M. Éric Bocquet. Cet amendement reprend une très vieille revendication de la gauche sénatoriale. Des amendements tendant à mettre en place un service bancaire universel, assorti d’un certain nombre de prestations gratuites, avaient en effet déjà été défendus devant cette assemblée voilà plus de dix ans par de nombreux collègues, siégeant sur toutes les travées.
Ce débat sur le service bancaire de base nous semble d’autant plus nécessaire qu’aucune disposition sur cette question importante pour la vie quotidienne de nos citoyens ne figure véritablement dans le présent projet de loi.
Nous savons ce qu’il en est aujourd’hui : l’article L. 312-1 du code monétaire et financier ne prévoit qu’un droit au compte, lequel est justement loin de faire le compte, puisque le nombre d’exclus bancaires est relativement élevé dans notre pays et que la procédure du droit au compte n’intéresse, les pires années, qu’une trentaine de milliers de personnes.
L’amendement que nous vous proposons vise donc à poser un principe général, celui de l’existence d’un service bancaire de base, lequel est absolument nécessaire du point de vue de l’égalité entre les citoyens de notre pays. En outre, il serait un outil d’insertion sociale et professionnelle évident.
Nous avions déposé un amendement visant à détailler plus précisément le contenu d’un service universel de base, mais celui-ci ayant subi les foudres de la LOLF, nous nous contenterons de la formule synthétique que nous vous présentons ici.
Examinons tout de même ce à quoi pourrait ressembler un tel service.
Il nous semble qu’il serait particulièrement regrettable que ce qui relève aujourd’hui des actes de la vie courante pour nombre de nos compatriotes, comme payer ses factures, ses impôts et taxes, ou encore s’acquitter progressivement du remboursement d’un prêt personnel ou immobilier, devienne une contrainte sujette au paiement d’une commission. Ces prestations sont d’ailleurs de moins en moins coûteuses pour les établissements bancaires du fait de l’évolution des techniques de communication et de traitement de ce type d’opérations.
Droit de disposer d’un relevé de compte mensuel, de se voir attribuer des formules de paiement par chèque, autorisation d’effectuer un nombre significatif de virements et/ou de prélèvements et d’utiliser une carte de retrait en espèces : voilà ce que l’on pourrait attendre d’un service bancaire de base.
Se pose ensuite la question de l’accessibilité à ce service de base, notamment pour les personnes les plus en difficulté et les plus vulnérables.
D’un point de vue strictement commercial, ces personnes ne constituent pas une clientèle très « intéressante » pour nombre d’établissements de crédit, car elles ne sont pas sources de rémunération.
En revanche, d’un point de vue humain et social, il ne nous semble pas souhaitable que ces personnes soient durablement exclues du système bancaire, car cela a des conséquences sur leur insertion sociale et professionnelle et des répercussions sur leur vie quotidienne.
On estime aujourd’hui qu’environ 10 % de nos compatriotes sont concernés par l’exclusion bancaire et donc victimes de la rigidité que cette situation peut entraîner.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous invitons à adopter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Richard Yung, rapporteur. Cet amendement vise à obliger les établissements de crédit à proposer gratuitement un service bancaire de base à toute personne qui en ferait la demande.
Le projet de loi prévoit deux améliorations importantes pour les populations fragiles.
Tout d’abord, pour les plus fragiles d’entre elles, il améliore la procédure de droit au compte, qui permet d’ouvrir un compte et de bénéficier de services bancaires de base gratuits. Ainsi, lorsqu’une banque refuse d’ouvrir un compte à une personne, elle doit – et nous avons encadré cette obligation – lui délivrer une attestation de refus, laquelle permettra ensuite à la Banque de France de désigner, dans un délai de trois jours, une nouvelle banque, cette dernière ne pouvant refuser l’ouverture d’un compte.
Ensuite, pour les populations fragiles et modestes, le texte prévoit une obligation pour les banques de proposer une gamme de moyens de paiement alternatifs permettant de limiter les incidents de paiement, et ce à un faible coût – par exemple, des cartes de crédit préchargées ou autorisant des paiements limités.
Ces deux dispositifs sont adaptés en fonction de la clientèle concernée.
La création d’un droit universel à un service bancaire de base gratuit, monsieur Bocquet, me paraît donc moins urgente que par le passé. Je vous prie donc de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Bocquet, l’amendement n° 66 est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 66.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 17
(Non modifié)
La sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre Ier du livre III du code monétaire et financier est complétée par un article L. 312-1-3 ainsi rétabli :
« Art. L. 312-1-3. – Les commissions perçues par un établissement de crédit à raison du traitement des irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire sont plafonnées, par mois et par opération, pour les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels.
« Les établissements de crédit proposent à celles de ces personnes qui se trouvent en situation de fragilité, eu égard, notamment, au montant de leurs ressources, une offre spécifique qui comprend des moyens de paiement et des services appropriés à leur situation et de nature à limiter les frais supportés en cas d’incidents.
« Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Patient, sur l’article.
M. Georges Patient. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi s’appliquera également aux outre-mer, dans les mêmes conditions qu’en métropole pour les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, et par ordonnances, avec les adaptations nécessaires, pour les autres collectivités ultramarines. C’est normal dans la mesure où le paysage bancaire des outre-mer est désormais dominé, comme en France métropolitaine, par les cinq principaux réseaux bancaires nationaux. La quasi-totalité des établissements locaux a en effet disparu, la banalisation des places financières des outre-mer et de la métropole s’accélérant.
Pourtant, malgré cette dynamique de convergence, les divergences demeurent fortes en ce qui concerne les conditions d’exploitation, principalement sur deux points : l’octroi de crédits aux TPE et aux PME et les frais bancaires.
Je ne reviendrai pas, monsieur le ministre, sur l’octroi des crédits, car j’ai eu l’occasion, lors de l’examen du projet de loi relatif à la création de la Banque publique d’investissement, de vous sensibiliser sur ce sujet. Je garde l’espoir que les engagements pris seront tenus.
En revanche, je m’attarderai sur les frais bancaires. C’est un fait reconnu et trop communément accepté que les « frais bancaires en outre-mer sont généralement significativement plus élevés qu’en métropole », pour reprendre les conclusions du rapport de Georges Pauget et Emmanuel Constans de juillet 2010 sur la tarification des services bancaires. Les écarts de prix sont considérables. Ainsi, les frais de tenue de compte, gratuits en métropole, s’élèvent à 30 euros en Martinique et en Guadeloupe, à 24 euros à la Réunion, à 25 euros à Mayotte et à 17 euros en Guyane. Les commissions d’intervention sont facturées 8,55 euros en moyenne en métropole, contre 16,50 euros par la BNP Martinique.
La loi relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer – la loi sur la vie chère de Victorin Lurel – a commencé à réguler cette forme de discrimination en introduisant dans le code monétaire et financier un article L. 711-22 prévoyant que « les établissements de crédit ne peuvent pratiquer des tarifs supérieurs à la moyenne de ceux que les établissements ou les caisses régionales du groupe auquel ils appartiennent pratiquent dans l’Hexagone ». Mais cette loi ne s’applique qu’aux services bancaires liés à l’exercice du droit au compte visés à l’article L. 312-1 du code monétaire et financier.
Le présent projet de loi portant précisément sur les activités bancaires, je présenterai, après l’article 17, un amendement de mon collègue Maurice Antiste visant à généraliser cette disposition à tous les frais bancaires. J’espère fortement qu’il sera adopté.
Mme la présidente. L’amendement n° 169 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, M. Dilain, Mme Lienemann, MM. Madec, Madrelle, Fauconnier, Chastan, Antoinette, Leconte et Teston, Mmes Alquier et Claireaux, MM. J.C. Leroy, Eblé, Vincent, Rome et Filleul, Mme Lepage et MM. Mirassou et Vandierendonck, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
traitement des irrégularités de fonctionnement d’un compte bancaire
insérer les mots :
y compris les frais de rejet
La parole est à Mme Laurence Rossignol.
Mme Laurence Rossignol. Nous évoquons les commissions bancaires, c’est-à-dire les sommes prélevées par les banques en cas de dépassement du découvert autorisé. Dans ce cas, les banques facturent des agios et perçoivent des commissions. J’ai découvert, à l’occasion de l’examen du présent texte, que ceux-ci représenteraient 10 % des activités bancaires.
Il est normal que les banques rémunèrent le prêt qu’elles consentent en avançant de l’argent sur un compte non provisionné. On peut également comprendre que les frais de production soient eux aussi facturés. En revanche, il est extrêmement immoral et choquant que les banques réalisent des bénéfices sur les frais bancaires !
Je ne vois pas comment on peut soutenir et accepter un tel modèle économique bancaire, qui n’a aucune justification, d’autant plus que des règles, comme la définition d’un taux de l’usure, limitent ce type de pratique.
Nos collègues de l’Assemblée nationale ont déjà adopté un amendement tendant à plafonner les commissions d’intervention.
L’amendement n° 169 rectifié bis que nous présentons maintenant vise à introduire une précision. Loin de moi l’idée de me montrer suspicieuse à l’égard des banques, mais il faudrait éviter qu’elles ne reportent sur les frais de rejet ce qu’elles ne peuvent plus percevoir au titre des commissions d’intervention. Cet amendement vise donc à préciser que les frais de rejet sont inclus dans le plafonnement des commissions d’intervention.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Richard Yung, rapporteur. L’amendement vise à intégrer les frais de rejet au plafond des commissions d’intervention.
Les frais de rejet sont d’une nature différente des commissions d’intervention et font déjà l’objet d’un plafonnement.
Contrairement aux commissions d’intervention, les frais de rejet ne rémunèrent pas l’analyse d’une situation individuelle. Ils compensent le coût des opérations occasionnées par le rejet, en particulier les coûts des procédures d’information, voire les frais d’inscription au fichier de la Banque de France. C’est pourquoi ils sont plus élevés, notamment pour les chèques.
Par ailleurs, ces frais de rejet font déjà l’objet d’un plafonnement depuis 2007, à 30 euros ou 50 euros, ce qui est effectivement élevé. Une disposition permet d’éviter les rejets à répétition d’un même chèque.
Par conséquent, je vous prie, chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Rossignol, l’amendement n° 169 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Laurence Rossignol. Oui, madame la présidente, car je ne pense pas qu’il déstabilise l’équilibre du texte !
M. Éric Bocquet. Très bien !
Mme la présidente. L’amendement n° 242, présenté par MM. Desessard, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Supprimer les mots :
, par mois et par opération
2° Compléter cet alinéa par les mots :
par mois en fonction du flux créditeur du compte selon un taux fixé par décret et par opération.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. L’Assemblée nationale a fort heureusement introduit un plafonnement par mois et par opération des frais bancaires pour incident de compte, à destination des particuliers.
Le présent amendement vise à introduire de la proportionnalité dans le calcul des frais prélevés pour incident de compte, afin de ne pas pénaliser davantage les clients aux plus faibles revenus. En effet, le plafonnement des frais bancaires pour incident est une mesure essentielle. Pour ceux dont la situation financière est la plus précaire, ces frais constituent souvent un cercle vicieux : plus on a d’incidents, plus on a de frais ; et plus on a de frais, plus on a d’incidents, dès lors que la somme disponible sur le compte est faible.
Tel est le sens de cet amendement, qui tend à introduire la proportionnalité des frais en fonction des revenus et de la tenue de compte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Richard Yung, rapporteur. Cet amendement vise à instaurer un plafonnement des commissions d’intervention modulable en fonction des flux financiers du compte.
M. Jean Desessard. C’est cela !
M. Richard Yung, rapporteur. Je comprends bien l’intention qui vous a inspiré, monsieur le sénateur, et je crois que nous la partageons tous.
Cependant, nous allons, dans quelques instants, examiner les amendements nos 143 rectifié quater et 269, présentés par M. Caffet, qui tendent à instaurer un autre type de modulation, en particulier pour les populations sensibles.
Puisque la commission soutient ces amendements, elle vous demandera, monsieur Desessard, de bien vouloir vous y rallier également, et de retirer l’amendement n° 242.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Desessard, l’amendement n° 242 est-il maintenu ?
M. Jean Desessard. Non, je le retire, madame la présidente.
M. Richard Yung, rapporteur. Merci !
Mme la présidente. L’amendement n° 242 est retiré.
L’amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Vaugrenard, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le plafond par opération ne peut s’écarter de façon abusive des coûts réels supportés par les établissements de crédit.
La parole est à M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis.
M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Le présent amendement vise à conforter l’acquis que représente la disposition issue de l’examen du texte à l’Assemblée nationale, tendant à plafonner, par opération et par mois, et pour l’ensemble des clients des établissements de crédit, les commissions d’intervention imposées en cas d’incident de paiement.
Tout en laissant au pouvoir réglementaire le soin d’établir le niveau du plafond par mois et par opération, cet amendement vise à définir des lignes directrices, en prévoyant que ce plafond ne peut s’écarter de façon abusive des coûts réels supportés par les établissements de crédit. La disposition doit permettre d’éviter que le plafond ne soit fixé à un niveau trop élevé, sans intérêt réel pour le client des banques. L’expérience précédente du plafond applicable aux frais de rejet des chèques nous a, en effet, amenés à constater que les banques ont tendance à s’aligner sur celui-ci.
Le présent amendement tend donc à instituer un garde-fou, afin de se prémunir de ces dérives.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Richard Yung, rapporteur. Le présent amendement vise à rapprocher le plafond des commissions d’intervention du coût que représentent ces interventions pour les banques. En effet, il apparaît que le prix facturé pour une commission d’intervention, de l’ordre de 8 euros, est bien supérieur à ce qu’il devrait être, compte tenu du temps réellement nécessaire à l’examen de l’opération par le banquier.
Je formulerai le même avis que celui que j’ai émis sur l’amendement présenté à l’instant par M. Desessard. Bien que la commission partage la préoccupation de l’auteur de cet amendement, je lui demanderai de bien vouloir le retirer, afin qu’il se rallie, lui aussi, aux amendements nos 143 rectifié quater et 269, présentés par M. Caffet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Vaugrenard, l’amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?
M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 4 rectifié est retiré.
L’amendement n° 143 rectifié quater, présenté par M. Caffet, Mme M. André, MM. Berson et Botrel, Mme Espagnac, MM. Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Marc, Massion, Miquel, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini et Yung, Mme Lepage et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Parmi ces personnes, celles qui souscrivent l’offre mentionnée au deuxième alinéa du présent article ainsi que celles qui bénéficient des services bancaires de base mentionnés au cinquième alinéa de l’article L. 312-1 se voient appliquer des plafonds spécifiques.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai également l’amendement n° 269. Il devait initialement faire l’objet d’une discussion commune avec l’amendement n° 143 rectifié quater, mais il en a été séparé pour des raisons quelque peu mystérieuses. Pourtant, il y a une logique à ce que ces deux amendements soient présentés ensemble.
À cette heure tardive, mon propos sera bref. Le projet initial du Gouvernement avait pour objet de plafonner les commissions pour les personnes en situation de fragilité. L’Assemblée nationale, quant à elle, a jugé bon de les plafonner pour l’ensemble des publics disposant d’un compte dans un établissement de crédit.
L’idée originelle du Gouvernement, consistant à limiter le plafonnement aux populations en situation de fragilité, a donc quelque peu disparu dans la mouture actuelle du projet de loi. Dans cette dernière version, les commissions sont plafonnées pour tous, et les établissements de crédit proposent aux « personnes qui se trouvent en situation de fragilité, eu égard, notamment, au montant de leurs ressources, une offre spécifique qui comprend des moyens de paiement et des services appropriés à leur situation et de nature à limiter les frais supportés en cas d’incidents ».
Les deux amendements que je présente visent à réintroduire l’idée d’un plafonnement spécifique des commissions pour les personnes en situation de fragilité, sans pour autant remettre en cause les dispositions adoptées par l’Assemblée nationale, qui instaurent le plafonnement pour l’ensemble des publics. Ce plafonnement spécifique s’appliquerait aux particuliers bénéficiant d’une offre spécifique, désormais imposée aux banques par l’article 17 du présent projet de loi, mais également à ceux qui bénéficient des services bancaires de base.
Le système ainsi promu permettrait de réintroduire le principe du plafonnement des commissions pour les personnes fragiles. Ce faisant, il respecterait l’esprit initial du projet de loi déposé par le Gouvernement, tout en conservant le plafonnement général, applicable à l’ensemble des clients des établissements de crédit.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Richard Yung, rapporteur. Lors de mes interventions précédentes, j’avais exprimé le soutien de la commission à cet amendement, et demandé que les auteurs des amendements visant le même objectif s’y rallient.
La commission, en effet, émet un avis favorable sur cet amendement, car il confirme le plafonnement général introduit par l’Assemblée nationale, et permet de mieux protéger les populations fragiles, en proposant un critère d’identification simple : la gamme de paiements alternatifs ou les services bancaires de base.
Son mérite réside donc dans la simplicité de sa mise en œuvre. Il correspond bien à l’esprit du projet de loi initial, déposé par le Gouvernement, et à celui du texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.
Par conséquent, la commission y est favorable, tout comme elle sera favorable à l’amendement n° 269, qui est un amendement de coordination, dans le cas où le présent amendement serait adopté.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 210, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
« Ce plafonnement ne s’applique toutefois pas à celles de ces personnes qui, au regard, notamment, de leurs moyens financiers et du volume de flux retracés par leurs comptes, constituent une clientèle avertie. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 107, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant unitaire des commissions perçues est calculé par référence au montant de l’opération faisant l’objet de l’irrégularité. Aucune commission ne peut présenter de caractère forfaitaire.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. L’article 17 du présent projet de loi nous fait entrer dans le champ fort intéressant des rapports entre les usagers des banques et les établissements de crédit eux-mêmes : enfin un peu d’humain dans nos discussions !
Le débat à l’Assemblée nationale a été l’occasion de faire entrer dans le corps du projet de loi la question des frais bancaires, qui sont parfois, cela a été souligné tout à l’heure, bien loin de ne constituer qu’un revenu accessoire pour les établissements de crédit.
Prenons quelques exemples.
La Banque postale diffuse gratuitement à ses clients leurs relevés de compte, selon une périodicité mensuelle, et prélève 3,80 euros par an au titre des frais de tenue de compte.
Elle prélève également 10,60 euros pour le rejet d’un prélèvement portant sur une somme supérieure à 20 euros et 43,66 euros pour tout rejet de chèque dont le montant est supérieur à 50 euros. Une carte de paiement à débit différé coûte 43 euros par an.
Que voit-on dans une banque comme BNP Paribas ? Si la tenue de compte est gratuite, la carte de paiement à débit différé coûte 46 euros. Le chèque rejeté est facturé 50 euros, dès lors que le montant est supérieur à cette somme. Le rejet d’un prélèvement d’au moins 20 euros coûte également 20 euros au minimum, et l’envoi de chéquiers – le droit le plus strict, pourtant, pour un client faisant transiter l’essentiel de ses revenus par cet établissement – est facturé 3 euros par envoi, alors qu’il est gratuit à La Banque postale.
Une banque comme HSBC représente un cas particulier. Un client de cet établissement doit s’acquitter d’un minimum de 150 euros par an, sans faire de folies particulières.
Ces frais de gestion de compte constituent tout de même un sérieux problème, du point de vue de l’éthique commerciale comme du droit des usagers. En effet, si les Français sont massivement « bancarisés », c’est, pour l’essentiel, parce que l’obligation leur en a été faite, notamment s’ils veulent percevoir leurs rémunérations d’activité et la plus grande partie de leurs prestations sociales. Ce véritable droit d’octroi perçu par les banquiers sur les sommes que les ménages salariés ou retraités peuvent percevoir doit donc être strictement limité.
Rien ne justifie l’usage et l’abus de forfaits de perception de frais. Ainsi, certaines banques perçoivent aujourd’hui des sommes forfaitaires sur la non-utilisation de l’autorisation de découvert par leurs clients, au seul motif que cette dernière existe ! C’est pourquoi le présent amendement tend à réduire à une proportion donnée le montant des frais perçus.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Richard Yung, rapporteur. Cet amendement vise à calculer le montant des commissions d’intervention sur le montant de l’opération financière concernée. En d’autres termes, il tend à instaurer entre elles un lien de proportionnalité.
Je dois le dire, le fond même de cet amendement est source de difficultés.
Tout d’abord, je l’ai dit tout à l’heure, les commissions d’intervention rémunèrent l’analyse, par la banque, de la situation financière de la personne, et non l’opération elle-même.
Surtout, il me semble que le dispositif prévu par cet amendement pourrait compromettre l’objectif du plafonnement des commissions. Certaines opérations, d’un montant relativement élevé, sont absolument incontournables. Il faut bien payer le gaz, le loyer, l’électricité ! Si cet amendement était adopté, ces opérations seraient ainsi accompagnées de commissions d’intervention beaucoup plus élevées qu’aujourd’hui, car proportionnelles à ces montants. Ces conséquences, monsieur Bocquet, me semblent donc aller à rebours de ce que vous recherchez, à savoir une plus grande justice sociale.
Je vous demande donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer l’amendement n° 107.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Bocquet, l’amendement n° 107 est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Il est maintenu, madame la présidente.
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 268, présenté par M. Vaugrenard, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Les établissements de crédit proposent à celles de ces personnes qui se trouvent en situation de fragilité financière, eu égard notamment à leurs ressources, au nombre et à la fréquence des incidents de paiement, un entretien pour examiner leur situation. Ils mettent à leur disposition une offre qui comprend des moyens de paiement et des services appropriés et de nature à limiter les frais. Ils appliquent aux commissions visées au premier alinéa un plafond spécifique par mois et par opération adapté aux situations de fragilité financière.
La parole est à M. Yannick Vaugrenard, rapporteur pour avis.