M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Cet amendement devrait plaire tout particulièrement à Jean-Pierre Vial et à tous ceux qui sont intervenus dans ce débat en faveur des industries électro-intensives. En revanche, je ne suis pas sûr que cet amendement obtienne la même bénédiction d’un autre Jean-Pierre, notre collègue Bosino. (Sourires.)
Cet amendement vise à préciser que, dans l’évaluation de l’équilibre économique futur de la concession pour fixer la redevance hydraulique, l’autorité concédante doit prendre en compte la stratégie de commercialisation du concessionnaire, laquelle peut notamment le conduire à approvisionner un consommateur participant au capital de la concession ou des industriels électro-intensifs qui auraient investi dans la concession à long terme.
De tels contrats d’approvisionnement conduisent souvent à un prix de vente de l’électricité plus faible que le prix de marché, en contrepartie de l’investissement. Pour éviter de pénaliser les concessionnaires qui concluent ces contrats, il convient de garantir que l’autorité concédante en tienne compte au moment d’évaluer les conditions économiques de la concession et de fixer le taux de redevance.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, qui tend à prendre en compte la situation réelle de la concession, notamment avec les contrats de long terme que le concessionnaire a conclus avec des industriels électro-intensifs, au lieu de se fonder seulement sur une valorisation de l’électricité au prix de marché.
Cette mesure évitera de pénaliser les concessionnaires qui approvisionnent des industriels.
M. le président. Je mets aux voix l'article 28, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 100 :
Nombre de votants | 338 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Pour l’adoption | 319 |
Contre | 19 |
Le Sénat a adopté.
Article 28 bis
Le dernier alinéa de l’article L. 523-2 du code de l’énergie est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Un douzième de la redevance est affecté aux communes sur le territoire desquelles coulent les cours d’eau utilisés. La répartition entre les communes est proportionnelle à la puissance hydraulique devenue indisponible dans les limites de chaque commune du fait de l’ouvrage hydroélectrique.
« Un douzième de la redevance est affecté aux groupements de communes sur le territoire desquelles coulent les cours d’eau utilisés. La répartition entre les communautés est proportionnelle à la puissance hydraulique devenue indisponible dans les limites de chaque communauté du fait de l’ouvrage hydroélectrique. »
M. le président. L'amendement n° 572 rectifié bis, présenté par Mme Lamure, MM. Calvet, P. Leroy, César et Gremillet et Mme Primas, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. L’article 28 bis vise à modifier la règle de répartition de la redevance d’hydroélectricité en affectant automatiquement et au maximum un douzième de cette redevance aux communes et un autre douzième aux établissements publics de coopération intercommunale.
Aujourd’hui, outre la part de l’État, un tiers de cette ressource est répartie entre les départements sur le territoire desquels coulent les cours d'eau utilisés. Un sixième de la redevance est affectée aux communes.
Le texte tend à réduire de moitié la part réservée aux communes et à préempter une décision relevant à ce jour exclusivement du couple commune-intercommunalité. Une telle mesure contribuerait à réduire encore davantage les ressources des communes.
Cet amendement de suppression vise donc à conserver le mode de répartition actuel de la redevance d’hydroélectricité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. La commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 572 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. En conséquence, l'article 28 bis est supprimé.
Articles additionnels après l'article 28 bis
M. le président. L'amendement n° 872, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Après l’article 28 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 2° de l’article L. 314-1 du code de l’énergie, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Lorsque l’exploitant ou le producteur utilise la station de transfert d’énergie par pompage pour remonter l’eau, cette opération ne peut donner lieu à aucun prélèvement prévu. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 890, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Après l’article 28 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le cadre des dispositions prévues par la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006, les bénéficiaires de contingents d'énergie réservés bénéficient d'une information écrite automatique à la suite de l'actualisation du tableau des bénéficiaires mentionné dans ladite loi.
Cet amendement n’est pas soutenu.
Article 29
I. – Le chapitre Ier du titre II du livre V du code de l’énergie est complété par une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Les sociétés d’économie mixte hydroélectriques
« Art. L. 521-18. – I. – Pour assurer l’exécution d’une concession prévue à l’article L. 511-5, l’État peut créer, avec au moins un opérateur économique, qualifié d’actionnaire opérateur, et, le cas échéant, avec les personnes morales mentionnées aux III et IV du présent article, une société d’économie mixte hydroélectrique.
« Cette société d’économie mixte à opération unique est constituée pour une durée limitée en vue de la conclusion et de l’exécution, dans les conditions définies au présent titre II, d’une concession dont l’objet est l’aménagement et l’exploitation, selon les modalités fixées au cahier des charges prévu à l’article L. 521-4, d’une ou de plusieurs installations constituant une chaîne d’aménagements hydrauliquement liés. Cet objet unique ne peut pas être modifié pendant toute la durée du contrat.
« II. – La société d’économie mixte hydroélectrique revêt la forme de société anonyme régie par le chapitre V du titre II et le titre III du livre II du code de commerce, sous réserve des dispositions de la présente section. Elle est composée, par dérogation à l’article L. 225-1 du même code, d’au moins deux actionnaires.
« III. – Dans le cadre des compétences qui leur sont reconnues par la loi en matière de gestion équilibrée des usages de l’eau, de distribution publique d’électricité ou de production d’énergie renouvelable, les collectivités territoriales ou les groupements de collectivités territoriales riveraines des cours d’eau dont la force hydraulique est exploitée en vertu de la concession mentionnée au I peuvent, si l’État approuve leur demande à cet effet, devenir actionnaires de la société d’économie mixte hydroélectrique, dans les conditions et selon les modalités prévues par décret en Conseil d’État.
« Les modalités de participation de ces collectivités territoriales ou de leurs groupements au capital d’une société d’économie mixte hydroélectrique, notamment leurs concours financiers, sont régies par le titre II du livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales, sous réserve des dispositions de la présente section.
« IV. – Si l’État le leur demande et si elles y consentent, d’autres personnes morales de droit public et des entreprises ou des organismes dont le capital est exclusivement détenu par des personnes morales de droit public, qualifiés de partenaires publics, peuvent également devenir actionnaires de la société d’économie mixte hydroélectrique.
« V. – Les statuts de la société d’économie mixte hydroélectrique ou un pacte d’actionnaires fixent le nombre de sièges d’administrateur ou de membres du conseil de surveillance attribués à chaque actionnaire.
« L’État et, le cas échéant, les collectivités territoriales mentionnées au III et les partenaires publics mentionnés au IV détiennent conjointement 34 % au moins du capital de la société et 34 % au moins des droits de vote dans les organes délibérants. La part du capital et des droits de vote détenue par l’actionnaire opérateur ne peut être inférieure à 34 %.
« Les règles régissant l’évolution du capital de la société d’économie mixte hydroélectrique sont déterminées par les statuts de la société ou par le pacte d’actionnaires. Ces règles ne peuvent faire obstacle à ce que l’État reste actionnaire de la société pendant toute la durée de la concession.
« VI. – La société d’économie mixte hydroélectrique est dissoute de plein droit au terme de l’exécution de la concession ou à la suite de sa résiliation.
« Art. L. 521-19. – Les modalités d’association de l’État, des collectivités territoriales ou de leurs groupements et des partenaires publics au sein de la société d’économie mixte hydroélectrique, en application des III et IV de l’article L. 521-18, font l’objet d’un accord préalable à la sélection de l’actionnaire opérateur.
« Cet accord préalable comporte notamment :
« 1° Les principales caractéristiques de la société d’économie mixte hydroélectrique : la part de capital que l’État, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les partenaires publics souhaitent détenir ; les règles de gouvernance et les modalités de contrôle dont l’État, les collectivités territoriales et les partenaires publics souhaitent disposer sur l’activité de la société définies, le cas échéant, dans le pacte d’actionnaires et les règles de dévolution des actif et passif de la société lors de sa dissolution ;
« 2° Une estimation provisoire de la quote-part des investissements initiaux à la charge de l’État, des collectivités territoriales ou de leurs groupements et des partenaires publics. Cette estimation est établie sur la base de l’évaluation prévisionnelle, au stade du lancement de la procédure unique d’appel public à la concurrence mentionnée à l’article L. 521-20, du montant des investissements initiaux.
« Les collectivités territoriales ou leurs groupements approuvent les modalités de leur participation par délibération de leur assemblée délibérante ou de leur organe délibérant.
« Art. L. 521-20. – I. – La sélection de l’actionnaire opérateur mentionné au I de l’article L. 521-18 et l’attribution de la concession à la société d’économie mixte hydroélectrique interviennent au terme d’une procédure unique d’appel public à la concurrence, qui respecte les mêmes règles et critères d’attribution que la procédure prévue à l’article L. 521-16 et qui est conduite par l’État selon des modalités définies par décret en Conseil d’État.
« II. – Dans le cadre des formalités de publicité prévues par le décret mentionné au I, l’État porte à la connaissance de l’ensemble des candidats les principales conditions qu’il a définies pour la conclusion du contrat de concession avec la société d’économie mixte hydroélectrique.
« Ces conditions portent notamment sur :
« 1° Les modalités d’association de l’État, des collectivités territoriales ou de leurs groupements et des partenaires publics au sein de la société d’économie mixte hydroélectrique, définies dans l’accord préalable mentionné à l’article L. 521-19 ;
« 2° Les projets de statuts de la société d’économie mixte hydroélectrique à créer, ainsi que l’ensemble des éléments appelés à régir les relations entre l’actionnaire opérateur et l’État, les collectivités territoriales ou leurs groupements et les partenaires publics qui seront actionnaires de cette société d’économie mixte ;
« 3° Les caractéristiques principales du contrat de concession qui sera conclu entre l’État et la société d’économie mixte hydroélectrique et du cahier des charges qui lui sera annexé ;
« 4° Les modalités selon lesquelles la société d’économie mixte hydroélectrique pourra conclure des contrats concourant à l’exécution de la concession, notamment des contrats de gré à gré avec l’actionnaire opérateur ou les filiales qui lui sont liées.
« III. – Les offres des candidats à la procédure unique d’appel public à la concurrence indiquent, selon les modalités définies par l’État lors de cette procédure, les moyens techniques et financiers qu’ils s’engagent à apporter à la société d’économie mixte hydroélectrique pour lui permettre d’assurer l’exécution de la concession, ainsi que les contrats qui devront être conclus par cette société pour la réalisation de sa mission.
« IV. – Ne peuvent soumissionner à la procédure unique d’appel public à la concurrence prévue au présent article les personnes mentionnées à l’article 8 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics. »
I bis. – Le titre II du livre V du code de l’énergie est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« L’information des collectivités territoriales et des habitants riverains sur l’exécution de la concession et leur participation à la gestion des usages de l’eau
« Art. L. 524-1. – I. – Le représentant de l’État dans le département peut créer un comité de suivi de l’exécution de la concession et de la gestion des usages de l’eau. Ce comité a pour objet de faciliter l’information des collectivités territoriales et des habitants riverains sur l’exécution de la concession mentionnée à l’article L. 511-5 par le concessionnaire et leur participation à la gestion des usages de l’eau. Il est consulté par le concessionnaire préalablement à toute décision modifiant les conditions d’exploitation des ouvrages de la concession ayant un impact significatif sur les différents usages de l’eau ou sur les enjeux mentionnés à l’article L. 211-1 du code de l’environnement, notamment la création d’ouvrages nouveaux ou la réalisation d’opérations d’entretien importantes. Il comprend notamment des représentants de l’État et de ses établissements publics concernés, du concessionnaire, des collectivités territoriales et de leurs groupements, des habitants riverains ou associations représentatives d’usagers de l’eau dont la force hydraulique est exploitée par le concessionnaire.
« II. – Pour les concessions ou regroupements de concessions en application de l’article L. 521-16-1 du présent code portant sur une chaîne d’aménagements hydrauliquement liés dont la puissance excède 1000 mégawatts et dont le concessionnaire n’est pas une société d’économie mixte hydroélectrique, la création du comité d’information et de suivi mentionné au I du présent article est de droit.
« III. – La commission locale de l’eau mentionnée à l’article L. 212-4 du code de l’environnement, lorsqu’elle existe, tient lieu de comité de suivi de l’exécution de la concession et de la gestion des usages de l’eau. À cet effet, elle invite des représentants du concessionnaire.
« IV. – Les modalités d’application du présent article, notamment la composition du comité, sont fixées par décret en Conseil d’État. »
II. – Après le premier alinéa de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Il peut également être saisi en cas de manquement aux mêmes obligations auxquelles sont soumises, en application de l’article L. 521-20 du code de l’énergie, la sélection de l’actionnaire opérateur d’une société d’économie mixte hydroélectrique et la désignation de l’attributaire de la concession. »
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, sur l'article.
M. Daniel Chasseing. Comme je l’ai dit précédemment, la prorogation des concessions des réseaux de barrage sur la Dordogne peut permettre un investissement important susceptible de doubler la production et de créer 500 emplois sur cinq ans. En l’absence de prorogation, il faudra organiser un appel d’offres, ce qui retardera un projet important pour cette zone hyper-rurale du département de la Corrèze. Je remercie par avance Mme la ministre des informations qu’elle voudra bien me donner.
J’en viens à l’article 29, plus particulièrement à ses alinéas 7 et 8, qui prévoient la possibilité, pour les collectivités territoriales, les groupements de collectivités territoriales riveraines des cours d’eau et les associations de devenir, sous réserve de l’accord de l’État, actionnaires des sociétés d’économie mixte exploitant les contrats de concessions hydroélectriques. Là encore, il me semble que le projet de loi va dans le bon sens, puisque les collectivités territoriales et les riverains seront davantage impliqués.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 112 est présenté par MM. Ravier et Rachline.
L'amendement n° 512 est présenté par MM. Bosino et Le Scouarnec, Mme Didier, M. Vergès, Mme Assassi, M. Abate, Mme Beaufils, MM. Billout et Bocquet, Mmes Cohen, Cukierman, David et Demessine, MM. Favier et Foucaud, Mme Gonthier-Maurin, M. P. Laurent, Mme Prunaud et M. Watrin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 112 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, pour présenter l’amendement n° 512.
M. Jean-Pierre Bosino. Originellement, la société d’économie mixte était détenue en majorité par le secteur public et de façon minoritaire par le secteur privé. Aujourd’hui, il est prévu que la part publique puisse diminuer jusqu’à 34 % et l’investissement privé s’élever à 66 %. D’aucuns parlent d’une minorité de blocage, mais en quoi une société d’économie mixte avec 66 % de parts privées serait-elle représentative de la maîtrise publique ? Cet argument n’est pas du tout convaincant.
Un groupe privé ne prendra pas le contrôle de 66 % du capital sans des objectifs financiers. Il est évident que tous ceux qui investiront dans le cadre d’une concession hydraulique viseront un retour sur investissement. Il suffit d’observer comment s’opère la financiarisation de l’économie ! Si un fonds de pension prend 66 % du capital d’un groupe de centrales hydrauliques, regroupant plusieurs barrages sur des secteurs complets, il est évident que son but sera la recherche du profit maximum.
On nous répondra que la SEM se verra imposer des contraintes, comme la gestion des usages de l’eau, en lien avec les collectivités territoriales et tous les usagers de l’eau. On nous opposera que les profits ne seront pas extraordinaires et que les collectivités auront tout loisir de devenir des actionnaires beaucoup plus importants, pour laisser encore moins de marges de manœuvre au privé. Mais encore faudrait-il qu’elles le puissent ! Étant donné l’état des finances locales, nous pouvons en douter.
Le rapport Battistel l’a très pertinemment souligné : la seule garantie apportée aux collectivités est le cahier des charges des concessions, que Mme la ministre a évoqué il y a quelques instants. Or, comme le montre l’analyse des conséquences de la mise en concurrence, le cahier des charges des concessions ne permettra de mieux encadrer l’action du concessionnaire sur les cours d’eau qu’à court terme. Comment prévoir les besoins des usagers pour les quarante prochaines années ?
Enfin, la réduction du portefeuille hydraulique d’EDF provoquera mécaniquement une hausse des prix.
En résumé, cette nouvelle mise en concurrence des concessions conduit à perdre l’avantage compétitif dont dispose la France grâce à l’électricité hydraulique. J’ajoute que, sauf erreur de notre part, aucune clause de destination n’est prévue. Ainsi, si un concessionnaire veut signer un contrat à long terme avec un industriel étranger, on ne pourra pas l’en empêcher.
Mes chers collègues, pour l’ensemble de ces raisons, nous vous invitons à supprimer cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. L’article 29 permet à l’État de créer des SEM hydroélectriques, afin d’associer les collectivités territoriales à la gestion de la ressource.
Lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, a été prévue, dans les cas où les concessions ne feront pas l’objet d’une SEM, la création d’une nouvelle instance de concertation locale : le comité de suivi de l’exécution de la concession et de la gestion des usages de l’eau. La commission a complété la composition de ce comité et étendu les cas dans lesquels sa création est de droit.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, la commission souscrit pleinement à cet article. Elle ne peut qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement, qui tend à le supprimer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable. La suppression de cet article entraînerait l’impossibilité pour l’État, les collectivités territoriales et les investisseurs publics d’entrer au capital des sociétés de production d’énergie hydroélectrique. Elle livrerait ainsi ces entreprises au privé.
M. Jacques Chiron. Absolument !
Mme Ségolène Royal, ministre. Le présent article crée une nouvelle catégorie de société économie mixte, laquelle permet d’associer les collectivités territoriales à la gestion de l’usage de l’eau, ce qui n’est pas le cas à ce jour. Par ce biais, il permet de renforcer l’efficacité du contrôle public sur ce patrimoine commun que constitue le parc hydroélectrique français.
En vertu de cet article, l’État pourra recourir à la création d’une SEM, à laquelle il pourra associer d’autres personnes publiques comme la Caisse des dépôts et consignations ou les collectivités territoriales. Le ou les actionnaires privés seront sélectionnés au terme d’une procédure de mise en concurrence, qui permettra par la même occasion d’attribuer le contrat de concession à la société d’économie mixte nouvellement créée.
De quoi parlons-nous concrètement lorsqu’il est question d’actionnaires privés ? Que se passe-t-il aujourd’hui ?
La Compagnie nationale du Rhône, par exemple, n’est détenue qu’à hauteur de 50,5 % par des capitaux publics. Qui sont les opérateurs électriciens privés pour les barrages hydroélectriques ? Le savez-vous ?
M. Roland Courteau. GDF-Suez !
Mme Ségolène Royal, ministre. Ce sont certes des sociétés anonymes de droit privé, mais ce sont aussi des entreprises publiques ou à capitaux publics, comme EDF ou GDF.
M. Jacques Chiron. Exactement !
Mme Ségolène Royal, ministre. Ne nous payons pas de mots, disons les choses telles qu’elles sont : par la société d’économie mixte, le projet de loi permet l’entrée des collectivités territoriales au capital de ces entreprises, laquelle est interdite à l’heure actuelle. Il donne à l’autorité publique la présidence de ces sociétés d’économie mixte.
M. Marc Daunis. Voilà !
M. Jacques Chiron. C’est capital !
Mme Ségolène Royal, ministre. C’est là une évolution considérable pour la maîtrise de l’énergie hydroélectrique, qui devient le pilier de la transition énergétique.
En outre, l’État maîtrisera les procédures d’appel d’offres et la ministre en charge de l’énergie, présente en cet instant devant vous, attribuera ces concessions. Les offres seront évaluées selon un cahier des charges d’ores et déjà établi par décret et organisé selon trois critères.
Premièrement, il s’agit de la redevance versée à l’État et aux collectivités : ces dernières vont enfin pouvoir bénéficier d’une partie de la redevance de ces ouvrages.
Deuxièmement, il s’agit du projet de développement énergétique, lequel accompagne le présent projet de loi.
Troisièmement, il s’agit de l’amélioration environnementale, c’est-à-dire de la continuité écologique et sédimentaire. Ce critère est déjà en vigueur pour la Compagnie nationale du Rhône.
Dans ce cadre, les grands opérateurs électriciens, comme EDF ou GDF, seront parfaitement bien placés.
Avec la transition énergétique, les firmes d’hydroélectricité deviennent de belles entreprises, représentant un enjeu considérable. Je suis persuadée qu’elles n’auront pas de mal à se positionner et qu’elles en auront même le désir. Bien sûr, la concurrence sera ouverte. Il appartiendra à ces entreprises de proposer les meilleures offres pour l’ouverture de ces concessions. EDF ou GDF pourront remporter les appels d’offres complémentaires à la participation publique.
Un amendement, que je présenterai dans quelques instants, tendra à clarifier totalement le dispositif. La participation publique pourra varier de 34 % à 66 %. Le complément sera alloué à l’opérateur électricien, qui pourra être EDF, GDF ou une autre entreprise de même nature. En pareil cas, avec les collectivités et les opérateurs électriciens, le contrôle public atteindra 100 %.
Mme Annie David. Mais d’autres types d’opérateurs pourront être retenus !
Mme Ségolène Royal, ministre. Ainsi, la situation sera meilleure que celle que nous connaissons aujourd’hui.
Par conséquent, on ne peut prétendre plus longtemps que le projet de loi privatise ce joyau qu’est l’énergie hydroélectrique. C’est tout le contraire !
M. Jean-Pierre Bosino. Quelle erreur !
Mme Ségolène Royal, ministre. Grâce à ce dispositif, perfectionné par la commission, dont je salue le travail, nous avons concilié l’ouverture à la concurrence et l’influence de nos grands électriciens français. Compte tenu de leur structuration et de leur poids, il est évident que ces derniers, s’ils présentent de beaux dossiers, seront dans de bonnes conditions pour continuer ou commencer à gérer les ouvrages, en réalisant les travaux d’investissement nécessaires, que plusieurs d’entre vous ont appelés de leurs vœux.
À présent, il faut lancer ces concessions sans tarder. Je le répète, un certain nombre d’entre elles sont arrivées à échéance et, en conséquence, il n’y a plus d’investissements.
Mme Frédérique Espagnac. C’est vrai !