Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre.
M. Jean-Jacques Lasserre. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme en première lecture, je tiens à saluer le travail réalisé par les deux rapporteurs sur ce projet de loi. Nous l’avons déjà indiqué et je le réaffirme en cet instant : ils ont véritablement fait preuve d’écoute vis-à-vis de tous les membres de cette assemblée, quelles que soient les travées sur lesquels ceux-ci siègent, et de persévérance à l’égard de l’Assemblée nationale qui a, parfois, détricoté ce que nous avions construit en première lecture. Ce travail a permis à chacun d’apporter sa pierre à la rédaction de ce texte.
Notons également que nous sommes presqu’au bout du parcours législatif de ce projet de loi qui a commencé voilà neuf mois, et qui devrait s’achever après la réunion de la commission mixte paritaire ce mercredi et l’examen de ses conclusions en séance publique. Cette remarque me permet de formuler deux jugements sur les conditions d’examen de ce texte.
D’une part, nous saluons, comme l’a fait M. le rapporteur Didier Guillaume tout au long de cette deuxième lecture, la volonté du Gouvernement de ne pas recourir à la procédure accélérée. Ce fait est rare pour ce qui concerne un texte traitant des questions agricoles. Il en est résulté de meilleurs échanges entre les deux chambres, ainsi qu’avec le Gouvernement, et ce jusqu’à la réunion de la commission mixte paritaire. Je ne peux que vous encourager, monsieur le ministre, à propager cette bonne pratique auprès de vos collègues du Gouvernement qui sont souvent tentés de faire passer en force leur projet de loi, notamment devant la Haute Assemblée.
D’autre part, nous regrettons malgré tout l’examen du présent texte réalisé à une vitesse vertigineuse en deuxième lecture au Sénat. Je vous laisse apprécier, mes chers collègues : entre le 15 et le 24 juillet, soit en neuf jours seulement, dépôt des amendements en vue de l’étude du projet de loi par la commission, réunion de celle-ci pour examiner le rapport, dépôt des amendements sur le texte de la commission, examen en séance publique, réunion de la commission mixte paritaire et, enfin, examen des conclusions de cette dernière ! Ce n’est pas mal ! Ce n’est malheureusement pas acceptable si l’on veut bien légiférer. À cet égard, il reste des progrès à accomplir.
J’en viens désormais au fond du projet de loi. Je dois vous avouer, monsieur le ministre, mes chers collègues, un sentiment en demi-teinte, et je l’ai déjà dit. L’agriculture est l’un des secteurs les plus intéressants de notre pays, un secteur porteur d’avenir qui évolue en permanence et qui est un fleuron de notre économie, malgré des pans en crise. C’est sans doute ce paradoxe qui est à l’origine de notre attachement aux agriculteurs et aux agricultrices qui font vivre tout un pays, et même davantage.
Ce texte comporte certaines améliorations intéressantes, lesquelles concernent principalement des dispositifs actuels. Nous l’avons déjà indiqué – sans doute le trait est-il un peu épais, mais c’est le sens de notre appréciation –, il s’agit bien plus d’un toilettage, d’une adaptation, que d’une future loi d’avenir !
L’équilibre trouvé entre performance économique et recherche d’une agriculture verte nous semble toutefois meilleur à l’issue des travaux du Sénat qu’après la lecture par l’Assemblée nationale. Au terme de la première lecture, nous notions un véritable point de désaccord entre les deux chambres. Ne voulant pas dresser le florilège des avancées, je raccourcirai volontairement mon propos. Nous avons déjà salué ces avancées. Je relèverai simplement les produits phytosanitaires, les clauses miroir, les différentes dispositions en matière de foncier et les règles de prélèvement. Nous sommes satisfaits de l’adoption de certains de nos amendements, notamment aux articles 4 et 12.
Cela étant, nous maintenons notre analyse originelle, même si, sans doute le trait est-il là encore un peu épais, mais mieux vaut dire les choses pour bien se comprendre : de notre point de vue, ce projet de loi aurait pu aller bien plus loin.
Consolons-nous en disant que, en matière agricole, les projets de loi ne sont jamais un aboutissement, mais campent le décor des actions futures devant être conduites. Nous avons précisé quels secteurs étaient les oubliés du présent texte. Nous avons souligné le travail réalisé par le Sénat. J’y reviens : le challenge est difficile, nous en convenons, mais la triple ambition écologique, sociale et économique – ces termes furent souvent employés – s’est traduite bien plus par de savants équilibres remarquablement cultivés par les rapporteurs que par des lignes directrices se dégageant avec netteté. Nous regrettons, bien entendu, que la performance économique ne ressorte pas davantage.
Tel est notre point de vue sur ce projet de loi et sur les travaux que nous avons conduits. En conclusion, pour toutes ces raisons, une très forte majorité du groupe UDI-UC s’abstiendra.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly.
M. Gérard Bailly. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous achevons l’examen en deuxième lecture de ce projet de loi, lequel s’est déroulé dans un bon climat. Je reconnais le mérite des rapporteurs, tant ils ont fait d’auditions et se sont impliqués dans l’examen de tous les amendements au cours des deux lectures.
Néanmoins, fallait-il consacrer autant de temps à ce texte pour obtenir si peu de mesures concrètes en termes de compétitivité, d’innovation et, surtout, de valeur ajoutée pour notre agriculture et nos agriculteurs ?
À la suite de la réunion de la commission des comptes de l’agriculture de la nation le 1er juillet dernier et du document tout récent émanant des chambres d’agriculture et portant le tampon de votre ministère, monsieur le ministre, on observe que le revenu des agriculteurs a baissé de 22,3 % en 2013 par rapport à 2012. Le présent texte permettra-t-il de modifier cette situation ? Les jugements diffèrent dans cette enceinte : sur le côté droit de l’hémicycle, nous sommes pessimistes, tandis que vous, mes chers collègues siégeant sur le côté gauche, comme M. le ministre, êtes optimistes pour notre agriculture. Pour ma part, je suis beaucoup plus réservé que vous.
Je formulerai maintenant trois constats.
Tout d’abord, la productivité agricole est en hausse. Aujourd'hui, un chef d’exploitation réalise le même volume que trois agriculteurs en 1980. On ne peut donc pas dire que les agriculteurs ne remplissent pas leur mission.
Ensuite, l’agriculture française a dégagé un excédent commercial de 11,5 milliards d’euros en 2013 ; elle était, ne l’oublions pas, déficitaire dans les années 1975–1980. Alors que bien d’autres secteurs de l’économie française sont peu, voire moins performants sur les marchés mondiaux, l’agriculture remplit sa mission.
Malgré cela, les prix des productions animales sont orientés à la baisse, en particulier en ce qui concerne les porcs et les volailles. Les exploitants dont les revenus sont les plus faibles sont ceux des zones de pâturages, d’élevage extensif situées surtout dans le Massif central, le Limousin, l’Auvergne.
Le revenu des éleveurs laitiers a baissé globalement, en raison, notamment, du coût des intrants.
Les agriculteurs font donc du bon travail, qui s’accompagne pourtant de baisses de revenus. À ce propos, il faut relever que leur endettement est plus élevé, et qu’il s’accroît chaque année. Avec 240 000 euros en moyenne par chef d’exploitation, leur besoin en capital est important.
Les jeunes connaissent des débuts de carrière difficiles, alors qu’un récent sondage indique que 40 % des chefs d’exploitation ne sont pas certains, pour des raisons financières, de pouvoir exercer leur profession jusqu’à la retraite.
Ce projet de loi d’avenir apporte-t-il les remèdes attendus et les outils nécessaires ? La réponse varie selon la travée d’où l’on parle. Selon moi, il ne renforcera malheureusement pas la compétitivité de notre agriculture, il ne développera pas l’innovation et n’améliorera pas la répartition de la valeur ajoutée.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il ne la dégradera pas non plus !
M. Gérard Bailly. Rien dans les dispositions de ce texte relatives aux grandes et moyennes surfaces n’indique en effet comment mieux répartir le profit. Chacun sait aujourd’hui qui en bénéficie, et j’ai cité tout à l'heure des chiffres déplorables.
Ce texte va-t-il redonner espoir aux éleveurs, victimes du désamour de leur environnement ? Va-t-il pousser les jeunes à s’engager dans l’avenir ? Dans trois ans, les jeunes des zones d’élevage du Massif central considèreront-ils qu’il aura répondu à leurs problèmes ? Permettez-moi d’être moins optimiste que vous, chers collègues siégeant sur les travées de gauche de cet hémicycle.
Certes, ce projet de loi comporte quelques avancées. C’est le cas pour ce qui concerne le loup, et j’en félicite et en remercie M. le rapporteur. N’oublions pas pourtant que quatre cents loups vivent en France, et que leur nombre augmente de 22 % par an. Il faudrait en tuer quatre-vingt-huit pour que leur population ne progresse plus. Il ne me semble pas que nous soyons déjà parvenus à cet objectif !
J’espère que la commission mixte paritaire maintiendra les dispositions que nous avons votées concernant les lycées agricoles.
J’ai déjà évoqué le défrichement, les baux environnementaux et les tribunaux paritaires.
Quant aux chambres d’agriculture, j’ai retrouvé le chiffre, elles bénéficieront de 135 millions d’euros en moins cette année !
M. Gérard Bailly. Vous affirmez que l’on fera mieux que les années précédentes, monsieur le rapporteur, mais je ne vois pas comment : ma région perdra 175 millions d’euros en 2015, 350 millions d’euros en 2016 et 525 millions d’euros en 2017 !
Mme la présidente. Je vous prie de conclure, monsieur Bailly !
M. Gérard Bailly. Je ne crois pas que le présent texte satisfera les attentes de nos agriculteurs, et principalement des jeunes. J’avais envisagé de m’abstenir, mais j’ai finalement décidé de voter contre, tant je ne vois pas, après toutes ces discussions, de raison d’espérer pour l’agriculture de demain. (M. le rapporteur applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ne boudons pas notre bonheur : ce projet de loi est important ; il est fondateur par son esprit et par les grandes orientations qu’il porte.
Pendant près de soixante ans, nous avons développé une agriculture exclusivement tournée vers l’accroissement des volumes afin d’accompagner les évolutions phénoménales non seulement de la société française, mais également du reste du monde, en termes d’accroissement de population, d’accroissement de la richesse, de consommation de viande, de modification des modes de vie.
Puis, nous avons commencé à prendre conscience que ce modèle de développement agricole ne pourrait survivre indéfiniment en poursuivant dans cette direction.
Nous voulions l’indépendance alimentaire, ce modèle nous a amené l’ultra-dépendance de nos éleveurs au soja importé d’Amérique du Sud. Un million et demi d’hectares sont cultivés là-bas, à seule fin de nourrir nos élevages en Bretagne, qui pourtant dispose de 1,65 million d’hectares de surface agricole utile ! Impossible, dans ces conditions, de parler de souveraineté alimentaire !
Nous voulions nourrir la planète, et nos exportations subventionnées ruinent les cultures vivrières d’un grand nombre de pays.
Nous voulions améliorer la nutrition et la santé de notre population, et nos modes de production ont une incidence sur la santé des agriculteurs comme des consommateurs, et affectent la biodiversité dans une proportion que l’on commence à peine à entrevoir.
Les écologistes n’ont peut-être pas obtenu, comme nos collègues du RDSE, une « moisson d’amendements », mais nous ne sommes pas productivistes : nous avons le sentiment d’avoir contribué à ensemencer quelque chose qui portera ses fruits à l’avenir, progressivement. Tel est pour nous le sens de ce projet de loi.
Ce texte marque le début d’une nouvelle ère pour notre agriculture, pour les agriculteurs qui nous nourrissent, pour la qualité de notre alimentation et de notre environnement, ainsi que pour notre santé. Il signe le début de la transition vers l’agro-écologie, et les écologistes, qui se réjouissent de voir ces principes bientôt mis en œuvre, le voteront donc ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au terme de nos travaux, je tenais à vous dire ma satisfaction, car le texte que nous nous apprêtons à voter va permettre un renouveau de l’agriculture en France.
Il met en effet en place l’agro-écologie, la transformation des pratiques des professionnels agriculteurs et forestiers tournées vers plus d’actions collectives et de respect de l’environnement, tout en redressant la compétitivité de l’agriculture française, qui a beaucoup souffert depuis une décennie. Chacun dans cette enceinte y a contribué à sa façon, à commencer par nos deux rapporteurs, dont je tiens à saluer le travail. Je salue également l’écoute et la détermination dont a fait preuve M. le ministre.
Le Sénat a conforté les principales innovations introduites par le projet de loi : le GIEE, et son pendant forestier, le GIEEF ; le renforcement de la politique de l’installation et de la protection du foncier agricole ; les mesures visant à mieux contrôler l’usage des antibiotiques, et à limiter le recours aux produits phytosanitaires ; le transfert des autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques à l’ANSES – nous observerons avec vigilance les moyens qui lui seront attribués, en particulier la levée de son plafond d’emploi – ; et la création de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France, l’IAVFF.
Nous avons également su faire évoluer le texte en renforçant la dimension sociale des GIEE comme la protection des terres agricoles et en créant la compensation agricole. Nous avons aussi permis de consolider le dialogue sylvo-cynégétique en trouvant les modes de conciliation des intérêts tant des chasseurs que des forestiers. J’ai déjà remercié MM. Mirassou et Leroy du travail qu’ils ont mené à ce sujet.
Lors de cette deuxième lecture, le Sénat, sur l’initiative du groupe socialiste, a réintroduit la possibilité pour les producteurs de céréales associés dans un GIEE de commercialiser leurs semences sans passer par un organisme stockeur agréé ; il a rétabli une disposition pour préserver davantage le foncier viticole en AOP ; il a donné plus de moyens à l’autorité administrative pour encadrer les épandages de pesticides à proximité des habitations.
Concernant la forêt, j’ai déjà développé les principales avancées du texte, mais je souhaite dire une fois encore que les outils mis en place permettront de mieux valoriser le potentiel forestier de notre pays et de répondre aux enjeux économiques majeurs de cette filière. Je souhaite enfin réaffirmer l’absolue nécessité de trouver les moyens de pérenniser le Fonds stratégique de la forêt et du bois, le FSFB.
Nous arrivons à un beau texte final, qui va favoriser le renouveau de l’agriculture de demain, dans l’intérêt des agriculteurs et des forestiers, et donc de l’économie nationale. Il fixe une nouvelle direction, et donne de la visibilité et de la confiance en l’avenir. Il est cohérent avec les orientations de la PAC, en particulier celle qui vise à une meilleure répartition des aides en direction des éleveurs et des jeunes, du Massif central, monsieur Bailly, comme des régions de montagne !
M. Gérard Bailly. La PAC, ce n’est pas une loi d’avenir !
Mme Bernadette Bourzai. Pour toutes ces raisons, les membres du groupe socialiste voteront ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, dans le texte de la commission, modifié.
(Le projet de loi est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, du groupe écologiste et du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, rapporteur.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Monsieur le ministre, je voudrais tout d’abord vous féliciter pour ce texte, présenté devant le Parlement avec un objectif : l’avenir de l’agriculture française.
Gérard César évoquait tout à l'heure la rapidité excessive de cette deuxième lecture. La loi d’orientation agricole n’avait connu qu’une seule lecture, tout comme la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Le présent projet de loi a fait l’objet de deux lectures. C’est une avancée ! (M. Jean-Jacques Lasserre opine.)
Aurait-on pu y consacrer encore trois, six, ou douze mois ? Non ! Ne nous préoccupons pas de la forme : il fallait en finir avec ce texte, pour qu’il soit appliqué. Notre unique objectif est de prendre soin des agricultrices et des agriculteurs de notre pays.
Le mot « avenir » figurant dans le titre de ce projet de loi est-il trop fort au regard de son contenu ? Je n’en sais rien. Quoi qu’il en soit, parlons de l’avenir, mais n’en restons pas à ce reproche ! La loi d’orientation de l’agriculture de 2006 a-t-elle vraiment orienté, ou réorienté, l’agriculture ? On peut s’interroger légitimement aujourd’hui à ce sujet. La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche de 2009 a-t-elle réellement modernisé ce secteur ? Sûrement pas, si l’on en croit tout ce que nous avons dû mettre en place dans le texte que nous venons de voter.
Mme Sophie Primas. Mais si !
M. Didier Guillaume, rapporteur. Dans l’appréciation de toutes les lois, nous devons être humbles et modestes.
Un point concret demeure : l’agriculture doit évoluer, se moderniser, se réorienter, et prendre en charge son avenir. Tel est l’objet du présent texte. Je voudrais donc de nouveau saluer M. le ministre et le féliciter de nous l’avoir présenté.
En tant que rapporteur, lors de la discussion des différents sujets, je n’ai eu à l’esprit – je les connais bien – que les agricultrices et les agriculteurs de mon département.
M. Gérard César. Moi aussi !
M. Didier Guillaume, rapporteur. De nombreuses filières prospèrent dans ce territoire. Comme partout, elles vivent beaucoup de crises. Je me suis demandé si les dispositions de ce texte étaient positives pour ces professionnels, et, à travers eux, si elles devaient s’appliquer sur l’ensemble du territoire national. C’est la recherche de l’équilibre et du pragmatisme qui nous a permis d’avancer dans la discussion.
Je ne ferai pas de grand discours ce soir, j’aurai peut-être l’occasion d’intervenir jeudi à l’occasion de l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire, mais je souhaite préciser quelques points.
Les deux lectures successives dans chaque assemblée ont permis d’enrichir le texte, et non de le dénaturer. Celui-ci jette les bases d’avancées importantes pour le monde agricole.
Premièrement, il confère, un statut juridique aux GIEE.
Deuxièmement, il renforce l’installation des jeunes agriculteurs. Souvenons-nous de la situation précédente, des déclarations récentes des jeunes agriculteurs, et voyons ce qu’il en est maintenant. Chacun s’accorde à constater que le remplacement de la surface minimale d’installation par l’activité minimale d’assujettissement est un progrès.
Troisièmement, et c’est une belle avancée, ce projet de loi organise la lutte contre l’antibiorésistance.
Quatrièmement, il modernise les autorisations de mise sur le marché, bien que, à mon grand regret, Mme Primas n’ait pu en être convaincue. Il s’agissait d’introduire du concret, nous en avons débattu longuement.
Que dire enfin de la création de l’IAVFF, qui permettra d’aller plus loin dans les domaines de la recherche, de l’enseignement supérieur, de la mise en réseau, de la coordination et de la modernité de l’agriculture ?
De nombreuses avancées obtenues à l’Assemblée nationale en deuxième lecture ont été conservées par le Sénat. C’est le cas du bail environnemental. N’oublions pas le point de départ, et regardons ce à quoi nous sommes parvenus aujourd’hui !
Les députés ont créé un statut d’associé coopérateur stagiaire. Notre collègue Gérard César, qui connaît mieux que moi l’agriculture, évoquait les coopératives et la clause miroir. Une fois de plus, souvenons-nous de la situation qui régnait voilà six mois ! Sur ce point, un consensus s’est dégagé, auquel souscrivent toutes les coopératives et Coop de France. Ce bon résultat a été obtenu grâce à la contribution de toutes et tous, ainsi qu’à la grande ouverture d’esprit de Stéphane Le Foll et de ses services.
La place du vin dans le patrimoine a été élargie, c’est une avancée importante. Il en va de même pour ce qui concerne le droit de préemption des SAFER, étendu à la nue-propriété des terres.
L’attribution de la gestion du registre des actifs agricoles aux chambres d’agriculture était une demande générale, nous l’avons satisfaite. Nous avons établi également une définition plus souple des préparations naturelles peu préoccupantes. Enfin, nous avons accru les possibilités données aux préfets de réguler l’utilisation des pesticides
Toutefois, il reste quelques points de divergence avec l’Assemblée nationale qu’il faudra trancher lors de la commission mixte paritaire, et dont certains sont importants. C’est le cas pour ce qui concerne les commissions départementales de la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, les CDPENAF, dont nous avons exclu l’intervention sur les plans locaux d’urbanisme couverts par les schémas de cohérence territoriale. En effet, nous croyons à la responsabilité des élus locaux, et nous ne souhaitons pas ajouter continuellement des strates.
Les questions d’urbanisme restent en discussion. Au travers des amendements que nous avons présentés, nous avons assoupli l’interdiction d’extension ou de changement de destination de bâtiments agricoles aux fins de logement. Cela sera sans doute l’un des points durs de la discussion que nous aurons lors de la réunion de la commission mixte paritaire, mais nous défendrons notre position, car il s’agit d’un point important.
Outre la discussion entre la ministre de l’écologie et le ministre de l’agriculture, un débat est engagé au sujet du loup. Ne soyons pas manichéens, voyons ce que nous voulons faire ! Là encore, cette question fera l’objet d’un véritable débat.
Concernant les laboratoires départementaux d’analyses, la loi doit reconnaître qu’ils exercent une mission de service public. Cette question fait partie des points forts sur lesquels nous devrons tenir lors de la commission mixte paritaire.
Nous avons rétabli les campagnes d’information relatives aux produits frais sur les chaînes publiques de télévision et de radio.
Monsieur le ministre, j’ai rendu hommage vendredi dernier – vous étiez absent – à l’action que vous avez décidé de mettre en place à la fin du mois de juillet ou au début du mois d’août pour promouvoir les fruits et légumes français et les produits du marché.
M. Didier Guillaume, rapporteur. Le patriotisme vaut aussi dans le domaine de l’agriculture, en assurant la promotion de nos produits. Je vous remercie de vous engager à le faire.
Par ailleurs, nous avons supprimé les rapports au Parlement, pour répondre aux demandes incontournables du président Daniel Raoul. (Sourires.) Nous verrons ce qu’il adviendra de ce choix en commission mixte paritaire.
Enfin, permettez-moi de remercier tout particulièrement M. le ministre et de saluer l’immense président de la commission des affaires économiques qu’est Daniel Raoul, qui a examiné ici son dernier projet de loi. Comme il le dit, il aura fait « carton plein », car cette commission a été saisie de nombreux textes au cours de cette année. (Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit.)
M. Claude Dilain. C’est vrai !
M. Didier Guillaume, rapporteur. Pour conclure, je veux vous dire tout le plaisir que j’ai eu à être le modeste rapporteur de ce projet de loi.
Tous mes collègues de la commission des affaires économiques et moi-même, nous avons mené des dizaines et des dizaines d’heures d’entretiens, d’auditions. Nous avons beaucoup discuté, parfois bataillé, comme on dit dans le sud de la France, mais toujours avec une seule finalité – nous avions tous un objectif commun, même si les orientations politiques sont différentes ! –, à savoir le bien-être des agriculteurs. Nous avons cherché à faire en sorte que leur situation soit meilleure demain. Tel est l’objectif qui nous a guidés.
J’ai accepté toutes les discussions, car chacun détenait sa vérité ou sa part de vérité. Personne n’a triché, personne n’a évoqué de sujets annexes. Tout le monde a exposé sa vision. Il nous reviendra de défendre tous ces points de vue lors de la réunion de la commission mixte paritaire et d’user de notre force de persuasion pour améliorer encore le texte.
Monsieur le ministre, cher Stéphane Le Foll, vous pouvez être vraiment fier d’avoir porté ce projet de loi d’avenir, qui marquera l’agriculture française. Après vous, d’autres ministres élaboreront d’autres lois,…
M. Didier Guillaume, rapporteur. … et nous nous poserons les mêmes questions quant au bien-fondé des lois précédentes. Ce qui compte, c’est que la loi que nous nous apprêtons à voter soit aujourd'hui un tournant important pour notre agriculture.
Espérons que les agriculteurs vivent mieux demain, avec des revenus supérieurs, et que la compétitivité de l’agriculture française augmente à l’export ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur les travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Leroy, rapporteur.
M. Philippe Leroy, rapporteur. Madame la présidente, monsieur le ministre, je veux, à mon tour, témoigner de la qualité des travaux de la Haute Assemblée sur ce projet de loi lors de ces deux lectures.
Permettez-moi de saluer Daniel Raoul, qui est un très bon président de commission.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est vrai !
M. Philippe Leroy, rapporteur. Son humour facilite souvent les choses, et nous apprécions ses qualités de scientifique. En effet, le débat s’enrichit en l’espèce lorsque le président de commission est un scientifique et non pas un juriste. Merci à lui d’avoir assumé ses responsabilités. (Applaudissements.)
Je remercie également les administrateurs de la commission, qui ont été surchargés de travail et, quelquefois, injustement décriés. Il faut dire que la commission des affaires économiques fonctionne mal : je ne parle pas de la qualité des fonctionnaires présents, qui est réelle, mais de leur effectif, insuffisant au regard du nombre de sujets traités. J’ai ouvert là une parenthèse ; je ne fais que semer quelques cailloux pour l’avenir…
Monsieur le ministre, le présent texte nous apporte, c’est évident, des satisfactions en matière forestière. Emporté par la passion, vous avez dit tout à l'heure qu’on ne faisait rien pour le regroupement. Non ! La petite forêt privée est bien prise en compte. La création des GIEE dans le domaine de la forêt constitue un progrès et les moyens prévus me semblent utiles, ce qui est formidable.
Par ailleurs, mon ami Jean-Jacques Mirassou et moi-même avons trouvé pour la première fois un accord entre les forestiers et les chasseurs. Cela n’a pas été facile ! On va couver cet accord et le faire vivre ! Il s’agit là d’une véritable avancée, que l’on retiendra de nos discussions.
J’exprimerai en cet instant un regret.
Je regrette beaucoup – et nous sommes nombreux dans ce cas ! – la volonté de donner suite aux espérances de ceux qui veulent créer des interprofessions éclatées. On est en train de casser l’unité des interprofessions de la filière bois, comme je l’ai dit lors de mon intervention dans le cadre de la discussion générale. Malheureusement, les choses sont écrites, mais je souhaite que l’on puisse revenir à l’avenir sur la nécessité d’assurer l’unité des actions interprofessionnelles forestières.
Je citerai maintenant les espoirs, nombreux, qui découlent de ce projet de loi.
Monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter d’avoir eu le courage – je l’ai souvent dit ! – de créer le Fonds stratégique de la forêt et du bois. Désormais, il nous revient de le transformer en compte d’affectation spéciale pour assurer sa pérennité.