M. Pierre Jarlier. L’adoption du présent amendement apporterait une souplesse du point de vue des délais pour les EPCI qui ont déjà fusionné entre les lois de 2010 et 2014, particulièrement l’année dernière. Cet exercice est extrêmement complexe : se posent des problèmes d’ordre fiscal, financier, en termes d’organisation et de mutualisation. Nous souhaitons éviter que ces EPCI ne doivent remettre sur le métier un travail de fusion et leur permettre de prendre le temps d’étudier avec qui ils travailleront peut-être.
Mme la présidente. La parole est à M. Charles Guené, pour présenter l'amendement n° 987.
M. Charles Guené. Il s’agit d’éviter aux communautés qui ont déjà fusionné deux fusions successives dans un délai trop rapproché. Ce point sera examiné à l’aune des dispositions que nous venons d’adopter.
Cela étant, les premières fusions furent les plus faciles : on choisissait les EPCI les plus proches. Les secondes fusions seront plus complexes : il faudra aller au-delà, ce qui va mettre du temps. Comme je le disais hier soir, il est souhaitable de laisser du temps à la mise en œuvre de ce type de réforme.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Si le seuil de 20 000 habitants avait été conservé, la commission aurait été extrêmement favorable à ces amendements, qui se justifiaient. Or le Sénat, dans sa grande majorité, a supprimé tout seuil. Dès lors, pourquoi tout remettre en cause ? Il ne s’agit que d’adaptations. La commission des lois a déjà proposé de retarder la mise en œuvre jusqu’à la fin de l’année 2017, ce qui nous paraît suffisant. Pourquoi reporter jusqu’en 2019 ?
Dans ces conditions, je vous demande, mes chers collègues, de bien vouloir retirer vos amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Le Gouvernement avait prévu de réserver un traitement particulier aux intercommunalités qui ont fusionné et se sont agrandies récemment si le seuil de 20 000 habitants avait été maintenu ; mais eu égard aux votes intervenus, il ne lui paraît pas opportun de retarder à 2019 l’achèvement de la carte intercommunale. C’est pourquoi il est défavorable à ces amendements.
Mme la présidente. Monsieur Jarlier, l’amendement n° 718 est-il maintenu ?
M. Pierre Jarlier. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 718 est retiré.
Monsieur Guené, l’amendement n° 987 est-il maintenu ?
M. Charles Guené. Je le retire, madame la présidente, en attendant la deuxième lecture…
Mme la présidente. L’amendement n° 987 est retiré.
Je mets aux voix l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
Article 15 bis (nouveau)
La dernière phrase du premier alinéa du IV de l’article L. 122-3 du code de l’urbanisme est supprimée.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 164 est présenté par M. Grand.
L'amendement n° 241 est présenté par M. Nègre.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour présenter l’amendement n° 164.
M. Jean-Pierre Grand. L’article 15 bis supprime la disposition du code de l’urbanisme suivant laquelle un schéma de cohérence territoriale, ou SCOT, ne peut être établi sur le périmètre d’un seul EPCI, mais doit obligatoirement avoir un périmètre plus large.
La valeur ajoutée du SCOT réside dans sa capacité à construire une vision stratégique partagée à une échelle plus vaste que celle de l’intercommunalité.
Cet amendement de suppression vise à garantir la valeur ajoutée des SCOT : il convient d’avoir une vision commune et de long terme du territoire partagé, en dépassant les frontières administratives.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Je ne comprends pas !
M. Jean-Pierre Grand. Je prendrai un exemple pour vous expliquer la raison du dépôt du présent amendement, monsieur le rapporteur.
La métropole de Montpellier ne va pas jusqu’à la mer, jusqu’aux plages. L’État a donné son accord pour la construction de lignes de tramway jusqu’à la limite de l’intercommunalité. Or, vous le savez, on ne peut ignorer les déclarations d’utilité publique, qui n’entrent pas néanmoins pas dans le détail de telles questions.
Cela étant, au-delà de l’intercommunalité, sur trois kilomètres, s’étend le territoire d’une autre intercommunalité, dont je sais qu’elle n’est pas complètement favorable au prolongement du tramway, pour des raisons sur lesquelles je ne m’appesantirai pas. En d’autres termes, rien n’empêche cette intercommunalité de faire construire un mur d’immeubles pour barrer la route au tramway. C’est dire s’il n’y a plus aucune cohérence territoriale dans le schéma – en l’occurrence, un schéma de transport. On pourrait multiplier les exemples.
Or je n’ai pas le souvenir – ma mémoire remonte pourtant assez loin – que, s’agissant de questions de cohérence, de grandes difficultés se soient posées au point de provoquer un conflit entre des intercommunalités.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Si !
M. Jean-Pierre Grand. Sans doute y a-t-il eu des discussions, des adaptations, mais une entente a toujours prévalu. En vérité, je crois qu’il est extraordinairement dangereux de ne pas permettre qu’une vision d’ensemble se dégage pour les années à venir dans des territoires complexes, appelés à évoluer et où, probablement, les intercommunalités vont être refondues.
Voilà pourquoi je vous demande vraiment, monsieur le rapporteur, de reconsidérer la position prise par la commission, en ayant à l’esprit les conséquences insoupçonnables qu’aurait pour nous le maintien de l’article 15 bis : songez qu’il mettrait en péril de grands équipements structurants décisifs pour le service public et pour les usagers de celui-ci.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur Grand, je comprends le problème particulier que vous venez de présenter.
La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové a prévu que les SCOT devraient obligatoirement couvrir les territoires d’au moins deux établissements publics de coopération intercommunale. Cette mesure n’est pas adaptée au cas des très grandes intercommunalités.
À la vérité, le SCOT est destiné à couvrir une unité urbaine ou un bassin de vie.
M. Jean-Paul Emorine. Exactement : un bassin de vie !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Or un bassin de vie peut correspondre à deux intercommunalités ou à cinq, comme il peut, dans certains cas, ne correspondre qu’à une seule. Seulement, dans cette dernière hypothèse, la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové oblige à établir le SCOT sur un périmètre artificiel.
L’amendement dont résulte l’article 15 bis a été présenté en commission par notre excellent collègue Alain Richard. Généralement, quand celui-ci avance une proposition, elle est réfléchie !
Aussi bien, monsieur Grand, je comprends votre préoccupation, mais il y a de nombreux autres cas de figure à prendre en considération.
J’ajoute que le périmètre des SCOT est approuvé par le préfet.
M. Pierre-Yves Collombat. En effet !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Dans le cas que vous avez exposé, ce serait au préfet d’intégrer dans le SCOT les deux intercommunalités concernées.
Simplement, il faut savoir qu’on ne peut pas y intégrer seulement un morceau d’intercommunalité : en effet, dans la mesure où les communautés de communes, et a fortiori les communautés d’agglomération, les communautés urbaines et les métropoles, exercent de manière obligatoire la compétence d’aménagement du territoire au niveau local, une intercommunalité doit relever tout entière d’un même SCOT. Il faudrait d’ailleurs que les communautés de communes elles-mêmes correspondent davantage aux unités urbaines et aux bassins de vie que ce n’est parfois le cas aujourd’hui.
Au demeurant, monsieur Grand, la mesure dont vous défendez le maintien n’empêcherait pas tous les problèmes, puisqu’une intercommunalité peut très bien s’associer pour l’établissement du SCOT à une autre que celle avec laquelle elle est en désaccord.
Que le SCOT doive couvrir un territoire suffisamment vaste, c’est entendu. Ainsi, son périmètre peut correspondre à deux ou trois intercommunalités, ou même à davantage en zone rurale. Du reste, je répète que ce périmètre est approuvé par le préfet.
Je vous rappelle qu’il n’y a pas de SCOT partout, sauf en Île-de-France, où les intercommunalités sont obligées d’élaborer des SCOT puisqu’elles ont au-dessus de leur tête le schéma directeur de la région d’Île-de-France, qui fait peser sur elles des contraintes considérables.
Pour ces raisons, je ne puis pas revenir sur la position de la commission en émettant un avis favorable sur votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. Indépendamment de la disposition dont l’article 15 bis prévoit la suppression, le code de l’urbanisme précise clairement les critères qui doivent présider à la définition des périmètres des SCOT. La disposition en cause ne paraît donc pas strictement nécessaire, dès lors que les préfets assurent le contrôle de la pertinence de ces périmètres avant de les publier.
Dans ces conditions, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 164. Je vous signale, du reste, que celui-ci tend à supprimer un article introduit dans le projet de loi par la commission des lois, comme l’a rappelé M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Absolument !
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote.
M. Pierre Jarlier. Il me paraît difficile d’adopter cet amendement dans la mesure où les fusions d’intercommunalités qui vont se produire correspondront, dans certains cas, à un ancien périmètre de SCOT. Ainsi, si plusieurs communautés de communes fusionnent pour former un ensemble qui coïncide avec le périmètre du SCOT, il n’y a pas nécessairement lieu de chercher à élargir ce périmètre.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Et voilà !
M. Pierre Jarlier. Je pense donc qu’il faut maintenir l’article 15 bis, issu de l’adoption d’un amendement présenté par Alain Richard, qui facilitera les fusions d’intercommunalités.
Nous avons déjà assez longuement débattu de cette question au cours de l’examen du projet de loi dont résulte la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové. La disposition adoptée par la commission sur l’initiative de M. Richard permet de contourner la difficulté.
Je comprends l’esprit dans lequel M. Grand a parlé, mais je répète que la suppression de l’article 15 bis poserait problème dans le cas de fusions d’intercommunalités correspondant à un périmètre de SCOT. Aussi ne voterai-je pas l’amendement n° 164.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Emorine, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Emorine. Je tiens à apporter quelques précisions qui rassureront peut-être mon collègue Jean-Pierre Grand.
Les schémas de cohérence territoriale que nous avons confirmés dans la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement remontaient à la loi du 25 juin 1999 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire dite « loi Voynet ».
À cette époque, les membres de la commission des affaires économiques ont été unanimes à considérer que les périmètres de ces schémas devaient correspondre aux bassins de vie – Daniel Raoul, qui est dans cet hémicycle, pourrait le confirmer. Il s’agissait de structurer les autres intercommunalités que les grandes agglomérations au niveau d’un bassin de vie.
Ainsi, dans mon département, nous avons été d’accord pour établir plusieurs de ces schémas.
Monsieur Grand, je comprends le problème que vous avez soulevé, mais je vous signale que le préfet a tout à fait le pouvoir d’élargir les périmètres ; la situation particulière que vous avez décrite ne pourra pas être résolue par le texte que nous examinons.
Nous avons fixé à 2017 la date butoir pour la mise en œuvre des SCOT : à cette échéance, l’ensemble du territoire français devra être couvert, étant entendu que, si certaines intercommunalités ne relèvent pas d’un SCOT, des dispositions spécifiques pourront être prises.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je préfère que ce soient nous, élus locaux, qui prenions les décisions, plutôt que le préfet !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Vous n’aimez donc pas les préfets ?
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Moi, je les adore !
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 15 bis.
(L'article 15 bis est adopté.)
Article additionnel après l’article 15 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 2 rectifié quinquies, présenté par MM. J.C. Gaudin, Gilles, Buffet et Darnaud, est ainsi libellé :
Après l’article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Au a du 2° du I de l’article L. 5217-2, les mots : « plan local d’urbanisme et documents d’urbanisme en tenant lieu » sont remplacés par les mots : « plan local d’urbanisme, document en tenant lieu ou carte communale » ;
2° Au 2° du II de l’article L. 5218-7, les mots : « élaboré par le conseil de territoire » sont supprimés.
II. – Le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Au début, est ajoutée une section 1 intitulée : « Dispositions communes » et comprenant les articles L. 123-1 à L. 123-20 ;
2° Au II bis de l’article L. 123-1, après le mot : « création », sont insérés les mots : « , y compris lorsqu’elle est issue d’une fusion, » ;
3° Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Dispositions particulières applicables à la métropole d’Aix-Marseille-Provence
« Art. L. 123-21. – La métropole d’Aix-Marseille-Provence est soumise aux dispositions de la section 1 du présent chapitre, sous réserve des dispositions de la présente section.
« Art. L. 123-22. - Par dérogation au II de l’article L. 123-1, la métropole Aix-Marseille-Provence élabore, dans le cadre de ses conseils de territoire, plusieurs plans locaux d’urbanisme intercommunaux. Le périmètre de chacun de ces plans couvre un territoire de la métropole.
« Art. L. 123-23. - Le conseil de territoire est chargé de la préparation et du suivi de l’élaboration et de toute procédure d’évolution du projet de plan local d’urbanisme.
« Il prépare les actes de procédure nécessaires.
« Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 123-6, le conseil de territoire arrête les modalités de la collaboration avec les communes concernées, après avoir réuni l’ensemble des maires de ces communes.
« Le conseil de la métropole transmet au conseil de territoire les orientations stratégiques de nature à assurer la cohérence du projet métropolitain ainsi que toutes informations utiles.
« Le débat mentionné à l’article L. 123-9 a lieu au sein du conseil de territoire et des conseils municipaux concernés, au plus tard deux mois avant l’examen du projet de plan local d’urbanisme. Un représentant du conseil de la métropole participe au débat réalisé au sein du conseil de territoire.
« Par dérogation à l’article L. 123-9, le conseil de territoire soumet, pour avis, aux communes du territoire le projet de plan local d’urbanisme arrêté. Les communes donnent leur avis au plus tard trois mois après la transmission du projet de plan ; à défaut, l’avis est réputé favorable. Lorsqu’une commune d’un territoire de la métropole d’Aix-Marseille-Provence émet un avis défavorable sur les orientations d’aménagement et de programmation ou les dispositions du règlement qui la concernent directement, le conseil de la métropole délibère à nouveau et arrête le projet de plan local d’urbanisme intercommunal concerné à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés.
« Par dérogation à l’article L. 123-10, après l’enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement, les avis joints au dossier, les observations du public et le rapport du commissaire enquêteur ou de la commission d’enquête sont présentés par le conseil de territoire aux maires des communes concernées.
« Le plan local d’urbanisme est approuvé par le conseil de la métropole à la majorité simple des suffrages exprimés. »
III. – La métropole Aix-Marseille-Provence engage l’élaboration d’un schéma de cohérence territoriale au plus tard le 31 décembre 2016.
La parole est à M. Jean-Claude Gaudin.
M. Jean-Claude Gaudin. Cet amendement tend à revenir un peu sur la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.
Le département des Bouches-du-Rhône compte cent dix-neuf communes ; je le signale, car la situation y est différente de celle que connaissent d’autres départements, où les communes se comptent par centaines.
Au mois de septembre dernier, lors de la campagne pour les élections sénatoriales, j’ai, comme la plupart de mes collègues soumis à renouvellement, visité un très grand nombre de communes de mon département – très exactement quatre-vingt-onze. Les maires m’ont fait part de leur inquiétude et m’ont demandé de rechercher des solutions pour leur permettre de rester maîtres de leur urbanisme. Aussi me suis-je engagé à présenter un amendement allant dans ce sens.
Je sais bien qu’il n’est pas possible de remettre en cause le caractère intercommunal des plans locaux d’urbanisme. Ma proposition consiste à renforcer leur procédure d’élaboration en réaffirmant l’importance de la concertation et la place centrale des maires. Plus précisément, je vous propose, en parfaite cohérence avec les dispositions de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, de confier à chacun des établissements publics de coopération intercommunale devenus conseils de territoire au sein de la métropole d’Aix-Marseille-Provence l’élaboration d’un plan local d’urbanisme intercommunal – un PLUI – spécifique, respectueux du SCOT métropolitain.
Ces PLUI seraient bien sûr approuvés par le conseil de la métropole, à la majorité simple des suffrages exprimés, après avis des communes. En cas d’avis défavorable d’une commune sur les orientations d’aménagement et de programmation, le conseil de la métropole serait contraint d’approuver le plan à une majorité qualifiée des deux tiers des suffrages exprimés.
Les dispositions du présent amendement ne dénaturent ni le code de l’urbanisme ni la métropole ; au contraire, elles confortent la reconnaissance d’une spécificité, déjà contenue dans la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.
Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, ce n’est un secret pour personne : je suis favorable à la métropole.
Songez qu’il m’a fallu attendre l’an 2000 pour arriver à mettre en place une communauté urbaine, sur le fondement de la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, dite « loi Chevènement ». En effet, lorsque, en 1966, le général de Gaulle et Olivier Guichard ont proposé à cinq villes – Bordeaux, Strasbourg, Lille, Lyon et Marseille – de se constituer en communauté urbaine, les maires des quatre premières ont accepté, mais pas Gaston Deferre. Résultat : nous avons dû attendre jusqu’en 2000 pour disposer d’une communauté urbaine.
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Un tiers de siècle, imaginez-vous !
M. Jean-Claude Gaudin. Cette communauté urbaine, nous l’avons faite à dix-huit, en nous mettant d’accord pour que chaque fois qu’un maire voudrait changer le plan d’occupation des sols, qui était le document en vigueur à cette époque, une commission ad hoc soit réunie, constituée des élus de la commune et du président de la commission de l’urbanisme de la communauté urbaine, afin de prévenir les difficultés. Madame la ministre, tous les maires vous ont dit que ce système avait bien fonctionné, sous Gaudin comme sous M. Caselli, qui m’a succédé.
Évidemment, avec quatre-vingt-treize communes dans la métropole, ce sera un peu plus difficile ; mais il appartiendra à celui ou à celle qui voudra présider cette métropole de faire les efforts nécessaires.
Les maires des communes des alentours de Marseille ne sont pas favorables à cette métropole ; vous allez entendre qu’ils sont cent trois, cent six ou même cent huit à y être hostiles.
Mme Sophie Joissains. Cent treize !
M. Jean-Claude Gaudin. Cent treize, peut-être. Seulement, le maire de Marseille représente 860 000 habitants, et toutes les forces économiques du département sont d’accord pour rattraper le temps perdu, jouer la modernité et ouvrir le territoire, de manière à attirer des entreprises et des ateliers, à créer des emplois et à faire reculer le chômage. Il faut avoir une vision d’avenir, au lieu de se replier uniquement sur les EPCI actuels !
Il le faut d’autant plus que vous avez, madame la ministre, fait beaucoup d’efforts. Il n’a échappé à personne que je ne suis pas un thuriféraire du département. Reste que vous êtes venue moult fois à Marseille, et que vous allez présenter toute une série d’amendements qui devraient donner satisfaction aux maires, parce qu’ils visent, en quelque sorte, à les protéger – même si je ne crois pas que ces mesures soient suffisantes.
Si les maires sont opposés à la métropole, les populations, elles, se sont depuis longtemps affranchies des limites. De fait, les populations qui vivent autour de Marseille viennent y travailler, s’y faire soigner et s’y distraire dans les cinquante théâtres, à l’opéra et aux spectacles de ballets ou au Vélodrome – tous équipements qui supposent des moyens. La ville de Marseille est entourée d’un corset montagneux ; ce ne sont pas les Hautes Alpes, mais enfin il y a des collines. Nous supportons toutes les charges de centralité, alors que la richesse est à l’extérieur. La métropole doit nous permettre de réaliser une meilleure justice et une meilleure équité.
Mes chers collègues, n’oublions pas que nous avons adopté la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles. J’y insiste : cette loi a été votée dans les mêmes termes par le Sénat et par l’Assemblée nationale !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Eh oui !
M. Jean-Claude Gaudin. Je suis, depuis longtemps, le doyen des parlementaires des Bouches-du-Rhône. Ce n’est pas d’hier que je suis parlementaire. Je n’ai pas toujours approuvé les lois, mais lorsqu’une loi est votée, elle doit être appliquée par ceux qui portent des écharpes tricolores à l’image de notre drapeau national.
La loi est votée ! Cela nous oblige !
Vous avez fait des efforts, madame la ministre, vous en faites encore, et je voterai bien évidemment les amendements qui suivront. Mais cet amendement, mes chers collègues, est destiné à montrer que nous faisons encore un effort en direction des maires, que nous les considérons.
Vous allez nous proposer des amendements faisant durer le mandat des membres des EPCI jusqu’en 2020. Or il faut mettre en marche la métropole, il faut aller de l’avant, vers l’avenir, il faut un peu de courage, il faut de l’espoir !
Certains disent que j’ai payé le prix. Oui, je l’ai payé, aux élections sénatoriales ! Mes positions n’ont pas plu aux maires, mais ce n’est pas si grave : tout d’abord, parce que je suis toujours là (Sourires.) et, ensuite, parce que je suis convaincu que c’est le mieux pour Marseille et donc pour toutes les autres villes qui l’entourent. Si Marseille est forte, si Marseille est attractive, toutes les autres en profitent aussi, et c’est là le sens de cet amendement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Quel plaidoyer ! Le président Gaudin a cherché à rassurer les maires, notamment sur la question de l’élaboration des documents d’urbanisme. Rappelez-vous les débats suscités par les PLUI au sein de notre assemblée ! Il faut bien reconnaître cependant qu’une certaine unité est nécessaire.
Vous proposez, d’une part, l’engagement de l’élaboration d’un SCOT au plus tard le 31 décembre 2016 et, d’autre part, en cas de désaccord de l’une des communes, une majorité qualifiée, afin d’ouvrir le dialogue.
Ce dispositif nous semble tout à fait pertinent et la commission est bien évidemment favorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Monsieur le ministre, cher Jean-Claude Gaudin, depuis juin 2014, je me suis rendue tellement souvent à Marseille que j’ai aujourd’hui l’impression d’y avoir établi ma résidence ! (Sourires.)
Le Gouvernement a, par ma voix, formulé un certain nombre de propositions – je pense au conseil paritaire territorial de projet de la métropole Aix-Marseille-Provence, que les élus nous ont demandé et qui a été installé.
Le Gouvernement tient ses engagements. Je vous remercie d’ailleurs de votre courage, monsieur Gaudin. La métropole Aix-Marseille-Provence doit voir le jour le 1er janvier 2016, c’est la loi. Il s’agit aussi d’un grand enjeu pour votre territoire – vous l’avez dit mieux que je ne saurais le faire – en termes de développement, de solidarité, de protection de l’environnement… Vous êtes l’un des fervents promoteurs, et l’un des meilleurs artisans, de cette grande porte méditerranéenne qui doit créer de l’emploi et satisfaire les besoins de la population.
Nous avons en commun une ambition forte pour Aix-Marseille-Provence, porte de la Méditerranée. La situation géographique de ce territoire, vous l’avez rappelé, mérite que cette métropole se mette en place sur le périmètre proposé.
Monsieur le ministre, vous proposez au Gouvernement d’associer les communes à l’élaboration des PLU de territoire. Vous m’aviez bien expliqué la première démarche de la communauté urbaine. Le Gouvernement regarde cette proposition très favorablement. C’est un pas immense que nous franchissons, et nous le franchissons parce que vous estimez qu’il s’agit d’une des conditions de la réussite de ce grand projet.
Comme vous l’avez rappelé, ce n’est pas le seul pas que nous franchirons. J’ai écouté Mme Joissains, ainsi que Mme Ghali, qui ont également proposé que l’on garde un PLH métropolitain, que l’on ait une vision d’ensemble de l’habitat pour que le droit des sols – cela fait votre force ! – soit maîtrisé par les maires.
Nous avons aussi entendu d’autres élus, tel M. Gaby Charroux, sur les réseaux. Nous allons même encore plus loin, par exemple, sur la programmation de la voirie ou sur une part des opérations d’aménagement.
Nous avons enfin prévu une délégation automatique des compétences pour la période 2016-2020, mécanisme que vous nous avez suggéré, afin de faciliter la mise en place de la métropole, avec la progressivité de la montée en charge de ses compétences.
S’agissant du transfert à la métropole des compétences des communes, nous proposons – ce n’est pas rien – un délai supplémentaire de deux ans, soit le maximum autorisé par la Constitution. Nous espérons également le faire ailleurs.
Nous aurons, d’ici à quelques minutes, l’occasion d’examiner d’autres amendements concernant Aix-Marseille-Provence. Pour l’heure, monsieur Gaudin, vous avez satisfaction.
Il est rare qu’un ministre, depuis son banc, remercie un parlementaire, mais votre beau plaidoyer appelle une réponse : je vous remercie de votre engagement et de votre courage. Il est vrai que le courage, parfois, n’est pas tout de suite récompensé : merci, monsieur Gaudin !
Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.