M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, auteur de la question n° 978, transmise à Mme la garde des sceaux.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le président, par cette question, je voulais attirer l’attention de M. le Premier ministre sur l’arrêt rendu par le Conseil d’État, le 12 décembre 2014, qui a rejeté le recours de l’association « Juristes pour l’enfance » et validé la circulaire dite « Taubira » du 25 janvier 2013 visant à faciliter la délivrance de certificats de nationalité pour les enfants nés à l’étranger de gestation pour autrui, GPA.
Par cet arrêt, le Conseil d’État valide de facto les conséquences d’une pratique interdite en France. Alors que le rapporteur public a rappelé à l’audience le contexte d’une interdiction très claire de la GPA, qualifiant le commerce de la GPA de « sordide et cauchemardesque », le Conseil d’État a considéré, s’appuyant sur l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 26 juin 2014, que la France ne peut plus priver un enfant de sa nationalité française, sous peine de porter une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée.
Or, selon le 1° de l’article 21-12 du code civil, la nationalité est acquise pour les enfants nés de GPA à l’étranger de manière automatique, au bout de cinq ans de résidence sur le territoire français.
Par conséquent, il n’y a pas de nécessité – ni pratique ni juridique – à créer des règles en ce domaine. Il est en revanche porté une grave atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant, qui devrait pourtant guider l’ensemble des réflexions et décisions.
Enfin, une convention de GPA ne peut pas être distinguée de ses effets, puisque la naissance de l’enfant constitue l’objet même et exclusif de cette convention.
En validant ses effets, c’est la convention de la GPA en elle-même que l’on valide. L’interdiction française de recourir à cette pratique ne devient alors qu’une pure pétition de principe, alors que cette interdiction est sanctionnée d’une peine d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 15 000 euros, selon l’article 227-12 du code pénal.
Je rappelle que le Premier ministre s’est élevé publiquement, à plusieurs reprises, contre la pratique de la GPA. Dans ses propos recueillis par le journal La Croix du 2 octobre 2014, il indique que « la GPA est une pratique intolérable de commercialisation des êtres humains et de marchandisation du corps des femmes ».
Ma question est simple et mérite une réponse claire : le Premier ministre entend-il intervenir concrètement – et comment – contre cette pratique ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme la garde des sceaux.
Vous interrogez le Gouvernement sur la manière dont il entend intervenir pour lutter contre la gestation pour autrui. Vous estimez, en particulier, que la décision du Conseil d’État du 12 décembre 2014, aux termes de laquelle cette haute juridiction a validé la circulaire du 25 janvier 2013 visant à permettre la délivrance de certificats de nationalité française pour les enfants nés de gestation pour autrui à l’étranger, revient finalement à valider la GPA elle-même puisqu’on en reconnaîtrait ainsi ses effets en France.
On ne doit pas se méprendre sur la portée de la décision du Conseil d’État : cette décision ne porte pas atteinte au principe de prohibition de la gestation pour autrui en France qui, je le rappelle, est affirmé à l’article 16-7 du code civil.
Le Conseil d’État, en rejetant le recours formé contre la circulaire du 25 janvier 2013, confirme uniquement la possibilité de délivrer un certificat attestant de leur nationalité française aux enfants concernés, nés à l’étranger d’un Français et qui disposent d’un acte d’état civil étranger « probant » justifiant d’un lien de filiation avec ce parent français.
Or, contrairement à ce que vous indiquez, madame le sénateur, l’article 21-12 du code civil ne permet pas d’admettre de manière automatique l’acquisition de la nationalité française pour les enfants nés à l’étranger de GPA, en raison de leur recueil par un Français depuis au moins cinq ans.
La décision du Conseil d’État témoigne de la recherche d’un juste équilibre entre le principe d’ordre public de prohibition de la gestation pour autrui, qui demeure et auquel le gouvernement français est très attaché, et la nécessaire protection qu’il convient de garantir à l’enfant au nom de son intérêt supérieur, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l’enfant, et de son droit à mener une vie familiale normale, au sens de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Elle confirme tout simplement, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, aux termes de ses arrêts du 26 juin 2014 ayant condamné la France, la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et de leur garantir ainsi, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la nationalité française constitue un aspect essentiel.
J’ajoute que la décision du Conseil d’État ne remet nullement en cause la politique pénale que le Gouvernement entend faire respecter contre toutes les atteintes à l’ordre public. En particulier, la garde des sceaux veille à ce que l’action publique soit particulièrement diligente s’agissant de la lutte contre toute forme de trafic d’enfants s’apparentant à l’exploitation d’autrui et de la poursuite des intermédiaires proposant des activités interdites en France.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Pour ma part, je pense que le Conseil d’État, en validant la circulaire Taubira, a consacré une nouvelle avancée de la GPA en France. Les droits des femmes et des enfants s’en trouvent plus que jamais menacés.
Je le redis, les enfants nés par GPA à l’étranger n’avaient pas besoin de cette circulaire pour avoir une nationalité : nés à l’étranger, ils ont la nationalité de leur pays d’origine. De plus, en vertu à l’article 21-12 du code civil, ils peuvent acquérir la nationalité française au bout de cinq ans de résidence sur le territoire français.
La position du Gouvernement n’est pas claire.
Vous avez évoqué, madame la secrétaire d’État, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que les arrêts du 26 juin 2014 de la Cour européenne des droits de l’homme, dont le Gouvernement n’a pas fait appel. Or tous les spécialistes s’accordent à dire que cette décision de ne pas faire appel desdits arrêts était motivée par la volonté de permettre la validation de la circulaire Taubira. La Cour européenne des droits de l’homme, en effet, est clairement sortie de son champ de compétence en se prononçant sur des affaires de GPA, alors même que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qu’elle est chargée de faire respecter, ne comporte aucun engagement des États en la matière. Il fallait donc faire appel de ces arrêts !
Là, réside toute l’ambiguïté du Gouvernement sur ce dossier.
Je déplore que, lentement mais sûrement, grâce à la tactique des « petits pas », la GPA s’installe en France. La circulaire Taubira n’a été prise que pour réaliser une avancée vers sa légalisation !
accès numérique pour les communes des alpes-maritimes
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 964, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l'économie, de l’industrie et du numérique, chargée du numérique.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Alors que le Gouvernement encourage l’utilisation du numérique pour faciliter les démarches des citoyens auprès de l’administration, avec la mise en place d’outils dématérialisés pour le paiement des impôts ou le dépôt de pré-plainte, certaines communes n’ont plus de connexion internet depuis le 1er janvier 2015. Un comble à l’ère du « tout-numérique » !
La commune du Mas, village de 170 habitants situé à 77 kilomètres au nord de Nice, se trouve précisément dans cette situation. Faute de couverture 3G, le maire nourrit des craintes quant au bon fonctionnement de la mairie et à la continuité du service public.
La raison évoquée de ce retrait par l’opérateur est le manque de rentabilité. Cela laisse supposer qu’aucun autre prestataire ne prendra le relai. La seule solution proposée est l’installation d’un « kit satellitaire », avec un abonnement bien trop onéreux pour une si petite commune et un débit bien plus lent pour la navigation.
Il ne s’agit malheureusement pas d’un cas unique, puisque dix-huit autres communes des Alpes-Maritimes sont actuellement dans la même situation.
L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, a mis en demeure deux opérateurs téléphoniques qui avaient deux à trois ans de retard sur leur taux de couverture attendu. Une enquête administrative a également été ouverte sur une « zone blanche » de montagne, censée disposer de réseau, comme l’a expliqué l’ancien président de l’ARCEP lors d’une audition à l’Assemblée nationale le 18 juin 2014.
À l’heure de l’« ultraconnectivité », à l’heure où les campagnes de publicité des opérateurs vantent les mérites du très haut débit, les communes sont loin d’être toutes égales face au numérique.
Dans les Alpes-Maritimes, l’uniformisation des connexions a été fixée à l’horizon 2020. Le conseil général s’est engagé à financer les opérations grâce à un schéma directeur départemental d’aménagement numérique, ou SDDAN, mais les opérateurs doivent néanmoins jouer leur rôle, conformément aux accords, et proposer des offres aux habitants.
Comment le Gouvernement compte-t-il encourager les opérateurs à s’implanter dans ces zones où la collectivité aura installé son propre réseau, et à y rester ?
Va-t-il renforcer les moyens de l’ARCEP pour sanctionner les opérateurs qui se retirent d’une zone géographique, alors que des communes y sont recensées et doivent bénéficier d’une connexion digne de notre temps ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme Axelle Lemaire.
Avec le plan France Très Haut Débit, nous avons souhaité engager le plus rapidement possible le chantier structurant pour nos infrastructures numériques de demain. Mais il nous faut aussi répondre aux besoins du moment, veiller à étendre l’accès aux réseaux existants et en assurer la fiabilité.
S’agissant des réseaux mobiles, des travaux sont en cours pour définir un nouveau programme de couverture, avec trois objectifs.
Premièrement, il convient d’achever les précédents programmes de couverture des zones blanches et, au-delà de ces programmes, de couvrir les 170 communes identifiées comme ne disposant d’aucune couverture mobile. Aucune commune n’est concernée dans le département des Alpes-Maritimes : l’ensemble des seize communes recensées au titre du programme « zones blanches » sont couvertes, quinze par les trois opérateurs et la seizième, pour le moment, par un seul opérateur.
Deuxièmement, il s’agit de pallier un manque évident des programmes précédents, lesquels ne permettaient pas d’assurer la couverture de l’ensemble de la population des communes puisqu’ils ne visaient que les centres-bourgs. Il faut en effet pouvoir répondre aux besoins des communes les plus mal couvertes, comme certaines communes des Alpes-Maritimes que vous avez évoquées.
Troisièmement, au-delà du service téléphonique de base, il faut s’assurer que les territoires ruraux disposent de l’accès à l’internet mobile en 3G.
Un programme de couverture en 3G de 3 900 communes par l’ensemble des opérateurs devait être achevé à la fin de 2013. Il ne l’a pas été et l’ARCEP a ouvert, à ce titre, une enquête administrative en mai dernier. Le Gouvernement travaillera, avec le régulateur, pour que l’objectif de ce programme soit atteint, ce qui permettra aussi de limiter les zones grises de la 3G.
Le programme que le Gouvernement entend proposer à brève échéance permettra de répondre aux difficultés que vous décrivez. Il pourra nécessiter d’étendre par la loi les obligations existantes des opérateurs mobiles.
Dans le cas d’une commune telle que celle du Mas, la réponse doit venir autant de la couverture fixe que de la couverture mobile. L’un des objectifs du plan France Très Haut Débit est d’apporter l’accès à internet dans les communes qui n’en bénéficient pas aujourd’hui ou qui n’ont qu’un accès très dégradé.
La situation de la commune du Mas est en outre assez particulière : il apparaît que les habitants de la commune sont placés derrière un équipement du réseau de cuivre d’Orange, un multiplexeur, empêchant les signaux DSL émis depuis la commune voisine de Saint-Auban de passer. Historiquement, cet équipement était nécessaire afin d’assurer le raccordement téléphonique de la commune. De ce fait, aucun logement du Mas n’est aujourd’hui éligible à l’ADSL.
Orange a engagé depuis plusieurs années un plan de neutralisation de ces multiplexeurs, consistant à procéder à des opérations de réaménagement de réseau exactement semblables à la montée en débit sur cuivre. Dans cette hypothèse, les logements du Mas pourraient théoriquement être éligibles au haut débit de qualité pour 93 % d’entre eux et au très haut débit pour 56 %.
Néanmoins, la commune du Mas ne fait pas partie du plan de neutralisation des multiplexeurs GMUX d’Orange. La réponse viendra donc du projet porté par le département dans le cadre du plan France Très Haut Débit. Ce projet prévoit la couverture en fibre optique de l’ensemble du département, y compris de la commune du Mas, selon un calendrier dont il a la maîtrise.
Dans ce cadre, le Gouvernement ne peut que vous encourager, madame la sénatrice, à solliciter les services du conseil général des Alpes-Maritimes, mais il reste bien entendu, de même que la mission France Très Haut Débit, à votre disposition.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Je vous remercie de ces réponses, madame la secrétaire d’État.
Bien évidemment, le conseil général des Alpes-Maritimes s’est saisi de ce projet de réduction de la fracture numérique, en se fixant pour objectif très ambitieux l’uniformisation des connexions à l’horizon 2020.
Cependant, ce schéma a un coût, qui, selon l’estimation du conseil général, est de 140 millions à 180 millions d’euros.
Je souhaite donc que l’État accompagne le conseil général des Alpes-Maritimes. Celui-ci financera une partie de l’équipement nécessaire pour couvrir les communes non encore couvertes par le très haut débit, mais il est impératif que l’État soit présent financièrement à ses côtés. D’autres sources de financement seront également bienvenues. Nous avons ainsi sollicité l’aide de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et de l’Union européenne.
retraite des non-salariés agricoles
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt, auteur de la question n° 992, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
M. Henri de Raincourt. J’ai pu constater que l’attention du ministre de l’agriculture avait déjà été appelée par différents collègues sur l’incompréhension que suscite chez certains non-salariés agricoles le décret n°2014-494, portant application de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.
En effet, si ce décret prévoit fort opportunément l’attribution de points gratuits de retraite complémentaire obligatoire aux conjoints et aides familiaux, il n’en reste pas moins que les critères qu’il exige – à savoir, pour les retraités d’avant 1997, justifier de 32,5 années de carrière comme non-salarié agricole et, pour ceux qui sont à la retraite depuis 1997, justifier de 17,5 années de carrière comme non-salarié agricole – sont de nature à exclure près de 80 000 conjoints et aides familiaux d’anciens exploitants agricoles.
Pour ces personnes, ce dispositif d’application paraît d’autant plus injuste que la loi prévoyait 557 000 bénéficiaires pour une enveloppe de 160 millions d’euros, mais que, dans les faits, on en compte 477 000, pour un coût de 133 millions d’euros. Le Gouvernement a expliqué que ce « décalage» résultait d’une application réduite du dispositif et qu’il fallait ne pas négliger la question des droits de réversion.
À ce sujet, j’ai étudié les arguments du ministre de l’agriculture. Sa réponse, d’ordre comptable, n’est pas, hélas ! de nature à satisfaire les principaux intéressés, raison pour laquelle ceux-ci n’ont de cesse de nous solliciter. On peut les comprendre quand sait ce qu’est aujourd'hui le niveau des retraites agricoles !
Pour dissiper définitivement le soupçon du caractère discrétionnaire de cette mesure, je souhaiterais connaître la raison qui justifie une telle exclusion d’une partie des conjoints et aides familiaux d’anciens exploitants agricoles et je voudrais savoir si le Gouvernement envisage d’autres dispositions, plus souples, pour répondre à leur situation.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Myriam El Khomri, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville. Je vous prie tout d’abord, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l’absence de M. Stéphane Le Foll.
Je rappelle qu’un plan ambitieux de revalorisation des retraites agricoles a été mis en œuvre dans le cadre de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.
Cette réforme, conformément aux engagements pris par le Président de la République, est la plus ambitieuse en termes de revalorisation des petites retraites agricoles depuis la loi Peiro de 1998.
L’une des mesures mises en œuvre permet d’attribuer aux aides familiaux et aux conjoints d’exploitants – des femmes dans leur très grande majorité – des points gratuits de retraite complémentaire obligatoire au titre des années antérieures à l’obligation d’affiliation au régime.
Par souci de cohérence, les conditions d’accès au bénéfice de la mesure sont identiques à celles qui sont mises en œuvre depuis 2002 pour l’attribution de points gratuits aux chefs d’exploitation.
Ainsi, les personnes dont la retraite a pris effet avant 1997 doivent justifier d’une durée minimale d’assurance en tant que non-salarié agricole au moins égale à 32,5 années. Celles dont la retraite a pris effet à compter du 1er janvier 1997 doivent justifier d’une durée minimale d’assurance en tant que non-salarié agricole égale à 17,5 années ainsi que d’une retraite à taux plein dans le régime des non-salariés agricoles.
Ces conditions d’accès à la mesure ont été présentées en toute transparence avant le débat parlementaire. En effet, c’est au mois d’août 2013, au cours d’une réunion présidée conjointement par Mme Marisol Touraine et M. Stéphane Le Foll et rassemblant l’ensemble des organisations professionnelles agricoles ainsi que les associations représentatives de retraités, qu’ont été exposées à la profession les conditions d’octroi des points gratuits de retraite complémentaire obligatoire, notamment celles qui sont relatives aux durées d’assurance nécessaires pour bénéficier de la mesure. Ces conditions ont d’ailleurs fait partie de l’étude d’impact du projet de loi.
Les décrets publiés au mois de mai 2014 sont conformes aux annonces et aux engagements pris et n’ont procédé à aucune restriction du champ d’application de cette mesure.
Le bilan provisoire qui a été réalisé au mois de juin 2014 ne prenait pas en compte les bénéficiaires des droits à réversion, ceux-ci n’ayant été versés, avec effet rétroactif, qu’à la fin de l’année 2014. De plus, en 2014, la mesure n’aura été appliquée que sur onze mois, ce qui minore son impact financier.
Enfin, il faut souligner que l’estimation des 557 000 bénéficiaires potentiels de la mesure correspondait à une simulation effectuée sur des effectifs de 2011. Or les effectifs de retraités subissent une érosion démographique naturelle, qui permet aussi d’expliquer le différentiel entre les effectifs estimés et les effectifs recensés.
M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.
M. Henri de Raincourt. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. J’avoue que je n’attendais pas d’éléments franchement nouveaux sur ce sujet.
Je reconnais évidemment le côté positif de la mesure qui concerne les conjoints – qui sont bien souvent les épouses, comme vous l’avez rappelé – et les aides familiaux. Néanmoins, je souhaite que vous rappeliez au ministre de l’agriculture que, même si des efforts ont été accomplis, ce que nous reconnaissons, le niveau des retraites de ces personnes est véritablement une misère. Tout ce que la société pourra faire pour elles ne sera donc que justice.
accessibilité des élèves avec chiens-guides et d'assistance
M. le président. La parole est à M. Claude Dilain, auteur de la question n° 983, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.
M. Claude Dilain. Madame la secrétaire d'État, au mois de novembre 2014, selon un sondage, 67 % des Français considéraient que l’État ne s’impliquait pas assez pour faire reculer les discriminations envers les personnes handicapées et 71 % reprochaient la même chose aux entreprises. Pourtant, plusieurs textes ont fait avancer la cause des personnes handicapées.
Ainsi, l’ordonnance du 26 septembre 2014 relative à la mise en accessibilité des établissements recevant du public, des transports publics, des bâtiments d’habitation et de la voirie pour les personnes handicapées a permis de redéfinir les modalités de la mise en œuvre du volet « accessibilité » de la loi de 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Je me plais à souligner au passage votre implication dans le suivi de ce texte, madame la secrétaire d'État.
L’ordonnance prévoit notamment de faire reconnaître la spécificité des chiens-guides d’aveugles et d’assistance, c’est-à-dire d’y sensibiliser les magasins, notamment les magasins d’alimentation, et les vigiles assurant la surveillance de ces établissements. Or nous continuons à recevoir de nombreuses plaintes concernant l’accès aux magasins ; il nous faudra donc être très vigilants sur l’application effective de cette mesure.
Je veux également souligner les difficultés que rencontrent de nombreux élèves pour être accueillis avec leur chien d’assistance dans les écoles, malgré les dispositions de la loi de 2005. Je suis persuadé, madame la secrétaire d'État, que vous aurez l’occasion d’évoquer ce problème avec Mme la ministre de l’éducation nationale.
Si l’accueil, l’aménagement et la sécurité des établissements scolaires soulèvent nécessairement des questions complexes, il n’en reste pas moins que les élèves bénéficiant de l’aide d’un chien d’assistance doivent pouvoir accéder de façon autonome à leurs établissements.
L’ordonnance que j’ai évoquée ne fait pas mention de ce cas précis. C’est pourquoi, madame la secrétaire d'État, je souhaiterais obtenir des précisions pour tous ces élèves qui veulent accéder à l’école et pour leurs parents.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question qui porte sur un sujet essentiel : l’inclusion accompagnée à l’école des enfants en situation de handicap, en particulier les jeunes malvoyants qui ont besoin d’un chien-guide d’aveugle.
À l’heure actuelle, la loi prévoit que les chiens-guides d’aveugles ou d’assistance sont admis dans les locaux scolaires, dès lors que trois conditions sont réunies : premièrement, l’élève doit être titulaire d’une carte d’invalidité ou de priorité ; deuxièmement, l’animal doit être inscrit dans le plan de compensation du handicap établi par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées et considéré par cette dernière comme devant être présent durant les temps de scolarisation ; troisièmement, pour être réputé chien-guide d’aveugles ou d’assistance, l’animal doit nécessairement avoir été formé dans un centre agréé. J’insiste sur ce dernier point, car c’est l’un des sujets sur lesquels nous avons récemment travaillé pour permettre la reconnaissance de ces chiens.
Plus largement, monsieur le sénateur, vous avez raison d’inscrire votre propos dans le contexte plus global de l’accessibilité de la ville et des transports aux personnes aveugles ou atteintes de déficience visuelle accompagnées d’un chien-guide ou d’assistance. Celle-ci est inscrite dans la loi depuis 1987 et a connu plusieurs améliorations. Néanmoins, dans certains secteurs, elle demeure imparfaitement assurée. Ainsi, certains conducteurs de taxi continueraient de se montrer réticents à la présence des chiens-guides d’aveugles ou d’assistance dans leur voiture.
Pour ce qui est des établissements de santé, on comprend bien que, dans les services où des soins sont pratiqués, l’accès soit interdit aux chiens pour des raisons d’asepsie. En revanche, dans les services où les raisons d’hygiène ne peuvent être invoquées, notamment dans les salles d’attente des cabinets médicaux, il faut que ces chiens puissent être admis.
La publication toute récente du guide de l’accueil des personnes en situation de handicap dans les services publics a justement pour objet de faire reconnaître tous ces droits.
C’est également à cette fin que, dans le cadre de la publication de l’ordonnance du 26 septembre 2014, nous avons rendu obligatoire l’acquisition de connaissances en matière d’accueil des personnes handicapées lors de la formation des personnels amenés à être en contact avec les usagers et les clients des lieux recevant du public.
Enfin, c’est l’ensemble de nos concitoyens que nous entendons mobiliser grâce à la grande campagne nationale relative à l’accessibilité universelle qui sera lancée au cours de l’année 2015 dans les médias nationaux.
M. le président. La parole est à M. Claude Dilain.
M. Claude Dilain. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse et, surtout, de votre engagement dans ce dossier extrêmement important. Si les textes ont évolué dans le bon sens, l’application ne suit pas toujours, ou pas toujours suffisamment vite. J’espère que les mesures que vous avez prises dans ce domaine, notamment le guide et la campagne de communication, nous permettront de ne plus avoir à vous interroger à ce sujet.