M. Michel Sapin, ministre. L’amendement n° 63, auquel le Gouvernement est favorable, me permet d’apporter à mon tour quelques réponses aux questions tout à fait légitimes posées par Mme Pasquet.
Aujourd’hui, aucune disposition particulière n’est prévue pour la plupart des DOM ; il y a seulement certaines spécificités de l’outre-mer, notamment de Mayotte, dont il faudra tenir compte.
Au reste, c’est certainement dans les départements d’outre-mer que le contrat de génération pourra s’appliquer le plus rapidement et le plus généralement.
En effet, le niveau élevé du chômage des jeunes dans ces territoires devrait favoriser le recours au contrat de génération, dont je vous rappelle qu’il concerne tous les jeunes, même les jeunes qualifiés. En outre, comme plusieurs sénateurs ultramarins l’ont signalé, ces territoires possèdent un grand nombre de petites et parfois de très petites entreprises, dans lesquelles la question de l’arrivée d’un jeune est absolument cruciale, y compris dans la perspective de la transmission de l’entreprise, pour laquelle une modalité particulière du contrat de génération est prévue.
De nombreux acteurs locaux m’ont dit que le contrat de génération les intéressait énormément et qu’ils allaient se battre pour le faire connaître. Aussi je pense que ce dispositif trouvera à s’appliquer dans les territoires d’outre-mer avec une ampleur et un dynamisme particuliers.
Nous avons pris la précaution de prévoir, à l’article 6 du projet de loi, que la situation de l’outre-mer ferait l’objet d’une analyse particulière à compter du 30 juin 2014. En effet, s’il n’y a pas aujourd’hui de disposition spécifique à l’outre-mer, il y a en outre-mer une situation particulière. (Mmes la rapporteur et la présidente de la commission acquiescent.) C’est pourquoi il sera nécessaire de vérifier, dans un peu plus d’un an, si cette situation particulière est en adéquation avec l’absence de dispositions particulières. Sur le fondement des données statistiques dont nous disposerons, nous aurons la possibilité d’apprécier le dispositif, et éventuellement de le modifier.
Madame Pasquet, c’est ainsi que le Gouvernement entend lutter contre le chômage des jeunes en outre-mer et y favoriser un véritable développement économique, propre à créer de la richesse et des emplois, ce dont les territoires ultramarins ont bien besoin !
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7 (nouveau)
L’article L. 5133-11 du code du travail est abrogé.
M. le président. L'amendement n° 45 rectifié, présenté par Mme Debré, M. Cardoux, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli, Hummel et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Milon, Pinton, de Raincourt, Savary, Buffet et G. Larcher, Mme Troendle, MM. Cléach, Legendre, Gournac, Duvernois, Beaumont, Huré, Chauveau, Fleming et Paul, Mmes Farreyrol et Duchêne, MM. Leleux, Magras, J. Gautier, P. Dominati, César, Trillard, Vial, de Legge, de Montgolfier, Couderc et Charon, Mmes Lamure et Sittler, MM. Hyest, G. Bailly, Doligé, Cambon et P. Leroy, Mme Des Esgaulx et MM. J.P. Fournier et B. Fournier, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Isabelle Debré.
Mme Isabelle Debré. La commission des affaires sociales a adopté un amendement de Mme la rapporteur tendant à supprimer un dispositif d'aide à l'embauche des seniors demandeurs d'emploi qui avait été créé lors de la réforme des retraites de 2010, la raison invoquée pour justifier cette suppression étant que le dispositif en question n’avait donné lieu à aucun décret d’application.
Ce dispositif n’en demeure pas moins un bon moyen d'insérer les seniors, moins complexe et mieux ciblé que le contrat de génération. En effet, il permet d’augmenter le nombre d’embauches de seniors, et non simplement de maintenir en activité les seniors qui ont déjà un emploi.
Je considère que ce dispositif devrait être réactivé.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Vous voulez dire « activé » !
Mme Isabelle Debré. En tout cas, il ne faut pas le supprimer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Madame Debré, j’entends votre argument, mais, vous l’avez dit vous-même, depuis 2010, aucun décret d’application n’est paru, ce qui signifie qu’il n’y a pas eu de volonté de faire exister ce dispositif.
Mme Isabelle Debré. Il n’est jamais trop tard !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ce dispositif n’ayant jamais été appliqué, nous vous proposons de maintenir l’article 7 du projet de loi qui en prévoit la suppression. La commission des affaires sociales est donc défavorable à l’amendement n° 45 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Il est vrai qu'il est difficile de mesurer l'efficacité d'un dispositif qui n'a jamais été mis en œuvre, et donc de présumer la nocivité de sa suppression...
Madame la sénatrice, sur le fond, je peux comprendre votre raisonnement : si cette mesure est bonne mais que votre propre majorité n’a jamais rendu son application possible, pourquoi ne le ferions-nous pas aujourd'hui ? C’est tout simplement parce qu’une autre raison prévaut, une raison de bon sens : nous créons le contrat de génération et c'est ce dispositif que nous souhaitons privilégier dans le cadre des politiques en faveur de l'emploi des seniors.
Au cours de ce débat, beaucoup d'entre vous nous ont mis en garde : attention à ne pas multiplier les dispositifs, à ne pas ajouter une nouvelle couche au millefeuille existant, comme nous le faisons trop souvent en juxtaposant les dispositifs, au point que, à la fin, plus personne n'y comprend rien !
Le contrat de génération simplifie et réunit en un seul document plusieurs négociations qui existaient auparavant. Il permet en outre aux entreprises de bénéficier d'une aide importante en cas d’embauche d'une personne de plus de 55 ans, quand elle est couplée avec celle d’un jeune.
Nous privilégions la simplicité et l'efficacité par rapport à la superposition de mécanismes inopérants.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article additionnel après l'article 7
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du II bis de l'article 3 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer est ainsi modifié :
1° Le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq » ;
2° Sont ajoutés les mots : « et s'applique, par dérogation aux dispositions du dernier alinéa du I, aux sommes versées au plus tard le 31 décembre 2013. »
II. - L'exonération prévue au II bis de l'article 3 de la même loi est compensée par le budget de l'État, sur les crédits de la mission « Outre-mer », programme « Emploi outre-mer », figurant à l'état B des états législatifs annexés au projet de loi de finances pour 2013.
La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre. Il s'agit d'une disposition spécifique à l'outre-mer, qui nous permet d’aller dans le sens souhaité par certains sénateurs.
En application de l’article 3 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, les employeurs implantés dans une région ou un département d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy, dans lequel un accord régional ou territorial interprofessionnel a été conclu selon les modalités prévues à l’article L. 2232-2 du code du travail, peuvent, dans certaines conditions, verser à leurs salariés un bonus exceptionnel d’un montant maximal de 1 500 euros par salarié et par an. Chacun se souvient que ce bonus a été mis en place à la suite des grandes difficultés sociales qui étaient survenues dans ces territoires.
Ce dispositif a bénéficié d’une prolongation d’un an qui vient aujourd'hui à échéance. Aussi, il est proposé de prolonger, au titre des bonus versés, pour une cinquième année et jusqu’au 31 décembre 2013 au plus tard, les exonérations de cotisations sociales dont ils bénéficient. Nous verrons ensuite s'il y a lieu de le proroger encore.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Nous venons de le voir lors de l'examen de l'article 6, il n'y a pas de règles particulières pour les départements et collectivités d'outre-mer, d'une part, pour la métropole, d'autre part. En revanche, la situation socio-économique est très différente selon les territoires ; au cours de la discussion générale, hier soir, notre collègue Jean-Étienne Antoinette y a fait largement allusion. Ainsi, en outre-mer, le taux de chômage est deux à trois fois supérieur à celui de la métropole, quelles que soient les catégories d'âge concernées.
Par conséquent, nous ne pouvons qu'être d'accord avec la proposition du Gouvernement de prolonger jusqu'au 31 décembre 2013 les exonérations de cotisations sociales concernant le bonus exceptionnel versé aux salariés dans certaines collectivités ultramarines. Ce sujet a d’ailleurs été abordé lors de rencontres pour l’emploi outre-mer qui se sont déroulées au mois de juin 2012.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Félix Desplan, pour explication de vote.
M. Félix Desplan. Monsieur le ministre, je suis bien évidemment favorable à cette mesure. J'enfonce sans doute une porte ouverte, mais je tiens à m'assurer que nos motivations sont identiques.
Je prends acte de cet amendement qui, outre-mer, permettra aux employeurs versant une prime de continuer à bénéficier, pour un montant maximal de 1 500 euros par an et par salarié, d’une exonération de charges sociales. Compte tenu des difficultés financières de bien des entreprises ultramarines, je comprends la volonté du Gouvernement de prolonger à nouveau de quelques mois un dispositif provisoire, qui avait été élaboré en 2009 pour aider à apaiser de graves troubles sociaux.
À la suite d’« accords régionaux interprofessionnels sur les salaires », l’État s’était alors engagé à accorder pendant trois ans des exonérations de charges sociales, hors CSG, CRDS et forfait social, aux entreprises ultramarines, contribuant au versement d’une prime exceptionnelle à leurs salariés. Ce dispositif représente, depuis sa création, un coût de l’ordre de 30 millions à 40 millions d'euros.
Il faut dire que le gouvernement précédent avait pris à l’époque quelques mesures de sortie de crise sans pour autant agir efficacement sur le fond. Heureusement, depuis, les choses ont changé !
Ainsi, sur l’initiative de Victorin Lurel, ministre des outre-mer, une loi contre la vie chère outre-mer a été votée au mois de novembre dernier. Ce texte est destiné à faire baisser les prix, qui sont de 30 % à 50 % supérieurs à ceux que l’on constate dans l’Hexagone, à corriger les situations de monopole ou d’oligopole et à renforcer la transparence des prix.
En outre, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013, nous avons voté des dispositions favorisant la compétitivité des entreprises en allégeant le coût du travail.
Aujourd’hui, nous facilitons l’embauche de jeunes tout en maintenant des seniors dans l’emploi, deux catégories de salariés particulièrement touchées par le chômage dans les territoires ultramarins.
L’ensemble de ces initiatives devraient produire leurs effets dans les prochains mois, en tout cas en 2014. Aussi, je formule l’espoir que cela suscitera un nouveau modèle économique, plus dynamique, plus favorable à la croissance, et rendra superflue la prorogation au-delà de l’an prochain d’un dispositif conçu, je le répète, comme provisoire.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans le texte de la commission modifié, je donne la parole à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai par un constat en forme de regret : un seul de nos amendements a été adopté, et encore était-il identique à un amendement déposé par le groupe RDSE ; tous les autres ont été rejetés.
Le groupe UMP votera contre ce projet de loi.
Nous voulons tout d’abord dénoncer le décalage entre les annonces du Gouvernement et les effets que l’on peut raisonnablement attendre de ce dispositif. La majorité annonce en effet 500 000 créations d’emplois grâce à cette mesure, ce qui est tout simplement impossible selon les prévisions des économistes.
M. Alain Néri. Impossible n'est pas français !
Mme Isabelle Debré. De plus, deux tiers des emplois prévus bénéficieront en fait d’un « effet d’aubaine » : ils auraient été créés de toute façon. Je l’ai déjà rappelé, cet effet d’aubaine a été dénoncé par plusieurs personnalités de gauche pendant les primaires socialistes.
Par ailleurs, le contrat de génération reposait initialement sur l’idée séduisante d’une solidarité entre les générations. Or le texte prévoit aujourd'hui que le référent du jeune ne sera pas forcément le senior avec lequel il constitue un binôme, ni même un senior de l'entreprise.
En outre, ce texte fait subir des contraintes et des contrôles aux entreprises et les expose à des sanctions supplémentaires.
Nous voulons également dénoncer le coût très important de cette mesure : un milliard d’euros par an, en rythme de croisière !
Force est de constater que la nouvelle majorité multiplie les dispositifs au lieu de renforcer ceux qui existent déjà et qui ont fait leurs preuves, tels l’alternance et l’apprentissage. Le contrat de génération ne prévoit que très peu de choses pour la formation des jeunes, qui seule peut leur permettre d’accéder durablement à un emploi.
Enfin, nous contestons le mode de financement choisi. Ce dispositif reposera sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, créé au mois de décembre dernier par le Gouvernement, qui se trouve de ce fait déjà amputé avant même d’avoir été mis en œuvre.
En bref, monsieur le ministre, nous attendons que vous engagiez les réformes d'ampleur qui sont nécessaires pour donner aux entreprises les moyens d'embaucher et non pas que vous multipliiez les dispositifs hasardeux. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Michel Vergoz.
M. Michel Vergoz. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, heureusement que nous avons agi !
M. Michel Vergoz. Il y a neuf mois seulement, nous étions dans le trou !
Mme Catherine Procaccia. On y est encore !
M. Michel Vergoz. Saisissez donc l'échelle que l'on vous tend pour en sortir, madame !
Nous étions dans le trou, disais-je, et nous le ressentions plus encore en outre-mer que dans l'Hexagone puisque, comme l'a fort bien rappelé Mme la rapporteur tout à l'heure, les chiffres de la métropole sont trois fois moins mauvais que les nôtres.
Monsieur le ministre, je me félicite que nous soyons intervenus pour qu'enfin, sur la question de l'emploi, la boîte à outils soit complète.
Je ne reviens pas sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi : il s’agit d’une grande avancée dont tout le monde se réjouit. Je ne reviens pas non plus sur la Banque publique d'investissement, qui est un bel outil. J’axerai mon propos sur les contrats qui favorisent l’emploi.
Je m'inscris en faux contre les propos qu'a tenus tout à l'heure ma collègue Isabelle Pasquet sur la baisse du nombre de contrats aidés. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2013, nous avons voté la création d'un nombre important de contrats aidés : de mémoire, 340 000 contrats d’accompagnement dans l’emploi et 50 000 contrats d’initiative emploi. Je peux comprendre qu’à la Réunion, à 9 000 kilomètres d’ici, on entende le contraire, mais pas dans cet hémicycle !
Nous avons également décidé la création de 100 000 contrats d’avenir en 2013. Ce nouvel outil est déjà opérationnel dans nos régions, hélas un peu moins dans certaines que dans d'autres.
Nous sommes maintenant sur le point d'adopter le contrat de génération.
Quelle boîte à outils !
Jamais nous n’aurions pu obtenir de telles avancées voilà neuf mois. Soyons donc fiers de notre action. J'invite par conséquent ceux qui traînent les pieds à se joindre à nous. Nous agissons dans l'intérêt de notre jeunesse et de ceux qui, tous les jours, vivent l'exclusion, qui sont dans l'impossibilité de réaliser tout projet de vie car, le matin, lorsqu'ils se réveillent, ils ont rendez-vous avec le néant. Voilà la réalité, ici comme en outre-mer !
Je me félicite d'autant plus de la mise en place de ces nouveaux outils que chez nous, Mme la rapporteur l’a rappelé à juste titre, 60 % des jeunes âgés de 15 ans à 24 ans sont au chômage, contre 24 %, chez vous, chers collègues de l’Hexagone. Vraiment, nous ne jouons pas dans la même cour ! Ici, le taux de chômage est de 10 % et on s'affole. Outre-mer, chez nous… Je dis « chez nous », mais c'est aussi chez vous : madame Procaccia, ne vous ai-je pas invitée 1 000 fois ?
Mme Catherine Procaccia. Ah bon ? (Sourires.)
M. Michel Vergoz. Mais oui ! Vous avez une courte mémoire ! En tout cas, je vous attends, pour que vous puissiez vous imprégner de la réalité ultramarine !
Mme Catherine Procaccia. Je n’ai pas attendu votre invitation pour y aller !
M. Michel Vergoz. Alors, on ne vous a sans doute pas tout fait visiter !
Chez nous, donc, ce taux s'élève à 30 %.
Notre fierté à nous, ultramarins, quand nous allons voter ce texte, sera donc beaucoup plus grande que celle que vous pourrez ressentir, chers collègues qui allez faire de même.
Pour autant, est-ce gagné, monsieur le ministre ? Certes non, vous avez bien raison !
Mais reconnaissons que le Président de la République a tenu ses promesses. Le contraire eût été surprenant, d’ailleurs.
Le Gouvernement a mis en œuvre les engagements du Président de la République. Quant au Parlement, il fait son travail, en les mettant en musique.
Désormais, que nous reste-t-il à accomplir, mes chers collègues ? À faire vivre cette loi, à faire vivre ces avancées successives ! Ce sera difficile, je le reconnais. Il nous faudra susciter l’adhésion de nos partenaires naturels, les chefs d’entreprise, qui devront trouver leur compte dans le dispositif. Mais je les sais particulièrement intelligents – je suis moi-même chef d’entreprise ! (Sourires.) Ne les faisons pas passer pour plus bêtes qu’ils ne sont : ils savent où est leur intérêt !
S’agissant des emplois d’avenir dans les mairies, les régions, les départements et les associations, je sais que certains traînent des pieds, au prétexte que ce ne serait pas « leur loi ». Je leur dis : appropriez-vous ce texte, car c’est la loi de la République ! Elle appartient à notre jeunesse ; elle appartient à tout le monde ! Qui oserait dire à un jeune qui n’a aucune perspective le matin lorsqu’il se réveille : « Je suis un élu de droite, je n’ai pas d’emploi d’avenir pour toi, parce que les emplois d’avenir, c’est une création de François Hollande ? » Serions-nous aussi ridicules que cela ? Je ne le crois pas !
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Michel Vergoz. La jeunesse de France nous regarde, celle de métropole comme celle d’outre-mer. Ne la trahissons pas ! Prenons nos responsabilités ! Les citoyens sauront reconnaître ceux qui traînent des pieds. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. J’avoue qu’il est difficile de vous succéder, cher collègue Vergoz ! Je serai pour ma part très brève.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi met en œuvre l’un des engagements du Président de la République et répond à deux défis du marché du travail : d’une part, l’embauche de jeunes en CDI pour accéder à un emploi stable ; d’autre part, le maintien dans l’emploi des salariés âgés. Nous devons nous en féliciter.
Les travaux de l’Assemblée nationale et de notre assemblée ont contribué à améliorer un texte qui, rappelons-le, reprend fidèlement les termes de l’accord national interprofessionnel signé le 19 octobre dernier par l’ensemble des partenaires sociaux. Je profite de cette occasion pour saluer, monsieur le ministre, votre méthode de travail, qui marque une véritable rupture avec le passé. Vous laissez une large place à la négociation sociale. Nous ne pouvons que vous encourager dans cette voie.
Monsieur le ministre, les contrats de génération vont dans le bon sens. C’est un signal fort que nous adressons aux Français, frappés durement par le chômage.
Nous le savons bien, nos jeunes sont touchés de plein fouet. Près de 25 % d’entre eux n’ont pas d’emploi. Et ceux qui en trouvent un enchaînent bien souvent stages, CDD et missions d’intérim. Moins d’un jeune sur deux bénéficie d’un CDI !
Les seniors ne sont malheureusement pas mieux lotis, la probabilité de retrouver un emploi à quelques années de la retraite étant particulièrement faible.
Après l’institution des emplois d’avenir, ce texte témoigne de votre détermination à lutter contre le chômage. C’est dans cet esprit que le RDSE vous apportera son soutien et que, à l’unanimité de ses membres, il votera ce texte. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Le contrat de génération est une très belle opportunité de réconciliation générationnelle au sein de l’entreprise. J’insiste sur ce point car, lorsque l’entreprise, avec les partenaires sociaux et les relais institutionnels, s’engage sur la place des seniors et l’intégration des jeunes en son sein, elle promeut une vision moderne de l’entreprise : celle d’une entreprise citoyenne, garante d’un développement durable, exonérée d’une vision court-termiste et capable de se projeter dans l’avenir et dans celui de la société.
En mettant l’accent sur le transfert des compétences et l’accès à la formation dès le recrutement, le contrat de génération remet l’accent sur les savoirs collectifs, mis à mal par les effets délétères du travail précaire et l’atomisation de l’emploi.
Le contrat de génération s’inscrit également dans la ligne européenne. Le Parlement européen vient en effet d’adopter une résolution relative à la « garantie européenne pour la jeunesse », visant à permettre aux jeunes au chômage depuis plus de quatre mois de se voir proposer un travail, une formation ou un apprentissage.
Ce texte appelle les ministres de l’emploi de l’Union européenne à adopter ce mois-ci une recommandation du Conseil afin de mettre en place ce système dans tous les États membres.
Nous devrions logiquement soutenir la mise en place de ce système, n’est-ce pas ? Car l’urgence française renvoie à l’urgence européenne : près de 14 millions de jeunes de moins de 30 ans en Europe ne sont ni dans l’emploi ni dans une formation. Le coût de cette mise à l’écart est estimé à 150 milliards d’euros par an pour l’économie européenne, soit plus que le seul budget de l’Union au sens global du terme. La mise en place de la « garantie jeunesse » coûterait seulement 21 milliards d’euros !
Cette initiative fait donc écho aux propos que nous avons tenus lors de ce débat : garantir aux jeunes l’accès à l’emploi, faire la chasse aux statuts précaires, et d’abord aux stages, qui remplacent trop souvent encore des salariés sur de vrais postes et de vrais emplois.
C’est pourquoi nous, écologistes, soutenons le contrat de génération. Il n’est sans doute pas parfait et devra vraisemblablement être amélioré, mais le ministre a proposé d’en réévaluer les effets dans quelque temps, ce qui est positif.
Nous soutenons le contrat de génération parce qu’il s’agit véritablement d’un dispositif d’intérêt général. Ce texte s’inscrit dans une logique louable de transmission des savoirs, d’apprentissage durable et solidaire des savoir-faire.
Au-delà du soutien des écologistes, je voudrais lancer un appel à ma collègue et amie alto-séquanaise Isabelle Debré, qui évoquait tout à l’heure les contrats d’apprentissage en alternance lancés par le précédent gouvernement. Je le dis franchement : si j’avais à l’époque siégé dans cet hémicycle, je les aurais soutenus ! Je participe depuis des années à des masters professionnels et je peux vous dire que le contrat d’apprentissage en alternance a vraiment permis de gagner en sécurisation de l’emploi. Un emploi sur deux, dans des métiers relativement peu recherchés, se traduit par un contrat à durée indéterminée.
À un moment, il convient, me semble-t-il, de dépasser les postures strictement idéologiques ou politiques. Il est en effet dans l’intérêt général de construire des dispositifs permettant au savoir de se transmettre de manière humaine, et les différentes mesures qui vont en ce sens peuvent utilement se compléter.
Je crois qu’il faudra aussi, à terme, ajouter un autre étage, en réévaluant et retravaillant l’usage qui est fait du « 1 % formation » dans les entreprises. J’en ai parlé avec plusieurs collègues et, effectivement, il semblerait que ce dispositif ne remplisse pas pleinement ses fonctions et que l’on puisse parler, au moins partiellement, de mauvaise utilisation de l’argent.
Avec ces fameux contrats d’apprentissage en alternance, ces contrats générationnels et une véritable refonte du « 1 % formation », nous pourrions, ensemble, tracer les voies d’une découverte du travail qui soient à la fois enrichissantes pour ceux qui entrent sur le marché du travail, pour ceux qui y sont et pour ceux qui s’apprêtent à en sortir. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.
M. Ronan Kerdraon. Beaucoup de choses ayant déjà été dites, parfois avec passion, je me contenterai de quelques mots pour vous expliquer pourquoi le groupe socialiste votera ce texte avec enthousiasme et fierté.
Comme vous l’avez rappelé tout à l’heure, madame Debré, il s’agit en effet d’un engagement du candidat François Hollande. Vous avez évoqué les primaires, ma chère collègue, et j’ai tendance à penser que c’est aussi l’un des éléments qui lui ont permis de les remporter.
Ce texte répond à une double urgence, sociale et économique, à savoir, tout simplement, le sous-emploi structurel des jeunes et des seniors.
Je voudrais aussi saluer la méthode qui a été adoptée par le Gouvernement.
Dix ans d’un côté, dix mois de l’autre ! Dix ans de quasi-absence de dialogue social contre dix mois de travail constructif avec les partenaires sociaux : la situation pourrait être ainsi résumée.
Il convient aussi de noter la complémentarité entre ce travail engagé avec les partenaires sociaux et celui que nous menons au Parlement. Il ne faudrait pas que l’on essaye d’opposer le travail que réalisent les partenaires sociaux et celui que nous accomplissons au Sénat ou à l’Assemblée nationale.
On a parlé, à plusieurs reprises dans ces débats, de boîte à outils. Le contrat de génération est effectivement un outil novateur au service de la lutte contre le chômage. Bien évidemment, cet outil seul ne suffira pas. Il a été question des emplois d’avenir, mais d’autres dispositifs verront bientôt le jour.
En tout cas, quel chemin parcouru en dix mois ! C’est pourquoi je faisais état d’un sentiment de fierté.
Le groupe socialiste votera également ce texte en raison du changement de vision qu’il propose.
Plutôt que d’opposer les jeunes aux seniors, on privilégie une véritable alliance des âges.
M. Roland Courteau. Bien dit !
M. Ronan Kerdraon. Autre élément à souligner : le rôle de l’entreprise, celle-ci étant véritablement remise au centre.
Non, mesdames, messieurs de l’opposition, les socialistes et la gauche ne sont pas les ennemis des entreprises, comme l’a fort bien dit Michel Vergoz. (Mme Bariza Khiari applaudit.) Bien au contraire !
En revanche, nous sommes effectivement partisans de relations équilibrées, sereines, honnêtes et transparentes.
À cet égard, je veux saluer tout particulièrement, dans ce texte, le dispositif qui permettra à un artisan de transmettre son entreprise à un jeune. Voilà une mesure particulièrement attendue !
En conclusion, je dirai de ce texte qu’il est pragmatique. Il offre une cohérence aux choix de notre majorité en matière d’emploi et constitue un signe d’espoir, de soutien.
Monsieur le ministre, votre gouvernement et notre majorité redonnent aux jeunes et aux seniors une véritable utilité sociale.
Oui, nous voterons ce texte avec un grand enthousiasme et beaucoup de fierté ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste, du groupe CRC et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille.