M. Aymeri de Montesquiou. On verra.
M. Thierry Repentin, ministre délégué. De même, puissiez-vous tous soutenir la mise en place de la taxe sur les transactions financières, aujourd’hui portée de façon volontariste par onze États. Il faudra que vous apportiez votre soutien au moment de ce débat, ici comme à l’Assemblée nationale.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Si on le veut bien !
M. Thierry Repentin, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de vos réflexions, notamment celles de M. Arthuis sur le gouvernement économique de la zone euro.
Dans la proposition du 30 mai dernier, la France demande la mise en place d’un gouvernement de la zone euro. Cela implique une présidence à temps plein, qui ne soit plus partagée avec la charge d’un ministère national des finances. Cela suppose également des réunions plus fréquentes de la zone euro. Cela signifie enfin, au sein du Parlement européen, une organisation spécifique, dédiée à la zone euro, afin de donner un pendant démocratique à ces discussions.
En attendant, d’ici à la fin de la législature, c’est-à-dire avant mai 2014, notre priorité est claire : c’est l’union bancaire.
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial. Il faudrait y intégrer les assurances !
M. Thierry Repentin, ministre délégué. Nous y travaillons. La finalisation de l’accord sur le mécanisme de résolution unique devrait avoir lieu d’ici à la fin de la législature.
Naturellement, je vous demande de bien vouloir voter cet article 41. Certains prônent l’abstention. Or le prélèvement sur recettes est tout simplement la traduction mécanique du budget européen. S’abstenir, ce serait en quelque sorte infliger un camouflet au Parlement européen, qui est légitime pour voter le budget. Ce serait aussi infliger un camouflet au président de la commission des budgets du Parlement européen, notre compatriote Alain Lamassoure, dont je me dois de prendre la défense.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cela vous arrange bien !
M. Thierry Repentin, ministre délégué. En bonne intelligence avec les autorités françaises, il a permis des avancées, notamment quant au mécanisme de flexibilité qui permettra de consommer l’intégralité des crédits de paiement sur la période 2014-2020. Ces 20 milliards d’euros résultent d’une approche équilibrée, soucieuse de respecter nos engagements en matière de sérieux budgétaire, mais aussi, et surtout, contribuant à un budget européen résolument tourné vers la croissance, les investissements d’avenir et la solidarité. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. François Trucy applaudit également.)
M. le président. Nous passons à la discussion de l’article 41.
Article 41
Le montant du prélèvement effectué sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne est évalué pour l’exercice 2014 à 20 144 073 000 €.
M. le président. Je ne suis saisi d’aucun amendement.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 41.
(L'article 41 est adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux. Nous les reprendrons à onze heures vingt-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures quinze, est reprise à douze heures cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
Mes chers collègues, à la demande du Gouvernement, je vais de nouveau suspendre la séance, cette fois jusqu’à quatorze heures trente.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le ministre fantôme (Sourires.), mes chers collègues, la séance a été suspendue voilà trois quarts d’heure ; nous attendons en vain sans avoir la moindre information. Certains d’entre nous ont fait le sacrifice de leur présence à certaines réunions de commission pour participer au débat budgétaire.
Nous avons l’impression de vivre une grève de la RATP : nous sommes laissés en rade sur nos travées, sans information aucune ! Cette situation témoigne d’un manque de respect envers le Parlement. (Marques d’approbation sur diverses travées.)
M. Jean Germain. Tout à fait !
M. Éric Bocquet. Elle a raison !
Mme Nathalie Goulet. Je tenais à ce que cela figure au Journal officiel.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour un rappel au règlement.
M. Éric Doligé. Mon intervention s’inscrit dans le droit fil de celle de ma collègue Nathalie Goulet.
Je suis très surpris : nous étions censés reprendre nos travaux à onze heures vingt-cinq pour examiner les amendements restant en discussion, un créneau horaire ayant été fixé pour le vote cet après-midi. Je suppose que nous ne respecterons pas non plus les horaires prévus cet après-midi.
À ma connaissance, la conférence des présidents a arrêté le calendrier budgétaire il y a un certain temps déjà. Le ministre chargé du budget doit savoir qu’il lui faut, en principe, lors de l’examen du projet de loi de finances, être présent au Parlement, plutôt que d’assister au conseil des ministres. C’est tout à fait possible : en témoigne la présence, ce matin, de M. Repentin.
Je regrette que le Sénat soit traité ainsi. On ne nous donne aucune information. Il faudrait au moins qu’il y ait une certaine transparence !
Quelle marque de dédain envers notre assemblée que de nous laisser attendre pendant trois quarts d’heure, sans nous donner la moindre information ! D’ailleurs, sommes-nous assurés de pouvoir poursuivre nos travaux cet après-midi, à quatorze heures trente ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Très bonne question !
M. Éric Doligé. Qu’on nous le dise maintenant ! Nous ne savons jamais ce qui peut se passer… Dans le cas contraire, nous pourrions peut-être faire droit à la demande de certains de nos collègues d’assister à des réunions de commission.
Monsieur le président, si vous disposez d’informations, je vous remercie de bien vouloir nous en faire part.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le président, mes chers collègues, nous avons bien fait de siéger samedi dernier dans l’après-midi… (Oui ! sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Mme Nathalie Goulet. On a fait du bon travail !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … et d’accélérer, voire de simplifier, la discussion de certains amendements. Il en reste vingt-quatre à examiner. M. le rapporteur général et moi-même espérions pouvoir les traiter en cette fin de matinée, afin de consacrer l’après-midi aux explications de vote sur l’ensemble.
Ce schéma, qui n’avait pas été préparé de longue date, nous semblait tout à fait raisonnable et de nature à mettre en valeur nos travaux. Espérons qu’il ne sera pas, de ce fait, trop remis en cause et que les différents groupes auront le temps de s’exprimer sur l’article d’équilibre, qui constitue le nœud de cette discussion budgétaire.
Je regrette, moi aussi, que le Gouvernement ne respecte pas les traditions institutionnelles. Les membres du Gouvernement sont suffisamment nombreux.
Mme Nathalie Goulet. Eh oui !
M. Jacques Mézard. Tout à fait !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il y a assez de ministres délégués.
Mme Nathalie Goulet. C’est vrai !
M. Éric Doligé. Tout à fait !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Chaque membre du Gouvernement représente le Gouvernement dans son ensemble. Il eût donc été facile, si le Gouvernement avait eu un peu plus de considération pour le Sénat,…
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … d’en dépêcher un pendant une heure dans notre hémicycle.
Qu’il me soit permis de regretter ce manque de la considération la plus élémentaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Acte est donné de ces rappels au règlement.
Mes chers collègues, je n’ai pas d’autres informations à vous communiquer.
En l’absence d’un membre du Gouvernement, je ne puis que suspendre la séance. Nous reprendrons nos travaux à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Raffarin
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission des finances a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances pour 2014, actuellement en cours d’examen.
Cette liste a été affichée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.
4
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour un rappel au règlement.
M. Albéric de Montgolfier. Monsieur le président, mes chers collègues, je salue la présence de M. le ministre et je suis heureux qu’il puisse entendre ce rappel au règlement.
Je regrette que nous n’ayons pas terminé hier soir la discussion des amendements déposés sur les articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2014 ; nous aurions pu le faire puisqu’il ne restait guère que quelques amendements à examiner. Cela nous aurait épargné la regrettable attente que nous avons vécue ce matin.
Bien sûr, nous pouvons comprendre, monsieur le ministre, que certaines circonstances vous aient empêché de rejoindre l’hémicycle du Sénat, mais, comme l’a indiqué le président de la commission des finances, il aurait été heureux que nous en soyons informés. Du reste, un autre ministre que vous-même, appartenant ou non au « pôle de Bercy », aurait aussi pu représenter le Gouvernement.
C’est d’autant plus fâcheux que, pensant que la discussion budgétaire reprendrait son cours normal à l’issue de l’examen de l’article 41 et de la participation de la France au budget de l’Union européenne, beaucoup d’entre nous avaient renoncé à participer à diverses réunions, notamment des réunions de commissions qui se tenaient en même temps que la séance publique de ce matin.
Du fait de ce contretemps, l’organisation de nos travaux se trouve perturbée et il est clair que les explications de vote sur l’ensemble de la première partie ne pourront pas se dérouler à l’heure prévue. Une fois encore, nous ne pouvons que le regretter.
M. le président. Acte vous est donné de votre déclaration, mon cher collègue.
5
Loi de finances pour 2014
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2014, adopté par l’Assemblée nationale.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein de la première partie du projet de loi de finances, des dispositions relatives aux ressources.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE IER (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
II. – RESSOURCES AFFECTÉES (suite)
B. – Impositions et autres ressources affectées à des tiers (suite)
M. le président. Le Sénat a entamé, hier, l’examen de l’article 34 bis, dont je rappelle les termes.
Article 34 bis (nouveau) (suite)
Le second alinéa du B de l’article L. 311-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est supprimé.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° I-41 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° I-166 est présenté par M. Leconte, Mme Lepage et M. Yung.
L'amendement n° I-390 est présenté par Mmes Lipietz, Ango Ela et Benbassa, M. Placé et les membres du groupe écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au premier alinéa du D de l’article L. 311-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, le montant : « 340 € » est remplacé par le montant : « 220 € ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… – La perte de recettes résultant pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
… – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l'amendement n° I-41.
Mme Cécile Cukierman. Sans reprendre le débat que nous avons eu hier soir, je tiens à signaler que cet amendement s’inscrit dans la suite de notre amendement n° I-40, de même que notre amendement n° I-39, que nous défendrons dans quelques instants.
Chacun peut le constater, des collègues d’autres groupes présentent une semblable disposition, qui a été mise au point avec un certain nombre d’associations de défense des droits des étrangers, notamment la CIMADE.
Ainsi que nous l’avons expliqué hier soir, depuis plusieurs années, le montant des taxes liées à l’obtention des titres de séjour ne cesse d’augmenter. Or les personnes concernées sont généralement fragilisées du fait même de leur situation. Privées d’emplois, disposant de ressources très faibles, elles doivent néanmoins s’acquitter de taxes en hausse !
C’est pourquoi, à travers cet amendement, nous proposons de réduire le montant des taxes dues par les personnes étrangères vivant en France en lien avec leur droit au séjour, sachant que nous réclamons par ailleurs, comme je l’ai indiqué hier, la gratuité de l’accès de ces personnes aux démarches administratives.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour présenter l'amendement n° I-166.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement a pour objet de réduire le montant du droit de visa de régularisation en le ramenant à 220 euros. Il me semble délicat d’exiger de personnes en situation précaire les sommes qui leur sont aujourd'hui demandées.
Je fais remarquer que, en 2012, la forte augmentation de ce droit n’a pas engendré la recette fiscale attendue, précisément parce que les personnes concernées, n’ayant pas les moyens de s’acquitter de cette taxe, tendent à repousser leur demande de régularisation. Ce n’est pas ainsi que nous pouvons mener une politique d’immigration favorisant la régularisation de ces personnes et leur intégration dans notre société.
On va sans doute me répondre que l’adoption d’un tel amendement représenterait une diminution des recettes de l’OFII – Office français de l’immigration et de l’intégration. Je n’en crois rien car, je le répète, nombreux sont ceux qui, faute de moyens, se voient contraints de reporter à plus tard leur demande de régularisation.
Mes chers collègues, nous savons malheureusement quelle sera l’issue de nos travaux et quel sera le vote du Sénat sur ce projet de loi de finances. Dans un tel contexte, plutôt que de nous préoccuper de quelques millions d’euros en plus ou en moins – même si, j’y insiste, je pense que la diminution du montant de ce droit susciterait un afflux de demandes de régularisation et, au final, une augmentation globale des ressources de l’OFII –, nous pourrions avant tout nous soucier d’affirmer certains principes.
Le Sénat s’honorerait d’encourager une politique d’immigration plus ouverte, permettant à des personnes se trouvant dans la précarité de faire leur demande de régularisation à des tarifs plus adéquats.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour présenter l'amendement n° I-390.
Mme Corinne Bouchoux. Nous faisons nôtres les arguments qui viennent d’être exposés et, nous aussi, nous proposons de ramener le droit de visa de régularisation au montant qui était le sien avant 2012. Cela n’aura pas d’incidence sur les sommes affectées à l’OFII, celles-ci étant plafonnées.
Au reste, s’agissant de cette question des ressources de l’OFII, je tiens à dire que, si nous voulons vraiment être un pays d’accueil, il serait bon que nous mettions en cohérence nos propos et notre action budgétaire !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements ont pour objet de réduire le montant du droit de visa de régularisation à 220 euros, soit son niveau de 2011. Or, selon la commission, la réforme mise en œuvre l’an dernier a permis non seulement de diminuer le montant des taxes sur la délivrance des titres de séjour, mais également de réduire de moitié la part non remboursable sur le droit de visa de régularisation.
En outre, l’adoption de ces amendements reviendrait à réduire d’un tiers le rendement de cette recette affectée à l’OFII, ce qui aurait inévitablement un impact négatif sur son budget d’intégration.
La commission suggère donc aux auteurs de ces amendements de les retirer, étant précisé qu’elle aura, sur les amendements qui vont suivre, un regard plus bienveillant.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. La position du Gouvernement est identique à celle de la commission.
Mme Cécile Cukierman. Je maintiens l’amendement n° I-41, monsieur le président !
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Pourquoi, encore et encore, vouloir faire en sorte que l’OFII n’ait pas les moyens d’agir ? Pardonnez-moi, mais il y a tout de même un moment où il faut revenir sur terre !
La politique actuellement appliquée en matière de droit d’asile et d’intégration, qui n’est pas la mienne, est à bout de souffle. Le ministre de l’intérieur lui-même le reconnaît et annonce qu’un texte devra venir réformer tout cela, théoriquement après les élections municipales. On lui a d’ailleurs remis aujourd'hui des conclusions qui devraient servir de base à cette future réforme.
Dans un rapport de la commission des finances, il est bien expliqué que, au-delà de toutes les mesures financières liées à l’accueil, au logement ou encore au versement de l’allocation, la diminution considérable des ressources de l’OFII pose un véritable problème. Non seulement l’État, désargenté, lui donne moins d’argent, mais en plus il plafonne la part des taxes qui lui sont affectées. Les ressources de l’OFII sont ainsi rognées de tous côtés et, de ce fait, sa capacité d’action est de plus en plus limitée. Résultat : il réduit ses interventions, notamment en ce qui concerne les cours de français, les cours d’instruction civique, tout ce qui vise à une meilleure intégration des personnes étrangères arrivant en France.
Si, d’une manière ou d’une autre, on continue à ne pas donner à l’OFII les moyens de mener son action, il faut en avoir bien conscience, tout naturellement, certains finiront par dire au ministre de l’intérieur : « Puisque les organismes travaillant à l’intégration des personnes étrangères disposent de moyens de plus en plus réduits, vous devez faire en sorte que ces personnes soient moins nombreuses ! »
Car on ne peut pas tout avoir ! On ne peut pas vouloir une politique d’ouverture et d’accueil et, ensuite, priver de moyens les organismes dont la mission est d’enseigner le français, l’instruction civique, les règles de la société française, et de favoriser ainsi l’intégration.
Vous l’avez compris, mes chers collègues, je suis très hostile à toutes les mesures tendant à réduire, à terme, les moyens de l’OFII.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. J’approuve totalement les remarques que vient de formuler mon collègue Roger Karoutchi, mais je voudrais évoquer un autre aspect de la question.
Nous traitons ici du droit de séjour et du droit d’asile. Comme chacun peut le constater, il s’agit d’un problème global, qu’il faut traiter comme tel. Or on aborde systématiquement ces sujets de manière tout à fait partielle, ce qui conduit à des décisions ayant des conséquences non désirées. Ainsi, dès lors que vous abaissez le droit de visa de régularisation de 340 euros à 220 euros, vous risquez d’enregistrer une hausse des demandes et, comme vous aurez moins de moyens pour traiter celles-ci, vous aurez encore plus de difficultés à le faire !
Vraiment, mes chers collègues, il faut examiner ces questions avec un peu plus d’attention que nous ne le faisons maintenant, au détour d’un amendement ! Je pense qu’il faut aller au fond des choses et mener de vraies réflexions.
Le problème est exactement le même pour les mineurs étrangers isolés. À partir du moment où nous avons décidé de faire une répartition sur le territoire national, nous avons créé un appel d’air et, en trois mois, le nombre d’entrées enregistrées a doublé !
En réalité, en réduisant cette espèce de taxe, on augmente les charges d’autres structures. C’est un système de vases communicants ! Comme le nombre d’entrants augmente et que les recettes financières manquent, d’autres organismes vont devoir payer. En définitive, ce sont les collectivités qui seront sollicitées pour assumer la charge en question. Car c’est finalement à la porte des collectivités qu’on viendra frapper pour demander des moyens supplémentaires afin de faire face à cet afflux éventuel de demandeurs d’asile !
Je regrette qu’une fois de plus on regarde ce problème global par le petit bout de la lorgnette, en l’occurrence le montant du droit de visa.
Comme l’a rappelé M. Karoutchi, le ministre de l’intérieur a fait, sur ce sujet, un certain nombre de remarques qui me paraissent de bon sens.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Monsieur Karoutchi, je suis tout à fait d’accord avec vous : pour mener sa politique d’intégration, l’OFII a besoin de moyens. Seulement, peut-on mener une politique d’intégration amitieuse avec de l’argent pris dans la poche des étrangers en situation irrégulière ?
Mme Corinne Bouchoux. Ce n’est pas éthique !
M. Roger Karoutchi. Il faut donc que l’État paie !
M. Jean-Yves Leconte. Mes chers collègues, je vous le demande : peut-on mener une politique d’intégration en demandant à des étrangers qui ont peu de moyens de payer plusieurs centaines d’euros pour être régularisés ? Pour ma part, je ne trouve pas cela raisonnable.
M. Roger Karoutchi. Alors, il faut que l’État donne plus de moyens !
M. Jean-Yves Leconte. La meilleure manière d’intégrer des personnes, c’est de leur permettre d’abord de sortir de la précarité !
Quant à vous, monsieur Doligé, je vous remercie d’avoir signalé que, si nous baissons cette taxe, les demandes seront plus nombreuses. Mais si les demandes sont plus nombreuses, les recettes globales seront supérieures : votre argumentation fondée sur une diminution des recettes induite par la baisse du montant du droit de visa tombe donc d’elle-même !
En outre, la diminution de la taxe, en accroissant le nombre des demandes, permettra de mieux connaître ceux qui sollicitent leur régularisation et de mener une politique d’intégration plus adéquate.
En définitive, monsieur Karoutchi, monsieur Doligé, vos interventions plaident en faveur de l’adoption de ces amendements ! (Mmes Corinne Bouchoux et Cécile Cukierman applaudissent.)
M. Richard Yung. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-41, I-166 et I-390.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas les amendements.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° I-39 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° I-171 est présenté par M. Yung, Mme Lepage et M. Leconte.
L'amendement n° I-389 est présenté par Mmes Lipietz, Ango Ela et Benbassa, M. Placé et les membres du groupe écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
...- Après le montant : « 340 € », la fin du premier alinéa du 1 du D de l’article L. 311-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est supprimée.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… – La perte de recettes résultant pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
… – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° I-39.
Mme Cécile Cukierman. Aujourd’hui encore, toutes taxes confondues, la délivrance d’un premier titre de séjour peut coûter jusqu’à 600 euros, ce qui est évidemment exorbitant pour les personnes concernées.
Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile comporte toujours, parmi ses dispositions fiscales, une mesure introduite par la loi de finances pour 2012 : l’obligation pour le demandeur d’un titre de séjour de payer une partie du droit de visa de régularisation, en l’occurrence 50 euros ; cette somme, due au moment de la demande du titre, n’est pas remboursable en cas de rejet de celle-ci.
À nos yeux et aux yeux de nombreuses associations qui, à l’époque, ont fait front commun contre la création de cette taxe, il s’agit d’un véritable droit d’entrée dans la procédure, inédit jusqu’à 2012.
Il nous semble primordial de supprimer cette mesure injuste, introduite dans notre législation voilà seulement deux ans. En effet, il y a là un véritable obstacle à l’accès à la procédure de demande de titre de séjour.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° I-171.
M. Richard Yung. Cet amendement vise à supprimer le principe de l’acquittement d’un droit de visa de régularisation par les personnes étrangères démunies de papiers lors de leur entrée en France, au moment où elles présentent leur demande de titre de séjour, et sans possibilité de remboursement en cas de rejet de celle-ci.
Je rappelle que nous nous étions fermement opposés à l’instauration de cette taxe, d’un montant de 340 euros, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012. À l’époque, on nous a dit qu’il s’agissait de responsabiliser le demandeur et de dissuader les demandes infondées.
En réalité, cette taxe due par les migrants en situation irrégulière est un véritable droit d’entrée dans la procédure.
Dans la mesure où, au bout d’un certain temps, il est obligatoire de solliciter un titre de séjour, ce qui est normal, le principe du paiement obligatoire d’un droit non remboursable n’est, lui, pas acceptable.
En ce qui concerne le financement de l’OFII, je suis d’accord avec mon collègue Jean-Yves Leconte : il ne saurait reposer durablement sur ces taxes de procédure. On ne peut se satisfaire d’un tel système, qui me rappelle les banques se finançant sur les incidents de paiement. C’est tout à fait choquant !
Du reste, monsieur Karoutchi, vous avez vous-même proposé de redéfinir les missions et le financement de l’OFII. (M. Roger Karoutchi acquiesce.) Sur ce point, nous sommes d’accord.
Monsieur Doligé, l’examen du projet de loi de finances est bien l’occasion d’aborder ce problème ; sinon, quand le ferons-nous ?