M. Jean-Jacques Mirassou. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.
M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur président-rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi déposée par Bruno Le Roux et les membres du groupe socialiste de l’Assemblée nationale a été adoptée par nos collègues députés le 15 avril.
M. Jean Bizet. Quelle avancée !
M. Jean-Jacques Mirassou. Son article unique prévoit l’interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié sur le territoire national. La proposition de loi vise plus précisément à interdire le maïs MON 810. Elle anticipe également l’éventuelle autorisation d’un nouvel OGM, le maïs Pioneer TC 1507.
Il n’est pas inutile de rappeler, à ce moment de la discussion, que cette proposition de loi est identique à celle qui avait été déposée par notre collègue Alain Fauconnier, auquel je veux rendre hommage, et rejetée ici, en séance publique, dans les conditions que l’on sait. Pour être tout à fait précis dans la chronologie, il me faut mentionner également l’arrêté du 14 mars 2014 que vous avez pris, monsieur le ministre, interdisant la commercialisation, l’utilisation et la culture des variétés de semences de maïs génétiquement modifié.
M. Jean Bizet. Cet arrêté est illégal !
M. Jean-Jacques Mirassou. N’en déplaise aux esprits chagrins, il y a, on le voit, de la cohérence dans cette démarche, avec une proposition de loi qui vient en quelque sorte épauler l’arrêté et qui vise, sous la double responsabilité du Gouvernement et du Parlement, à interdire la mise en culture du maïs OGM, tout en donnant un cadre juridique à cette disparition.
Il s’agit donc aujourd’hui de franchir une étape, à travers ce que je considère comme un geste politique fort visant à conforter à l’échelon européen la position déjà arrêtée par notre pays depuis bien longtemps.
Il n’a échappé à personne que nous étions à quelques encablures d’élections européennes importantes, ce qui justifie, dans ce domaine notamment, la révision de schémas ayant démontré parfois, et même souvent, leur incohérence. Études scientifiques souvent incomplètes ou approximatives, voire contestées, majorités qui, à force d’être qualifiées, sont disqualifiées,…
M. Daniel Raoul, rapporteur. Joli !
M. Jean-Jacques Mirassou. … contradictions entre le Conseil européen et la Commission européenne, tout cela impose une nouvelle démarche, qui repose sur un dispositif d’autorisation à deux niveaux : au niveau européen, avec, à terme, une liste des OGM pouvant être mis en culture sur une base scientifiquement irréfutable, après avis de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, et, au niveau national, à partir de critères de décision propres à chaque nation.
L’enjeu global est d’ordre sociétal, économique et écologique. C’est la raison pour laquelle de fait, et par définition, tout le monde est concerné, et pas seulement le clan des initiés. Il est très facile de démontrer, comme l’a fait Joël Labbé, que, entre l’obscurantisme et la confiance aveugle dans les progrès de la science, il y a place pour le débat, le bon sens, l’esprit critique et le libre arbitre.
Encore faut-il que l’approche du scientifique soit non seulement incontestable et incontestée, mais aussi, et surtout, accessible au plus grand nombre. En menant ici, au Sénat, ce débat, nous ouvrons cette voie, et, ce faisant, nous jouons parfaitement notre rôle. L’opinion publique ayant été marquée – le mot est faible – par les affaires de l’amiante, de l’encéphalopathie spongiforme bovine ou, plus récemment, du Mediator, on comprend que, pour le moment, elle émette quelques doutes et souhaite s’emparer du débat.
Cependant, à l’heure où je parle, le préalable reste le respect du fameux principe de précaution interdisant la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié, qui sont plus que douteuses. C’est pourquoi, en conscience, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voterons résolument cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Gaouyer.
Mme Marie-Françoise Gaouyer. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président- rapporteur, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi relative à l’interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié. On a pu entendre qu’il s’agissait d’un texte d’affichage politique rédigé au mépris de la réglementation européenne, tournant le dos à l’innovation, foulant aux pieds la recherche.
Que les auteurs de ces affirmations me permettent de douter de la pertinence de leurs arguments. Est-ce un texte politique ? Oui, c’en est un ; c’est là tout son objet. Nous sommes tous au fait des péripéties, ces derniers mois, du TC 1507 de Pioneer à Bruxelles. Lorsque les procédures dysfonctionnent au point de laisser une minorité d’États décider, contre tous les autres et contre l’avis très tranché du législateur européen, sur une question aussi sensible que celle des OGM, il est alors de notre responsabilité d’apporter une réponse politique pleinement assumée, claire et ferme.
Trop souvent, les partisans des OGM essaient de noyer le débat et de repousser les études scientifiques accablantes par l’artifice d’une argumentation technico-juridique destinée essentiellement à donner du temps et à brouiller leurs intentions. Face à cette stratégie, ne craignons pas d’user de la fibre politique. Les Français, qui sont massivement favorables à notre démarche d’interdiction, sont, je crois, en attente de marqueurs politiques forts. Ne nous privons pas de leur en donner !
Manque de pertinence, également, dans l’accusation d’affichage politique : cette stratégie peine à masquer la réalité du rapport de force sur cette question. Il a toujours existé en France, et je m’en félicite, un certain consensus au sujet des OGM. Depuis l’activation de la clause de sauvegarde en 2007, les majorités successives ont toutes protégé notre pays contre le danger de la culture de plants OGM. Le principal effet de cette proposition de loi sera d’ailleurs de prolonger une décision du gouvernement de François Fillon. Cette décision était justifiée en mars 2012 ; elle l’est toujours aujourd’hui. Conservons la cohérence de la politique française en matière d’OGM.
Manque de pertinence, enfin, car cette interdiction du maïs transgénique n’est pas une porte fermée à la recherche et à l’expérimentation. En la matière, notre débat récent sur l’avenir de l’agriculture a déjà apporté des éléments de réponse : l’article L. 533-1 du code de l’environnement satisfait la logique de recherche, puisqu’il dispose que la dissémination volontaire d’OGM est autorisée sous réserve du respect de certaines conditions de sécurité sanitaire, notamment en termes de risque de dissémination.
J’ajoute que, justement, les partisans du maintien de l’interdiction sont, me semble-t-il, très attentifs à la question de la recherche en plein champ ou aux conséquences de la consommation de produits génétiquement modifiés, car c’est de la recherche que vient la preuve de la nocivité des OGM, ou du moins de leur dangerosité potentielle. Rappelons que le plus grand obstacle à la recherche est moins la législation française avec son principe de précaution que la politique de Monsanto, qui refuse l’acquisition du maïs MON 810 à des fins de recherche.
Après la forme, examinons maintenant le fond.
La proposition de loi ne dit rien de nouveau. Son examen est l’occasion de rappeler les dangers environnementaux de la culture du maïs MON 810, qui ont été mis en évidence il y a longtemps déjà : développement de la résistance chez les espèces cibles exposées, ce qui encourage le recours à des techniques de lutte contre les ravageurs au très lourd impact écologique ; destruction des populations non cibles – papillons et abeilles, notamment –, avec toutes les conséquences que l’on imagine pour la pollinisation et l’apiculture, sans parler de l’impact de la dissémination non contrôlée sur les filières refusant le recours aux OGM.
La vérité est que les cultures OGM sont totalisantes : elles n’obéissent qu’à leur propre système, ou plutôt à celui qui a été conçu par leurs développeurs. On ne peut pas cultiver de manière conventionnelle ou biologique à proximité ; on ne peut développer quasiment aucune activité agricole dans les environs, à cause des disséminations et des impacts sur l’écosystème et la biodiversité. Les cultures OGM font entrer les agriculteurs dans une logique de dépendance préoccupante pour l’approvisionnement en semences et les enferment dans un mode de production et une filière dont il leur est très difficile de sortir.
Nous avons récemment examiné et voté le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt. Cette discussion fut pour nous l’occasion de dire notre volonté de développer une agriculture soutenable sur les plans économique, environnemental et social, et la nécessité, pour y parvenir, de rompre avec la logique du « tout-intensif » et de mettre fin à la toute-puissance du productivisme aveugle.
L’agriculture telle que la conçoivent les producteurs d’OGM est en totale contradiction avec l’orientation que nous avons choisie. La France et même l’Europe n’ont rien à gagner à entrer dans la compétition internationale avec les mêmes armes que le Brésil, les États-Unis ou le Canada : de cette compétition-là, nous sortirons toujours perdants ! Je crois pouvoir dire sans me tromper qu’il n’y a pas de place en France pour le développement d’une économie rentable des OGM. Les consommateurs français n’y sont pas favorables, et les agriculteurs voient bien qu’ils n’y ont aucun intérêt au-delà du très court terme.
Cette proposition de loi n’est sûrement pas la dernière étape du combat, mais elle est essentielle : elle constitue un acte politique fort qui doit nous servir de référence positive. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Je dirai quelques mots en réponse aux différentes interventions.
Premièrement, cette proposition de loi remet-elle en cause la capacité de la France à innover et à faire des recherches sur les semences ? Je rappelle encore une fois que la France est le premier exportateur mondial de semences, loin devant tous les autres pays européens. Une entreprise française est d'ailleurs en train de s’implanter de manière extrêmement importante en Asie, et en particulier au Japon et en Inde, en attendant la Chine. Cette entreprise est en concurrence avec les fameux groupes dont il a beaucoup été question aujourd’hui.
Deuxièmement, qu’en est-il des rendements ? Nos voisins espagnols, qui cultivent du maïs OGM, ne sont pas arrivés à des rendements supérieurs à ceux que nous obtenons en France, en particulier dans le grand Sud-Ouest. Cela montre que les OGM n’ont pas d’impact évident en la matière.
En revanche, les études réalisées aux États-Unis montrent assez clairement que l’utilisation des herbicides et des pesticides dans les champs d’OGM suit une courbe en « J » : elle baisse au début, mais augmente ensuite à mesure que les résistances se développent.
Il me semble donc que, à long terme, l’avantage compétitif des OGM est tout à fait contestable.
Troisièmement, et c’est sans doute le point le plus important, je veux revenir sur l’agroécologie, débat que nous avons déjà eu lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
Pour élaborer une variété d’OGM, on sélectionne une semence résistante ou produisant ses propres pesticides. Or cette méthode empêche de réfléchir à de nouveaux modèles de production qui reposent sur des mécanismes naturels permettant de se protéger – c’est cela, la stratégie de l’agroécologie –, au lieu de continuer dans une logique d’utilisation de produits phytosanitaires. Si l’on entrait dans le débat par la seule clé des OGM, on fermerait l’accès à des potentialités de développement durable pour l’agroécologie, et pour l’agriculture tout court. Cela serait préjudiciable, et cela limiterait les innovations, car les nouveaux modèles de production donnent une place extrêmement importante à la recherche et à l’innovation ; le projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt en témoigne.
Quatrièmement, sur le plan juridique, cette fois, d’aucuns m’opposent que ce texte serait contraire au droit européen. Je vous rappelle simplement que le Monsanto 810 a une autorisation de mise en culture vieille de seize ans, alors qu’elle aurait dû être revue au bout de dix ans. S’il y a du juridisme à faire, nous avons donc aussi de quoi argumenter…
Épargnons-nous ces débats !
En revanche, sur la question de la législation européenne, il y a un débat engagé à l’échelon communautaire. Pour nous, l’objectif est d’arriver à une proposition du Conseil sous la présidence grecque, car le Parlement et la Commission ne seront pas encore en capacité d’examiner ce texte.
À cet égard, je veux juste préciser un certain nombre de critères sur lesquels nous nous appuyons et vous informer de l’état d’avancement de notre démarche.
Au départ, nous avions défendu une proposition extrêmement ambitieuse qui consistait à reprendre le système juridique existant pour les autorisations de mise sur le marché des produits phytosanitaires afin de l’appliquer aux organismes génétiquement modifiés. Ainsi, l’autorisation de mise sur le marché à l’échelle européenne était censée être accordée après un débat européen, mais, comme M. le rapporteur l’a rappelé, chaque État pouvait avoir ses propres critères pour réévaluer l’autorisation de mise en culture.
Comme nous n’avons pas été suivis par une majorité d’État, nous défendons désormais une seconde stratégie qui consiste à faire fixer des critères à l’échelon européen, c’est-à-dire que les critères sur lesquels les États pourront se fonder pour accepter ou refuser l’autorisation de mise en culture relèveront de la législation non pas nationale, mais européenne.
Aujourd’hui, le débat porte sur l’élargissement des critères d’interdiction économiques et sociaux. Comme je l’ai dit, j’attache une grande importance à la capacité de chaque État à mettre sur la table les coûts et les bénéfices, du point de vue social et économique. Il importe ainsi de pouvoir évaluer les rendements, le recours aux pesticides, ce qui n’a jamais été fait.
Par ailleurs, il me semble primordial que la Commission soit impliquée dans le dialogue entre l’État membre et le pétitionnaire, en l’occurrence l’entreprise qui vient demander une autorisation de mise en culture. Jusqu’ici, chaque État se retrouvait seul face au pétitionnaire, sans implication de la Commission. Avec le changement de législation, comme l’autorisation sera donnée à l’échelon européen, chaque État pourra renvoyer les pétitionnaires vers la Commission, qui prendra les décisions dans le cadre défini.
Il m’apparaît également important de pouvoir demander à tout moment de réévaluer les autorisations sur la base de données nouvelles. Ainsi, concernant un certain nombre d’OGM autorisés voilà une dizaine d’années, nous disposons aujourd’hui d’éléments scientifiques nouveaux à la lumière desquels l’autorisation doit pouvoir être réévaluée au niveau européen, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. C’est l’un de nos objectifs.
Il est même envisagé une clause de rétroactivité, c’est-à-dire que, si l’on s’aperçoit qu’un OGM qui a été autorisé pose problème, il sera possible de revenir en arrière.
Telle est notre stratégie actuelle et tel est le cadre de nos discussions au niveau européen, et j’espère que nous parviendrons à un accord sous présidence grecque.
Enfin, permettez-moi un mot sur le Haut Conseil des biotechnologies, que je souhaite réorganiser en rouvrant sa composition. J’entends bien m’appuyer sur cet organisme qui doit être une véritable instance de débat. D’ailleurs, en me rendant au comité économique, éthique et social, la semaine dernière, j’ai pu constater qu’il fonctionnait bien et que s’y tenaient des débats très intéressants.
Je suis donc preneur de toute suggestion qui permettrait de relancer véritablement le HCB et de lui donner toute sa place dans ces débats.
Pour conclure tout à fait, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous informe que le Conseil d’État a débouté l’AGPM de son référé, considérant qu’il n’y avait pas d’urgence suffisante. Cette information permet aussi d’éclairer notre débat.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avec ce texte, nous procédons à une mise en conformité avec ce qu’a toujours été la position du Gouvernement, position qui était également celle de l’UDI au moment du Grenelle de l’environnement, monsieur Lasserre.
Ce moratoire était urgent, ce qui explique que nous n’ayons pas attendu d’en discuter dans le cadre de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture. En effet, nous nous trouvions face à un vide juridique dont, d’ailleurs, certains agriculteurs ont profité pour semer.
M. Jean Bizet. Légalement !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Soyons clairs et transparents ; donnons-nous un cadre, tout en continuant à discuter !
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié
Article unique
I. – La mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié est interdite.
II. – Le respect de l’interdiction de mise en culture prévue au I est contrôlé par les agents mentionnés à l’article L. 250-2 du code rural et de la pêche maritime. Ces agents disposent des pouvoirs prévus aux articles L. 250-5 et L. 250-6 du même code.
En cas de non-respect de cette interdiction, l’autorité administrative peut ordonner la destruction des cultures concernées.
M. le président. L'amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Lasserre, Détraigne, Deneux, Capo-Canellas, Roche, J.L. Dupont, J. Boyer et Bockel, Mme Férat, M. Tandonnet, Mme Jouanno et MM. Namy et Merceron, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les expérimentations de plein champ sous contrôle sont autorisées.
La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre.
M. Jean-Jacques Lasserre. Je me suis suffisamment exprimé lors de la discussion générale sur l’intérêt que nous voyons à l’autorisation de la recherche et de l’expérimentation.
Sans vouloir abuser de votre temps, je vous rappelle tout de même que l’affirmation de ce principe est pour nous fondamentale. Il s’agit d’un domaine d’excellence dans lequel la France doit prendre toute sa place. Or, je le répète, je trouve dommage de voir nos chercheurs s’en aller sous d’autres cieux trouver les conditions d’épanouissement de leur talent.
Par ailleurs, nous pensons très sincèrement qu’il faut une initiative du Parlement – commençons donc ici, au Sénat ! – pour sortir de ce débat manichéen en déterminant un cadre nous autorisant à agir de manière plus simple et plus positive, aussi, dans les années qui viennent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Daniel Raoul, rapporteur. Mon cher collègue, nous avons eu cette discussion au mois de février, lorsque nous avons étudié un amendement similaire, qui était alors rédigé d’une autre façon, j’y reviendrai.
Le texte que nous examinons aujourd’hui ne concernant que la mise en culture à des fins commerciales, je souhaiterais que nous en restions là.
En outre, la rédaction de votre amendement pose un autre problème : en effet, elle présuppose que les autorisations sont quasi automatiques et qu’il n’existe qu’un contrôle a posteriori.
Autrement dit, votre dispositif est tout à fait contraire aux dispositions du code de l’environnement applicables à la dissémination volontaire, donc aux essais au champ.
Pour ces deux raisons, la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe de l'UDI-UC.
Je rappelle que l’avis la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 169 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 330 |
Pour l’adoption | 161 |
Contre | 169 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. Jean-Jacques Mirassou. Il a bien fait !
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le vote sur l’article unique vaudra vote sur l’ensemble de la proposition de loi.
Avant donc de mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean Bizet, pour explication de vote.
M. Jean Bizet. Je ne vous surprendrai pas en réaffirmant que cette proposition de loi n’entre pas dans le cadre légal des autorisations de mise en culture des OGM tel que le prévoit le droit européen. Je l’ai dit plusieurs fois lors de nos débats, y compris le 17 février dernier.
Monsieur le ministre, pour avoir voulu agir trop vite, vous allez vous retrouver dans une impasse juridique. Vous avez souhaité empêcher par tous les moyens les semis de maïs OGM cette année, mais vous n’avez pas tenu le calendrier, car, comme vous l’avez reconnu vous-même, certains ont semé, et tout à fait légalement, il est vrai dans un court laps de temps. (Exclamations sur les travées du groupe écologiste.) C’est le propre des agriculteurs de savoir jouer de fenêtres de tir excessivement courtes !
M. Joël Labbé. Et certains les y poussent !
M. André Gattolin. Oui !
M. Jean Bizet. Par ailleurs, vous le savez, vos textes d’interdiction ne sont pas conformes à la Constitution.
M. Jean Bizet. Pourquoi une telle précipitation, alors que, en parallèle, vous militez au niveau européen pour la négociation d’une nouvelle directive qui pourrait modifier les procédures d’autorisation ?
Comme je l’ai dit à la tribune, je ne suis pas formellement opposé à cette démarche, tant il est vrai que nous sommes dans une certaine incohérence, source de difficultés, depuis une dizaine d’années.
Attendons donc la mise en place de ce nouveau cadre juridique négocié avec nos partenaires !
Le Premier ministre, Manuel Valls, à la sortie d’un conseil des ministres, a d’ailleurs lui-même récemment enjoint le Gouvernement à « être un peu plus vigilant sur la constitutionnalité des textes de loi qu’il soutient ».
Nous avons aujourd’hui la preuve que le Premier ministre n’est pas véritablement écouté… Non seulement vous essayez de contourner la Constitution, mais vous mettez aussi en doute les conclusions des autorités scientifiques.
J’ai un avis sur le fonctionnement du HCB, et nous en parlons d’ailleurs souvent avec le président Raoul. En 2008, nous avions voté un dispositif assez bien pensé : le comité économique, éthique et social émettait des recommandations, tandis que le comité scientifique émettait des avis.
Si nous revenons à cette architecture en prenant garde de faire en sorte que le comité scientifique soit assez équilibré, monsieur le ministre, nous créerons les conditions pour que cette structure fonctionne normalement. C’est en tout cas ce que nous appelons de nos vœux.
Le débat que nous avons eu aujourd’hui n’est pas franchement raisonnable, même s’il s’est déroulé dans une atmosphère assez sereine et amicale. Vous comprendrez donc, et vous m’en voyez désolé, que le groupe UMP n’hésitera pas à voter contre plutôt que de s’abstenir.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je l’ai dit à la tribune : ce débat est tout à la fois sociétal, environnemental et économique. Il n’en demeure pas moins qu’il est possible d’échapper au carcan juridique derrière lequel vous vous abritez, monsieur Bizet. Il ne vous aura pas échappé non plus qu’entre le carcan juridique et le reste du monde, il y a le Parlement, qui a pour rôle – cela tombe bien ! – de refléter ce que l’opinion publique pense à un instant T de tel ou tel dossier dont il a la charge.
Nous avons été un certain nombre aujourd’hui à tenter de faire la démonstration que l’opinion publique avait été quelque peu échaudée par nombre d’expériences menées auparavant dans ce domaine comme dans d’autres, et l’on comprend dès lors qu’elle puisse être réticente à s’engager dans une voie manifestement semée de dangers potentiels.
Certains l’ont dit avant moi, sur le plan scientifique, à peu près tout et son contraire a été dit sur le sujet en fonction des officines auxquelles on s’adressait. C’est la raison pour laquelle, ayant moi-même une formation scientifique, je plaide, à l’instar notamment de Daniel Raoul, pour que l’on approfondisse le volet expérimental, de manière à en tirer le meilleur parti. En même temps, ne cherchons pas à fuir notre responsabilité en jetant le voile sur les dangers potentiels des OGM.
Aussi, je considère que, compte tenu des doutes qui planent et compte tenu des mauvaises expériences passées, il faut appliquer le principe de précaution. Le vote de cette proposition de loi permettra d’offrir ce cadre légal dont vous déplorez l’absence depuis le début de cette discussion, chers collègues.
C’est donc sans ambiguïté, avec détermination et en parfaite conscience, au sens le plus fort du terme, que nous voterons cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote.
Mme Chantal Jouanno. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au sein de notre groupe, les positions sont quelque peu partagées.
Je connais bien ce sujet. Les conditions dans lesquelles nous avons été amenés à prendre des décisions en 2007 ou en 2008 n’ont pas fondamentalement changé. Les questions relatives au maïs OGM demeurent : son intérêt pour la société, sur les plans économique, environnemental ou sanitaire n’est pas avéré. Il demeure des incertitudes sinon sur le plan sanitaire – je n’irai pas sur ce terrain extrêmement controversé –, mais en tout cas sur le plan environnemental ; en effet, nous n’avons que peu d’éclairage sur les risques de dissémination et de résistance, et planent bien des incertitudes.
Au regard d’un bilan qui n’apparaît pas comme étant positif pour la société, au regard de ces incertitudes qui demeurent, nous redisons notre opposition à l’introduction du maïs OGM dans nos cultures.
Il n’en reste pas moins que l’importation de produits destinés notamment à la nourriture animale pose problème. À cet égard, monsieur le ministre, il serait important de relancer en France les filières de protéagineux et la culture de légumineuses. Il ne faut pas être hypocrite : une grande part des aliments pour animaux que nous importons contiennent des OGM.