M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Pour arriver à ce résultat en Seine-Saint-Denis, il a fallu que les forces de l’ordre, le parquet, les associations, les huissiers, les collectivités locales se mettent autour d’une même table. C’est précisément ce que nous organisons désormais département par département, de manière à rendre cela possible sur tout le territoire.
M. Courteau m’a interpellée sur l’éducation à la sexualité.
Je précise d’abord que nous avons veillé à adopter la convention interministérielle pour l’égalité entre les filles et les garçons à l’école, signée le 7 février dernier, qui était, comme vous le savez, un peu tombée en déshérence. Nous avons en outre prévu une formation des enseignants à l’égalité filles-garçons dans le cadre de la refondation de l’école. Nous lançons également, en cette rentrée scolaire, et ce dès le plus jeune âge, c’est-à-dire à l’école primaire, une expérimentation intitulée les « ABCD de l’égalité », pour faire en sorte que celle-ci s’apprenne le plus tôt possible.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Plus précisément sur le thème abordé par Roland Courteau, nous publierons la circulaire sur l’éducation à la sexualité à proprement parler dans les collèges et les lycées d’ici au mois de novembre – c’est ce qui est prévu avec le ministre de l’éducation nationale – pour donner enfin corps à cette obligation qui n’était toujours pas mise en œuvre.
M. Roland Courteau. Exactement !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Nous avons travaillé à sa concrétisation, notamment en ouvrant les établissements scolaires à des associations agréées pour pouvoir parler de ces sujets aux jeunes.
J’espère ne pas avoir oublié, dans cette brève intervention, quelque chose d’essentiel…
Mme Esther Benbassa. Les femmes étrangères !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. En effet !
Comme vous avez pu le constater, le projet de loi tend à supprimer les taxes portant sur la demande d’obtention ou de renouvellement d’un titre de séjour pour une femme étrangère victime de violences.
Par ailleurs, dès lors qu’une ordonnance de protection a été délivrée pour une femme étrangère victime de violences, nous faisons en sorte que les préfets puissent en être totalement informés – cela passe notamment par la formation des agents que nous évoquions tout à l’heure –, de telle sorte que la délivrance des cartes de séjour soit, dans ce cas, plus automatique qu’elle ne semble l’être actuellement sur le terrain, où le lien entre les deux ne se fait pas naturellement.
M. Roland Courteau. C’est vrai que ça coince parfois !
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Je le redis, sur ce sujet comme sur d’autres, je suis ouverte à la discussion. Je vous propose donc, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, que nous commencions à examiner les amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste, du RDSE et du groupe CRC, ainsi que sur plusieurs travées de l’UDI-UC.)
M. le président. Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.
Article 1er
L’État et les collectivités territoriales, ainsi que leurs établissements publics, mettent en œuvre une politique pour l’égalité entre les femmes et les hommes selon une approche intégrée. Ils veillent à l’évaluation de l’ensemble de leurs actions.
La politique pour l’égalité entre les femmes et les hommes comporte notamment :
1° Des actions visant à garantir l’égalité professionnelle et la mixité dans les métiers;
2°Des actions de lutte contre la précarité des femmes ;
3° Des actions tendant à faciliter un partage équilibré des responsabilités parentales ;
4° Des actions pour mieux articuler les temps de vie ;
5° Des actions destinées à prévenir les stéréotypes sexistes ;
6° Des actions de prévention et de protection contre les atteintes à la dignité des femmes ;
7° Des actions de prévention et de protection permettant de lutter contre les violences faites aux femmes.
M. le président. La parole est à M. René Teulade, sur l’article.
M. René Teulade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen d’un tel projet de loi est un moment privilégié pour mesurer les progrès d’une société et pour en définir collectivement les futurs contours.
Regardons ce passé dans les yeux pour nous remémorer le chemin parcouru et préparer un avenir que nous souhaitons tous meilleurs.
En regardant les étapes essentielles de l’évolution de notre société, j’ai tenté de comprendre pourquoi des textes votés ne sont pas appliqués. Ce n’est pas nouveau et d’autres orateurs avant moi l’ont souligné : il se dit que 50 % des textes votés dans notre belle démocratie ne reçoivent pas de décrets d’application. Ce pourcentage est peut-être exagéré – je n’ai pas fait le calcul ! –, mais je sais qu’il y en a tout de même un certain nombre qui ne voient pas le jour.
Rappelons les dates les plus importantes.
L’été 1789 vit naître ce qui est probablement le plus éminent, le plus déterminant, le plus beau des textes de notre histoire contemporaine : la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.
Son esprit et ses objectifs lui confèrent d’emblée une portée universelle, mais, à la charnière des XVIIIe et XIXe siècles, cette universalité s’arrête à la frontière du genre : les femmes ne peuvent se réclamer de ces droits pourtant inhérents à tout individu et censés être indépendants de son sexe.
Les femmes les plus prosélytes, comme Marie-Olympe de Gouges, qui rédigea en 1791 la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, et dont l’entrée au Panthéon pourrait devenir prochainement réalité, goûtèrent, hélas, la lame de la guillotine pour avoir mené un combat féministe précurseur, qui s’accompagnait généralement d’une virulente critique de la barbarie qui prévalait pendant la Terreur.
Ainsi, les Lumières ont sans doute vivement éclairci les consciences et réveillé les âmes, mais elles n’ont pas immédiatement fait avancer la cause féminine. Le XIXe siècle oubliera la femme qui, tapie dans l’ombre du foyer, restera prisonnière et du père et du mari, parfois même, dans les communes rurales, de la belle-mère.
Mme Nathalie Goulet. Pas seulement !
M. René Teulade. Ce n’est qu’une fois la figure masculine partie au front, lors de deux guerres mondiales, que la femme pourra s’émanciper et s’imposer comme une individualité à part entière. N’est-il pas tristement ironique que l’émancipation des femmes, si auguste dessein qui a ouvert la voie de la reconnaissance de l’égalité des droits entre les genres, ait vu le jour grâce à un événement aussi funeste que la guerre ?
Et pourtant ! Il a effectivement fallu attendre le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, lequel dispose que « la loi garantit à la femme dans tous les domaines des droits égaux à ceux de l’homme », pour que l’égalité entre les hommes et les femmes soit consacrée.
Par la suite, le mouvement visant à consolider cette égalité s’est développé, notamment grâce à différents textes : loi du 13 juillet 1965 portant réforme des régimes matrimoniaux de 1804, qui permet à la femme d’ouvrir un compte en banque et de gérer seule ses biens ; loi du 4 juin 1970, qui substitue à la toute-puissance paternelle la notion d’autorité parentale ; loi du 11 juillet 1975, qui libéralise le divorce.
Si des progrès indéniables ont été réalisés, n’en subsistent pas moins de nombreuses entraves à l’effectivité du principe d’égalité entre les femmes et les hommes. En effet, l’organisation sociale séculaire, le poids des conservatismes, omniprésents, comme l’a révélé le débat autour d’un récent projet de loi sociétal, le scepticisme et l’anachronisme des mentalités sont autant d’éléments qui expliquent l’impérieuse nécessité d’adopter de nouvelles mesures sur ce sujet.
Au-delà de l’articulation entre vie familiale et vie professionnelle, de l’accentuation des violences commises à l’encontre des femmes, de la concrétisation « clopinante » du principe constitutionnel de parité, il est essentiel de se focaliser sur l’égalité professionnelle, afin de permettre une émancipation réelle des femmes.
C’est pourquoi, au cours de la discussion, je présenterai deux amendements qui, plutôt que d’en faire un principe purement déclaratif, visent à donner corps au principe d’égalité salariale. Les inégalités en la matière ne peuvent être tolérées alors que toutes les études soulignent que les femmes sont désormais, parfois, plus et mieux diplômées que les hommes.
Enfin, madame la ministre, monsieur le président, mes chers collègues, la lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes est loin, vous le savez bien, d’être achevée. Si tel était le cas, cette égalité apparaîtrait naturelle, et nous n’aurions nul besoin d’inciter à la discrimination positive qui, par essence, est une politique inepte, dernier rempart contre des comportements et des situations qui le sont tout autant !
Dès lors, les mécanismes de contrainte sont des moindres maux qui ne font que masquer la ténacité de mentalités.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. René Teulade. Ainsi, l’engagement au nom de cet auguste principe sera un véritable triomphe quand le législateur deviendra muet sur l’égalité entre les genres. Les passions rétrogrades, les préjugés, les stéréotypes obstinés se seront alors définitivement tus. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l’article.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous félicitons de la présence de ce premier article chapeautant le texte pour l’égalité entre les femmes et les hommes. Cet article fixe un cadre et une orientation à l’action publique, tout en posant la nécessité de l’évaluer afin de pouvoir la rendre effective à l’échelle de l’État, mais aussi dans les collectivités territoriales.
Si nous approuvons, bien sûr, les sept points correspondant aux champs dans lesquels vous entendez, madame la ministre, développer cette politique pour l’égalité entre les femmes et les hommes, il nous semble cependant important d’étendre le cadre de cet article à la maîtrise par les femmes de leur sexualité, notamment par des actions en faveur de l’accès à la contraception et à l’interruption volontaire de grossesse. Ce sera l’objet d’un amendement que je défendrai tout à l’heure.
En effet, les conditions d’accès à l’IVG se sont considérablement dégradées ces dernières années. Depuis la loi HPST – loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires – les restructurations, regroupements, voire fermetures de services hospitaliers, et au premier chef des centres d’IVG, ont encore étendu les délais d’accès à l’avortement dans notre pays.
Le délai de douze semaines donné aux femmes se révèle souvent très court étant donné le temps qui est aujourd’hui nécessaire pour obtenir, une fois qu’on s’est rendu compte de sa grossesse, une première consultation gynécologique, respecter un délai de sept jours avant la seconde consultation, obtenir un rendez-vous dans un centre d’IVG.
Ajoutons à cela qu’un nombre important de centres ne pratiquent plus que des IVG médicamenteuses, c'est-à-dire jusqu’à six semaines.
Il est donc particulièrement important que l’État ait une intervention forte à ce sujet, afin que toutes les femmes puissent accéder librement à une interruption volontaire de grossesse, quelle que soit leur condition sociale et où qu’elles vivent sur le territoire. C’est pourquoi nous saluons la décision du Gouvernement de rembourser les IVG à 100 %.
Nous défendrons ultérieurement deux autres amendements relatifs à cette question. Je tiens à y insister parce que cela me paraît devoir faire partie du développement des différentes actions ciblées dans cet article 1er.
Cette action publique visant à donner à chacune et à chacun la liberté de maîtrise de sa sexualité passe, bien entendu, aussi par un accès gratuit de chacune et de chacun à une contraception adaptée.
Il s’agit donc, par des actions de prévention, de sensibilisation, d’éducation à la sexualité, de donner accès à toutes les femmes au contraceptif qui sera le plus adapté à son cas.
Nous espérons que des actions concrètes en ce sens pourront se développer dans les années à venir : soutien au planning familial, présence de gynécologues dans les centres de santé universitaires, remboursement intégral de l’ensemble des contraceptifs.
Alors que nous parlons d’égalité entre les femmes et les hommes, n’oublions pas cette dimension importante du combat pour l’égalité, qui est au cœur des revendications féministes depuis les années soixante.
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Printz, sur l’article.
Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il est important de prendre la mesure des avancées accomplies en matière d’égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi de ce qu’il reste à faire.
Avec les lois Roudy et Génisson, notre pays n’aura eu de cesse de combattre les inégalités entre les hommes et les femmes lors de ces trente dernières années.
François Poullain de La Barre les dénonçait déjà, dès 1673 comme relevant du simple préjugé ! Pourtant, force nous est de constater que ces préjugés sont tenaces, tant les inégalités continuent de perdurer dans notre pays !
Les femmes restent bien trop souvent reléguées au second rang en matière de rémunérations, de postes à responsabilité dans le monde professionnel et politique, et cela malgré la loi sur la parité. Elles sont toujours victimes de précarité, de stéréotypes sexistes, d’atteintes à la dignité et de violences souvent mortelles.
Il reste encore du chemin à parcourir pour parvenir à une égalité réelle entre les hommes et les femmes dans l’ensemble de notre société.
La mesure contenue dans ce texte qui donne aux hommes la possibilité de prendre six mois de complément de libre choix d’activité, permettront d’accomplir une avancée décisive en plaçant les femmes et les hommes sur un pied d’égalité, ce qui facilitera l’éducation de leurs enfants.
Cette disposition aura des effets positifs sur le niveau des retraites des femmes, retraites qui, nous le savons, sont aujourd’hui largement inférieures à celles des hommes.
Cette loi couvre plusieurs domaines dans lesquels perdurent des inégalités.
Elle sera un outil pour faire progresser le statut de la femme dans le champ professionnel, la représentativité dans l’entreprise, dans le monde associatif, artistique, sportif, mais surtout dans la lutte contre la précarité par l’amélioration du recouvrement des pensions alimentaires, la pénalisation des entreprises qui ne respectent pas l’égalité salariale et, surtout, dans le combat quotidien contre les violences faites aux femmes.
C’est à nous, parlementaires, qu’incombe le devoir de veiller à la bonne application de cette loi, qui fera progresser le statut de la femme en favorisant l’égalité entre les femmes et les hommes.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, sur l’article.
Mme Catherine Génisson. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Stendhal écrivait : « L’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain. »
Le projet de loi que vous défendez avec enthousiasme et détermination, madame la ministre, doit y contribuer afin que « notre République tout entière, unie, consciente, mobilisée permette de passer de l’égalité formelle à l’égalité réelle ».
L’article 1er définit l’égalité entre les femmes et les hommes. Si l’écriture en est technique et pragmatique, il illustre l’obligation d’une prise en compte transversale, intégrée dans l’ensemble de nos politiques publiques.
Les diverses interventions ont montré combien les inégalités entre les hommes et les femmes, dans toutes les sphères de la vie publique, comme dans la sphère privée, existent encore aujourd’hui. Ce n’est pas Mme la présidente de la délégation aux droits des femmes qui me contredira : quand on évoque le sujet de l’inégalité professionnelle, j’ai presque envie de dire que non seulement on avance peu, mais même que l’on régresse.
Quant à l’interruption volontaire de grossesse, évoquée par Chantal Jouanno et Laurence Rossignol, il est vrai qu’il y a danger. Cécile Cukierman a mentionné les restructurations intervenues après la mise en œuvre de la loi HPST.
Au-delà, n’oublions pas que tous ceux qui ont milité pour que les femmes puissent mener librement leur vie personnelle en matière de sexualité comme en matière de grossesse, qu’ils appartiennent au monde médical et paramédical ou qu’ils s’expriment dans les autres sphères de la vie publique, tous partent aujourd'hui à la retraite. Aujourd'hui, bien souvent, en particulier dans le monde médical et paramédical, on observe de l’indifférence ou, pis encore, des attitudes qui s’apparentent à des jugements moraux. Ce ne sont pas là des comportements de praticiens responsables, ce ne sont pas là des comportements d’humanistes, ce que sont pourtant censés être ces professionnels !
Je vous remercie donc, madame la ministre, d’être attentive, avec votre collègue Mme la ministre de la santé, à cette question, qui me paraît essentielle.
Sur le sujet de l’égalité professionnelle, comme notre collègue de Mayotte l’a souligné, il est important de traiter le sujet en amont, avant l’entrée dans le monde du travail, qu’il s’agisse de l’entreprise, des fonctions publiques ou des services publics. Le rôle de l’éducation nationale est à cet égard fondamental. Je vous remercie, là encore, madame la ministre, d’avoir travaillé avec votre collègue de l’éducation nationale sur le thème de l’orientation des filles et des garçons.
En effet, cela a été dit, les femmes ont souvent des diplômes plus élevés que les hommes, elles réussissent mieux dans les études, et pourtant, elles sont orientées vers des études qui ne leur permettent pas d’accéder à toutes les professions. Les études qu’elles suivent ne leur facilitent pas, en particulier, l’accès aux postes à responsabilité dans la vie professionnelle.
On a beaucoup insisté sur le sujet de l’inégalité professionnelle, sur le thème du « plafond de verre », du « plancher collant », comme disent nos amis canadiens. Je pense qu’il est un sujet au moins aussi grave, celui de la précarisation des femmes, celles qui sont chefs de famille monoparentale, celles qui occupent des temps partiels subis. Nous devons vraiment nous occuper de cette question avec ténacité.
Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir enrichi les services des droits des femmes dans les régions, dans les départements. En effet, s’il est bon qu’il y ait des lois, il faut aussi pouvoir en vérifier l’application sur le terrain. Or, il faut bien le dire, le maillage des déléguées régionales, des chargées de mission a été malheureusement très malmené ces dernières années. Pouvoir faire en sorte qu’il y ait vérification et évaluation de l’application des textes de loi sur notre territoire doit permettre d’avancer vers de meilleurs résultats.
Enfin, je voudrais dire qu’on ne parviendra à résoudre la sempiternelle question de l’égalité salariale que sous réserve d’avoir réalisé préalablement l’égalité professionnelle, laquelle exige de lutter contre les discriminations à l’embauche, de garantir l’égal accès des femmes et des hommes à la formation et à la mobilité. L’égalité salariale, c’est également la définition de meilleures conditions de travail dans l’entreprise ou les fonctions publiques, en sachant que cette exigence qualitative dans le monde du travail profite à tous.
C’est après avoir abouti sur tous ces points que l’on assurera une vraie égalité salariale. Or l’égalité salariale est fondamentale pour appréhender le sujet du congé parental. Certains arguent que les hommes n’accèdent pas au droit d’être à côté de la mère pour élever l’enfant… Mais il y a aussi certaines réalités indéniables : lorsque, dans un foyer, la différence de revenus est de l’ordre de 20 % à 30 %, le choix de celui qui reste pour élever l’enfant est malheureusement vite fait !
L’égalité salariale, qui est la conséquence de l’égalité professionnelle, est vraiment un sujet extrêmement prégnant. (M. le président de la commission des lois, M. Thani Mohamed Soilihi et Mme Cécile Cukierman applaudissent.)
M. le président. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes Gonthier-Maurin, Cohen et Goy-Chavent, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…° Des actions en faveur de l’égal accès aux mandats électoraux et aux fonctions électives.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La sphère politique a été la première à mettre en œuvre le principe de parité, dans le prolongement de la révision constitutionnelle de 1999. Plusieurs textes sont intervenus en la matière dont, il y a encore quelques mois, le texte relatif à l’élection des sénateurs.
Le présent projet de loi revient, lui aussi, sur ces questions dans son titre IV, relatif à la parité. L’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives figure ainsi indiscutablement dans le champ d’application de l’approche intégrée retenue par le projet de loi.
Pourtant, son article 1er ne le mentionne pas lorsqu’il énumère les domaines concernés par cette nouvelle approche.
Conformément à sa recommandation n° 2, la délégation aux droits des femmes propose de combler cette lacune en complétant l’article 1er afin d’y faire figurer l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives.
J’entends bien que cet article 1er ne peut pas dresser une liste absolument exhaustive, mais je crois que nous touchons là une dimension fondamentale si l’on veut que les intéressées et les intéressés aient les moyens de participer à la construction d’une véritable politique d’égalité.
J’ajoute que, au moment où chacun et chacune ici s’émeut de la distanciation entre la politique et nos concitoyens, ce serait quand même un signe important adressé à la société. C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous invite à retenir, en votant cet amendement, la recommandation de la délégation aux droits des femmes qui avait été adoptée à l’unanimité. (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Virginie Klès, rapporteur. La commission des lois, qui est composée d’éminents juristes s’assignant principalement pour tâche d’écrire la loi de la façon la plus simple et la plus lisible possible, a émis un avis défavorable sur cet amendement, bien qu’elle approuve l’idée qui le sous-tend.
Nous considérons en effet que cet objectif de parité est déjà inscrit dans la Constitution et que, dès lors, toutes les lois et tous les règlements s’y conforment nécessairement. Il serait donc redondant d’inscrire dans le projet de loi cet alinéa issu de la recommandation n° 2 adoptée par la délégation aux droits des femmes.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre. Cette question de l’égal accès aux responsabilités électives étant inscrite dans la Constitution, nous avions estimé qu’il n’était pas utile de la mentionner de nouveau à l’article 1er, comme vient de le dire Virginie Klès. Néanmoins, pour être tout à fait honnête, compte tenu de l’ampleur de la tâche qu’il nous reste à accomplir, je peux aussi comprendre l’intérêt de la faire figurer ici.
Je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 7 rectifié.
(L'amendement est adopté.) – (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Bravo !
M. le président. L’amendement n° 132, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
...° Des actions visant à assurer aux femmes la maîtrise de leur sexualité, notamment par l’accès à la contraception et à l’interruption volontaire de grossesse.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Comme je l’ai indiqué lors de mon intervention sur l’article 1er, cet amendement énonce les grands champs d’intervention de l’État sur le terrain de l’égalité entre les femmes et les hommes. Il nous paraît donc particulièrement important d’y intégrer la question de la maîtrise par les femmes de leur sexualité.
Une réflexion approfondie doit être menée, par exemple, sur les questions de contraception. Il ne s’agit pas d’y apporter immédiatement des réponses dans le texte, mais de les faire figurer parmi ces grands champs d’action.
Il convient de garantir à toutes les femmes un accès libre à la contraception, ou à une IVG quand elles le souhaitent, et ce quels que soient leur lieu de résidence et leur situation personnelle.
Je me suis longuement exprimée sur ce sujet ; je serai donc brève. J’ai bien entendu les objections de la commission des lois. Notre objectif n’est pas d’étoffer le texte, mais bien de n’exclure du texte aucun des champs d’intervention, qu’ils se situent au niveau de l’État, des collectivités territoriales ou même de la société tout entière. Nous devons en effet nous interroger, à cet égard, sur les inégalités qui persistent.
C’est en prenant en compte les différents moyens d’action, sans oublier la maîtrise de la sexualité des femmes, que nous pourrons aboutir à une réelle égalité entre les femmes et les hommes.
Mme Corinne Bouchoux (Applaudissant). Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Virginie Klès, rapporteur. La commission va encore jouer les rabat-joie… (Sourires.) Nous avons en effet émis un avis défavorable, pour des raisons rédactionnelles et non de fond, car, tout en étant quelque peu divisés sur le sujet, nous partageons vos objectifs, madame Cukierman, qui rejoignent ceux qu’a précédemment affirmés Laurence Rossignol.
Il nous semble néanmoins que ces objectifs sont satisfaits par la mention de la dignité des femmes et de la lutte contre les stéréotypes sexistes. (Protestations sur les travées du groupe écologiste.)
Mme Esther Benbassa. Ce n’est pas la même chose !
Mme Virginie Klès, rapporteur. Certes, mais c’est tout de même inclus dans cette mention.
Quel que soit le sort qui sera réservé à cet amendement – au vu du précédent vote, je pense qu’il sera adopté –, nous appelons l’attention de nos collègues députés sur la nécessité de réfléchir à une rédaction qui convienne et à se méfier du terme « notamment », dont l’emploi est toujours problématique dans la loi, ainsi que de l’exhaustivité, qui pourraient conduire à des interprétations du texte contraires à l’objectif visé.