans ce domaine.
Je suis absolument convaincue que, pour sortir de l’ère du soupçon, ce qui est absolument indispensable, nous avons besoin de transparence : c’est en ne cachant rien, en permettant à chacune et à chacun de connaître les liens d’intérêts qui unissent des professionnels de santé avec des industriels, des liens qui ne sont pas nécessairement des conflits, que nous irons de l’avant.
Des mesures ont déjà été adoptées il y a un certain temps. Ainsi, ce n’est pas un hasard si le site transparence.sante.gouv.fr est extrêmement fréquenté : les Français sont désireux de connaître les relations qui unissent leurs professionnels de santé à des industriels. N’oublions pas non plus le décret du 9 juillet 2015, dont nous avons parlé hier, relatif à la composition de la commission de la transparence et de la commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé.
Lors des débats à l’Assemblée nationale, j’ai fait adopter deux séries de dispositions.
L’article 43 bis prévoit que les rémunérations versées dans le cadre des collaborations entre industries et professionnels de santé seront rendues publiques sur le site transparence.sante.gouv.fr et via la mise en ligne des déclarations publiques d’intérêts. En outre, il autorise la réutilisation de ces données, mesure qui n’est pas négligeable : des journalistes, mais d’autres aussi, pourront se saisir des informations portées sur le site, les trier, les exploiter et les présenter en fonction de leurs objectifs.
L’article 43 ter se rapporte au suivi de ces informations. Compte tenu du très grand nombre d’intervenants concernés et de la spécificité du secteur, la solution la plus efficace pour assurer ce suivi consiste à demander à chaque agence sanitaire de se doter d’un déontologue ; celui-ci établira un rapport annuel rendu public et pourra adresser aux personnes tenues à déclaration des demandes d’informations auxquelles elles seront tenues de répondre.
Tel est le dispositif adopté par l’Assemblée nationale. Je propose au Sénat de le compléter pour franchir une nouvelle étape en matière de transparence.
Il s’agit, plus précisément, d’habiliter le Gouvernement à renforcer les dispositions dites anti-cadeaux. Je vous rappelle que l’actuel dispositif en la matière, distinct de celui relatif à la transparence, interdit l’octroi par les entreprises d’avantages aux acteurs concernés, à l’exception des avantages accordés dans le cadre de conventions de recherche, d’évaluations scientifiques ou de l’hospitalité offerte de manière directe ou indirecte lors de manifestations de promotion ou de manifestations à caractère exclusivement professionnel et scientifique, dès lors qu’elles sont prévues par convention. Il est destiné à préserver l’indépendance des professionnels de santé, en particulier celle des prescripteurs.
Je souhaite que cette réglementation soit étendue à toutes les entreprises dont les produits ou les prestations sont susceptibles d’avoir une incidence sur la santé publique ; à toutes celles, en somme, qui proposent des produits de santé, qu’ils soient remboursés ou non – seuls les produits remboursés sont aujourd’hui concernés. Nous débattrons plus en détail de cette proposition dans quelques instants, mais je tenais à en souligner dès à présent l’importance.
Je vous proposerai également de compléter l’article 43 ter, relatif à la création du déontologue, afin d’en étendre les dispositions aux personnes qui, sans faire partie des commissions, sont invitées à apporter leur expertise sanitaire au conseil placé auprès du ministre.
Toutes ces mesures forment un ensemble cohérent destiné à renforcer la transparence.
Mesdames, messieurs les sénateurs, notre intention est d’assurer la transparence, mais sans encourager l’esprit de soupçon systématique. Des fraudes ont été commises, et aussi des tentatives pour occulter la réalité des choses ; elles ont conduit à une prise de conscience qui doit nous inspirer. Il n’en faut pas moins rappeler que les liens entre la recherche et l’université passent par les relations entretenues par des services hospitaliers, des professionnels de santé et des chercheurs avec des industriels. Ces relations sont possibles, et même nécessaires, mais elles doivent être nouées dans la transparence absolue, car c’est la transparence qui distingue le lien d’intérêts du conflit d’intérêts.
Tels sont les principes qui guideront mes positions au sujet des amendements présentés sur les articles 43 bis et 43 ter.