compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Pierre Caffet
vice-président
Secrétaires :
M. François Fortassin,
M. Bruno Gilles.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Croissance, activité et égalité des chances économiques
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (projet n° 300, texte de la commission n° 371, rapport n° 370, tomes I, II et III).
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission spéciale.
TITRE II (suite)
INVESTIR
Chapitre Ier (suite)
Investissement
Section 1 (suite)
Faciliter les projets
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein de la section 1 du chapitre Ier du titre II, à l’article 33 septies D.
Article 33 septies D (nouveau)
Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° La section 4 du chapitre II du titre Ier du livre II est complétée par un article L. 34-8-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 34-8-5. – Les zones, incluant les centre-bourgs ou des axes de transport prioritaires, non couvertes par tous les opérateurs de radiocommunications mobiles de deuxième génération, sont couvertes en services de téléphonie mobile de deuxième génération de voix et de données par l’un de ces opérateurs chargés d’assurer une prestation d’itinérance locale, dans les conditions prévues à l’article L. 34-8-1.
« Par dérogation au premier alinéa du présent article, la couverture en téléphonie mobile dans certaines zones est assurée, si tous les opérateurs de radiocommunications mobiles en conviennent, par un partage d’infrastructures entre les opérateurs.
« Les zones mentionnées au même premier alinéa sont identifiées par le représentant de l’État dans la région en concertation avec les départements et les opérateurs. En cas de différend sur l’identification de ces zones dans un département, les zones concernées sont identifiées au terme d’une campagne de mesures conformément à une méthodologie validée par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Le ministre concerné rend publique la liste nationale des zones ainsi identifiées et la communique à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
« Sur la base de la liste nationale définie au troisième alinéa et dans les deux mois suivant sa transmission aux opérateurs par le ministre, les opérateurs adressent audit ministre et à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes un projet de répartition entre les zones qui sont couvertes selon le schéma de l’itinérance locale et celles qui sont couvertes selon le schéma du partage d’infrastructures, un projet de répartition des zones d’itinérance locale entre les opérateurs, ainsi qu’un projet de calendrier prévisionnel de déploiement des installations passives et actives nécessaires, notamment les pylônes et les équipements et contrôleurs de stations de base. Le ministre approuve ce calendrier prévisionnel dans le mois suivant sa transmission par les opérateurs. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes se prononce sur les répartitions proposées, qui ne doivent pas perturber l’équilibre concurrentiel entre les opérateurs de téléphonie mobile, dans le mois suivant leur transmission par les opérateurs. La couverture d’une commune est assurée dans les trois ans suivant son identification par le ministre. » ;
2° Au second alinéa du 17° de l’article L. 32 et à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 34-8-1, les mots : « de deuxième génération » sont supprimés.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, sur l’article.
M. Jean Desessard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons depuis hier soir des dispositions du projet de loi ayant trait aux ondes électromagnétiques et aux dangers que l’exposition à ces dernières peut représenter.
Un compromis sur ce sujet avait été trouvé au Sénat dans la loi du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques, dite « loi Ondes », qui avait d’ailleurs été repris par un vote conforme à l’Assemblée nationale.
Hier soir, monsieur le ministre, vous avez présenté un amendement n° 1501, qui portait sur trois points différents : l’un ne posait pas de problème ; un autre introduisait la notion de « présence prolongée », qui peut être considérée comme créant les conditions d’un flou juridique ; un dernier concernait certaines modalités techniques, et pouvait être sujet à interprétation. Cela dit, on peut penser que cet amendement respectait l’équilibre trouvé sur ce sujet par le Sénat et l’Assemblée nationale.
Monsieur le ministre, vous vous en êtes remis à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 333 présenté par Bruno Sido. Cela m’étonne, car le dispositif de cet amendement remet en cause l’équilibre trouvé dans la loi Ondes.
Bruno Sido n’a pas précisé la teneur de l’article L. 5232-1-2 du code de la santé publique que son amendement tendait à abroger, en prétendant ne pas la connaître. Cela peut se comprendre. Peut-être n’avait-il pas envie de le dire ?
Mme la rapporteur n’a pas non plus répondu à notre demande d’explication sur le sujet. Je considère que les équipes du Sénat ne doivent pas servir que la seule majorité ; elles doivent aussi aider les partis de la minorité sénatoriale à faire leur travail, en leur donnant les renseignements qu’ils demandent.
Je vais donc vous lire l’article en question, mes chers collègues, qui a été abrogé hier, car il m’intéressait d’en connaître les dispositions.
M. Hervé Maurey. C’est pour cela que vous êtes de mauvaise humeur !
M. Jean Desessard. Je suis de mauvaise humeur parce que je me suis senti floué, trompé, mon cher collègue. Ce n’est jamais agréable, vous en conviendrez !
M. Hervé Maurey. Tout à fait !
M. Jean Desessard. L’article L. 5232-1-2 du code de la santé publique disposait donc : « Est interdite toute publicité, quel que soit son moyen ou son support, ayant pour but la promotion de l’usage d’un téléphone mobile sans accessoire permettant de limiter l’exposition de la tête aux champs électromagnétiques émis par l’équipement. Le contrevenant est passible d’une amende maximale de 75 000 euros ».
En abrogeant cet article, mes chers collègues, on supprime la possibilité d’infliger une amende à celui qui ne respecte pas la loi.
Par ailleurs, le 1° de l’amendement n° 333 tendait à remplacer la notion de promotion « de l’usage » d’un téléphone mobile par celle de la promotion « directe ». Ce faisant, on autorise à ne prendre que le téléphone mobile en photo. Cela change tout ! Les publicités montrent généralement des personnes utilisant leur téléphone ; rarement le téléphone seul.
Dès lors, en s’en remettant à la sagesse du Sénat sur cet amendement n° 333 de M. Sido, monsieur le ministre, vous avez permis la suppression d’une disposition importante, qui interdisait la publicité pour les téléphones mobiles. Les opérateurs ont réussi à faire supprimer la possibilité d’infliger une amende, et à changer la nature même des dispositions de l’article du code de santé publique, puisque désormais l’encadrement de la promotion « de l’usage » d’un téléphone mobile, notion assez claire, est remplacé par l’encadrement de la promotion « directe », qui est très limitative.
Je regrette que nous n’ayons pas pris le temps de mieux étudier cette question hier soir. Je comprends qu’à minuit et quinze minutes, il n’est pas facile d’avoir un débat complètement documenté, d’autant que chacun d’entre nous aspire à voir la séance être levée quinze minutes plus tard…
M. Charles Revet. Il y avait tout de même beaucoup de sénateurs, cher collègue, et très attentifs encore !
M. Jean Desessard. C’est vrai, cher collègue. Je dois néanmoins reconnaître ne pas l’avoir été assez ; la résistance d’un Parisien n’est pas celle d’un Normand ! (Sourires.)
Je suis assez déçu que la loi Ondes, fruit d’un équilibre trouvé au Sénat et à l’Assemblée nationale, ait été ainsi remise en cause, monsieur le ministre.
Je suis aussi déçu de n’avoir pas eu plus de renseignements sur le sujet de la part de la commission spéciale.
Je regrette, enfin, que Bruno Sido ait voulu dissimuler les informations que nous lui demandions de donner. C’est qu’il avait peut-être un intérêt direct à ne pas le faire.
C’est en définitive un épisode à mon avis regrettable, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur de la commission spéciale. Monsieur Desessard, il ne vous aura pas échappé que, lorsque nous avons examiné l’amendement n° 333 de M. Sido, la commission spéciale, n’ayant pas véritablement compris les implications sous-jacentes qu’aurait eues son adoption, et n’ayant pas disposé des informations nécessaires pour se prononcer sur le sujet lors de ses travaux, a pris le soin de demander l’avis du Gouvernement.
Il revenait donc au Gouvernement de vous donner son avis ! M. le ministre a préféré s’en remettre à la sagesse du Sénat, sans entrer véritablement dans le fond du sujet. Je renvoie donc au Gouvernement le soin de vous répondre, mon cher collègue.
Mme Catherine Deroche, corapporteur de la commission spéciale. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 455, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Le présent amendement vise à préserver des « zones blanches » pour les personnes électrosensibles.
Je note tout d’abord que l’article 33 septies D est redondant avec une disposition figurant dans le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou NOTRe, qui lui est identique. Pourquoi se répéter ?
Je comprends que tout le monde veuille une couverture en téléphonie mobile de l’ensemble du territoire. C’est le sens en effet du présent article, qui tend à mettre en œuvre une obligation de couverture des zones dites « grises » et « blanches » de téléphonie mobile, en recourant à la prestation d’itinérance locale ou à la mutualisation des infrastructures.
Je vous l’accorde, mes chers collègues, l’objectif de cet article est louable. Il s’inscrit dans la continuité de la proposition de loi visant à assurer l’aménagement numérique du territoire, dite « Leroy-Maurey », et vise à réduire la fracture numérique territoriale, pour qu’il n’y ait pas de citoyens de seconde zone, qui soient exclus des technologies de l’information.
M. Hervé Maurey. Oui !
M. Jean Desessard. Cependant, cette disposition passe sous silence un aspect important de la réalité du développement de la téléphonie mobile sur notre territoire : l’électrosensibilité. Un nombre croissant de nos concitoyens vivent en effet des souffrances, que de plus en plus de scientifiques imputent à l’exposition aux champs électromagnétiques. Il s’agit, plus précisément, du syndrome d’intolérance aux champs électromagnétiques.
Certains nient ce syndrome ; d’autres constatent en revanche un accroissement de l’hypersensibilité aux ondes électromagnétiques. Il serait d’ailleurs intéressant que les pouvoirs publics se saisissent du sujet, car, depuis l’étude menée en 2009 par l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, force est de constater qu’aucun autre document officiel n’a abordé la question.
En résumé, nous sommes favorables à l’extension de la couverture, afin que chacun ait la possibilité d’utiliser un téléphone mobile. Sur ce point, nos positions convergent. Mais il faudrait tout de même prévoir des zones spéciales pour les personnes électrosensibles.
Certains d’entre nous ne supportent pas les ondes, et nous ne disposons pas, aujourd’hui, de lieu pour les accueillir. Jusqu’à présent, ces personnes pouvaient se réfugier dans les zones blanches. Mais si l’on fait disparaître complètement celles-ci, les personnes électrosensibles n’auront plus d’endroit où aller, ce qui constituera un facteur important d’exclusion sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur de la commission spéciale. Nous ne contestons pas le fait que certains de nos concitoyens sont particulièrement sensibles à ce type d’ondes et peuvent vouloir s’en tenir écartés. Pour autant, la couverture des zones blanches et grises n’aboutira pas à une couverture complète du territoire. Seront uniquement concernés les villes et les hameaux, et encore selon des critères assez souples, puisque l’obligation de couverture concerne les seuls centres-bourgs. Dès lors, il restera un certain nombre de zones préservées.
Je rappelle que, selon le rapport de notre collègue Hervé Maurey consacré à l’aménagement numérique des territoires, rapport datant de 2011, 2,3 % de la surface du territoire métropolitain, soit environ 12 600 kilomètres carrés, n’est pas couverte par un seul opérateur.
La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 455.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Je tiens tout d’abord à répondre à la première intervention de M. Jean Desessard et à rassurer celui-ci sur le fait que, dans la perspective de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, et si, faute d’une discussion suffisante, une erreur a été commise, je suis tout à fait prêt à revenir sur le sujet.
En m’en remettant, hier, à la sagesse de la Haute Assemblée sur l’amendement n° 333 de M. Bruno Sido, j’acceptais que l’on modifie l’article L. 5232-1-1 du code de la santé publique. J’en rappelle les termes : « Toute publicité, quel que soit son moyen ou son support, ayant pour but la promotion de l’usage d’un téléphone mobile pour des communications vocales mentionne de manière claire, visible et lisible l’usage recommandé d’un dispositif permettant de limiter l’exposition de la tête aux émissions radioélectriques émises par l’équipement ».
En fait, ce que nous avons supprimé, c’est une obligation de mentionner systématiquement l’oreillette dans la publicité.
M. Jean Desessard. C’est l’article L. 5232-1-2 qui pose problème !
M. Emmanuel Macron, ministre. De la même manière, cet article ne consacre pas une obligation de fond.
M. Jean Desessard. Il prévoit une amende de 75 000 euros.
M. Emmanuel Macron, ministre. Certes, mais, de nouveau, nous traitons, non pas d’une obligation de santé publique, mais d’une question de publicité. Je vois donc plutôt, dans les mesures adoptées, un élément de simplification, s’inscrivant dans la lignée de nos discussions d’hier. C’est bien l’obligation d’afficher systématiquement l’oreillette dans toute publicité qui est supprimée, ce qui n’a rien à voir avec une obligation de port de l’oreillette.
Ainsi, selon l’article L. 5232-1-2, « est interdite toute publicité, quel que soit son moyen ou son support, ayant pour but la promotion de l’usage d’un téléphone mobile sans accessoire permettant de limiter l’exposition de la tête aux champs électromagnétiques émis par l’équipement. Le contrevenant est passible d’une amende maximale de 75 000 euros. »
L’adoption de l’amendement n° 333 va donc dans le sens d’une simplification. Dans un souci de clarté des débats, pour que tout le monde comprenne bien ce dont il est question, je tenais à remettre le sujet en perspective, mais, entre nous, il m’apparaît comme un sujet de second rang au regard de notre discussion et des apports de la loi du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques, la loi ondes. Nous ne traitons ici, j’y insiste, que des questions d’obligations en matière de publicité.
Néanmoins, je suis prêt à reprendre la discussion à froid, monsieur Desessard, afin que vous n’ayez pas le sentiment d’avoir été lésé. Je m’engage donc à ce que ce dialogue ait lieu, en tout cas si nous avons raté un élément, mais le sujet me semble vraiment mineur.
Par ailleurs, vous avez soulevé, dans votre deuxième intervention, l’importante question des personnes électro-sensibles.
Il me paraît nécessaire, mesdames, messieurs les sénateurs, que, dans le cadre de vos débats sur le projet de loi de modernisation de notre système de santé, vous puissiez réfléchir aux dispositifs utiles sur le sujet, car, effectivement, c’est un problème avéré, qu’il faut considérer avec sérieux et ne pas négliger.
Je partage donc la préoccupation exprimée. Ce n’est pas parce que toutes les réponses n’ont pas encore été apportées sur le plan scientifique que la problématique est mineure, et nous devons veiller à la traiter sur le plan de la santé publique. Tel est, en tout cas, l’engagement que je voulais porter à la suite de l’intervention de M. Jean Desessard.
S’agissant maintenant de l’amendement n° 455, je pense que la commission spéciale a pris une bonne initiative en en relançant le sujet dans le cadre de ce projet de loi.
La discussion que nous menons depuis deux jours témoigne d’une approche cohérente de toutes les mesures relatives à la couverture du territoire en matière de téléphonie. Compte tenu de l’importance de l’enjeu économique, le Gouvernement a la volonté d’enrichir le texte de ces éléments. Mais le sujet rassemble à la fois des objectifs économiques, des objectifs environnementaux et de santé publique – nous venons de les évoquer – et des objectifs d’aménagement du territoire. Par conséquent, nous ne pouvons en faire l’économie ici.
Certes, la question a été déjà été traitée dans le cadre du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dit NOTRe. Mais, comme j’aurai l’occasion de l’expliquer en présentant l’amendement que le Gouvernement portera à cet article 33 septies D, le dispositif que nous proposons est un peu différent sur le plan juridique et a toute sa cohérence dans le présent texte. Le Gouvernement souhaite donc qu’il y soit intégré. Ainsi, nous aurons adopté, dans une rédaction plus précise, des mesures qui pourront entrer en vigueur plus rapidement, ce qui, compte tenu de l’importance de ces sujets, me semble préférable.
J’invite donc M. Desessard à retirer l’amendement n° 455, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je voudrais signaler à l’attention de mon collègue et ami Jean Desessard que, si certaines personnes sont électro-sensibles, on trouve aussi dans la population des « personnes électro-insensibles par contrainte » : les ruraux, sur une bonne partie du territoire !
Peut-être qu’en attendant de régler définitivement leur problème, nous pouvons recommander aux personnes électro-sensibles de s’installer dans ces villages où, par manque de couverture en téléphonie mobile, elles ne risquent strictement rien. Mais, dans l’immédiat, l’urgence me paraît tout de même d’assurer une couverture maximale du territoire. En effet, qu’on le veuille ou pas, la possibilité de faire usage d’un téléphone portable représente un élément de modernité n’ayant rien d’exceptionnel.
Bien évidemment, des précautions sont nécessaires, mais il est des urgences plus grandes, me semble-t-il. Je suis donc quelque peu étonné de voir, alors même que la couverture du territoire est insuffisante, que l’on se préoccupe en priorité de ce problème, celui-ci, au demeurant, me paraissant plutôt difficile à résoudre en dehors d’une pratique individuelle.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Dans mon intervention, j’ai tout de même expliqué comprendre que chacun devait pouvoir bénéficier d’une couverture. Mais il serait aussi problématique que personne ne prenne en compte une catégorie de la population qui souffre. Certes, on peut considérer le traitement des questions générales comme nécessaire et prioritaire, mais une personne électro-sensible qui ne peut plus résider ou travailler dans certaines zones rencontre une difficulté cruciale.
J’ai bien saisi, à l’écoute des différentes interventions, que le problème n’était pas nié. Je ne pense pas, monsieur Collombat, qu’il soit insoluble, même s’il est difficile à régler. M. le ministre m’a assuré que la question serait soit prise en compte dans le cadre de l’examen du projet de loi santé, soit mise à l’étude. Du fait de cette attention portée au sujet, j’accepte de retirer mon amendement n° 455.
Je remercie également M. le ministre d’avoir pris le temps de répondre à mon intervention liminaire. Je n’ai pas tout à fait la même lecture que lui, mais sa réponse a au moins le mérite d’expliciter les propos d’hier soir et l’avis qu’il a formulé. Pour ma part, je reste persuadé que la décision prise porte atteinte à l’équilibre de la loi Ondes.
M. le président. L'amendement n° 455 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 838 rectifié, présenté par MM. Retailleau, Allizard, G. Bailly, Baroin, Bignon, Bizet, Bonhomme, Bouchet, Bouvard, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Commeinhes, Courtois, Danesi et Darnaud, Mme Debré, M. Dériot, Mmes Deromedi, Deseyne et di Folco, MM. Doligé et P. Dominati, Mmes Duchêne et Duranton, MM. Emorine, Falco, Forissier, Fouché et B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Grand, Gremillet, Grosdidier et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Houel, Huré et Hyest, Mme Imbert, MM. Joyandet, Kennel, Laménie et Laufoaulu, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Leleux, Lemoyne, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pintat, Pinton et Portelli, Mme Primas, MM. de Raincourt, Raison, Revet, D. Robert, Saugey, Savin, Sido et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vasselle, Vogel et Dufaut, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les zones non couvertes en services de radiocommunication mobile de deuxième et troisième générations à la date de promulgation de la présente loi et identifiées en tant que telles par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes sont couvertes par ces technologies d’ici le 31 décembre 2016. L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes formule des propositions d’amélioration de la couverture de ces zones.
Un décret en Conseil d’État fixe les modalités techniques permettant d’atteindre l’objectif mentionné au premier alinéa.
La parole est à M. Bruno Retailleau.
M. Bruno Retailleau. Avec cet amendement, que, conjointement à d’autres collègues, j’ai eu l’honneur de déposer, mais aussi avec l’amendement suivant proposé par le Gouvernement, nous abordons la question de la couverture du territoire en matière de téléphonie mobile.
Comme nous tous, monsieur le ministre, vous avez lu les travaux de Christophe Guilluy sur la fracture territoriale française…
Mme Nicole Bricq. Ils sont contestés !
M. Pierre-Yves Collombat. Évidemment !
Mme Nicole Bricq. En tout cas, il y a débat !
M. Pierre-Yves Collombat. Il y a un problème aussi !
M. Bruno Retailleau. Les élections européennes et départementales ont malheureusement apporté, dans leur verdict, la confirmation de ces analyses : une partie des territoires de France – la ruralité, mais pas seulement – se sent abandonnée, en matière tant de présence des services publics que de couverture numérique du territoire.
Voilà exactement douze ans que j’ai entendu prononcer, pour la première fois, l’expression : « couverture des zones blanches ». À l’époque, un premier programme – gouvernemental – avait été lancé. Il prétendait régler le problème en quelques années. Nous étions en 2003, voilà de cela douze ans ! Un autre accord a été conclu en 2010, prévoyant notamment une mutualisation des fréquences, que l’on a désignée sous le terme barbare de « RAN sharing ».
Pourtant, aujourd’hui encore, de larges pans du territoire sont toujours situés en zone blanche. Il s’agit soit de zones classées comme telles, soit de zones qui ne sont pas considérées comme des zones blanches au sens de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, mais qui, de fait, le sont. Effectivement, la méthode de calcul utilisée, dans les études, pour identifier les zones blanches présente un biais.
J’ajoute que la qualité de service en matière de téléphonie mobile, qui n’est pas mesurée par l’ARCEP sur une très grande part du territoire, s’est dégradée, les opérateurs investissant sur la 4G – on ne peut pas leur en vouloir – et l’explosion du trafic – data, vidéo, et autres – ayant entraîné une dégradation des anciens réseaux.
Les zones blanches existent donc, et je prétends, mes chers collègues, qu’elles sont plus larges encore qu’elles ne l’étaient voilà quelques années.
Il faut donc mettre un terme à cette situation. Le Premier ministre a fait des annonces en ce sens, et cet amendement n° 838 rectifié vise un objectif précis, en fixant un délai de dix-huit mois pour régler l’affaire définitivement. Des moyens seraient alors demandés à l’ARCEP, peut-être par le biais d’un décret.
J’ajoute que le problème concerne non plus la 2G, mais à tout le moins la 3G. Imaginer que l’on puisse résoudre le problème des zones blanches en France avec la 2G, c’est effectivement faire insulte à tous les Français qui vivent dans ces zones périphériques, bien souvent abandonnées de tous.
M. le président. L'amendement n° 1761 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le chapitre Ier du titre V de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique est complété par des articles 52-1 et 52-2 ainsi rédigés :
« Art. 52-1. – I. – La liste nationale mentionnée au III de l’article 52 est complétée par une liste comportant les zones suivantes :
« 1° Les centre-bourgs de communes qui répondent aux critères fixés au premier alinéa du même III ;
« 2° Les anciens centre-bourgs de communes ayant fusionné avec une autre commune au cours d’une période de cinquante ans précédant la date de promulgation de la loi n° … du … pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques identifiés comme n’étant couverts par aucun exploitant d’un réseau mobile ouvert au public, titulaire d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques.
« II. – Cette liste est arrêtée conjointement par le ministre chargé des communications électroniques et le ministre chargé de l’aménagement du territoire dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la loi n° … du … précitée, en concertation avec l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, les représentants des collectivités territoriales et les exploitants des réseaux précités.
« III. – Les zones inscrites dans la liste mentionnée au II du présent article sont couvertes en services de téléphonie mobile de deuxième génération dans les conditions prévues à l’article 52 avant le 31 décembre 2016 ou au plus tard dans un délai de six mois suivant la mise à disposition effective des infrastructures par les collectivités territoriales ou leurs groupements.
« Art. 52-2. – Les zones résiduelles du programme d’extension de la couverture par les réseaux de téléphonie mobile de deuxième génération sont couvertes en services de téléphonie mobile de deuxième génération avant le 31 décembre 2016 ou, lorsqu’une mise à disposition d’infrastructure par les collectivités territoriales ou leurs groupements est prévue, au plus tard dans un délai de six mois suivant leur mise à disposition effective.
« On entend par zones résiduelles du programme d’extension de la téléphonie mobile de deuxième génération :
« 1° Les zones de la liste nationale mentionnée au III de l’article 52 non couvertes en services de téléphonie mobile de deuxième génération à la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques ;
« 2° Les zones que les opérateurs de communications électroniques, titulaires, à la date d’entrée en vigueur de la même loi, d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques pour l’exploitation d’un réseau mobile ouvert au public de deuxième génération, se sont engagés à couvrir par voie conventionnelle en services de téléphonie mobile de deuxième génération dans le cadre d’un partage des réseaux mobiles ouverts au public. »
II. – Après l’article 119 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, sont insérés des articles 119-1 et 119-2 ainsi rédigés :
« Art. 119-1. – I. – La couverture en services mobiles de troisième génération des zones identifiées en application de l’article 119 par les opérateurs de communications électroniques, titulaires, à la date d’entrée en vigueur de la loi n° … du … pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques pour l’exploitation d’un réseau mobile ouvert au public de troisième génération, est réalisée au plus tard le 30 juin 2017.
« Lorsque l’une de ces zones est couverte en services mobiles de quatrième génération par ces mêmes exploitants, elle est réputée couverte au sens du premier alinéa du présent article.
« II. – Dans les deux mois suivant la promulgation de la loi précitée, les opérateurs de communications électroniques, titulaires, à la date d'entrée en vigueur de cette même loi, d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques pour l’exploitation d’un réseau mobile ouvert au public de troisième génération, adressent conjointement à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et au ministre chargé des communications électroniques les projets de conventions portant sur les modalités techniques et financières du partage des installations de réseau de communications électroniques mobiles prévu à l’article 119, la répartition entre les opérateurs de la responsabilité du déploiement sur chacune des zones en cause, le calendrier prévisionnel de ce déploiement et de mise à disposition de prestations de partage par l’opérateur responsable sur chacune des zones, ainsi que le calendrier de disponibilité des services mobiles de chacun des opérateurs sur chacune des zones. Les prestations de chaque opérateur sont proposées dans des conditions objectives, transparentes et non discriminatoires.
« L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes vérifie la conformité du projet au cadre réglementaire applicable et, le cas échéant, donne son approbation à ce projet.
« En l’absence de transmission conjointe par les opérateurs d’un projet, en cas de non-conformité de ce projet au cadre réglementaire applicable, ou en cas de défaut de mise en œuvre des conventions conclues, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes fixe la répartition des zones entre opérateurs et le calendrier de déploiement des zones concernées par chaque opérateur dans les conditions définies à l’article L. 36-7 du code des postes et des communications électroniques et, le cas échéant, les modalités techniques et financières du partage d’installations actives dans les conditions définies à l’article L. 34-8 du même code.
« Art. 119-2. – La couverture des zones mentionnées à l’article 52-1 de la loi n° 2004-575 pour la confiance dans l’économie numérique en services mobiles de troisième ou quatrième génération est réalisée avant le 31 décembre 2016 ou au plus tard dans un délai de six mois suivant la mise à disposition effective des infrastructures par les collectivités territoriales ou leurs groupements, dans les conditions prévues au II de l’article 119-1 de la présente loi et à l’article L. 34-8-1-1 du code des postes et des communications électroniques, par les opérateurs de communications électroniques, titulaires d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques pour l’exploitation d’un réseau mobile ouvert au public. »
III. – Le code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 34-8-4, il est inséré un article L. 34-8-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 34-8-5. – Dans un délai de trois mois suivant la promulgation de la loi n° … du … pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, l’État, les représentants des collectivités territoriales et les opérateurs de communications électroniques, titulaires d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques pour l’exploitation d’un réseau mobile ouvert au public, concluent une convention définissant les conditions dans lesquelles la couverture des zones où aucun service mobile n’est disponible à la date de publication de la loi n° … du … précitée est assurée, à l’exception des zones identifiées en application du III de l’article 52 ou des articles 52-1 et 52-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique ou des articles 119, 119-1 et 119-2 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.
« Elle prévoit notamment les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, après avoir constaté une carence d’initiative privée, mettre à disposition des exploitants une infrastructure comprenant un point haut support d’antenne, un raccordement à un réseau d’énergie et un raccordement à un réseau fixe ouvert au public, permettant d’assurer la couverture de la zone en cause en services mobiles de deuxième génération et de troisième ou quatrième génération, dans des conditions techniques et tarifaires raisonnables.
« Les opérateurs informent conjointement l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes des obligations individuelles qu’ils ont respectivement contractées dans le cadre de la mise en œuvre de la convention mentionnée au premier alinéa du présent article. » ;
2° L’article L. 35-1 est ainsi modifié :
a) Au 2°, les mots : « et électronique » sont remplacées par les mots : « ou électronique » ;
b) Le 3° est abrogé ;
c) Au 4°, les références : « , 2° et 3° » sont remplacées par la référence : « et 2° » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 35-2, les mots : « pour la composante du service universel mentionnée au 3° de l’article L. 35-1 ou » sont supprimés et les mots : « du même article » sont remplacés par les mots : « de l'article L. 35-1 » ;
4° Le premier alinéa de l’article L. 35-2-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « ou la composante du service universel mentionnée au 3° du même article » sont supprimés ;
b) À la seconde phrase, la référence : « ou au 3° » est supprimée ;
5° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 35-4, les mots : « et électronique » sont remplacés par les mots : « ou électronique » ;
6° Après le 5° de l’article L. 36-6, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° Les prescriptions applicables aux conditions techniques et tarifaires pour l’accès à l’infrastructure mentionnée à l’article L. 34-8-5, conformément aux I et IV de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales. » ;
7° L’article L. 36-7 est complété par un 9° ainsi rédigé :
« 9° Fixe, le cas échéant, les obligations de chacun des opérateurs de communications électroniques, titulaires d’une autorisation d’utilisation de fréquences radioélectriques pour l’exploitation d’un réseau mobile ouvert au public de troisième génération, afin d’assurer la couverture en services mobiles de troisième génération des zones identifiées en application de l’article 119 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie. » ;
8° Après l’article L. 36-10, il est inséré un article L. 36-10-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 36-10-1. – L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes a pour mission de veiller au respect :
« 1° Du III de l’article 52 et des articles 52-1 et 52-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique ;
« 2° Des articles 119, 119-1 et 119-2 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ;
« 3° De la couverture en téléphonie mobile des zones mentionnées aux 1° et 2° du présent article, ainsi que de celles qui n’étaient pas couvertes en 2003 et qui l’ont été par la mise en œuvre d’un partage de réseau radioélectrique ouvert au public par voie conventionnelle entre les opérateurs ;
« 4° Des obligations contractées par chacun des opérateurs en application de l’article L. 34-8-5. »
La parole est à M. le ministre.