M. Jean Besson. Monsieur le président, mes chers collègues, j’appelle l’attention de M. le ministre sur la conclusion de la procédure de classement du parc naturel régional des Baronnies Provençales.
Le territoire concerné par le projet de parc régional couvre 220 000 hectares, avec une population très faible puisque la densité moyenne y est de quinze habitants au kilomètre carré. Dans le canton de Rémuzat, qui m’est cher car j’en ai été le conseiller général pendant vingt-cinq ans, cette densité est parfois de moins de deux habitants au kilomètre carré, et soixante-deux des communes concernées par le projet comptent aujourd’hui moins de cent habitants.
On comprend aisément les difficultés quotidiennes que les élus ou les habitants rencontrent pour vivre dans ce territoire. Pourtant, ils y sont fermement attachés.
Les Baronnies Provençales sont en effet un territoire d’exception. Elles appartiennent à ce que l’on appelle les « Préalpes », qui bénéficient des influences à la fois méditerranéennes et alpines, d’une biodiversité et de paysages remarquables. On y trouve des femmes et des hommes qui veulent continuer à vivre sur ce territoire.
Il fallait donc s’appuyer sur ces atouts pour fonder un nouveau développement fédérateur des énergies. Avec de nombreux élus de cette région, tout particulièrement Didier Guillaume, président du conseil général de la Drôme, j’ai été un fervent défenseur du projet de création de parc naturel régional.
En 2004, les régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur ont toutes deux décidé, le même jour, de lancer la procédure de création de ce parc. À la suite de l’instauration du syndicat mixte des Baronnies Provençales, en 2007, la procédure d’élaboration de la charte du parc a permis d’associer toutes les forces vives du territoire, dans une démarche d’ouverture et de main tendue.
En 2010, au vu de l’avant-projet de charte, la Fédération des parcs naturels régionaux de France et le Conseil national de la protection de la nature ont unanimement souligné la pertinence de ce projet, qui bénéficie également du total soutien du conseil général de la Drôme et du conseil général des Hautes-Alpes.
Quelque quatre-vingt-six communes représentant 30 700 habitants et la totalité des douze communautés de communes, sans discontinuité territoriale, ont approuvé la charte.
Ce projet a reçu un très large soutien à tous les niveaux, quelle que soit la sensibilité politique des différents acteurs. Il a bénéficié du vote favorable de plus des deux tiers des 1 600 élus municipaux appelés à s’exprimer sur la charte.
Les acteurs économiques, sociaux et associatifs sont d’ores et déjà engagés avec le syndicat mixte, les départements et les régions dans des actions qui permettent, chaque jour, de relever le défi du développement de ce territoire. Monsieur le ministre, pour conclure la procédure, seule manque aujourd’hui la décision de classement de l’État.
Je souhaite donc vous interroger sur les prochaines échéances qui permettront de disposer enfin de la reconnaissance et des outils que cette superbe région mérite. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le sénateur, vous comprendrez que ma réponse s’adresse également à Didier Guillaume, tant je sais que vous avez tous deux partie liée sur ce magnifique projet de création du parc naturel régional des Baronnies Provençales. Je connais votre attachement à ce sujet. Soyez assuré de mon total soutien.
Le périmètre d’étude arrêté en 2004 par les régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur présente toutes les qualités requises, que ce soit en termes de richesses naturelles, culturelles et paysagères, pour prétendre au classement en parc naturel régional. Je sais le soutien constant apporté par le conseil général de la Drôme à ce projet. La large consultation des acteurs locaux dans le cadre de la procédure de création a d’ailleurs permis d’en confirmer l’opportunité.
La Fédération des parcs naturels régionaux de France ainsi que le Conseil national de la protection de la nature ont tous deux rendu, en 2010, un avis favorable sur une telle création, soulignant à cette occasion la qualité du projet de la charte.
Mon ministère a également rendu un avis intermédiaire favorable, en relevant notamment la large concertation conduite avec l’ensemble des partenaires tout au long du processus d’élaboration de la charte ainsi que le dynamisme de l’équipe de préfiguration du parc.
Je l’indique solennellement, je souhaite que le projet de parc naturel régional puisse désormais rapidement aboutir. Aux communes qui hésitent et n’ont pas encore approuvé le projet de charte, je veux dire qu’il s’agit d’une chance pour leur territoire. La création d’un parc naturel régional est un projet de développement local durable et n’est pas, comme certains le prétendent, la « mise sous cloche » dudit territoire.
Les services de l’État apporteront tout leur appui à l’équipe de préfiguration, monsieur le sénateur, afin de faire aboutir un projet qui sera utile à la valorisation des Baronnies Provençales. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean Besson.
M. Jean Besson. M. le ministre connaît très bien le dossier et je l’en remercie. Je voulais simplement ajouter une précision. La carte de la région le montre clairement (L’orateur en brandit une.), le seul espace entre les parcs naturels régionaux des Bauges et du Massif de la Chartreuse, d’une part, et du Luberon et des Préalpes d’Azur, d’autre part, est constitué par les Baronnies Provençales.
Par conséquent, notre demande est totalement justifiée. Les forces vives que j’ai citées, les élus, le conseil général de la Drôme et celui des Hautes-Alpes seraient bien entendu très déçus si ce projet de parc n’aboutissait pas.
avenir des épiceries sociales et solidaires
M. le président. La parole est à M. Luc Carvounas, auteur de la question n° 667, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.
M. Luc Carvounas. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je souhaite attirer votre attention sur l’avenir des épiceries sociales et solidaires.
Le 27 juin 2013, les présidents du Conseil européen, du Parlement européen et de la Commission européenne ont trouvé un accord pour la création d’un fonds européen d’aide aux plus démunis doté de 3,5 milliards d’euros sur sept ans.
Je tiens tout d’abord à saluer le rôle déterminant du Gouvernement français dans cette décision, qui a permis de maintenir la totalité des crédits alloués aux associations françaises d’aide alimentaire, alors qu’il était question de supprimer leurs subsides européens.
Cependant, les épiceries sociales et solidaires ont été exclues de fait de ce fonds eu égard à l’obligation faite aux associations de délivrer gratuitement des denrées alimentaires.
Or le modèle des épiceries sociales et solidaires repose précisément sur une participation symbolique de leurs bénéficiaires qui permet aux personnes en difficulté de voir leur dignité respectée et d’alléger leur sensation de dépendance à l’autre, sentiment qui s’ajoute très souvent à celui de déclassement qu’elles éprouvent. De plus, cette participation permet de financer diverses actions d’insertion sociale en matière d’aide au logement, de soutien à l’insertion professionnelle, ou encore d’accès aux soins.
Madame la ministre, pour toutes ces raisons et parce que ces épiceries sont un maillon essentiel de notre modèle de solidarité nationale, je souhaiterais savoir ce que le Gouvernement entend faire pour protéger et pérenniser les épiceries sociales et solidaires. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, vous avez raison de saluer la création du Fonds européen d’aide aux plus démunis, le FEAD, qui succède au Programme européen d’aide aux plus démunis. Ce n’était pas gagné d’avance, vous le savez. C’est grâce au combat du Président de la République et du Gouvernement, au soutien sans faille des députés européens ainsi qu’à la mobilisation de l’ensemble des associations qu’a été maintenue une aide alimentaire européenne de 3,5 milliards d’euros sur la période 2014-2020, soit un montant équivalent à celui qui avait été octroyé pour la période précédente.
Mais les critères sont différents. Pour compenser la baisse des crédits alloués à la France, au mois de décembre dernier, le Gouvernement a décidé de débloquer un crédit exceptionnel de 8,2 millions d’euros dédié à l’aide alimentaire. Ce crédit augmentera le programme 304 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » qui finance l’aide alimentaire nationale.
Dans notre pays, trois millions de personnes bénéficient de l’aide alimentaire et dix-huit millions à l’échelle européenne. C’est avant tout pour elles que le Président de la République, le Gouvernement et tous ceux qui se sont mobilisés ont mené ce combat.
Reste le problème que vous soulignez, monsieur le sénateur, des épiceries sociales et solidaires, dont certaines dépendaient hier de l’aide alimentaire européenne par l’intermédiaire de la Fédération française des banques alimentaires. Aujourd’hui, elles sont au nombre de 729 en France. Elles effectuent un travail remarquable et souvent innovant qui va bien au-delà de la simple aide alimentaire, vous avez raison de le relever, et produit du lien social pour accompagner des foyers en extrême difficulté ou des familles précaires.
Cependant, comme vous le soulignez, le règlement du FEAD ne permet pas une participation, même symbolique, de la personne à laquelle est attribuée l’aide, ce qui est en contradiction avec le modèle des épiceries sociales et solidaires, qu’il convient pourtant de soutenir. C’est pourquoi le Gouvernement compensera le manque à gagner pour elles en dédiant près de 8 millions d’euros de crédits – 7,7 millions d’euros précisément – du programme 304 aux achats de denrées des quatre réseaux qui approvisionnent les épiceries sociales et solidaires, notamment les banques alimentaires et l’Association nationale de développement des épiceries solidaires, l’ANDES, qui réalisent un travail remarquable.
Ces réseaux nous ont déjà fait part de leurs besoins – c’est la raison pour laquelle ceux-ci sont chiffrés – et ces crédits nationaux, dont l’affectation n’interdit en rien la participation du bénéficiaire final, permettront de couvrir leur action. Par ailleurs, il est également important de souligner que les services déconcentrés de l’État en matière d’aide alimentaire sont d’importants relais et soutiens locaux des associations. Nous voulons donc soutenir parallèlement ces deux réseaux.
Enfin, sachez que j’ai reçu le 22 janvier dernier les quatre grandes associations historiques de l’aide alimentaire, afin d’aborder avec elles les sujets sur lesquels nous devons continuer à travailler, parce qu’il ne faut pas se reposer et s’en tenir là. Il convient en effet d’accompagner ces associations pour les aider à faire face à l’afflux de nouveaux bénéficiaires – même si je n’aime pas ce terme –, notamment les travailleurs pauvres, précarisés par la crise et les difficultés du quotidien. Les enjeux sont, d’une part, de s’adapter au mieux à cette situation et, d’autre part, de sécuriser leur budget et de conforter leur financement à l’échelon européen. Nous avons donc encore du chemin à parcourir !
Je vous remercie, monsieur le sénateur, d’avoir posé la question de l’avenir des épiceries sociales et solidaires. Sachez que c’est un réseau que je soutiens ! Dites-le leur : elles n’ont pas de souci à se faire cette année. Mais nous devons continuer à militer ensemble pour leur cause !
M. le président. La parole est à M. Luc Carvounas.
M. Luc Carvounas. Je vous remercie, madame la ministre, des précisions que vous avez apportées, notamment des crédits de 7,7 millions d’euros que vous avez annoncés.
Vous avez évoqué le réseau français de 729 épiceries sociales et solidaires. L’une d’elles est implantée sur le territoire de ma commune, Alfortville, et je peux témoigner de son action au quotidien auprès des habitants. Le Gouvernement répond à la nécessité d’accompagner ce réseau si important et je vous en remercie très chaleureusement, madame la ministre.
L’annonce de la création du Fonds européen d’aide aux plus démunis est essentielle. Je me souviens avoir mis en avant, en tant que rapporteur pour avis de la mission « Égalité des territoires, logement et ville », lors des deux derniers exercices budgétaires, notre vigilance sur les aides alimentaires au plan européen. Le Gouvernement a répondu là aussi à cette nécessité et je ne puis que m’en féliciter.
pensions des mineurs et consolidation de l'offre de soins du régime minier
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, auteur de la question n° 650, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Dominique Watrin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis de nombreuses années, les mineurs retraités estiment que le système de calcul du montant de leurs pensions de retraite est injuste et discriminant à l’égard de ceux d’entre eux ayant pris leur retraite avant 1987.
En effet, le nouveau mode de calcul mis en place en 2001, qui se traduit par une certaine revalorisation du montant des pensions, ne concerne que les mineurs ayant fait valoir leurs droits à la retraite après 1987. Le dispositif engendre maintenant des écarts de plus en plus importants – jusqu’à 25 % – entre les pensions de mineurs ayant cotisé un même nombre d’années.
Le Gouvernement, sous la présidence de M. Nicolas Sarkozy, avait consenti une revalorisation de 5 % de celles-ci. Aussi, estimant qu’un gouvernement de gauche ne peut faire moins, il nous semble opportun d’évaluer le coût budgétaire d’une revalorisation des pensions de ces mineurs de 5 % dès 2014.
Par ailleurs, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour corriger ces discriminations qui touchent également les pensions de réversion des veuves de mineurs dont celles qui ont élevé trois enfants sont déjà pénalisées par la perte de la demi-part fiscale ?
Le second volet de ma question portera encore une fois, madame la ministre, sur l’offre de soins du régime minier. Les centres de santé du régime minier du Nord-Pas-de-Calais, ouverts à toute la population et fortement fréquentés par les ressortissants du régime général, ont permis jusque-là de pérenniser l’offre de soins de proximité dans des conditions tarifaires respectueuses du droit à la santé pour tous – tiers payant, absence de dépassement d’honoraires et d’avance de frais.
Or leur situation ne cesse de se détériorer. À titre d’exemple, 200 personnes attendent un rendez-vous ophtalmologique au centre de santé d’Auchel où l’offre de consultation a été fortement réduite. De même, alors que ce centre réalisait 2 700 actes dentaires dont 1 200 pour le régime minier et 1 500 pour le régime général, en 2013, cette offre a complètement disparu. Les patients sont envoyés vers le centre de santé de Bruay qui ne peut les accueillir.
Les élus locaux, toutes tendances politiques confondues, réclament d’ailleurs une table ronde, afin de revoir à la hausse le projet de restructuration prévu par la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines, la CANSSM, qui vide encore plus l’offre de soins sur le secteur de l’Auchellois. Ils souhaitent connaître, madame la ministre, les mesures que vous comptez prendre sans attendre pour répondre aux besoins urgents.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Marisol Touraine, qui présente actuellement le plan cancer en compagnie du Premier ministre et m’a demandé de vous répondre à sa place.
Comme vous le savez, ma collègue s’est particulièrement engagée en faveur du régime minier. Dans ce dernier, les pensions sont calculées selon un mode particulier, en multipliant le nombre de trimestres par la valeur forfaitaire du trimestre. Cette caractéristique d’un montant identique de pension pour une même durée de carrière traduit la volonté d’un traitement identique des retraités, quels que soient les salaires d’activité. À partir de 1987, ce mode de calcul a conduit progressivement à un « décrochage » des pensions servies par rapport à celles du régime général.
Pour y remédier, en 2001, le gouvernement de Lionel Jospin a réformé le mode de calcul des pensions minières : elles sont désormais revalorisées comme les pensions du régime général, ce qui garantit leur pouvoir d’achat. Pour le passé, une revalorisation exceptionnelle a été accordée, afin de compenser le « décrochage » intervenu entre 1987 et 2001.
Une deuxième revalorisation exceptionnelle, à hauteur de 3 %, des pensions qui avaient été liquidées avant 1987 a également eu lieu récemment.
Ces mesures favorables ont permis d’aligner les règles d’évolution des pensions minières sur celles des pensions du régime général, sans remettre en cause les avantages propres au régime minier, notamment l’ouverture des droits à pension à cinquante-cinq ans, avec possibilité d’anticipation à cinquante ans, ou la durée de cotisation à trente annuités.
Pour ce qui concerne les pensions de réversion, elles bénéficient déjà d’un mode de calcul plus favorable que celui qui est applicable aux régimes spéciaux : leur montant correspond à 54 % de celui de la pension du conjoint, contre 50 % dans la plupart des autres régimes spéciaux, fonctions publiques comprises.
Enfin, comme elle a déjà plusieurs fois eu l’occasion de le dire, Mme la ministre des affaires sociales et de la santé considère que l’offre de santé du régime minier doit s’engager dans une nouvelle dynamique, sous l’égide des agences régionales de santé, les ARS. Il s’agit en effet de répondre, sur l’ensemble des territoires concernés, aux besoins des populations, aux exigences de qualité, comme à celles d’un retour à l’équilibre économique. La convention d’objectifs et de gestion du régime minier, en cours de négociation, fixera pour la période 2014-2017 le cadre et les objectifs de cette offre de santé renouvelée.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Madame la ministre, vous venez de confirmer une compensation très partielle déjà annoncée, c’est-à-dire une revalorisation de 5 % répartie sur plusieurs années pour les pensions liquidées avant 1987, sans annoncer d’autres mesures, alors que les écarts constatés vont jusqu’à 25 %.
Quant aux centres de santé, j’ai bien entendu que Mme Touraine souhaitait qu’une nouvelle dynamique soit engagée sur les territoires, au niveau du bassin minier notamment, à l’égard des centres de santé. Je voudrais la rassurer : les élus, quelle que soit leur tendance politique, ne sont pas partisans du statu quo et pensent que des réorganisations sont effectivement nécessaires, de même que des investissements dans les bâtiments et les équipements, si l’on veut maintenir l’attractivité de ces centres de santé, qui constituent l’un des atouts majeurs pour le rattrapage des retards de soins constatés sur ces territoires.
L’important, dans le contexte socio-économique actuel, avec un taux de chômage atteignant 25 % dans certaines communes, est qu’aucune restructuration ne devrait être engagée si elle ne garantit pas une offre de santé au moins équivalente, notamment les pratiques du tiers payant et des tarifs opposables.
Pour conclure, les élus locaux sont ouverts au dialogue et à l’échange sur ces questions. Ce qu’ils ne supportent pas, c’est de se voir imposer des restructurations qui ne prennent pas en compte les besoins des populations, qu’ils sont les premiers à connaître. C’est pourquoi, sur plusieurs secteurs, ils proposent la constitution de groupes de travail auprès de la CANSSM et de l’ARS, pour chercher ensemble les meilleures solutions. Je ne doute pas, madame la ministre, que vous transmettrez ces propositions à votre collègue chargée de la santé.
formation des opticiens en trois ans
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, auteur de la question n° 654, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
M. Ronan Kerdraon. Madame la ministre, selon un récent sondage, 43 % des Français ont renoncé à des soins d’optique en raison de la difficulté à obtenir un rendez-vous – un exemple vient d’ailleurs d’être cité par mon collègue Watrin – et 8 % d’entre eux n’ont jamais consulté d’ophtalmologiste. Dans les prochaines années, cette situation risque de s’aggraver, eu égard au vieillissement de la population et à la baisse du nombre d’ophtalmologistes dans notre pays.
En ce moment, le sujet de l’optique revient souvent sur la scène publique, avec la discussion du projet de loi relatif à la consommation, l’annonce de la stratégie nationale de santé ou le rapport de la Cour des comptes qui préconise des déremboursements. J’y vois donc l’occasion de faire le point sur l’état des métiers de l’optique.
Selon le syndicat des ophtalmologistes, en 2020, seuls huit millions de patients seront pris en charge par les ophtalmologistes, contre dix millions aujourd’hui, alors que les besoins continueront de croître. Face à cette fracture sanitaire croissante, un certain nombre de mesures simples pourraient être mises en œuvre, afin d’améliorer l’accès de nos concitoyens aux soins d’optique.
La loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », prévoit d’ailleurs des protocoles de coopération entre professionnels de santé.
Notre pays compte aujourd’hui 25 000 opticiens-lunetiers répartis dans plus de 11 000 magasins d’optique. Ils pourraient être de véritables partenaires de santé des ophtalmologistes et contribuer à la prise en charge des patients, dans le cadre d’un protocole de soins conclu sous l’égide de la Haute Autorité de santé.
Cette délégation de tâches garantirait à la collectivité des économies estimées à 200 millions d’euros, puisque l’examen effectué par un opticien-lunetier serait facturé à un prix moindre et non remboursé par la sécurité sociale. Elle exigerait également d’allonger la formation des opticiens-lunetiers d’une année – trois ans contre deux ans aujourd’hui –, afin de renforcer les compétences de ceux-ci en matière d’examen de vue, d’adaptation de lentilles, voire d’initiation au dépistage.
La troisième année de formation pourrait intégrer deux stages pratiques à l’hôpital et en cabinet médical, encadrés par des ophtalmologistes, afin de faire travailler ensemble ces deux professions, selon des modes opératoires déterminés par les médecins spécialistes.
En outre, ce cycle de formation, qui serait reconnu par l’État et intégré dans le cadre du cursus européen licence-master-doctorat, ou LMD, pourrait être financé par les opticiens eux-mêmes, afin de ne pas alourdir les dépenses de l’État.
Au sein de cette formation, l’instauration d’un numerus clausus semble nécessaire, même à titre provisoire ! Il faut en effet mettre en place une régulation du nombre de diplômés et non pas de la quantité de points de vente, comme ont pu le préconiser certains – je pense notamment à Éric Raoult. Sur les 25 000 opticiens diplômés, 32 % sont gérants, 64 % sont salariés et – fait grave – 13 % sont demandeurs d’emploi, ce qui est parfaitement honteux au regard du coût d’inscription dans une école, pas moins de 6 000 euros !
Madame la ministre, face à cette problématique majeure de santé publique, je vous remercie de bien vouloir me préciser si des mesures de cette nature sont envisageables et les actions que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour faciliter l’accès de nos compatriotes aux soins d’optique de base.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Monsieur le député, je vous prie également d’excuser l’absence de Marisol Touraine, pour le motif que j’ai évoqué en répondant au précédent orateur.
Monsieur le sénateur, veux-je dire. N’interprétez pas cette erreur comme un manque de respect à l’égard du Sénat. J’ai dit à plusieurs reprises dans cette enceinte combien je respecte le travail que nous faisons ensemble, dont je veux à nouveau souligner l’extrême qualité.
Vous le rappeliez, l’ophtalmologiste est un professionnel majeur de l’organisation des soins de premier recours. Les orthoptistes et les opticiens-lunetiers exercent pour leur part leur activité dans un champ strictement défini par le code de la santé publique.
Si la formation des opticiens-lunetiers relève du ministère de l’éducation nationale, celle des orthoptistes est, elle, en cours de « réingénierie », sous la responsabilité conjointe du ministère des affaires sociales et de la santé et du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Il est indéniable que la santé visuelle, en particulier l’examen de la vision, constitue un enjeu essentiel, du point de vue tant médical que social, économique et politique. Pour faire face à cet enjeu, le recours au dispositif des coopérations entre professionnels de santé est privilégié par le ministère des affaires sociales et de la santé, ainsi que par les professionnels eux-mêmes.
Les ophtalmologistes sont prêts à déléguer des tâches aux orthoptistes et aux opticiens. Ainsi, des protocoles de coopération ont été élaborés avec le soutien de l’Académie française d’ophtalmologie, des syndicats médicaux et des syndicats d’orthoptistes pour améliorer l’accès aux soins grâce à une meilleure répartition des rôles entre ces professionnels de santé. Ces nouveaux modes d’organisation et de définition des compétences permettent de libérer du temps médical et de réduire les délais d’attente des patients pour une consultation.
Plusieurs de ces protocoles ont déjà reçu un avis favorable de la Haute Autorité de santé. Ils permettent à un orthoptiste de réaliser un bilan visuel, un examen de dépistage de la rétinopathie diabétique, par exemple. De tels protocoles sont déjà appliqués dans la région Pays-de-la-Loire. Concrètement, en cas de renouvellement de lunettes, l’examen physique est réalisé par l’orthoptiste ; suit un contrôle du dossier du patient par le médecin ophtalmologiste ; ce dernier adresse ensuite l’ordonnance de renouvellement dans un délai de quelques jours.
Ce dispositif réduit les délais d’obtention de rendez-vous pour les patients ayant seulement besoin d’un renouvellement de lunettes et améliore les délais de prise en charge par un ophtalmologiste, en permettant à ce spécialiste de se consacrer aux patients dont la santé nécessite des soins plus complexes.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a renforcé le déploiement de ces nouveaux de mode de coopération entre professionnels, en facilitant le financement de ce type de projets.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.
M. Ronan Kerdraon. Je me félicite de vos réponses, madame la ministre, qui vont dans le sens des solutions évoquées dans ma question pour favoriser un meilleur accès aux soins en matière d’optique, et je vous en remercie.
déficit de données statistiques à mayotte
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, auteur de la question n° 659, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Thani Mohamed Soilihi. Ma question est adressée à M. le ministre de l’économie et des finances dont je souhaite attirer l’attention sur le déficit de données statistiques relatives au département de Mayotte.
Devenu le cent unième département depuis le 31 mars 2011, Mayotte s’apprête à entrer de plain-pied dans le droit commun avec la mise en place de la fiscalité propre et son accession au statut de région ultrapériphérique le 1er janvier dernier.
Pourtant, force est de le constater, quel que soit le domaine observé, ce département manque cruellement de données locales chiffrées précises et fiables permettant de mesurer ses évolutions démographiques et ses mutations, et facilitant la mise en œuvre de politiques publiques.
Dans ses articles consacrés au recensement de la population, la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a instauré un recensement quinquennal à Mayotte, alors qu’il se déroule de la même façon qu’en métropole dans les autres départements d’outre-mer. Compte tenu de l’évolution exponentielle de la démographie due à une forte natalité, mais surtout à une pression migratoire excessive, un recensement annuel serait plus adapté. Cette situation constitue un frein considérable à l’établissement de diagnostics partagés quant aux politiques à engager et aux investissements à réaliser. Elle ne permet pas d’établir un plan d’action global adapté pour Mayotte.
Je souhaite donc savoir, madame la ministre, quels moyens le Gouvernement compte mettre en œuvre pour que le système statistique soit développé afin d’assurer une connaissance du territoire à la hauteur de celle des autres départements français, de garantir un rattrapage du système d’information et de disposer, enfin, de chiffres fiables sur les grandes problématiques économiques, démographiques et sociales de l’île.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.