M. Philippe Bas. Je le déplore comme vous !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. En outre, il n’a jamais été abondé. En votre qualité d’ancien ministre délégué à la famille, vous savez que ce fonds est placé sous la tutelle de la famille et qu’à ce titre il doit notamment être abondé par la Caisse nationale des allocations familiales.
Deuxièmement, – je le dis sous votre contrôle parce que je n’en ai pas la certitude absolue –, faire intervenir ce fonds en faveur des mineurs isolés étrangers nécessiterait une modification du décret.
M. Philippe Bas. C’est vrai !
M. René-Paul Savary. Absolument !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Votre suggestion n’est donc pas opérationnelle immédiatement. (M. René-Paul Savary s’exclame.) Cependant, je la garde dans un coin de ma tête…
M. Philippe Bas. Ne la gardez pas trop longtemps !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Les trois inspections générales verront ce qui est souhaitable ou possible de faire.
Pour terminer, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, je veux de nouveau tous vous remercier pour la qualité de ce débat. Comme je m’y attendais, il a contribué à enrichir notre réflexion et servira indiscutablement aux trois inspections, dont le travail a déjà commencé.
Certains ont dit que je ne devais pas invoquer l’article 40 de la Constitution pour ne pas mettre un terme au débat.
Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, il est vrai que j’aurais pu mettre un terme au débat, par exemple en intervenant auprès de la conférence des présidents pour éviter l’inscription à l’ordre du jour de ce texte ! Je ne l’ai pas fait. J’ai permis que le débat ait lieu.
La discussion générale est désormais achevée, et la commission des lois, que j’ai interrogée, m’a indiqué qu’aucun amendement n’avait été déposé. Dès lors, nous n’avons pas à discuter d’éventuelles modifications qui pourraient être introduites dans le texte.
Le débat nous a éclairés ; il nous a enrichis. Il nous conforte dans l’idée que si le dispositif doit être vraiment amélioré, il a d'ores et déjà incontestablement apporté des réponses.
Par conséquent, je n’hésite pas, à ce stade de la discussion, à invoquer l’article 40. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. René Vandierendonck, rapporteur. Très bien !
M. René-Paul Savary. C’est frustrant !
M. Philippe Bas. Nous sommes juste atterrés !
M. le président. Quel est l’avis de la commission des finances sur l’applicabilité de l’article 40 de la Constitution ?
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, très récemment, la commission des finances a élaboré, adopté et diffusé un rapport d’information sur la recevabilité financière des amendements et des propositions de loi au Sénat.
M. André Reichardt. Exact !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le président, me fondant sur les analyses de droit qui figurent dans ce rapport sur l’application de l’article 40 de la Constitution, auquel je me permets de renvoyer chacun,…
M. André Reichardt. Bon rapport !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … je suis amené à indiquer que les articles 1er et 5 de la proposition de loi auraient pour conséquence d’aggraver une charge publique.
En effet, l’article 1er vise à transférer à l’État les compétences, aujourd’hui assurées par les départements, d’accueil et d’évaluation des mineurs isolés étrangers et les frais de prise en charge de ces derniers. L’article 5 confie aux centres d’hébergement des mineurs isolés des compétences qui ne leur sont pas attribuées à ce jour et qui excèdent la « charge de gestion », notion largement explicitée et commentée dans le rapport d’information que je viens de citer.
Les autres articles de la proposition de loi, quant à eux, ne sont pas contraires à l’article 40 de la Constitution dès lors, d’une part, qu’ils n’ont pas pour conséquence de créer ou d’aggraver une charge publique et, d’autre part, que leurs dispositions ne sont pas inséparables de celles des articles 1er et 5 précités.
Ainsi, monsieur le président, et conformément à la « jurisprudence » développée et publiée par la commission des finances, je répète que les dispositions des articles 1er et 5 de la proposition de loi sont contraires à l’article 40 de la Constitution et que les articles 2, 3, 4, 6 et 7 ne le sont pas.
M. le président. En conséquence, les articles 1er et 5 ne sont pas recevables.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Article 1er (irrecevabilité)
(Non modifié)
L’article L. 121–7 du code de l’action sociale et des familles est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« 11° Les frais de prise en charge, dans les centres d’accueil définis à l’article L. 345–1–1, des mineurs mentionnés au 1° de l’article L. 511–4 et à l’article L. 521–4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
« 12° Les frais de prise en charge des mineurs isolés étrangers confiés, en application d’une mesure judiciaire d’assistance éducative, à un service départemental de l’aide sociale à l’enfance ou à un service ou un établissement habilité pour l’accueil de mineurs. »
M. le président. Je rappelle que cet article n’est pas recevable.
Article 2
(Non modifié)
Après le cinquième alinéa de l’article L. 223–2 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La procédure prévue à l’alinéa précédent est également applicable en cas de danger immédiat ou de suspicion de danger immédiat concernant un mineur mentionné au 1° de l’article L. 511–4 et à l’article L. 521–4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Le procureur de la République est informé sans délai. Au terme du délai de soixante-douze heures, si l’intéressé n’a pas fait, antérieurement, l’objet d’une mesure de placement provisoire ou d’assistance éducative, il fait l’objet d’une mesure de placement provisoire dans le centre d’accueil mentionné à l’article L. 345–1–1 dans le ressort duquel est situé le département où il a été trouvé. »
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je veux remercier M. le président de la commission des finances d’avoir démontré que n’étaient irrecevables, au titre de l’article 40 de la Constitution, que des articles bien précis du texte.
Monsieur Marini, je vous remercie de cette analyse, qui nous permet de nous exprimer sur différents articles de la proposition de loi et, j’en suis sûr, nous servira d’expérience pour d’autres textes.
Madame la garde des sceaux, j’ai fait partie du comité de suivi. J’ai assisté à ses trois réunions avec beaucoup d’assiduité, muni de notes que m’avaient préparées mes services pour bien cadrer le dispositif.
Dès la première réunion, nous vous avons demandé d’organiser la formation des travailleurs sociaux, qui seront amenés à évaluer l’âge des mineurs isolés étrangers. Cette formation est très importante, car, pour l’heure, nos travailleurs sociaux ne sont pas du tout formés pour émettre un avis pertinent et le moins contestable possible. Or, alors que tout le monde en est convenu et que notre demande date maintenant de presque un an, rien n’a encore été fait ! C’est dommage, car la mise sur pied d’un protocole d’évaluation constituait une avancée.
Dans le cadre de la mission d’expertise que vous avez lancée, il est important de s’assurer que tous les parquets suivent bien les préconisations que vous avez formulées, ce qui n’est pas le cas actuellement.
En outre, je comprends mon collègue Éric Doligé, qui a bien résumé la situation : si les mineurs isolés étrangers représentent bien 4 % des mineurs pris en charge par l’aide sociale à l’enfance à l’échelle nationale, certains départements n’en accueillent pas du tout, quand d’autres en accueillent beaucoup !
Il importe donc de considérer et les flux – vous les avez évoqués pour le département du Loiret –, et les stocks.
Pour ce qui concerne mon département de la Marne, le flux s’est élevé à 79 mineurs isolés étrangers, mais j’évalue à 50 le nombre de mineurs hébergés sur l’ensemble de l’année. Le coût, à raison de 50 000 euros la place – excusez-moi de ramener le sujet à des affaires d’argent, mais nous sommes des gestionnaires – atteint 2,5 millions d’euros supplémentaires, alors que le budget de l’aide sociale s’élève d'ores et déjà à 50 millions d’euros en ce qui concerne la protection de l’enfance et de la famille. Eu égard à la situation dans laquelle se trouvent les départements, vous le comprendrez, un coût supplémentaire de 2,5 millions d’euros peut nous interpeller.
Madame la garde des sceaux, j’avais accepté les quotas que vous aviez fixés. Ces quotas étaient exprimés sous la forme d’un chiffre, calculé par rapport au flux annuel de 1 500 mineurs isolés étrangers. Or, le nombre d’entre eux à être entrés sur le département a tout de suite été supérieur à ce qui avait été prévu, et le quota que j’avais accepté a été doublé. Comprenez donc que nous ayons le sentiment de n’avoir pas fait une bonne affaire, et de n’avoir pas été correctement traités ! Au demeurant, c'est la raison pour laquelle nous avons émis quelques critiques.
J’ai noté que vous aviez pris l’engagement de modifier le décret relatif au Fonds national de financement de la protection de l’enfance, de manière à permettre que ce dernier contribue au financement.
Toutefois, madame la garde des sceaux, des fonds européens peuvent également être sollicités ! Tout ce travail d’inclusion, toute cette politique d’intégration peut s'inscrire dans le cadre de fonds européens avec la nouvelle maquette spécifique pour les jeunes !
Il faut donc que vous parveniez à un accord au niveau national avant qu’intervienne, dans le cadre du fonds social européen spécifique aux jeunes, la déclinaison régionale qui s'ensuit. Un financement pourrait alors intervenir au niveau des conseils généraux pour abonder indirectement le Fonds national de financement de la protection de l’enfance, permettant que la prise en charge ne se fasse pas au détriment des autres mineurs, car nos foyers sont surchargés.
Par ailleurs, en tant que président de conseil général, le risque de placer une personne majeure dans un foyer pour mineur me pose un problème moral.
Mme Hélène Lipietz. Tout à fait !
M. René-Paul Savary. Des difficultés peuvent survenir – par exemple, une agression –, et la responsabilité de ceux qui ont assuré le placement est alors susceptible d'être mise en cause pour manque de vigilance.
Je veux maintenant m'adresser à Jean-Pierre Michel pour lui dire à quel point il est frustrant, pour un président de conseil général, de faire des efforts financiers et pédagogiques – grâce à nos travailleurs sociaux – pour intégrer ces jeunes, et de les voir se faire expulser à leur majorité parce qu'ils se trouvent alors en situation irrégulière. Je souhaite que l’on puisse poursuivre ces efforts afin de parvenir à une véritable intégration. (M. Jean-Pierre Michel opine.) La politique de l’immigration et surtout celle de l’intégration doivent donc être améliorées pour les jeunes une fois majeurs.
J’en arrive à un dernier point, madame la garde des sceaux, et ainsi j’aurai vidé mon sac – vous m'en excuserez, il fallait que je vous dise tout ce que j’avais sur le cœur ! Certes, la cellule a fait un joli dépliant ! (M. René-Paul Savary montre un dépliant.) Ce dépliant est tout à fait intéressant et il montre bien la marche à suivre.
Mais avec ce document, madame la garde des sceaux, on devient vraiment les complices des filières de l’immigration clandestine ! J’ai interrogé les jeunes concernés en prenant le temps nécessaire, et j’ai appris que les filières connaissent les adresses ! Figurez-vous que le dernier était un Afghan, à qui le passeur avait demandé 3 000 euros pour venir d’Afghanistan en camion et donné l’adresse du foyer départemental de l’enfance ! Ce jeune, qui parlait bien, nous a tout expliqué – je suis sûr que, celui-là, on l’intégrera.
Les filières commencent donc à bien connaître nos structures, et voilà qu’un dépliant est fourni ! Si jamais l'on se trompe d’adresse, ces filières, condamnables pour la plupart, trouveront ainsi un descriptif qui leur permettra de diriger ces jeunes vers les différents foyers selon le département où ils se trouvent…
Soyons attentifs à cet égard. Il s’agit d’une évolution car on cadre le dispositif. Toutefois, en faire la promotion peut s'avérer contre contre-productif au regard de votre volonté de trouver des solutions dans ce domaine, volonté dont je ne doute pas ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Yves Détraigne applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. René Vandierendonck, rapporteur. Je suis très content que le débat sur les mineurs isolés étrangers ait lieu. l’article VI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, aux termes duquel la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse », a été cité par Mme la garde des sceaux.
Maintenant, pour nous, tout est une question de confiance. Ou bien l’on attend la fin du créneau horaire (Mme Éliane Assassi s'esclaffe.) ; ou bien l’on s'oriente dans la direction conforme à mes souhaits : s'il apparaît, après avoir attendu deux ou trois mois les résultats d’une concertation, que des ajustements sont nécessaires, on les place là où l’article 40 ne pourra pas être invoqué, c'est-à-dire dans un texte sur des transferts de compétence – je pense au deuxième texte sur la décentralisation, dont on nous dit qu’il va arriver.
Tout dépend de la raison pour laquelle on veut être en séance. Si c'est pour occuper la galerie en échangeant des arguments, on peut continuer, on peut même attendre la prochaine niche parlementaire ! (Sourires.) Mais si c'est pour légiférer, je pense que la seconde méthode est plus efficace. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – Mme Hélène Lipietz applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
M. Jean Arthuis. Je voudrais à mon tour exprimer ma satisfaction et remercier Mme la garde des sceaux, le rapporteur de la commission des lois et tous ceux qui ont participé à la discussion générale. Mes chers collègues, nous avons tous reconnu que nous nous trouvions face à un problème qui se pose en des termes toujours plus aigus, et qui suscite beaucoup d’incompréhension. On a cité la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, je voudrais rappeler que son l'article XV précise que la société est en droit de demander à tout agent public de rendre compte de son administration.
C'est bien la question qui se pose ici : qu’il s'agisse du Gouvernement ou des responsables de l’aide sociale à l'enfance, nous devons rendre compte de notre administration et constater que, face à l’afflux croissant de mineurs isolés étrangers, les réponses que nous apportons sont insatisfaisantes.
Naturellement, on peut évoquer des considérations financières. Mais, encore une fois, je voudrais dire que, dans l’esprit des auteurs de cette proposition de loi, il ne s'agit pas de faire une opération favorable aux finances des conseils généraux. Ce qu’il leur en coûte aujourd'hui pour accueillir des mineurs isolés étrangers doit être demain restitué à l’État si ce dernier assume cette mission de solidarité nationale. Que cela soit bien clair !
Il ne s'agit pas non plus de pratiquer une discrimination entre les mineurs isolés étrangers et les mineurs issus des familles de nos territoires qui nous sont confiés par décision de justice parce qu’elles sont jugées incapables – au moins momentanément – d’assurer la sécurité et l’éducation de ces jeunes.
Or, madame la garde des sceaux, en édictant la circulaire du 31 mai 2013, vous avez vous-même opéré une distinction entre les mineurs isolés étrangers et les autres mineurs pris en charge par l’aide sociale à l'enfance. Alors, ne formulons pas d’accusation ni de soupçons : nous nous trouvons simplement face à un problème qu’il nous appartient de régler avec humanité, tout en respectant, bien sûr, nos engagements internationaux.
Mes chers collègues, je voudrais vous rendre attentifs à l’exaspération de nos collaborateurs chargés de l'aide sociale à l'enfance. D'une part, de plus en plus de jeunes leur sont confiés, en raison de la précarité des familles, conséquence de la situation économique et sociale. D'autre part, leur mission première, c'est l’éducation. Nos travailleurs sociaux n’ont pas été préparés à comprendre un jeune arrivant d’Érythrée ou d’Afrique subsaharienne et qui ne parle pas notre langue ni à évaluer leur âge. Encore une fois, nombre d’entre eux sont majeurs.
J'ai fait appel de douze décisions du tribunal de grande instance de Laval, et la cour d’appel a fait droit à notre requête dans huit cas parce que les papiers étaient faux, parce qu'il s'agissait d’adultes… Ces appels justifieraient peut-être que le conseil général se retourne contre l’État et porte plainte contre des individus qui ont présenté de faux papiers et raconté des histoires qui sont des fables.
Soyons conscients que, par ces décisions de justice, le conseil général a supporté indûment des frais d’accueil, et qu’il serait fondé à en demander le remboursement à l’État. Voilà jusqu'où l’on pourrait aller si l’on voulait vraiment faire du juridisme !
Encore une fois, nous nous trouvons face à un problème majeur, et nous devons y apporter, avec humanité, une réponse réaliste, financièrement soutenable. Car c'est l’action éducative des services d’aide sociale à l’enfance qui est en cause.
Je veux vous dire le travail formidable qu’accomplissent nos collaborateurs. D’un dévouement exemplaire, ils se mobilisent à toute heure du jour et de la nuit et les fins de semaine – y compris le dimanche – pour faire face à des situations parfaitement imprévues. Soyons donc à leur écoute, et apportons à nos législations les mesures correctives indispensables.
Naturellement, la tentation de la procrastination est toujours très forte : remettons à demain ce que nous devrions faire dès aujourd'hui ! Alors, j’entends bien que des rendez-vous sont prévus autour du 15 avril prochain. J’entends aussi que le Fonds de financement de la protection de l’enfance sera sans doute doté. Mais je ne sais pas par quel moyen…
Hier soir, le Premier président de la Cour des comptes nous rendait attentifs au fait que le Gouvernement ne pourrait pas tenir ses objectifs de déficit public, parce que les recettes ne seraient pas à la hauteur des prévisions tandis que les dépenses leur seraient en revanche supérieures, et que, dans ces conditions, le déficit de 2013 dépasserait ce qu’avait imaginé le Gouvernement, et il en irait de même pour la prévision de déficit 2014.
J’attire votre attention sur toutes ces considérations et souhaite que, par nos votes, nous puissions introduire des éléments de navette, ce qui, monsieur le rapporteur, ne portera aucunement préjudice au rendez-vous du 15 avril prochain. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur plusieurs travées de l'UMP.)
M. André Reichardt. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 145 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 347 |
Pour l’adoption | 170 |
Contre | 177 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Madame la ministre, mes chers collègues, je vous rappelle que la proposition de loi de M. Jean Arthuis a été inscrite par la conférence des présidents dans le cadre de l’espace réservé au groupe UDI-UC, c'est-à-dire pour une durée totale de quatre heures.
Les quatre heures étant écoulées, je me vois dans l’obligation d’interrompre l’examen de ce texte. Il appartiendra à la conférence des présidents d’en inscrire la suite de la discussion à l’ordre du jour d’une prochaine séance.
Avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
9
Ville et cohésion urbaine
Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine (texte de la commission n° 334, rapport n° 333).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Claude Dilain, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine s’est réunie le 4 février dernier. Elle a, je le dis d’emblée, adopté un texte commun sans aucune difficulté. Ce résultat a été possible parce que, très en amont, dès la phase de concertation, vous avez su, monsieur le ministre, installer un climat de coopération qui a permis à chacun d’aborder cette commission mixte paritaire avec une grande volonté d’efficacité.
J’en profite pour souligner une nouvelle fois le fructueux travail que nous avons réalisé avec votre cabinet, monsieur le ministre. Je veux également rendre hommage à mon homologue de l’Assemblée nationale, François Pupponi, pour la qualité du climat qui a présidé à nos échanges - on aimerait que ce fût plus souvent le cas.
M. Jean-Jacques Mirassou. Très bien !
M. Claude Dilain, rapporteur. Quels sont les quatre grands axes de ce projet de loi ? Permettez-moi de les rappeler brièvement, puisque la commission mixte paritaire les a naturellement repris.
Le premier axe, c’est la réforme de la géographie prioritaire, qui permet à la fois une meilleure lisibilité, une concentration des moyens spécifiques et une transparence totale, le critère étant clair pour tout le monde.
Le deuxième axe, c’est évidemment l’instauration d’un nouveau programme national de renouvellement urbain.
Le troisième axe concerne le contrat de ville unique, qui allie l’humain et l’urbain – ils étaient fâchés, paraît-il –, mais aussi le droit commun et les crédits spécifiques nécessaires.
Le quatrième axe est une innovation sur laquelle je veux insister, à savoir l’instauration d’une coconstruction, d’une coformation, qui devrait faire jurisprudence.
La commission mixte paritaire n’est pas revenue sur les principaux apports du Sénat, qui avait lui-même repris des avancées majeures introduites par l’Assemblée nationale.
Ainsi le Sénat avait-il clarifié l’organisation du projet de loi dans son titre Ier et avait-il réaffirmé, à l’article 1er, les principes de mobilisation prioritaire des moyens de droit commun, de coconstruction et de coformation.
Le Sénat avait également prévu le maintien dans le droit positif de la dotation de développement urbain jusqu’à la création de la future dotation « politique de la ville ».
Nous avions, à l’article 5, prévu la signature des contrats de ville par les départements et les régions, et inscrit une meilleure prise en compte des objectifs spécifiques de la politique de la ville par les plans et schémas de planification.
Nous avions amélioré la rédaction de l’article 5 bis, relatif aux conseils citoyens, et prévu que ceux-ci pourraient faire appel à des experts extérieurs.
Le Sénat avait réécrit aussi l’article 5 ter, introduit par les députés, afin de le recentrer sur l’élaboration d’une convention intercommunale relative aux politiques d’attribution de logements sociaux, de manière à favoriser l’équilibre social dans les attributions et à contribuer à la réduction des inégalités entre les territoires.
Le Sénat avait également, à l’article 10 B, sécurisé le régime juridique de l’aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d’origine, de manière à permettre sa mise en application effective. Nous avions tous salué chaleureusement cette initiative, monsieur le ministre.
Il avait enfin permis à l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, autrement dit l’EPARECA, d’intervenir à proximité d’un quartier prioritaire.
La commission mixte paritaire n’est pas revenue sur ces nombreuses avancées.
Elle a prévu, à l’article 1er bis A, que le rapport relatif à la dotation « politique de la ville » étudierait également la possibilité de mettre en œuvre des pénalités à l’encontre des collectivités territoriales et de leurs groupements qui ne signeraient pas un contrat de ville alors même qu’ils comptent sur leur territoire un ou plusieurs quartiers prioritaires.
Cela mérite quelques explications.
L’Assemblée nationale avait introduit, à l’article 5, un dispositif de sanction financière automatique à l’encontre des intercommunalités qui ne s’engagent pas dans un contrat de ville. Le Sénat l’avait retiré, non en raison d’un désaccord de fond, mais parce que les modalités paraissaient inappropriées et difficiles à déterminer d’ores et déjà ; car je crois important que, d’une manière ou d’une autre, les intercommunalités soient fortement incitées à entrer dans les contrats de ville.
Nous sommes donc tombés d’accord, en commission mixte paritaire, pour que cette question soit réexaminée dans les mois à venir, en prenant en compte le retour d’expérience attendu de l’élaboration des premiers contrats de ville.
À l’article 2 bis, nous nous sommes aussi accordés pour rétablir, dans une meilleure rédaction que celle qu’avait adoptée l’Assemblée nationale, la mention explicite d’une réunion d’information ayant pour thème le bilan de la concertation, dans le cadre des opérations d’amélioration ou de construction-démolition de logements sociaux.
À l’article 5, qui concerne les contrats de ville, nous avons réuni les propositions votées par l’Assemblée nationale et le Sénat concernant le rôle du maire afin de préciser, d’une part, qu’il est chargé, dans le cadre de ses compétences, de la mise en œuvre du contrat de ville et, d’autre part, qu’il contribue aux actions des autres signataires du contrat de ville selon des modalités définies par ce même contrat.
Dans le même article, nous avons accepté le rétablissement de la mention d’une instance de pilotage, qui garantira qu’une coordination aura lieu au niveau intercommunal pour piloter l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation du contrat de ville. Bien entendu, cette disposition n’interdit pas la mise en place d’instances plus locales, au niveau d’une commune ou d’un quartier, lorsque cela paraît nécessaire.
À l’article 5 bis, M. François Pupponi et moi-même avons proposé une nouvelle rédaction qui opérait une clarification en permettant aux conseils citoyens de participer effectivement à l’élaboration de la première génération de contrats de ville. De plus, les habitants qui siègent dans ce conseil seront tirés au sort et, comme l’a décidé la commission mixte paritaire au cours de ses débats, devront respecter le principe de parité entre les femmes et les hommes.
Nous avons également accepté, à l’article 16 bis, le rétablissement d’une demande de rapport sur la création d’emplois et d’entreprises dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, ainsi que sur les conditions de renforcement des emplois d’avenir sur ces territoires.
Nous avons par ailleurs réalisé plusieurs coordinations juridiques avec la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, discutée en parallèle et promulguée le 27 janvier dernier.
Il s’agissait notamment de prendre en compte la création des autorités organisatrices de la mobilité, d’adapter la définition de la compétence « politique de la ville » et de prendre en compte les particularités du statut des métropoles de Paris, Lyon et Aix-Marseille-Provence.
Enfin, la commission mixte paritaire a adopté des amendements rédactionnels ou de précision. Le plus long consiste sans doute en la rédaction d’un article 15 qui recense l’ensemble des références aux zones urbaines sensibles dans les lois et codes existants et les remplace, lorsqu’il y a lieu, par des références aux nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville.
La commission mixte paritaire soumet ainsi au vote du Sénat un texte qui ne remet pas en cause les grandes orientations du texte présenté par le Gouvernement ni les améliorations apportées par l’Assemblée nationale puis par le Sénat. Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter ces conclusions en l’état, de manière à permettre la mise en œuvre des nouveaux contrats de ville et du nouveau programme de renouvellement urbain. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Michel Bécot applaudit également.)