Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Engagements financiers de l’État » comprend des programmes d’une très grande diversité. Je m’arrêterai en particulier sur deux d’entre eux, avant d’évoquer le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » – le CAS PFE.
J’aborderai ainsi, en premier lieu, la grande question de la charge budgétaire de la dette. En 2014 et 2015, bien qu’elle soit élevée, et malgré l’augmentation de l’encours de dette, elle reste contenue. En 2015, les intérêts de la dette constitueront le deuxième poste budgétaire de l’État, après l’éducation nationale, avec une dépense de 44,3 milliards d’euros. Ce montant est cependant inférieur à la charge prévisionnelle de 2014 – plus de 46 milliards en LFI, puis près de 45 milliards dans la LFR d’août 2014.
Ce niveau stable des intérêts de la dette malgré l’augmentation de son encours s’explique – vous l’avez tous souligné – par les gains de refinancement de l’État. En effet, la France a bénéficié cette année de conditions de financement très favorables. De manière générale, les taux ont baissé dans toute la zone euro.
Je rappelle ainsi que nous finançons notre dette à des taux, comme on dit, « historiquement bas ». Vous l’avez sans doute noté, nos taux à dix ans sont même passés en dessous de 1 % la semaine dernière, ce qui est une première dans l’histoire de la France. Pour l’ensemble de nos émissions à moyen et long terme depuis le début de l’année 2014, le taux est de 1,33 %, soit, là encore, le taux le plus bas jamais atteint. Je rappelle que ce taux était de 4,1 % en 2008. On voit donc que l’écart est considérable, et nous engrangeons aujourd’hui des niveaux de taux faibles qui nous aideront durablement à contenir la charge d’intérêt.
La constatation de cette baisse des taux nous conduit à prévoir une diminution de la charge de la dette pour 2015 de 400 millions d’euros en comptabilité maastrichtienne.
Ce scénario pour 2015 reste cependant un scénario prudent, qui prend comme hypothèse une remontée des taux – causée, par exemple, par une remontée des taux américains. Les taux de ce scénario excèdent ainsi de dix à vingt points de base ceux qu’anticipent, par ailleurs, les économistes. Il s'agit donc d’un scénario extrêmement prudent, qui nous réservera peut-être de bonnes surprises.
Un autre point important de cette mission est, bien sûr, le financement du fonds d’aide aux collectivités locales pour sortir ces dernières des emprunts dits « toxiques » qu’elles ont souscrits dans le passé.
La loi de finances pour 2014 a créé un fonds de soutien en faveur des organismes publics locaux ayant souscrit des emprunts structurés et des instruments financiers particulièrement sensibles. Le versement des aides attribuées d’ici à l’été 2015 par le fonds sera réalisé pour l’essentiel sur quinze ans – entre 2014 et 2028 –, à raison de 100 millions d’euros par an. Une petite partie – de l’ordre de 50 à 60 millions d’euros au maximum – pourra être versée en une fois.
Le Gouvernement, je dois l’avouer, a pris du retard dans la mise en œuvre concrète de ce fonds – certains, ici, le savent bien –, mais, ces derniers mois, nous avons beaucoup avancé.
Ainsi, le service de pilotage du fonds a été mis en place. De plus, le comité national d’orientation et de suivi a donné un avis favorable à la doctrine d’emploi du fonds, qui a été publiée ce mois-ci. Vous connaissez bien le président de ce comité, puisqu’il s'agit du sénateur Jean Germain. Des représentants de toutes les strates de collectivités y siègent. Les collectivités sont donc désormais en mesure de déposer leur dossier et de demander une aide au fonds de soutien.
J’en arrive au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », qui, à juste titre, a attiré l’attention de beaucoup d’entre vous. L’année écoulée aura marqué une nouvelle étape dans la modernisation de l’actionnariat public, avec, successivement, la publication d’une doctrine – saluée par plusieurs d’entre vous – et l’adoption le 20 août dernier de l’ordonnance relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.
Comme l’a appelé M. le rapporteur spécial, les lignes directrices de l’État actionnaire, adoptées par le Gouvernement le 15 janvier 2014, ont permis de préciser et clarifier ses objectifs d’intervention en fonds propres. Cette doctrine permet à l’État actionnaire d’adopter une gestion plus active de ses participations. L’État cède ainsi certaines de ses participations pour réinvestir là où c’est le plus utile, mais aussi, bien sûr, pour se désendetter.
Dans ce même esprit, nous avons simplifié et renforcé le cadre juridique de la gouvernance des entreprises à participation publique, grâce à l’ordonnance précitée. Nous devions prendre en compte l’évolution depuis trente ans des bonnes pratiques en matière de gouvernance, afin de rapprocher celle des entreprises à participation publique du droit commun des sociétés, et cela pour donner à l’État une capacité d’influence réelle, au moins égale à celle d’un actionnaire privé.
Nous avons bien entendu préservé certaines spécificités des entreprises à participation publique, par exemple dans le domaine d’une plus grande représentation des salariés dans les organes de gouvernance, dans celui de la protection d’intérêts stratégiques de l’État, ou dans le domaine de la défense nationale – certains, ici, en connaissent bien les enjeux.
Comme M. le rapporteur spécial l’a relevé, cette politique de gestion plus dynamique a été parfaitement illustrée, cette année, par la réalisation de plusieurs opérations de cessions – titres d’Airbus et de GDF SUEZ –, ainsi que par l’opération en cours d’ouverture du capital de l’aéroport de Toulouse. L’État a utilisé ces produits de cession pour prendre une participation de 15 % dans PSA en avril – ce qui a été salué – et pour contribuer à limiter l’endettement de l’État à hauteur de 1,5 milliard d’euros, au début du mois d’octobre. Cela n’était pas arrivé depuis 2007.
L’année 2015 se situera dans la continuité de cette stratégie, avec un accent particulier mis sur la limitation de l’endettement de l’État, quelque 4 milliards d’euros de produits de cessions devant être affectés à cet emploi.
Je vois bien que différentes rumeurs circulent sur ce que l’État céderait ou non, mais il ne serait pas responsable de ma part, quelles que soient les questions que les uns et les autres ont pu me poser, de les commenter au risque de déstabiliser les entreprises concernées. En tout état de cause, un examen au cas par cas de chaque participation doit être effectué avant de prendre une décision.
Madame la présidente, je souhaite maintenant apporter des éléments de réponse aux quelques questions qui m'ont été plus précisément posées.
Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous m'ont demandé si nous pensions, au travers du CAS PFE, financer la transition énergétique. Comme vous le savez, le Président de la République a annoncé la constitution d’un Fonds de la transition énergétique, qui sera doté de 1,5 milliard d’euros sur trois ans et dont la gestion sera assurée par la CDC, la Caisse des dépôts et consignation. Ses ressources proviendront non pas du CAS PFE, mais d’une partie des dividendes perçus par l’État dans le secteur de l’énergie – c’est logique –, du programme d’investissement d’avenir et de la CDC, dont la participation est ainsi requise.
S’agissant des questions aéroportuaires – plusieurs d’entre vous m'ont interrogé à ce sujet, soit de manière globale, soit à propos de Toulouse –, nous nous situons dans le processus d’ouverture du capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac. Les collectivités territoriales ont bien sûr été associées à cette opération, qu’elles ont d'ailleurs abondamment commentée.
J’insiste sur le fait qu’il s'agit d’opérations sur le capital de l’aéroport et que, en tout état de cause, l’État gardera évidemment un rôle majeur en tant que concédant. De plus, il ne s'agira pas d’une entreprise autonome, car nous sommes aussi concessionnaires. Par ce biais, qui nous évitera de reproduire ce qui a pu se passer dans d’autres opérations, non pas aéroportuaires, mais autoroutières, nous pourrons conserver la totalité de nos prérogatives de concédant. L’État pourra donc continuer à exercer son influence sur les investissements réalisés par l’aéroport – beaucoup d’entre vous y ont fait allusion –, ainsi que sur le niveau des redevances.
S'agissant de Dexia, cette banque fait partie de celles qui ont subi le fameux stress test mené par la Banque centrale européenne. Cette dernière a toutefois reconnu à Dexia une spécificité, au titre de laquelle elle n’a pas demandé la recapitalisation de la banque. Pour leur part, les marchés financiers n’ont pas réagi aux résultats du test. Quoi qu’il en soit, mes services, comme ceux des autres pays concernés, restent bien sûr vigilants quant à la situation de Dexia.
S'agissant de Nexter, l’enjeu du développement de son activité est au cœur de l’opération de rapprochement avec KMW, qui n’est pas simple à mener. Tout le sens de cette opération est de constituer un champion franco-allemand, qui atteigne une taille critique pour faire face à une concurrence extrêmement vive.
Ce rapprochement nécessite en effet une autorisation du Parlement, et il est prévu d’introduire une disposition ad hoc dans le projet de loi pour l’activité, dit « projet de loi Macron ». Le Parlement aura donc l’opportunité de débattre de cette opération.
Enfin, monsieur le rapporteur spécial, vous m'avez interrogé sur Areva, dont on sait qu’elle connaît un certain nombre de difficultés. Cela dit, Areva bénéficie d’une situation tout à fait satisfaisante en termes de liquidité et d’un carnet de commandes solide. Areva n’a donc pas besoin aujourd’hui d’être recapitalisée.
Par ailleurs, Areva a constitué un comité, dans lequel les représentants de l’État seront bien sûr présents, afin d’élaborer les mesures de redressement nécessaires. Nous suivrons de près ces travaux.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, le commentaire général et les réponses particulières que je souhaitais apporter à ce stade de notre débat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
engagements financiers de l’état
Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
État B
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Engagements financiers de l’État |
46 605 700 000 |
45 228 700 000 |
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
44 337 000 000 |
44 337 000 000 |
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
197 000 000 |
197 000 000 |
Épargne |
476 700 000 |
476 700 000 |
Majoration de rentes |
168 000 000 |
168 000 000 |
Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité |
0 |
0 |
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement |
||
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
1 427 000 000 |
50 000 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte de concours financiers : accords monétaires internationaux
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.
État D
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Accords monétaires internationaux |
0 |
0 |
Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine |
0 |
0 |
Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale |
0 |
0 |
Relations avec l’Union des Comores |
0 |
0 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte de concours financiers : avances à divers services de l’état ou organismes gérant des services publics
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.
État D
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Avances à divers services de l’État ou organismesgérant des services publics |
7 438 856 329 |
7 438 856 329 |
Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune |
7 200 000 000 |
7 200 000 000 |
Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics |
56 000 000 |
56 000 000 |
Avances à des services de l’État |
167 856 329 |
167 856 329 |
Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex |
15 000 000 |
15 000 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : participation de la france au désendettement de la grèce
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce », figurant à l’état D.
État D
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Participation de la France au désendettement de la Grèce |
309 000 000 |
432 500 000 |
Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs |
309 000 000 |
432 500 000 |
Rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France |
0 |
0 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Ces crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : participations financières de l’état
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.
État D
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Participations financières de l’État |
5 000 000 000 |
5 000 000 000 |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
1 000 000 000 |
1 000 000 000 |
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
4 000 000 000 |
4 000 000 000 |
Mme la présidente. Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que des comptes d’affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce et « Participations financières de l’État ».
Remboursements et dégrèvements
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
La parole est à Mme la rapporteur spéciale.
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spéciale de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » constitue un volet important de la politique fiscale de l’État, puisque ses crédits représentent plus d’un quart des recettes fiscales brutes. Ce montant est en diminution par rapport à la loi de finances initiale pour 2014.
Les dépenses retracées dans cette mission découlent de nombreux dispositifs fiscaux, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les sociétés, de la taxe sur la valeur ajoutée ou des principaux impôts locaux.
L’évolution des indicateurs de performance met notamment en évidence les difficultés que rencontrent de plus en plus de contribuables pour acquitter leurs impôts. En effet, je note cette année une dégradation, certes faible, du délai de traitement des réclamations contentieuses relatives à l’impôt sur le revenu et à la taxe d’habitation. La dégradation de ces indicateurs de performance serait due, selon la direction générale des finances publiques, à la hausse du nombre de recours gracieux.
Par ailleurs, comme chaque année, je regrette que les documents budgétaires soient toujours aussi peu étoffés. En outre, malgré ma demande concernant le nombre de ménages qui bénéficient d’exonérations et de dégrèvements d’impôts locaux, ces informations ne m’ont pas été communiquées.
Les remboursements et dégrèvements liés aux impôts d’État représentent les neuf dixièmes des crédits de la mission. Ils auraient tendance à augmenter en 2015, à hauteur d’environ 4 milliards d’euros par rapport à l’estimation révisée pour 2014.
L’estimation de la loi de finances initiale pour 2014 a été fortement revue à la baisse en cours d’année. Ce différentiel ne pose pas, en soi, de problème, puisque les crédits de la mission sont évaluatifs : ils reposent sur des prévisions, et toute prévision est appelée à évoluer.
Cependant, l’écart important entre l’estimation de la loi de finances initiale pour 2014 et la prévision révisée pour cette même année renforce la nécessité, que j’ai déjà pointée, de présenter l’estimation révisée de façon détaillée dans les documents budgétaires et d’expliquer les écarts par rapport à la prévision.
Une fois de plus, j’invite donc le Gouvernement à tenir compte de cette remarque, afin de donner au Parlement les moyens d’une analyse plus ambitieuse. Le législateur ne dispose aujourd’hui que de l’évolution de prévisions, dont il ne connaît pas les hypothèses.
L’augmentation prévue pour 2015 s’inscrit dans une tendance à la hausse observée depuis le début des années 2000. Deux observations doivent être faites à ce sujet.
D’une part, les gouvernements successifs mènent des politiques fiscales qui s’appuient de plus en plus sur des mécanismes d’exonération ou de crédit. Or ces dispositifs dérogatoires présentent le double inconvénient d’être peu pilotables par l’État d’une année sur l’autre et peu lisibles pour le citoyen. C’est un peu une dépense publique sans pilote !
D’autre part, la hausse des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État profite avant tout aux entreprises : même lorsque les remboursements et dégrèvements liés à la TVA sont retranchés du montant destiné aux entreprises, celui-ci reste bien supérieur aux transferts en direction des ménages.
Les transferts aux entreprises par le biais des remboursements et dégrèvements connaissent également une évolution très – voire trop –, dynamique : ils ont augmenté de près de 50 % entre 2012 et 2015. Sur la même période, les transferts vers les ménages diminuaient d’environ 1,5 %.
Pour ce qui concerne les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux, ils sont relativement stables depuis 2011 et la suppression de la taxe professionnelle : ils s’élèvent à 11 milliards d’euros environ.
Cette stabilité cache toutefois, en 2015, deux mouvements de sens contraire, mais de faible ampleur. Il s’agit, d’une part, d’un renchérissement du coût du plafonnement de la taxe d’habitation en fonction du revenu, et, d’autre part, de la diminution du dégrèvement transitoire et d’une diminution anticipée des restitutions de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises.
S’agissant des impôts dits « ménages », je regrette que l’expérimentation de la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation n’ait toujours pas été engagée : les départements où aurait lieu l’expérimentation devaient être désignés à la fin de 2014. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet, monsieur le ministre ? Nous sommes en effet très attentifs à cette question.
En ce qui concerne les impôts dits « économiques », je remarque des différences dans l’évolution de la CVAE selon les secteurs d’activité. Ainsi, la contribution des activités financières et d’assurance a particulièrement diminué entre 2010 et 2012. Je me demande dans quelle mesure ces variations de CVAE peuvent s’expliquer par des comportements d’optimisation.
Enfin, je tiens à saluer le projet de la direction générale des finances publiques, en partenariat avec les associations d’élus, qui vise à favoriser la transmission aux collectivités territoriales des données relatives à leurs recettes fiscales. En effet, nous le savons tous, la prévisibilité de leurs recettes, et en particulier de la CVAE, est une donnée majeure pour nos collectivités territoriales, qui peuvent ainsi préparer leurs projets budgétaires, et ce le plus tôt possible.
Mme la présidente. J’indique au Sénat que le Gouvernement dispose au total de cinq minutes pour intervenir.
La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre des finances et des comptes publics. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Remboursements et dégrèvements » est une mission assez atypique au sein du budget de l’État, et ce pour deux raisons.
Tout d'abord, c’est, en volume, la plus importante du budget général, puisque ce sont près de 100 milliards d’euros de crédits qui sont prévus pour l’exercice 2015. Ensuite, c’est une mission dont les dépenses sont de nature particulière : ce sont des dépenses en atténuations de recettes, dont l’évolution est intimement liée à celle des recettes fiscales. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les crédits de cette mission sont évaluatifs.
Les crédits du programme 200 dépendent étroitement de l’évolution des recettes fiscales, car la plus grande part des dépenses prévues dans le cadre de ce programme est liée à la mécanique de certains impôts : il s’agit des remboursements de crédits de TVA et des remboursements d’acomptes d’impôt sur les sociétés. L’évolution de ces remboursements découle directement du dynamisme de ces recettes.
L’évolution de ces dépenses très particulières ne peut donc être comprise qu’au regard de celle, plus globale, des recettes fiscales nettes, c’est-à-dire des recettes brutes nettes de remboursements et dégrèvements.
Je rappellerai donc les principaux déterminants des prévisions des recettes fiscales en 2015. L’hypothèse de croissance spontanée des recettes fiscales nettes a été fixée à seulement 1,7 %, soit une élasticité à la croissance de 0,9 point, ce qui est peu : on suppose que, pour la troisième année consécutive, les recettes fiscales augmenteront moins vite que l’activité économique. Cette hypothèse semble prudente quand on sait que, à moyen terme, l’élasticité moyenne a vocation à être égale à l’unité.
S’agissant plus particulièrement de la TVA et de l’impôt sur les sociétés, l’IS, qui concernent une grande part des dépenses de la mission, leur croissance spontanée en 2015 est estimée à 1,4 % pour la TVA, soit une faible élasticité de 0,7 point, et à 0,4 % pour l’IS, soit une élasticité de 0,2 point. Ce sont donc des prévisions extrêmement prudentes, mais qui restent bien entendu soumises à tous les aléas imaginables dans le cadre d’une anticipation de l’avenir.
Pour assurer la bonne information du Sénat, je souhaite par ailleurs apporter quelques précisions utiles sur les contentieux fiscaux de masse, dont les dépenses sont retracées dans le cadre de cette mission.
Vous le savez, les contentieux sur le précompte mobilier et la taxation des revenus des OPCVM ont conduit, avant que nous arrivions aux responsabilités, à des condamnations de la France devant la Cour de justice de l’Union européenne. Il s’agit de dépenses de plusieurs milliards d’euros, étalées sur plusieurs années, qu’il nous faut donc assumer.
S’agissant du contentieux sur le précompte mobilier, nous avions initialement anticipé un coût total de 2 milliards d’euros. Compte tenu d’une décision du Conseil d’État favorable aux intérêts financiers de l’État, les jugements au cours de l’année écoulée se sont révélés moins coûteux que prévu pour les finances publiques. Nous avons donc revu à la baisse le coût total du contentieux à 1,3 milliard d’euros. Toutefois, avant de connaître les décisions définitives, il subsiste encore des incertitudes sur le coût exact de cette dépense.
S’agissant du contentieux OPCVM, le coût total du contentieux demeure estimé à 5 milliards d’euros. En revanche, la chronique de décaissement a été revue, avec une prévision de 700 millions d’euros cette année, de 1,75 milliard d’euros en 2015 et 2016, puis un apurement complet en 2017. En effet, les délais de traitement des demandes de remboursement exprimées par les contribuables sont plus longs que prévu, et ce pour deux raisons.
D’une part, une seule juridiction centralise la totalité des recours contentieux. D’autre part, ces affaires sont souvent complexes et nécessitent de vérifier, ce qui prend du temps, les pièces justificatives apportées par les contribuables.
Voilà, en quelques mots, mesdames, messieurs les sénateurs, les éléments qui me semblent devoir être portés à votre connaissance.
J’ajoute simplement, madame la rapporteur spéciale, que l’expérimentation relative à l’évaluation des valeurs locatives des locaux d’habitation est sur le point d’être lancée. Cinq départements sont concernés, me semble-t-il.
Dans quelques jours, je serai en mesure de vous faire connaître les conditions dans lesquelles cette expérimentation sera menée, de manière à ce qu’elle soit efficace, sans pour autant mobiliser un nombre trop important des personnels de la DGFIP, qui sont par ailleurs – vous le savez, puisque vous leur avez rendu hommage – extrêmement accaparés par leurs tâches, qu’ils accomplissent, je tiens à le souligner, dans des conditions difficiles. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Nous allons maintenant procéder à l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.
État B
(en euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Remboursements et dégrèvements |
98 975 025 000 |
98 975 025 000 |
Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs) |
87 330 025 000 |
87 330 025 000 |
Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs) |
11 645 000 000 |
11 645 000 000 |